Jezabelle était perdue dans le vide de son esprit. La noirceur qui l'entourait était telle de l'encre. Elle était prisonnière de ses traumatismes, n'arrivant pas à revenir parmi les vivants. Seuls les morts la côtoyaient à ce moment. La violence, le sang, l'abandon... Elle ne voyait plus autre chose. Elle n'entendit même pas Eccho s'approcher d'elle. Pire encore, lorsqu'il la toucha, elle ne comprit pas et tenta par tous les moyens d'échapper à ce qu'elle assimilait comme une menace. Mais la différence de force entre eux était telle qu'elle finit par se laisser bercer, contre son gré.

Sentir cette chaleur, sentir son odeur... La jeune femme se rendit compte enfin que c'était lui qui l'enlaçait de la sorte. Cela la rassura de voir qu'il ne l'avait pas abandonné. Ses larmes se mirent à couler sans vouloir s'arrêter. Elle sentait ses mains dans ses cheveux telle une caresse rassurante. Et ses sanglots se turent petit à petit alors qu'elle reprenait peu à peu prise avec le monde qui l'entourait.

"Tu n’as plus à avoir peur des autres maintenant. C’est toi, le chasseur"

Ces simples mots qu'il lui adressa lui firent redresser la tête. Elle avait encore un regard hébété, ne sachant pas trop quoi dire. Elle baissa les yeux sur la dague qu'il lui tenait et comme par automatisme, la prit dans ses mains et la serra contre elle. Puis elle se blottit à nouveau contre le nomade. Elle avait tellement besoin de sa chaleur... Il était à présent le seul repère qu'elle avait en ce monde, la seule personne sur qui elle pouvait compter n'était autre que lui. Elle avait juste envie d'être un peu contre lui.

Au bout de quelques minutes, Jezabelle se redressa. Son regard croisa celui d'Eccho et elle plongea dans celui-ci. Cela ne dura qu'une seconde ou deux avant qu'elle ne baisse à nouveau la tête.

- Désolé, se contenta t-elle de dire.

Ce simple mot faisait référence au fait qu'elle soit restée un peu trop longtemps contre lui, mais aussi parce qu'elle devait apparaître comme la créature la plus faible qu'il ait jamais vu, un poids qu'il devait traîner derrière lui, une fille incapable de faire quoi que ce soit sans aide. Elle se sentait si nulle à  ce moment-là, presque honteuse d'avoir ce genre de crise juste à cause d'une simple belette...

La jeune femme n'attendait pas vraiment de réponse. Elle se leva, s'appuyant sur l'arbre près d'elle pour éviter de tomber. Elle ne demanda pas l'aide du nomade et une fois bien sur ses appuis, elle s'avança peu à peu vers l'endroit où se trouvait sa proie. Elle était chancelante mais elle devait au moins finir ce qu'elle avait commencé. Cependant, plus elle avançait et plus elle sentait une nausée monter et sa gorge se nouer. Quelques pas avant d'arriver à son but, elle stoppa. Ses membres tremblaient et ce n'était clairement pas le froid qui produisait cela. La brune prit finalement une grande inspiration et continua son chemin. Une fois près de petit corps sans vie, ses yeux s'arrondirent. Elle dût faire appel à tout son courage pour ne pas flancher une nouvelle fois. Toujours tremblante, elle chercha un linge dans sa besace. Elle enveloppa par la suite la petite chose à la hâte à l'intérieur et fourra le tout dans sa besace.

Jezabelle manqua de tomber en se levant mais finit par tenir sur ses jambes. Elle ne disait toujours aucun mot, elle ne sollicitait Eccho pour aucun de ses gestes. Elle était comme dans une bulle, essayant de préserver le peu de sang-froid qu'elle avait. Et elle entreprit donc de faire le chemin en sens inverse pour regagner leur abri. Elle ne voulait pas être un poids pour lui. Elle voulait lui prouver qu'elle pouvait aller au bout de la tâche qu'il lui avait donné. Et ce, même s'il avait dû venir la sortir de sa torpeur.

Cependant, la malchance voulut qu'elle trébuche et s'étale dans la neige. Elle ne pleura pas, elle resta juste là à genoux, la tête baissée.

- Je suis désolée... dit-elle à nouveau. Je ne fais que te ralentir. Tu dois constamment veiller sur moi. Tu n'as qu'à m'abandonner dans la neige et comme ça je tu pourras retourner à ta vie, sans moi. Après tout, je n'ai fait que t'apporter des ennuis. C'est ce que je fais toujours...

Depuis sa vengeance, Jezabelle n’était plus la même.Elle, d’habitude si loquace et en quête d’attention, était murée dans un silence. S’il aurait dû s’en réjouir, le nomade s’en inquiétait plutôt.Il comprenait que ce qui c’était passé n’était pas anodin et que la jeune femme allait avoir besoin de temps pour tourner la page. Même là, tout contre lui, à son contact, alors qu’ils étaient l’un contre l’autre, il ne parvenait pas à l’atteindre. Elle s’excusa. Il ne comprit pas. Elle s’écarta de ses bras. Pourquoi ? Elle fuyait son regard, tête baissée. Elle lui échappait. Le regard vert pomme la suivait, attentif à chacun de ses mouvements. S’il avait voulu l’entraîner dans leur abri, il était toutefois retenu par un sentiment qu’il n’avait plus connu depuis longtemps. Cette histoire de chasse qui n’était qu’une taquinerie, une provocation à son encontre, Jezabelle en avait fait une affaire personnelle, une responsabilité. Eccho devait l’avouer, elle l’avait surpris en s’exécutant sans un mot, comme s’il en allait de sa dignité. D’ailleurs, elle ne s’était pas contentée de sortir, elle avait effectivement repéré une proie et avait touché la cible en mouvement. Et là, alors même que la vue du sang l’avait fait retomber dans la vision d’horreur à laquelle il l’avait déjà extirpé une première fois, elle s’éloignait pour finir ce qu’elle avait commencé, seule. Elle n’était plus un petit poussin qu’on devait prendre par la main et guider à la moindre difficulté. Elle apprenait, elle changeait. Mais aucun changement ne se fait dans le calme et sans douleur. Elle tomba à genou dans la neige, les yeux toujours fixés sur le sol. Elle était fatiguée et se décourageait. Il s’accroupit près d’elle.

— La Tridéité entend toutes les paroles. Toutes tes pensées. Si tu penses au malheur, Shoggoth te le destine.
Du bout de l’index, il lui releva le menton et planta son regard dans le sien. Il songea qu’il parlait encore des dieux, et que pour elle, tout ça n’avait pas vraiment de sens. Il lui était impossible d’imaginer un monde sans foi, ce monde-là aurait été bien hostile. Et les mortels y auraient été si seuls. Et perdus. Jezabelle n’était pas seule. Le comprenait-elle ?

— Moi, je pense à toi, conclut-il avec un sourire. Ses lèvres se posèrent brièvement sur celle de la jolie brune, et lorsqu’il s’écarta son visage avait repris cet air si provocateur et insupportable qu’il avait dès leur première rencontre dans les bois. Il se souvenait d’ailleurs très bien de la manière dont les griffes du félon avaient arrangé la tenue du petit poussin d’alors. Comme il y pensait, yeux s’égarèrent à l’endroit où elle avait été griffé, et le sourire du nomade s’élargit plus encore.

— Tu sais, tu n’es pas obligée de te rouler dans la neige pour avoir mon attention… Te déshabiller aurait pu suffire, acheva-t-il d’un ton narquois.

"Si tu penses au malheur, Shoggoth te le destine."

Mais à quoi pouvait-elle bien penser d'autres ? Tout ce qui lui était arrivé récemment était teinté de rouge et de noir. Le sang et les ténèbres. Après tout, il avait sans doute raison. Elle était sûrement maudite et apportait la peste sur son chemin.

Cependant les réflexions de Jezabelle ne durèrent pas. Le nomade lui releva la tête et en une seule phrase, il fit battre le coeur de la demoiselle. Il... pensait réellement à elle ? Il y avait vraiment quelqu'un en ce moment sur qui elle pouvait s'appuyer alors qu'elle se sentait si inutile... Ses lèvres avaient toujours ce même goût agréable... Elle ne s'en lasserait sûrement jamais. Mais lorsqu'il s'écarta d'elle, elle fronça légèrement les sourcils. Il avait plaqué sur son visage ce sale petit sourire qu'il arborait quelques fois. Et elle vit alors son regard se poser sur chaque parcelle de son être. Une chaleur remonta son échine alors qu'il l'étudiait sous toutes les coutures.

Néanmoins, à la petite remarque, elle ne put se retenir de répondre.

- Eccho... fit-elle doucement.

Le nomade s'approcha d'elle et passa sa main sur sa joue, toujours sourire aux lèvres.

- J'ai froid, dit-elle alors près de son oreille.

L'homme fut un peu décontenancé par ce qu'elle venait de dire. Il avait eu une autre idée en tête, il ne s'était pas attendu à cela.

- Il est donc hors de questions que je retire mes vêtements et que je me roule dans la neige avec toi. Mais si tu me porte, on regagnera plus vite l'abri, ajouta t-elle en souriant légèrement à son tour.

Est-ce que Jezabelle profitait de la situation ? Oui, clairement. Elle avait bien compris qu'il essayait de lui faire penser à autre chose. Et elle entrait volontiers dans le jeu. Il fallait aussi avouer que ce qu'elle venait de vivre l'avait quelque peu fatigué et qu'elle n'avait pas encore récupéré pleinement toutes ses forces.

- Alors, tu m'aide à monter sur ton dos ?

Les femmes ont toujours de très bonnes excuses pour garder leurs vêtements : froid, faim, fatigue, contrariété. Si ce n’était qu’une question de température, c’était un problème que le nomade saurait résoudre sans mal. Cette idée renforça son sourire, toutefois il estima qu’il n’était pas nécessaire de la partager. Il est de nombreux cas où il vaut mieux agir sans prévenir. La rouler dans la neige ici aurait été inhabituel, excitant sans doute, mais très inconfortable pour l’un comme pour l’autre, surtout s’il fallait se départir de leurs vêtements. S’il avait eu une idée sournoise, ce qui n’était absolument pas le cas, il comptait bien mettre ses plans à exécution dans leur abris. Et ça tombait bien, puisqu’elle avait beau faire la fine bouche maintenant, elle venait d’exprimer sa volonté de retourner à cet endroit précis. Qui était-il pour aller à l’encontre de l’avis éminemment sage d’une femme ? Personne, il allait donc faire ce qu’un homme savait faire le mieux : faire croire qu’il est vaincu et dévoué.

— Si on m’avait dit que je servirai de bantha à une Shog… soupira-t-il en levant les yeux au ciel. Puis comme elle ne semblait pas décidée à grimper d’elle-même, il consentit à fléchir des genoux pour la laisser prendre place sur son dos.

— Ce que je ferais pour toi… bougonna-t-il en attendant patiemment que la princesse prenne place. Et tu ne t’en rends même pas compte… Il sentit que sa dernière phrase avait provoqué l’interrogation de sa compagne, il expliqua :

—Tu imagines des choses parce que tes pensées sont noires. Elles faussent ton jugement.

Il attrapa fermement les cuisses qui lui enserraient les hanches en déplorant toutefois que sa partenaire se trouve dans le mauvais sens, et il entama sa marche vers la grotte. Pendant quelques pas, il conserva le silence en ressassant les mots qui le travailler jusqu’à enfin préciser ce qui le tourmentait :

— Je vais où tu as besoin d’être emmené. Comment pourrais-tu me ralentir, tu es ma mission.

Jezabelle avait lancé cette petite pique pour titiller son compère. Il l'avait pris au premier degré visiblement. Même si elle était bien contente qu'il veuille bien d'elle sur son dos. Elle grimpa avec peine mais arriva à trouver une position assez pratique pour tenir comme il faut. Elle entoura son cou de ses bras sans pour autant le serrer et se prit à sourire. Au fond, elle était bien contre lui. Elle avait nettement plus chaud qu'en crapahutant dans la neige et il était indéniable que son corps contre le sien la rassurait beaucoup. La jeune femme se surprit à fermer les yeux et poser sa tête contre son cou. Si elle ne s'était pas retenue elle y aurait sûrement déposé un baiser. Mais ce n'était ni le moment ni le lieu pour ça.

Elle entendait vaguement ce que lui disait Eccho. "Des pensées noires", il était sûr qu'elle en avait plus d'une, surtout en ce moment vu ce qu'elle venait de vivre depuis quelques jours seulement. Les pas la berçait légèrement. Elle soupira et se laissa aller plus encore contre son dos. Cependant, les mots jetés par le nomade eurent tôt fait de la réveiller.

Jezabelle ne sut pas quoi répondre. Elle préféra donc garder le silence. Mais les mots tournaient dans sa tête durant tout le trajet jusqu'à l'abri. Elle se demandait ce qu'il voulait dire par là, elle ne savait pas vraiment comment le prendre.

Arrivée à destination, elle se laissa glisser sur le sol avec un petit "merci" timide à l'attention de son porteur. Elle ne prolongea pas le regard et se contenta de s'approcher du feu pour se réchauffer. Assise à même le sol, elle sortit la proie de sa besace et la posa sur le côté. Puis elle se délesta de sa cape et de son sac et ajouta une bûche afin de raviver un peu le foyer. Ses yeux étaient plongés dans les flammes et elle repensait aux mots que le nomade lui avait dit plus tôt. Après plusieurs minutes sans rien dire, Jezabelle releva la tête vers lui.

- Eccho...

Elle ouvrit la bouche puis la referma aussi sec. Elle chercha un peu ses mots mais elle avait du mal à ordonner les choses.

- Tu... Tu as dit que j'étais "ta mission", lança t-elle finalement. Qu'est-ce que tu veux dire par là ?

La jeune femme se demandait surtout s'il la considérait comme une sorte de contrat, une tâche dont il devait s’acquitter. Ce côté purement professionnel de la chose la peinait quelque peu. Elle, elle avait tout abandonné pour le suivre. Elle l'avait fait par pleine conscience, elle n'avait de toutes façons pas vraiment de vie qui vaille le coup pour y rester. Mais elle avait suivi cet homme qu'elle connaissait peu au final, elle avait écouté son instinct et cette envie de lui faire confiance.

- Tu sais, reprit-elle, je t'ai dit ce que je voulais faire et où je voulais aller. Tu sais pourquoi j'ai décidé de suivre cette voie. Mais je ne veux te forcer en rien. Enfin... ton avis compte pour moi, on est deux dans cette histoire. Je ne veux pas non plus être un poids pour toi... Je suis bien consciente que je ne suis pas dégourdie et que je te dois la vie, par deux fois déjà. Enfin...

Jezabelle finit par soupirer en baissant une fois les yeux. Elle s'embrouillait dans ses paroles, elle ne savait plus trop où elle voulait en venir au final. La journée avait été éprouvante et tout s'emmêlait dans sa tête.

Alors que Jezabelle était perdue dans ses songes, le vent froid soufflait entre les oreilles d’Eccho qui ne se dit absolument rien, comme si porter son fardeau était une tâche qui ne pouvait être accomplie qu’en y attribuant toute son énergie. La neige se remit à tomber, signe que les températures étaient au moins remonté au tour du point de solidification de l’eau. Quand ils arrivèrent enfin à la grotte, ses mains trouvèrent à s’occuper en dépouillant le petit cadavre abandonné près du feu. Voilà qui leur ferait un ragoût qui les réchaufferait et en y glissant quelques racines, la soupe serait suffisamment consistante pour deux repas, et peut-être même n’auraient-ils pas la nécessité de compléter avec des rations. Avec un automatisme que seule l’habitude peut générer, le couteau du nomades travaillait la viande pour ne garder que les organes comestibles et une carcasse dépecée. Quand Jezabelle l’appela il releva la tête, incertain de si on lui avait parlé auparavant.

— Mmh ?

Qu’avait-il voulu dire, au fait ? Pris sur le fait, il s’était interrompu, couteau immobilisé en l’air, les yeux dans le vague. Il avait prononcé des pensées à voix haute, comme si elles avaient pu la consoler, et voilà qu’il allait devoir expliquer ce qu’il voulait dire. Elle avait dû sentir qu’elle l’avait mis dans une situation délicate où il n’y a aucune bonne réponse, alors elle se mit à le guider vers un terrain moins glissant, en apparences tout du moins. Elle ne voulait pas être un poids pour lui après lui avoir fait la porter jusqu’en au de la colline ? Voilà qui était un comble, il esquissa un demi sourire et baissa la tête pour dissimuler la culpabilité d’une blague qu’il ne pouvait pas partager avec elle à cet instant. Puis, il releva le poignet et dirigea la pointe de son couteau vers Jezabelle comme un index accusateur :

— Deux fois ? s’étonna-t-il avant de déposer la viande sur une pierre plate devant lui. Il se servit du plat de son couteau pour compter sur ses doigts, le félon, la forêt dans laquelle tu te serai perdue, les chasseurs, la flaque d’eau dans laquelle tu as failli te noyer, ce sale Shog qui te voulait… arrivé à cinq, il dut repartir dans l’autre sens en repliant chacun des doigts qu’il tapotait. Au fil de l’énonciation, le visage de la jeune femme oscilla entre l’abasourdissement, la révolte et la honte. Les loups qui ont attaque votre « troupeau », la fois où t’as failli tomber de l’arbre, et celle où tu te serai laissé mourir de faim, acheva-t-il en se demandant sincèrement s’il avait loupé une péripétie. Il se releva, les mains toujours sales de sa besogne mais assez satisfait d’avoir réussi à détourner le fil de la conversation juste pour taquiner la jeune femme.

— Je me demande comment tu as survécu autant de temps sans moi, conclut-il sans pouvoir se départir du large sourire gorgé d’arrogance que l’agacement de la brune avait étalé sur tout son visage.

Eccho avait commencé à énumérer sur ses doigts toutes les fois où il estimait être intervenu pour elle. Au départ Jezabelle avait la bouche bée qu'il relate tout ça, puis elle fronça les sourcils d'agacement et finalement, elle baissa les yeux à la fin de la liste. Elle se sentait clairement et véritablement le poids dans leur duo, le fardeau qu'il devait trainer. Elle soupira une nouvelle fois et se ramassa un peu plus sur elle-même au coin du feu. Le nomade était là près d'elle, debout et vraisemblablement fier de lui. Elle leva les yeux et put se rendre compte de son imposante stature. Et aussi de la différence entre eux.

- Vas-y fanfaronne, lui dit-elle, je sais bien que c'est toi le guerrier du groupe, l'homme fort. Je ne peux même pas dire que je suis la femme au foyer vu que c'est toi qui cuisine en plus de ça.

La brune reporta son regard vers les flammes, jouant avec un petit bout en poussant les braises. Elle repensait une nouvelle fois à tout ce qu'elle avait parcouru jusque là. Après tout, là où ils étaient, il n'y avait pas grand chose à faire. Puis soudain elle soupira bruyamment, jetant son bout de bois au feu et tomba à la renverse sur le dos.

- Qu'est-ce qui m'a pris de m'embarquer là-dedans ?... fit-elle en appuyant ses mains sur ses yeux.

Elle n'était pas une aventurière, la survie n'était pas dans ses gènes. Enfin si, mais c'était si lointain, quelque chose qu'elle n'avait pas vraiment connu. Jezabelle avait toujours été une sédentaire, toujours vécu en ville, ne s'aventurant que rarement en pleine nature seule. Et pourtant, si elle n'avait pas été en forêt ce jour-là avec ces deux mercenaires, elle n'aurait jamais rencontré Eccho... Cette première rencontre avait été... particulière. La jeune femme ne s'en était pas sorti sans encombres. Mais elle ne regrettait aucunement ce moment. Ni tous ceux qui avaient suivi par la suite.

Si elle s'était lancée dans toute cette histoire, c'était pour trouver qui était vraiment sa mère, connaître cette part de culture et de civilisation qu'elle ne connaissait qu'à travers les rumeurs des gens en ville. Cependant, elle ne pouvait nier le fait qu'Eccho était aussi une des raisons qui l'avait poussé à tout quitter. Et c'était peut-être pour ça qu'elle n'arrêtait pas de se tourmenter, elle voulait être à la hauteur de son compagnon de route, elle ne voulait pas qu'il la voit come quelqu'un de faible. En relevant son défi de chasse, elle avait voulu prouver sa valeur. Bon, même si c'était au final un échec assez cuisant...

Jezabelle était perdue dans ses pensées, elle ne faisait plus vraiment attention à ce qui se passait autour d'elle. Ni au bruit, ni aux éventuels mouvements. Elle avait toujours eu cette tendance à s'enfoncer en elle et se couper du monde, que ce soit pour s'évader de façon rêveuse dans un autre monde ou bien sombrer dans ses pensées les plus noires.