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Claircombe  :: Titre :: Quartier Amaranthis :: On ne change pas les règles en fin de jeu :: Page 2 sur 2 Précédent  1, 2
On ne change pas les règles en fin de jeu
Adrian Mayr
Adrian Mayr
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Métier : Apothicaire
Ven 4 Fév - 19:35
Il avait entendu l'Inconnue relater une évidence. Il n'était jamais conseillé de laisser une plaie, même recousue, à l'air libre. D'ailleurs, Adrian n'aurait jamais autorisé un patient à partir avant d'avoir apposé au moins un bandage. Mais la sensation de ne plus sentir la plaie de son bras ouverte fut suffisante à Adrian pour qu'il retourne auprès de son compagnon canin. Comme s'il avait la tête dans un étau, l'apothicaire sentait que ses ressentit étaient biaisées, tant du côté physique que mental. Pendant l'opération de fortune, il avait serré les dents de douleur, mais il s'agissait surtout d'une réponse automatique de son corps, se défendant contre l'agression qui torturait son bras, car sa tête était ailleurs.

Quelqu'un s'en était prit à son chien, en voulant l'atteindre lui, tel était la pensée qui envahissait son esprit depuis leur retour, cette même pensée qui endiguait son débordement émotionnel pour se focaliser seulement sur ces voix qui s'étaient mise à crier dans sa tête depuis lors. Ses yeux posés sur son compagnon, un frisson parcourut l'échine d'Adrian, rien qu'à l'idée qu'il soit passé à quelques centimètres de recevoir un carreau d'arbalète. Non...Il était aujourd'hui inconcevable pour lui que son chien soit tué, il ne se le pardonnerait pas. Une chose était sûre, s'il avait dû s'interposer une nouvelle fois, il l'aurait fait sans hésiter. Les mains tremblantes de colère, Adrian se força à chasser ses idées noires dans lesquelles il imaginait son chien blessé à mort. Les voix se firent bien plus entêtantes de secondes en secondes.

" Tu va le retrouver, il va payer "

" Il veut ta mort, trouve le avant qu'il ne te trouve "

" Il doit mourir, qui qu'il soit "

Au moins pour une fois, le brouhaha se dessinait dans un semblant d'unisson désorganisé, s'apparentant à un canon maladroit entre trois musiciens. Chaque fois que les voix martelaient son esprit, il lui était difficile de s'en détourner. Il y parvenait malgré tout, généralement au prix d'un effort considérable. Cette fois pourtant, il se surprit à tomber d'accord avec ce qu'elles lui répétaient. Cela ne l'empêcha pas de sentir la crispation gagner tout son corps, comme des salves nerveuses prenant possession de ses muscles.

L'inconnue avait raison, il était trop fragile.

Son regard perdu dans l'obscurité, il sentait toujours la présence de Whisper dont il s'était éloigné de quelques pas et qui, malgré qu'il n'ait subi aucun dommage, semblait aussi crispé que son maître. Couché dans son coin, l'animal fixait intensément Adrian sans bouger. L'apothicaire finit par s'appuyer contre le mur et se laisser glisser lentement au sol, ignorant la douleur du faux mouvement qu'il réalisa en sollicitant son bras. Il fourra sa main dans sa poche pour en extraire une petite fiole qu'il déboucha sans ménagement avant d'en ingurgiter le contenu. La fiole retourna d'où elle venait en quelques secondes à peine.

Petit à petit, les voix se calmèrent pour laisser les sentiments réels d'Adrian s'extraire de leur cage. Sa crainte pour son chien s'était dissipée depuis, limitant ainsi les conséquences sur son moral. Sa colère en revanche était intacte, bien que son visage n'en témoigne qu'une infime partie. Les questions commencèrent à fuser dans sa tête. Qui pouvait bien s'en être prit à lui? De nombreuses théories étaient possible et chacune défilèrent mentalement devant lui à une vitesse folle. Des ennemis, Adrian en avait eu quelques-uns, mais il était peu probable que ceux-ci ne fasse de telles représailles. Une hypothèse vint se placer au-dessus des autres.

Comme il avait ironisé sur le sujet il y a de cela quelques jours, l'Inconnue avait une certaine influence, mais aussi visiblement des ennemis. Sinon, pourquoi agir dans la discrétion. Ainsi, l'idée que quelqu'un ait tenté de le dissuader de collaborer avec elle devint une conjecture viable pour lui. Il ne la prit pas pour acquis, mais c'est à ce moment précis que l'Inconnue se décida à briser le silence.

- Le fait de travailler pour moi vous met en danger.

C'était comme si elle conversait avec l'esprit de l'apothicaire, qui eut la désagréable impression qu'elle pouvait lire en lui comme dans un livre ouvert. Il se rationalisa cependant, prônant intérieurement le concours de circonstance. Dans tous les cas, cela ne faisait que renforcer l'hypothèse la plus plausible qu'il avait. Bien qu'il écoute attentivement ce qu'elle avait à dire, il ne put s'empêcher de repenser à l'agression. Alors ainsi, quelqu'un souhaitait se placer - très indirectement - entre lui et sa liberté ? Cette simple idée contraria Adrian plus encore.

- [...] Peut-être qu’il serait bon que je ne vous approche plus pendant quelques temps, au moins le temps de régler cette affaire.

Adrian se releva pour avancer vers le centre de la pièce, lentement.

- Il m'est tout à fait possible d'approcher certaines personnes sans que cela ne paraisse suspect, je n'ai pas spécialement besoin de vous pour ça.

L'inconnue sembla réfléchir un moment.

- Peut-être que vous avez raison. Tant que vous ne vous mettez pas inutilement en danger...
- Je n'ai pas vocation à prendre des risques, je pense qu'il ne serait anormal pour personne que je me rende chez une connaissance. Les bruits qui courent autour de moi laisseront penser que je cherche du soutien.
- Oh, je suis rassurée, moi qui commençais à penser que votre propre vie ne vous importait pas du tout. Vous ne prendrez aucun risque donc, tout va bien.

Une fois n'est pas coutume, Adrian sentit l'évident ton sarcastique qu'employait l'Inconnue, sans agressivité toutefois. D'abord étonné, la douleur à son bras sembla vouloir lui souligner les raisons d'un tel emploi. Son regard passa furtivement sur Whisper avant de revenir vers elle.

- J'aime faire la différence entre prendre un risque et protéger ceux que j'aime. Qui sait, peut-être est-ce Providence qui à guidé mon geste, me rendant prompt à aider mon prochain.

L'inconnue dévisagea longuement Adrian, avant de poser son regard sur Whisper, puis de revenir sur l'Amaranthis, visiblement troublé par ce qu'il venait de dire.

- C'est un chien.

Bref, l'Inconnue n'aimait pas les chiens. Un silence s'installa entre eux, silence pendant lequel Adrian hésita à se lancer dans un débat tout en ajoutant une remarque relativement acerbe à propos de Providence, mais cela ne mènerait sans doute à rien, et ce n'était qui plus est pas du tout à l'ordre du jour. Il ne put s'empêcher malgré tout d'ajouter quelque chose.

- Aujourd'hui, je n'ai plus que lui.
- Aujourd'hui. Répondit-elle le regard soudainement trouble, comme si les paroles d'Adrian semblaient faire écho à quelque chose qu'elle ressentait également. L'Amaranthis remarqua se trouble mais ne se permit pas de poser de questions, pas tout de suite du moins.

Une nouvelle fois le regard de l'Inconnue se posa sur Whisper, avec beaucoup moins d'hostilité dans le regard.

- Je n'ai jamais aimé les chiens, avoua-t-elle finalement.
- Y-a-t-il une raison à cela ? s'enquit instinctivement Adrian.

L'ambiance pesante du retour au Lys d'Argent sembla se mettre en pause un instant, car Adrian ne put se résoudre à laisser passer une occasion de parler normalement avec cette personne dont il n'osait même pas penser le nom, qu'il connaissait pourtant depuis son séjour au Palais.

- Des mauvais souvenirs. Dit-elle en fronçant les sourcil.

Adrian fit un signe de tête en direction de Whisper.

-  S'il appréhende l'idée de vous approcher, c'est simplement parce qu'il sent que vous n'êtes pas disposée à ce qu'il vienne vers vous. Automatiquement, il aura l'air hostile. Les chiens sont à l'image de leur maître généralement...
- J'aime autant qu'il garde ses distances, en effet.

La réponse de l'Inconnue était assez prévisible en soit, pourtant cette situation amusa presque Adrian, qui aimait en apprendre plus sur ces interlocuteurs. La discussion s'arrêta là et l'apothicaire se dirigea vers le bureau en grimaçant sur un nouveau faux mouvement. Tout en rangeant machinalement deux trois choses qui trainait - étonnement -, il s'affaira à nettoyer l'outil ayant servi à ouvrir sa plaie, sentant que certains mouvements restaient somme toute assez pénibles, le rappelant à l'ordre sur la situation dans laquelle les protagonistes se trouvaient. Il releva la tête vers l'Inconnue et reprit la parole, toujours très calmement.

- Pour en revenir à ce que nous disions, je ferai en sorte de ne pas empiéter sur vos plates bandes et de me contenter de ce que je suis sensé faire pour qu'aucun soupçon de collaboration ne se porte ni sur vous, ni sur moi, il marqua une pause pour vérifier que l'outil n'était plus maculé de son sang, avant de le reposer sur le bureau. Mais je pense malgré tout qu'il ne serait pas profitable que je reste ici à rien faire pendant que vous tentez de tirer au clair cette histoire.

Au fond, il pourrait simplement attendre que l'Inconnue ait réglé cette fameuse affaire, mais la simple idée d'attendre à ne rien faire lui semblait hors de propos, surtout aux vues des récents évènements. Une nouvelle fois, la colère monta en lui, le forçant à se concentrer pour garder son calme, au moins en apparence, exercice qu'il parvint à exécuter avec brio une nouvelle fois, motivé par l'idée qu'il était inutile que l'Inconnue ne s'imagine qu'il agisse animé par une quelconque motivation revancharde.

Sentant une sensation désagréable sur son bras, Adrian passa sa main au niveau de la plaie pour réaliser que, malgré la propreté des sutures, il serait préférable de protéger la zone meurtrie des affres de l'air extérieur. Il grimaça avant de pousser un long soupir résigné. Son regard se porta à nouveau vers l'Inconnue.

- Vous avez raison, il vaudrait mieux poser un cataplasme et un bandage. Puis-je vous demander votre aide avant que vous n'envisagiez de partir?
Erzebeth
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Dim 6 Fév - 1:42
Le regard de l’Ascanienne s’était longuement attardé sur le chien d’Adrian après leur échange. Cet animal ne ressemblait en rien aux énormes molosses auxquels elle avait été confrontée dans le passé mais leur souvenir avait laissé une marque indélébile dans son esprit - et pas que dans son esprit d’ailleurs. Aujourd’hui encore elle était capable d’entendre leurs aboiements dans sa tête lorsqu’elle fermait les yeux certains soirs, elle ressentait même parfois distinctement leurs crocs se planter dans sa chair comme si elle n’était qu’une vulgaire pièce de viande. Il ne fallait pas grand-chose pour transformer un souvenir d’enfant en mythe terrifiant qui amplifiait année après année, cauchemar après cauchemar. Erzebeth s’était débarrassée de sa peur – comme elle s’était débarrassée d’un tas d’autres choses – mais elle ne s’était pas débarrassée de sa haine.

Cette nuit-là, s’ils n’avaient pas flairé leurs odeurs et s’ils ne les avaient pas prises en chasse, elles auraient pu s’enfuir.

Si les chiens étaient effectivement à l’image de leurs maîtres alors celui qui était dans la pièce avait peut-être des raisons de vouloir lui sauter à la gorge. Au fil du temps, elle avait pourtant eu l’impression que son hostilité s’était muée en curiosité ; était-ce le cas d’Adrian également ? Elle se posa la question puis tenta la seconde d’après de se convaincre que la réponse n’avait pas la moindre importance - elle avait dit qu’elle préférait qu’il garde ses distances, peut-être ne parlait-elle pas tant du chien que du maître. Elle ne s’était jamais imaginé que cette « collaboration » entre eux donnerait lieu à ce genre d’échange et qu’elle se mettrait à livrer des choses personnelles à son sujet, aussi superficielles et banales qu’elles puissent sembler.

Mais toutes ces banalités ne l’étaient pas tant, au moins, grâce à elles, elle avait réalisé quelque chose ce soir : elle avait sous estimé le lien qui unissait Adrian à son chien, plus que ça elle n’en avait jamais compris l’importance. Elle aurait dû mépriser une telle débauche de faiblesse de sa part – après tout ne venait-il pas d’avouer que la seule chose qui lui restait dans la vie pouvait lui être enlevé d’un seul carreau d’arbalète ? - mais ce ne fût pas le cas. La foi, voilà quelque chose qu’on ne pourrait pas lui enlever aussi facilement, hélas, il en était cruellement dépourvu. Encore une fois, elle se surprit à éprouver plus d’empathie que d’indifférence.

- Pour en revenir à ce que nous disions, je ferai en sorte de ne pas empiéter sur vos plates bandes […] Mais je pense malgré tout qu'il ne serait pas profitable que je reste ici à rien faire pendant que vous tentez de tirer au clair cette histoire.

Elle hocha la tête, simplement. Il semblait sincère et elle n’eut pas de raison de croire qu’il allait vouloir chercher vengeance dès qu’elle aurait le dos tourné. Une vive appréhension la gagnait pourtant à l’idée de ne plus garder un œil aussi attentif sur lui, comme si les ennuis finiraient par le trouver même s’il ne les cherchait pas lui-même. Certes, elle le faisait surveiller depuis longtemps déjà, mais après ce soir, elle n’était plus certaine de vouloir confier cette tâche à quelqu’un d’autre qu’elle-même. Cette histoire la rendait décidément très paranoïaque.

Elle le suivit du regard tandis qu’il s’agitait pour remettre de l’ordre dans sa boutique, puis une grimace déforma un instant son visage. Il soupira.

- Vous avez raison, il vaudrait mieux poser un cataplasme et un bandage. Puis-je vous demander votre aide avant que vous n'envisagiez de partir ?
- Bien sûr, répondit-elle sans hésiter, visiblement satisfaite de le voir faire preuve de bon sens.

Elle attendit qu’il lui désigne les baumes nécessaires – après tout, c’était lui le spécialiste – et elle s’exécuta sans mot dire. Le baume qu’il avait choisi avait une odeur très prononcée de plantes et l’Ascanienne ne dut dire si elle la trouvait plaisante ou un peu écœurante. Avant de plonger ses doigts dans la pâte argileuse, elle retroussa ses manches, dévoilant une marque au fer rouge sur son poignet droit, le genre de marque que l’on apposait généralement sur des esclaves. Concentrée sur sa tâche, elle ne sembla pas remarquer où l’attention d’Adrian s’était posée, ou peut-être faisait-elle simplement semblant de ne pas le remarquer. Lorsque la pâte fut correctement étalée sur la plaie encore rouge, formant un barrage entre elle et les agressions extérieures, Erzebeth enroula un bandage autour de la blessure du mieux qu’elle put compte tenu de sa localisation. Plusieurs fois elle lui demanda si elle serrait trop ou pas assez.

Elle avisa le résultat final d’un œil critique avant de replacer correctement ses manches sur ses poignets, avec presque trop d’attention.

- Il y a quelque chose que je dois vous rendre.

Elle extirpa péniblement le journal de Jörgen de la poche de son pantalon qui lui collait toujours à la peau ; la couverture de cuir était humide mais l’intérieur semblait intact. Elle le posa doucement, presque religieusement sur le bureau près duquel se trouvait Adrian. Même fermé, il put distingué que plusieurs petites feuilles avaient été glissées entre les pages du journal. Lorsqu’il leva un regard interrogateur vers elle, elle expliqua :

- Des annotations que j’ai ajoutées, juste pour vous indiquer les passages qui mériteraient votre attention ou… les passages où il parle de vous. Je me suis dit que vous… n’aurez peut-être pas envie de les lire, dit-elle avec une prudence et une hésitation qui ne lui étaient pas coutumières.

Plusieurs fois elle avait perçu son trouble à l’idée d’ouvrir ce journal, plus encore à l’idée de le lire. Jörgen n’était pas très tendre lorsqu’il parlait de sa famille, de tous les espoirs déçus qu’il avait placé en son fils. Parfois, il détaillait avec force et détails la façon dont il le traitait pour obtenir de lui les meilleurs résultats possibles. Si Erzebeth n’avait pas apprécié de lire ces passages, elle imaginait sans mal que ce serait pire pour Adrian.

- Vous n’avez rien en commun, finit-elle par laisser tomber après un long silence. Ne laissez personne vous faire croire le contraire Adrian.
Adrian Mayr
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Lun 7 Fév - 0:58
S'il y avait bien quelque chose de redondant dans les échanges entre l'Inconnue et lui, c'était cette abondance de questions qu'Adrian s'efforçait de garder "pour plus tard", dans un coin de sa tête. Une nouvelle interrogation était venu s'additionner à cette pile déjà haute quand les yeux émeraudes de l'Amaranthis s'étaient posé sur cette marque qu'elle portait au poignet, une marque ressemblant bien trop à une apposition au fer rouge pour être confondu avec une tentative de tatouage mal soignée. La plaie chauffée et fermée laissait une trace indélébile et peu de place au doute. Cette nouvelle question qui s'était instinctivement soulevée dans son esprit se fit bien plus entêtante que ne l'avait été sa dernière interrogation, car il n'aurai jamais imaginé voir un tel signe distinctif sur la peau raffinée de l'Inconnue, évident témoin d'un passé sombre dissimulé derrière des yeux de glace, ce masque de froideur. Une forme d'empathie naquit dans la tête d'Adrian, ce qui n'arrangea pas sa curiosité, il ne savait pas bien pourquoi il ressentait cela, mais il ne chercha pas à s'éloigner de ce ressenti tandis qu'elle s'occupait de ses soins.

L'espace d'un instant, le terme d'Inconnue se fit plus dissonant dans sa tête.

C'est sans un mot qu'il accompagna ensuite du regard le geste de la main que fit l'Ascanienne pour poser le journal sur le bureau. Un frisson remonta le long de son échine, comme si la vue de cet ouvrage intime ne le rendait pas encore totalement indifférent. Elle anticipa suffisamment bien son interrogation quant aux feuillets ajoutés pour qu'il n'ait pas à parler. Les mots qu'elle employa le surprirent au moins autant que l'attitude qu'elle adoptait. Loin de l'assurance et l'indifférence dont il était presque devenu habitué, il la vit hésiter, employer ses mots avec soins. Était-ce une crainte de ne pas exprimer correctement son propos alors qu'ils impliquaient directement Adrian et son père ? Cette attitude dérouta un instant l'apothicaire qui resta malgré tout impassible, si ce n'est un léger plissement d'yeux, presque imperceptible. La suite le cloua littéralement sur place.

- Vous n’avez rien en commun. Ne laissez personne vous faire croire le contraire Adrian.

Un silence s'installa, laissant raisonner dans la pièce le tambourinement irrégulier de la pluie battant les fenêtres. Les mots qu'elle venait d'employer raisonnèrent une bonne dizaine de fois dans sa tête, taisant un bon coup toute pensée vagabonde et bruyante pour la replacer dans la réalité. Dans un éphémère instant, sa colère s'évapora comme l'eau dans le désert pour laisser place à une confusion mêlée d'un étrange sentiment, lui donnant l'impression que l'on ôtait un poids de ses épaules. Puis tout se mélangea à nouveau, renforçant cette dissonance qui d'ores et déjà s'était immiscée dans sa tête.

Ces mots qu'elle avait eu pour lui, des mots d'une rareté suffisante pour être soulignée, l'avaient laissé sans voix. Bien qu'il ait toute sa vie lutté pour ne pas marcher dans les traces de son géniteur, il était plus que fréquent que l'on attribue ses propres talents à son héritage familial. En de trop nombreuses occasions, Adrian Mayr était marqué comme "le digne fils de son père, doué de ses mains et de sa tête". Combien lui avaient dit que son père aurait été fier de lui? enfonçant encore un peu plus ce clou dans les tréfonds de son âme torturée ? Il avait arrêté de compter depuis de nombreuses années maintenant. Irrémédiablement, tout semblait le replacer dans le sillage de cet homme qu'il haïssait encore bien après sa mort. L'inconnue elle-même avait fait un profond amalgame entre lui et son géniteur, elle l'avait condamné et poussé dans ses retranchement afin d'obtenir des aveux d'une vérité qui n'était pas sienne, le jugeant d'avance comme héritier d'une corruption dont il tentait de se tenir le plus éloigné possible. Chaque fois qu'il avait dû faire face à cette porte se refermant, une partie de lui s'était attribué la culpabilité de tous ces meurtres propagé par ce qui s’apparentait à un pan de son héritage.

Et pourtant, c'était bien elle qui venait d'employer ces mots au combien important pour l'Amaranthis, au sein même du Lys d'Argent, au milieu de cet endroit qui représentait le plus Adrian. Ce qu'elle venait de dire, il ne l'avait pas entendu autant qu'il l'aurait espéré, tout au long de sa vie d'adulte accompli. Toujours silencieux dans cette digestion mentale - qui dura à peine quelques secondes en réalité -, Adrian réalisa que les voix ne s'était pas remise à susurrer des choses à son oreille comme elles avaient l'habitude de le faire en la présence de l'Inconnue

Cette ultime pensée lui fit comprendre quelque chose qui lui était encore invisible  jusqu'alors. Celle qui venait de prononcer ces mots qui ne quittaient plus son esprit n'était pas l'Inconnue, mais Erzebeth.

Prenant une grande inspiration, Adrian ferma les yeux un instant. Lorsqu'il les rouvrit, l'Ascanienne ne put être sans remarquer cette expression de profonde reconnaissance qui teinta ses yeux émeraudes pendant plusieurs longues secondes, avant que son attitude ne redevienne peu à peu celle qui le caractérisait le mieux. Il parut également moins crispé, malgré la douleur encore quelque peu présente dans son bras. Machinalement, il passa sa main sur le bandage pour constater que le travail effectué était aussi minutieux que propre. Il s'approcha alors du journal, toujours en silence, et effleura la couverture humide de ses doigts avant d'en chasser quelques perles humides d'un balayement soigné.

- Merci pour les soins, je n'aurai certainement pas pu soigner cela correctement tout seul.

Était-ce vraiment pour cela qu'il la remerciait? Peut-être, mais ce n'était probablement pas la seule raison. D'un geste encore plus mesuré que d'habitude - si c'était possible d'être plus mesuré qu'il ne l'était-, il se saisit du journal et le cala contre sa main avant de ramener son bras contre lui. Son regard s'égara sur la fenêtre toujours battue par la pluie. Le grondement de tonnerre qui suivit semblait souligner que l'averse n'était pas prête de s'arrêter.

- Je crois que ça n'est pas prêt de s'arrêter de tomber. Je vais allumer un feu à l'étage, il fera moins froid.

Joignant le geste à la parole, l'apothicaire prit lentement la direction de l'escalier, non sans croiser de manière fugace le regard d'Erzebeth, soulignant que ses propos l'invitait à le suivre afin de ne pas finir transit de froid dans des vêtements humides. Le calme d'Adrian semblait se refléter sur sa boutique, comme si tout à coup la tension était descendue d'un cran et que l'on pouvait de nouveau s'entendre penser. Whisper se redressa au moment où Adrian s'approcha de l'escalier, suivant du regard son maître avant de commencer à lui emboîter le pas. Lorsqu'il arriva à hauteur de son maître, l'apothicaire le gratifia d'une longue caresse derrière l'oreille qui fit frémir la boule de poil de contentement. Tous deux montèrent à l'étage, suivis peu de temps après par Erzebeth.

Adrian ne perdit pas de temps pour allumer un feu suffisamment grand pour que la chaleur prenne rapidement possession de la pièce. Il profita des flammes pour installer une sorte de récipient couvert sur un support résistant au feu et une odeur fruitée se mêla peu à peu à l'odeur de feu de bois qui dominait dans l'étage. Pendant que sa préparation chauffait, il s'affaira à trouver deux serviettes et en déposa une sur le dossier d'une chaise non loin de l'Ascanienne. Concentré sur ses tâches, l'apothicaire semblait quelque peu dans son monde, concentré comme il le serait s'il était en train de réaliser des soins délicats. Après quelques minutes, il vint extraire le récipient des flammes pour le poser sur le côté. Muni de deux godet profond en terre cuite, il les remplit généreusement de sa préparation dont les volutes de fumée s'évadaient dans l'air ambiante, réhaussant encore un peu plus l'odeur de fruits rouges. Après avoir fini son petit manège, il posa l'un des godets sur une petite table près de la cheminée, prenant le second avec lui lorsqu'il s'installa sur le canapé.

Sur l'accoudoir reposait le journal, ainsi que sa paire de lunettes qu'il posa sur son nez avant de se saisir du carnet en cuir pour l'observer. Pendant un instant, la vue des flammes derrière le livre lui donna l'envie de simplement faire fi de tout cela, et de jeter au feu cette énième trace de l'existence de son géniteur. Ce furent les marque page, soigneusement placés dans le journal qui l'arrêtèrent immédiatement. Tournant entre ses mains le livre, il l'étudia sans l'ouvrir, jaugeant de tous ces passages qui parlait visiblement de lui mais aussi de passages importants pour ce qui les intéressait. Il y en avait un certain nombre, trop à son goût, mais pourtant l'intention visant à lui faire éviter ces écrits le concernant le poussaient à prendre du recul sur ce qu'il s'apprêtait à lire.

Bien sûr, il reconnaîtrait le ton et l'écriture de Jörgen et rien ne garantissait qu'il parvienne à simplement dépasser les deux premières pages. Lorsque l'on connait une personne, il n'est pas rare d'entendre sa voix percer l'espace d'un feuillet pour raisonner dans la tête du lecteur, nul doute que ça aussi, il n'y échappera pas. Pourtant, il se sentait le besoin de ne pas s'en remettre uniquement à quelqu'un d'autre pour consulter ce journal intime, relatant de faits et d'informations probablement importantes pour leur enquête. Qui plus est, n'était-il pas le plus à même de comprendre certains détails de ces écrits qui auraient pu échapper à quelqu'un n'ayant pas connu Jörgen? Qui plus est, quelqu'un lui avait dit un jour que garder le passé sous un tapis en espérant qu'il finisse par disparaître n'était jamais une bonne solution, une phrase pleine de sens qui l'amusa presque autant qu'elle lui fit de la peine, tant elle était teinté d'un souvenir doux-amer.

Lentement, Adrian plaça la reliure du livre dans le creux de sa main et ouvrit le journal de son père. Il ne lui fallut pas longtemps comme prévu pour que la voix de Jörgen raisonne au fond de sa tête dans une douloureuse sonorité, mais cela ne l'arrêta pas, si ce n'est pour prendre le temps d'une simple inspiration. Calme, l'apothicaire releva malgré tout les yeux vers l'Ascanienne avant de continuer sa lecture.

- Aussi lourd qu'ait été l'avertissement, je doute que l'on ne nous chasse jusqu'ici, alors prenez le temps que vous voulez pour vous reposer.
Erzebeth
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Métier : Corbeau du Gouverneur
Mer 16 Mar - 0:15
Elle avait attrapé la serviette sur le dossier de la chaise pour s’en couvrir les épaules puis s’était installée face à la cheminée ; le gobelet dans ses mains lui brûlait les paumes mais elle les garda crispées sur celui-ci tandis que l’odeur de fruits rouges lui chatouillait les narines. Ici et maintenant, elle profitait de l’un des rares moments de quiétude qui lui était accordé, alors même qu’elle ne se sentait ni tout à fait invitée ni tout à fait intruse. Le silence ne la gênait pas, elle le préférait aux longues conversations stériles ; pendant les heures qui suivirent, il ne fut troublé que par le crépitement du feu et le bruit des pages qu’Adrian tournait avec lenteur.

Assise en tailleur devant les flammes, elle lui tournait le dos, ce qui cette fois n’avait rien à voir avec du désintérêt, peut-être voulait-elle lui laisser le secret de ses réactions devant cette lecture désagréable ou peut-être voulait-elle simplement lui signifier qu’elle était en confiance avec lui ; après tout, on ne tournait jamais le dos à un ennemi, Erzebeth moins que quiconque. La pluie martelait les fenêtres du Lys d’Argent, comme si Providence elle-même souhaitait qu’elle s’attarde près de lui ; l’Ascanienne demeura pourtant près du feu encore de longues heures après la fin de l’averse, jusqu’à ce qu’il ne reste plus que des braises dans l’âtre de la cheminée.

Elle ne savait pas si sa présence ici apportait quoi que ce soit, parfois elle se persuadait même du contraire. Elle se savait incapable d’avoir les mots qu’il fallait au bon moment, encore moins les gestes ; tout juste avait-elle l’idée de glisser quelques notes au milieu d’un journal pour épargner à son lecteur des émotions trop négatives. Il méritait certainement un peu mieux que ça, mais c’était quelque chose qu’elle n’était pas en mesure d’offrir. Il lui fallut la nuit entière pour se convaincre que sa place n’était pas ici, et elle finit par se lever lorsque des teintes plus chaudes vinrent colorer le ciel.

- Si vous avez besoin de me joindre, vous pouvez laisser un message à Lazare, le propriétaire de la Guilde ; il veillera à ce qu’il me soit transmis, vous pouvez lui faire confiance.

Elle n’avait pas relevé les yeux vers lui ; le regarder lui était parfois tellement pénible qu’elle préférait s’en abstenir, quitte à paraître encore plus froide qu’elle ne l’était de prime abord. Combien de gens s’étaient retrouvés à la place de l’Amaranthis par le passé ? Des gens qu’elle avait volontairement brisés, juste pour avoir une réponse, juste parce qu’on lui en avait donné l’ordre ? Et si jusqu’ici elle avait réussi à se soustraire à tout engagement émotionnel, il était beaucoup difficile d’ignorer les conséquences de ses actes lorsqu’elle les avait sous les yeux.

Elle aurait préféré laisser sa culpabilité avec les braises de cette cheminée mais elle savait qu’elle allait devoir l’emmener avec elle et la garder peut-être indéfiniment. Savoir qu’Adrian retrouverait une vie normale après leur collaboration forcée allégerait peut-être ce sentiment. Aussi normale que puisse être sa vie après leur rencontre…

- Faites attention à vous, Adrian.

On ne change pas les règles en fin de jeu - Page 2 W69b

Palais du Gouverneur | Quartier Ascanien | Troisième mois du printemps - jour 15 - An 83

Dans son bureau, Erzebeth faisait les cents ; elle avait toujours dit des gens qui avaient cette fâcheuse manie qu’ils ne savaient pas contrôler leurs émotions ou qu’ils avaient si peu l’habitude de réfléchir que ça les mettait dans tous leurs états. Heureusement pour elle, à part Maeve tranquillement installée dans un siège devant elle, personne n’était là pour lui en faire la remarque. Quoique… à bien y réfléchir elle était peut-être la personne la plus susceptible de la railler à ce sujet. Prudemment, l’Ascanienne se rassit.

- Cet homme t’obsède.

Le Corbeau fronça les sourcils.

- Sa sécurité, rectifia t-elle. Mort, il n’est plus d’aucune utilité.

Maeve plissa les yeux avant de pencher la tête sur le côté, puis un sourire amusé vint étirer ses lèvres.

- Je parlais de Cole, pas de l’Amaranthis chez qui tu passes tes nuits en ce moment, mais je note que c’est la première personne à laquelle tu as pensé.

La blonde connaissait assez bien son amie pour savoir quand elle faisait juste semblant de lire les documents éparpillés sur son bureau pour ne pas avoir à réagir à quelque chose, comme si elle avait été pris en flagrant délit d’apparaître un peu humaine. Elle dut se mordre les joues pour ne pas éclater de rire.

- Il est plus dangereux qu’il en a l’air. Le regard sombre d’Erzebeth finit par se plonger dans le sien. Cole. Je dois trouver une façon de le mettre hors jeu. Une qui n’implique pas de devoir me débarrasser du corps ensuite…
- Est-ce que je peux me permettre d’être tout à fait honnête avec toi ? Maeve n’attendit pas la permission. J’ai l’impression que cette histoire est devenue personnelle. Tu n’as pas de preuve de ce que tu avances, tu as seulement ton intuition. Je sais qu’elle est de bon conseil la plupart du temps mais… Pour la première fois j’ai l’impression que tes sentiments faussent ton jugement. Elle fit une pause, hésitant à poursuivre et exposer le fond de sa pensée. Il a pris ta place, en quelque sorte, il est normal que tu ressentes… de la jalousie à son égard.

Expliquer au Corbeau qu’elle n’était pas dispensée de ressentir des émotions humaines et de se fourvoyer comme n’importe qui était tout un concept que seule une personne de la trempe de Maeve pouvait se permettre. Le visage de l’Ascanienne ne trahit rien de ses émotions dans un premier temps, comme c’était souvent le cas. Puis elle se redressa soudain avant de lui tourner le dos tandis que son regard se perdait sur la ville en contrebas.

- Tu as raison, c’est devenu personnel. Comment ça pourrait ne pas l’être ? Rarement la colère avait été aussi perceptible dans la voix de la brune. C’était là, juste sous mes yeux, sous mes pieds, et je n’ai rien vu venir, rien pu faire. Sa Grâce n’a pas besoin d’un corbeau aveugle, il a raison d’être déçu et de m’écarter. Même lorsque je lui apporterai la tête des coupables sur un plateau, ça ne change rien à ce qui m’attend à la fin. J’ai échoué.
- Mais… Combien d’autres n’ont rien vu venir ? Tu n’es pas coupable, Erza.
- Responsable mais pas coupable. Quelle importance ? C’est Lui qui décidera ce que vaut ma vie à présent.

Maeve resta un instant les yeux écarquillés sans trop savoir quoi dire. Elle qui s’était souvent plaint de pas voir son amie s’ouvrir à elle, elle se trouvait d’un coup bouleversée d’avoir accès à ce déballage d’émotions brutes. Elle l’avait vu abattue, en proie aux doutes, comme n’importe quel croyant aurait pu l’être en temps de crise, jamais elle ne s’était douté qu’elle était simplement résignée sur son sort.

- Laisse-moi t’aider. Je ne sais pas bien ce que je peux faire à mon niveau mais… je suis là. Je serai toujours là. Dis moi juste quoi faire.

Lorsqu’Erzebeth se tourna enfin vers elle, elle sut immédiatement qu’elle n’allait pas aimer la suite.

- À vrai dire, je t’ai trouvé une place de domestique dans une maison noble ascanienne. Je pense qu’il est plus sage que nos chemins se séparent maintenant, je ne serai peut-être plus en mesure de faire quoi que ce soit pour toi plus tard.
- Tu n’es pas sérieuse ?
- Le travail ne sera pas pénible, tu ne seras pas la seule employée, et la paie est très bonne.
- Je sais ce que tu cherches à faire, tu veux m’écarter parce que tu t’inquiètes. Tu peux duper tout le monde mais pas moi, répliqua Maeve dont la voix commençait à partir dans les aigus, trahissant ses émotions. Qui va veiller sur toi quand je ne serai plus là ? ajouta t-elle presque implorante.

Elle avait remis le masque, elle avait tout enfoui si bien qu’il était difficile de la distinguer d’une statue de sel. Maeve n’avait jamais semblé incommodée par son apparente froideur, pas une seule fois depuis qu’elles se connaissaient ; pourtant ce jour-là, alors que cette bise glaciale était dirigée contre elle, elle comprenait ce que ressentait la plupart des gens et réalisait à quel point l’Ascanienne l’avait épargnée jusqu’ici.

- Je t’avais confié un travail et tu n’as pas été capable de le remplir. À quoi me servirais-tu ici ? Rassemble tes affaires, tu commences ta nouvelle vie demain.

Et elle se détourna, mettant un terme à la discussion, et probablement à une amitié qui était bien plus chère pour elle qu’elle ne voulait bien l’admettre. Maeve baissa les yeux sur le sol, consciente du jeu auquel jouait le Corbeau mais aussi consciente qu’elle ne lui rendrait pas service en se rebellant contre sa décision. C’était une façon de la protéger, elle le savait. Elle savait aussi qu’Erzebeth ne se battait jamais mieux que lorsqu’elle n’avait pas à se soucier des pertes dans une bataille. Accepter son sort, c’était une façon de l’aider, et ça au moins c’était à sa portée.

En silence, Maeve quitta la pièce.
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