[Port-aux-Echoués] Bienvenue à Port-aux-Echoués ! [Audélia - Nothjaan]

Date d'inscription : 05/05/2021 Messages : 19

Perdue dans un demi sommeil, bercée par les flots et légers clapotis, Audélia se délectait de cet instant privilégié qui lui fût donné de savourer après cette journée mémorable faite d'imprévues, auxquels elle n'aurait pu s'imaginer en quittant la ferme familiale.
A cet instant ses pensées allaient vers son compagnon. Cet idiot de chat qui avait dû se croire à la maison, à faire les quatre cents coups de son cousin ; se retrouvait perdu, seul dans cette nature inconnue, grouillant de prédateurs prêt à tout.

Malgré cela, Audélia gardait espoir de le retrouver sain et sauf ; tout comme ses parents pour lesquels elle était venue, afin de retrouver leurs traces, malgré les années écoulées depuis leur départ de la maison familiale.
Avaient-ils eu la même chance de trouver des compagnons prêts à les aider ? Ou c'étaient-ils fait prendre par ignorance par ces mêmes prédateurs, auxquels, avec Nothjaan, ils échappèrent de justesse ?

Audélia en était là de ses pensées, quand le sommeil se fît ressentir de plus belle, l'emportant doucement dans les bras de Morphée, en toute quiétude, se croyant à l'abri de tout danger, depuis qu'ils avaient quittés la terre ferme.
La pensée de ses parents se muta en un doux rêve la menant peu à peu vers son enfance...

Puis, une secousse se fît ressentir, un bruit, un murmure suivi d'un cri. Entre rêve et réalité Audélia ne réagit pas de suite à ces alertes, quand elle fût propulsée hors de la barque, la faisant couler à pic dans cette eau froide et sombre.
La panique s’empara de tout son être. Que lui arrivait-il ? Nothjaan avait-il fait une mauvaise manœuvre ?
Au même instant, elle réalisa qu'elle manquait d'air. Il fallait à tout prix qu'elle reprenne ses esprits et retrouver son calme pour rejoindre la surface. Audélia n'était malheureusement pas très bonne nageuse, mais il fallait à tout prix qu'elle sauve sa peau de ses eaux troubles.

Une image s'imposa dans son esprit. Elle se revît à une partie de pêche en famille ; ce jour où elle avait glissé sur la rive, se retrouvant dans l'étang, en pleine panique. Audélia n'avait alors que 7 ans. Ne sachant pas nager, son père avait plongé à sa rencontre, essayant de lui faire retrouver son calme et lui apprendre les bases pour se sauver de cette situation.

Dans cette eau trouble et froide, elle refit les gestes de son enfance remontant doucement à la surface...
L'air… Enfin ! Elle pouvait de nouveau respirer, remplissant ces poumons à pleine goulée, et de reprendre ses esprits. Elle essaya de se repérer dans ce lieu au milieu des flots, pensant à Nothjaan.
Où pouvait-il bien être en cet instant ? Avait-il réussi à se sortir des flots ou était-il à sa recherche ?
Au même moment, elle ressentit quelque chose la frôlée. Puis une sorte de rugissement qui lui semblait lointain…
Oh mon dieu !!, pensa-t-elle.
Son sang se glaça et la figea sur place. L'ignorance de son jeune âge lui avait jouer des tours. Croire que ces prédateurs ne se mouvaient que sur la terre ferme était une erreur.

Réfléchissant à toute vitesse, Audélia se demandait comment faire pour se sortir de là quand d'autres images lui revinrent en tête ; mélangée entre rêve et réalité avant de faire le grand plongeon… Elle s'en voulait d'avoir était si sotte de croire qu'ils étaient sauvés et de s'être assoupie. Mais l'heure n'était pas aux lamentations.

Audélia sentait l'eau se mouvoir ; puis l'animal destructeur fonça sur elle, la poussant sur plusieurs mètres. Par chance elle eût le réflexe de se protéger et évita ainsi des blessures. Mais l'assaut de la bête la laissa étourdit quelques instants. Audélia reprenait tant bien que mal ses esprits. Sans paniquer, elle profita d’un revirement de l'animal pour dégainer sa dague qui heureusement était encore bien fixée à sa ceinture. Elle sentait la bête revenir vers elle. Audélia fit quelques mouvements, afin de se préparer à l'accueillir. Il ne s'agissait pas de rater son objectif. Elle ignorait encore à cet instant les capacités de résistance de ces prédateurs, mais peu lui importait une seule chose comptait sauver sa peau…

Poussée par une force intérieure, Audélia se mouvait dans les eaux avec plus d'aisance. L'animal se rapprochant, elle frappa rageusement de la pointe de sa dague. La lame s'enfonçant dans le tissu visqueux. Un cri déchira les ténèbres, encourageant Audélia à frapper de nouveau et à son tour crier à tue-tête le nom de Nothjaan, avec l'espoir qu'il soit encore en vie et vienne à sa rescousse…

Il ne se rendit compte de rien. Il était sur la barque où une secousse se fît sentir et l’instant d’après il se retrouvait dans l’eau, la tête vers les abysses… Ce fût si rapide qu’il ne lui semblait avoir eu aucun moment lucide entre ces deux conditions.

Le temps du réflexe de retenir sa respiration et de nager vers la surface, Nothjaan compris qu’il avait été projeté à plusieurs mètres de l’esquif qui maintenant était sens dessus dessous. La situation était de l’ordre de la panique la plus totale. Il ne pouvait voir que deux gerbes d’eau à la surface. Impossible de discerner allier ou ennemi dans ce chaos.

Ses esprits repris, le jeune homme ne perdit pas de temps à décider de ses actes. Seul, il aurait probablement fuit ; le bateau n’étant plus très loin et étant bon nageur, il aurait eu toutes ses chances. Mais là ils étaient deux… Et Noth ne pouvait imaginer laisser Audélia affronter seule l’anthropophage.

Il se précipita alors vers l’agitation. En s’approchant il s’aperçut qu’Audélia essayait de repousser la créature tant bien que mal. Il entendit alors deux cris successifs.
Le premier était bestial et emplit de douleur et de rage. C’était bon signe au premier abord, car cela voulait dire qu’Audélia semblait se débrouiller pour se défendre. Mais la haine était palpable dans ce hurlement, et cela ne présageait rien de bon quant aux coups revanchards que la créature allait pouvoir asséner.
Le second cri était celui d’Audélia. Noth entendit son nom et compris sans mal que c’était un appel de détresse. La jeune fille avait beau se défendre bec et ongles, un combat dans l’eau avec une abomination pareille n’était clairement pas à son avantage.

En combat singulier, il n’aurait sans doute pas eu beaucoup plus de chances de s’en sortir. Mais dague en main et arrivant par derrière, le jeune homme nagea aussi vite que possible et comptait prendre l’avantage en attaquant par surprise.

Même si l’eau réduisait la puissance de ses coups, il put profiter de l’obsession de cette monstruosité à vouloir dévorer Audélia pour lui planter son arme dans la gorge tel un assassin. Il fût étonné lui-même de l’efficacité de son assaut. Alors qu’il s’attendait à recevoir la fureur de l’ennemi de plein fouet, il se retrouva avec une enveloppe difforme vide de toute énergie. Il y extirpa sa dague avant que le corps de l’anthropophage sombre dans les profondeurs de la baie.

Le choc de cet affrontement lui demanda plusieurs dizaines de secondes avant de réaliser qu’ils n’étaient pas encore forcément en sécurité. Les cris de tout à l’heure n’avaient probablement pas été audibles que par lui.
Voyant Audélia avoir toutes les peines du monde à rester à la surface, le jeune homme s’approcha et se positionna de manière à la soutenir et l’aider à flotter.

- Ca va ? Tu n’es pas blessée ?

Dans le feu de l’action, le jeune homme ne se rendit pas compte qu’il l’avait tutoyée. Il était trop tiraillé par la peur d’être de nouveau attaqué. La jeune fille était toujours consciente, mais il était dur de savoir si elle était blessée. Il les dirigea vers la barque renversée pour qu’Audélia puisse s’y accrocher et lui laisser ainsi la possibilité de pousser l’esquif jusqu’au navire. Il ne restait plus beaucoup de distance à parcourir mais Noth y laissa le peu de forces qui lui restait. Une fois l’embarcation collée à la coque du navire, il l’accrocha à une amarre qui pendait et chercha à tâtons l’échelle de corde qu’il tendit à sa camarade de naufrage.

La jeune fille semblait aussi éreintée que lui. De plus, elle devait surement être traumatisée. Noth n’en menait pas large non plus. Il se précipita à la suite d’Audélia et monta sur le pont puis emmena aussitôt la récente arrivante à Port-aux-Echoués vers la porte permettant d’entrer dans la cabine du château arrière.

- Vite, rentrons ! A l’intérieur nous serons enfin à l’abri…

Noth verrouilla la porte et la barricada avec plusieurs petites poutres placées en travers de l’issue à intervalle régulier. Il prit le temps d’expirer et d’inspirer profondément afin de se calmer un peu, puis avança dans l’obscurité d’un pas assuré pour allumer des bougies à divers endroits de la cabine.

Les lueurs vacillantes des bougies laissaient découvrir une pièce relativement grande. Le mur du fond était composé de fenêtres à vitraux colorés sur toute sa longueur. Le mobilier présent quant à lui, était simple et prévu pour être utile avant tout. Juste à droite de l’entrée était situé un lit avec un vieux coffre massif à son pied. Le fond à gauche était occupé par un bureau et sa chaise, pendant que le coin au fond à droite était dédié à une table ronde d’environ un mètre de diamètre entourée de deux fauteuils. Dans un recoin à droite était disposée une petite bibliothèque où seuls quelques bouquins venaient orner les étagères.

- Voici mes appartements. Ce n’est pas grand-chose mais ce sera toujours mieux que de devoir fuir toute la nuit en espérant ne pas se faire bouffer.

Le temps d’illuminer la pièce, des raclements contre la porte se fît entendre. Le remue-ménage qu’ils avaient fait entre le combat et l’abordage sur le pont du navire avait dû attirer un autre prédateur. Noth regarda Audélia et la rassura.

- C’est bon, on ne risque rien. C’est monnaie courante d’avoir des rôdeurs errant sur les ponts du bateau. La porte est suffisamment renforcée pour ne pas avoir d’inquiétude.

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L'épuisement se faisait ressentir de plus en plus. Ce combat lui parut durer depuis des heures ; la résistance de l'animal sous les coups de sa dague semblait n'avoir aucune limite. Audélia n'étant pas dans son meilleur élément, ces capacités en étaient amoindries. Les coups portés perdaient de leur puissance. Gardant confiance malgré tout, assemblant son reste de courage, dague en avant, elle se dirigea de nouveau vers l'ennemi lorsqu'elle vît une autre silhouette surgir au côté de celui-ci. Audélia se figea, prenant peur d'être à nouveau prise pour cible par une seconde créature, contre laquelle elle ne pourrait rien cette fois. Voyant sa mort certaine, elle resta là impuissante à regarder les ombres et attendre le coup fatal qui mettrait fin à sa jeunesse.

Mais à cette instant sa vision fût tout autre. Hallucination dû à la peur et la fatigue sans doute. Audélia ne comprenait pas ce qui était en train de se dérouler sous ses yeux. Elle voyait une des ombres fondre comme neige au soleil avant de disparaître dans les profondeurs des eaux sombres.
Les blessures infligées un instant plus tôt auraient-elles eu effet ?

A part quelques cris au loin, le calme était revenu. Sa peur se dissipait peu à peu, gardant le peu de ses forces pour rester à la surface de l'eau. Des clapotis se firent entendre et elle se sentit soulevée.
Puis elle entendit des paroles prononcées par une voix qu'elle reconnue,

Ca va ? Tu n’es pas blessée ?

Nothjaan, sain et sauf, l'avait enfin rejointe. Elle qui pensait ne jamais le revoir, elle prenait conscience à cet instant du pourquoi des événements qui venaient de se produire sous ses yeux.

Etait-elle blessée ? Audélia n'aurait su le dire en cet instant. Trempée jusqu'aux os, tremblante de froid et d'épuisement, une seule chose lui importait : se sortir de là au plus vite, avant que d'autres prédateurs n'aient l'envie de prendre la relève.

Tournant la tête vers Nothjaan, elle se contenta de le regarder un faible sourire aux lèvres et de se laisser entraîner à la surface des flots. Il l'emmena vers l'embarcation qui s'était retournée sous les coups. Elle s'y agrippa au mieux pour ne pas sombrer. Sentant cette dernière glisser, Audélia s’inquiètait de ne pas y voir Nothjaan l'y rejoindre. Puis elle comprit qu'il les faisait évoluer vers un endroit encore inconnu pour elle.
Un claquement suivi d'une légère secousse, poussa Audélia à lever les yeux pour essayer de comprendre ce qui arrivait. Une autre embarcation plus imposante leur faisait face. Audélia n’eut pas le temps de poser de questions. Suivant les directives données, elle s'agrippa à l'échelle tendue pour gravir les échelons ; suivie de son compagnon d'infortune qui sitôt sur le pont l'entraîna...

Vite, rentrons ! A l’intérieur nous serons enfin à l’abri…

Sans un mot Audélia entra dans le lieu dépourvu de lumière. Elle entendit le jeune homme se démener. Bruits et craquements divers suivis de grandes inspirations se faisaient entendre sans qu'Audélia ne puisse comprendre ce qui était en train de se produire.
Malgré les paroles prononcées par Nothjaan, elle n'était pas des plus rassurée. Etait-elle vraiment à l'abri de prédateur ? Pouvait-elle réellement faire confiance ? Ou, était-elle tombée dans un piège dû à sa naïveté ?

Quand de faibles lueurs se mirent à danser, son regard se posa sur Nothjaan. Toujours muette, elle prenait connaissance des lieux. Audélia, voyant la porte calfeutrée, compris les bruits entendus quelques instants plus tôt. Transit de froid et fourbue elle resta plantée au centre de la pièce, sans réaction. Les dernières heures vécues lui ayant ôtées toute énergie, elle ignorait combien de temps elle resta ainsi.
Jusqu'au moment où elle ressentie un poids sur ses épaules. Le bruit que le jeune homme faisait à se mouvoir, la ramena doucement dans la réalité. Elle tourna son regard dans sa direction, en ôtant sa besace trempée de son épaule, et se dirigea vers la table et la posa dessus avant de s'affaler, telle une poupée de chiffon, sur le fauteuil qui la jouxtait.

Audélia voulait parler mais aucun son ne sortait de sa gorge, puis sans crier gare, épuisée par la fatigue et le stress, elle s'écroula dans un sommeil profond...

Noth laissa le temps à la jeune fille de faire redescendre la tension et découvrir l’espace où il venait de l’inviter.

Une fois la pièce éclairée et sécurisée, Noth prit aussi quelques instants pour souffler un bon coup. Tant qu’il avait été dans l’action, il n’avait pas ressenti tout ce poids dû à la complète prise de conscience des risques qu’ils avaient encourus cette soirée. C’est une fois au calme qu’il réalisa ce qu’aurait impliqué le moindre faux pas supplémentaire. Leur vie n’avait tenu qu’à un fil, et il avait bien conscience que durant ces péripéties, il n’avait strictement rien maîtrisé…

Toujours dans ses pensées, c’est l’anthropophage qui se montrait insistant de l’autre côté de la porte qui le ramena à la réalité. Il se concentra durant plusieurs secondes pour s’assurer qu’il n’y avait qu’une seule créature. La pièce était bien barricadée, mais s’il pouvait éviter de tester la robustesse de celle-ci face à un régiment de ses monstres, il préférait tout autant.

Une fois rassuré que la menace était unique, il se retourna vers son invitée tout en lui parlant simultanément :

- Bon vous ne m’avez pas répondu. Etes vous…

…blessée ?
Ah bah il n’y aura pas de réponse tout de suite !
Une fois son mouvement de rotation terminé et en capacité de regarder Audélia, il s’aperçut qu’elle était affalée sur la table.
Etait-ce de la fatigue ou une blessure ?

Noth se précipita vers la jeune fille imaginant déjà le pire. Si elle s’était pris un coup par une créature, il devrait y avoir des stigmates visibles. Il avait beau regarder la jeune fille, il ne voyait aucune trace de sang, ni même de déchirures sur ses vêtements.
Tout laissait penser qu’elle s’était juste effondrée de fatigue. Cela rassura le jeune homme qui se disait qu’ils avaient eu assez d’émotions fortes pour la journée. La pauvre fille devait être chamboulée de son arrivée à Port-aux-Echoués. Elle ne semblait pas du tout informée de ce qui l’attendait ici, et du coup, n’était pas du tout préparée à faire face à la situation vécue.
Il faut dire que lui non plus n’en menait pas large. Il ne s’était jamais considéré comme quelqu’un de courageux outre mesure, mais la peur qu’il avait ressenti cette nuit, lui montrait qu’il était loin d’avoir la carrure d’un aventurier. Sa philosophie à lui, c’était plutôt le risque calculé… Là il avait clairement dépassé ce seuil et ça lui faisait venir des tonnes de réflexions en tête. Toutefois, ce n’était pas le moment pour ça.

Noth tenta de secouer doucement l’épaule d’Audélia afin de la réveiller mais cela ne semblait pas suffisant. La question maintenant était de savoir quoi faire…

Regardant de nouveau son invitée, il ne put que remarquer qu’elle dégoulinait de partout. C’était un coup à attraper la mort. En même temps, il était dans le même état…
Après de multiples essais pour faire ouvrir les yeux de la jeune fille en vain, il décida de s’occuper de sa propre personne. Il serait toujours temps de retenter sa chance de la réveiller, une fois que lui serait au sec.

Il profita donc que sa convive soit dans les bras de Morphée pour se diriger vers le coffre au pied du lit et en sortir ses seuls autres vêtements. Il était urgent de se changer et ne se fît pas prier. L’humidité couplée à la fraicheur de la nuit, le sel, les traces de sang et autres morceaux de leurs ennemis… Puis l’odeur… Celle de la pourriture et des relents persistants, souvenir de leur passage dans la ruelle…
Noth ne pouvait plus le tolérer et déposa ses frusques dans un tonneau qu’il recouvra rapidement de son couvercle pour éviter d’empester trop longtemps les appartements. Il s’occuperait de tout ça demain dès l’aube.

Même vêtements retirés, il avait l’impression que les complications rencontrées cette nuit lui collaient à la peau. L’espace réservé à l’hygiène se situant sur le pont inférieur du bateau, il n’était pas envisageable de sortir de la cabine pour s’y rendre. Il improvisa donc avec ce qu’il avait sous la main ; c’est-à-dire un linge qui n’était en fait qu’un simple chiffon, une carafe remplie d’eau et un récipient qui ferait office de bassine.

Après un rapide débarbouillage, il enfila alors sa tenue secondaire qui lui servait principalement lorsqu’il effectuait travaux et manœuvres sur le navire. Celle-ci était composée d’un pantalon ample noir accompagné d’une large ceinture et d’une sorte de gilet bleu sans manche et sans bouton. Une fois revêtu, il se prépara à réitérer ses efforts pour ne pas laisser son invitée de la soirée ainsi…

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Des images se mélangeaient dans son esprit, perturbant ainsi le sommeil dans lequel elle s'était plongée. Des visages hideux s'imposant à son regard la firent sursauter, provoquant un réveil brutal, et laissant pendant un instant une Audélia hébétée et perdue.
Son regard se porta sur l'endroit où elle se trouvait. Une table sur laquelle elle s'était assoupie…
Puis doucement relevant la tête, un regard circulaire au travers de la pièce la replongea peu à peu dans la réalité.

Voyant Nothjaan, elle s'excusa auprès de lui pour son attitude. En se levant une odeur qu'elle pensait venir du dehors lui fît prendre conscience de la souillure de ses vêtements. Un regard rapide vers le jeune homme lui indiqua que de son côté, il avait troqué la sienne contre des habits propres. Combien de temps s'était-elle assoupie ? Elle n'aurait su le dire…

Des frissons lui parcouraient le corps. Son sang glacé glissait lentement dans ses veines.
Il lui fallait se réchauffer, il n'était pas temps de tomber malade ; d'autres missions l'attendaient au dehors.
Ayant sombrée sans sommation dans les bras de Morphée, une question à laquelle elle n'avait répondu pas lui revint en mémoire.
Passant en revue sa tenue, la jeune fille ne constata aucune empreinte de déchirures, ni résidu de sang. Aucune douleur suspecte ne se faisait ressentir, seules les affres de ses dernières heures étaient figées dans tout son être.
Se dirigeant à nouveau vers la table, elle tendit ses mains en direction de sa besace, celles-ci se figèrent, regardant d'un air perplexe les traces de griffures figées dans le cuir,

- Je pense que ma besace m'a sauvé des pattes de l'animal. Voilà pourquoi je n'ai aucune blessure apparente sur le corps.
Dit-elle montrant les stigmates sur le cuir,

- Nous l'avons échappé belle je crois bien, et je ne vous remercierai jamais assez de l'aide apportée à me sauver la vie. Ainsi qu'à ma famille m'ayant fait ce cadeau…

Sourire timide envers le jeune homme, puis de se tourner à nouveau vers sa besace, afin d'y prendre ses affaires. A la vue du contenu, son visage se décomposa ; tout était aussi souillé que les vêtements qu'elle portait.
Angoisse et frustration se mélangeaient dans son esprit tout en sortant ses effets un à un sur la table.
Regard de désolation envers Nothjaan.

- Qu'elle idiote je fais d'avoir pu m’imaginer que ce périple se déroulerai sous de bons auspices ! Je n'étais pas suffisamment prête pour ce genre d'aventure. Ma famille avait raison, mais têtue comme je le suis, je n'ai pas voulu écouter ; et me voici démunie devant cet étalage de souillure.

Une autre question s’imposait à elle en jetant un regard vagabond sur l'espace exigu et sommaire où ils se trouvaient. La faible lueur des bougies laissait flotter des ombres, dans lesquelles Audélia s'y noya un instant ; tourmentée à l'idée de devoir se changer en cet endroit, devant ce jeune homme encore inconnu le matin même. La boule au ventre elle se dit qu'elle n'avait d'autre choix, vue la situation dans laquelle ils se retrouvaient, que de laisser sa bonne éducation et sa pudeur de côté.
Sa voix laissa transparaître son angoisse quand elle s'adressa de nouveau à Nothjaan,

- Désolée de vous avoir imposé tous ces désagréments indépendants de ma volonté et dû à mon insouciance, mais je ne vais pouvoir rester ainsi toute la nuit… Dans des vêtements souillés et à l'odeur douteuse ? Comme il est hors de question pour moi de me montrer dévêtue devant vous, une simple couverture fera l'affaire. En attendant que je puisse remettre mes vêtements en état de propretés ; ainsi que moi d'ailleurs, qui aurait bien besoin d'un brin de toilette...

Audélia dévisagea le jeune homme l'air pensif, sans un mot prit de nouveau place dans le fauteuil, un œil jeté tristement vers l'étalement de ses affaires sur la table.
Elle tendit la main vers son bracelet qui trônait là ; le prit, et le caressa doucement du bout des doigts. Ses pensées vagabondant vers ses parents, pour lesquels, elle était venue au port des échoués. Allait-elle avoir le courage d'aller jusqu'au bout de son périple ? Dans l'espoir de les retrouver…
La jeune fille en était là de sa réflexion, oubliant un instant les frasques de la journée et la suite à venir...

Il venait à peine de se diriger vers son invitée qu’elle sursauta dans son sommeil. Avait-elle senti son approche, se réveillant ainsi par instinct ?
Nothjaan se recula d’un pas et lui laissa quelques instants pour émerger. Un fois ses esprits en place, la jeune fille s’inspecta… Elle ne semblait s’intéresser à son état physique que maintenant. Le marin compris qu’elle devait être dans un état second bien avant de s’être endormie sur la table ; probablement depuis la confrontation avec l’anthropophage.
Ce n’est qu’après sa vérification méticuleuse que Noth pu entendre que la voix d’Audélia était revenue à la normale. Enfin… à la normale était un bien grand mot ; son timbre montrait tout de même une pointe de ce sentiment quand on prend conscience que la fin aurait pu arriver plus vite que prévue. Puis arriva le son de la vague de regret. Et pour terminer, ce fût le vent apportant la tonalité de l’embarras.
Au fur et à mesure de son monologue, la gêne se lisait de plus en plus sur le visage d’Audélia. Le jeune homme avait laissé la jeune fille converser, pris de surprise par la tournure des évènements, il préféra lui répondre une fois qu’elle aurait vidé son sac ; façon de parler, même si elle déballa réellement ses effets un à un sur la table.
Il était temps qu’il dise quelque chose ; même s’il ne savait pas vraiment quoi…

- Vous savez, si nous en sommes où nous en sommes, c’est en partie ma faute. C’est moi qui suis d’ici, et qui connaît les dangers du coin. Et c’est moi qui vous ai conseillé certains agissements qui, avec le recul, ne semblaient pas être pas les bons.

Puis, déposant un regard sur la sacoche de la demoiselle.

- Maintenant, le principal, c’est que nous nous en sommes sortis indemnes aussi bien l’un que l’autre. Je vous avoue qu’il m’est arrivé un certain nombre de fois d’en douter ce soir… Mais ce qui est fait est fait !

Ce n’était surement pas les mots de réconfort que l’a jeune fille avait besoin, mais ce genre de situations le mettait mal à l’aise, incapable de trouver les mots adéquats.
Puis, d’autant plus qu’un autre sujet venait perturber son esprit. Le simple fait qu’elle énonce à haute voix sa problématique de se retrouver nue devant lui, lui fît trotter de multiples scènes dans la tête. Bien qu’il ne dise mots, il se sentit gêné à son tour ; comme si Audélia avait pu entendre ses pensées. Même si son imagination le dirigeait vers un cap opposé, la bienséance voulait qu’il lui propose une solution. Ce qu’il avait le plus grand mal à trouver…

Le regard déconfit qu’avait eu Audélia avant de prononcer sa dernière requête en avait dit long sur ce qu’elle pensait du lieu de vie qu’il lui proposait pour la nuit. Plus tôt dans la soirée, elle avait mentionnée d’être d’origine Ascanienne. Son éducation n’allait clairement pas l’aider à supporter la suite de la soirée. De plus, sa manière de parler semblait bien plus soutenue que ce que Nothjaan se faisait comme idée de la vie courante à la ferme. C’était une énigme cette fille…
Dans tous les cas, fermière ou aristocrate, il doutait fort que la solution qu’il allait lui proposer lui fasse plaisir…

- Pour ce qui est de l’hébergement, je suis désolé mais je n’ai que ça à vous proposer. J’imagine que vous aviez l’habitude à plus d’espace et de confort là d’où vous veniez. Moi, c’est tout ce que j’ai pour le moment. Le reste du navire n’est pas suffisamment sécurisé pour que je vous offre un espace individuel.

Réfléchissant en même temps qu’il regardait les vêtements qu’il venait d’enfiler.

- Je n’ai pas de change à vous proposer, ceux-ci sont les seuls en ma possession. Mais si vous le désirez il est possible de faire une toilette sommaire avec la carafe et la bassine là-bas. Pour la couverture, je n’ai que celle sur le lit ; elle est à vous si vous le voulez. Par contre je vous déconseille de vous mettre dedans avant de vous être débarrassée de l’odeur. C’est qu’elle est tenace et risque d’imprégner la courtepointe.

Ses derniers mots avaient eu pour effet de clouer tout espoir à Audélia. La torpeur se lisait dans ses yeux. Le jeune homme imaginait très bien à quoi devait faire face la demoiselle. Un choix qui n’en était pas un entre rester trempée et couverte de puanteur et exposer intégralement son corps au regard d’un membre de la gente masculine…

Noth se dit qu’il avait eu de la chance que la jeune fille se soit assoupie, lui permettant ainsi de ne pas se retrouver lui aussi face au dilemme que subissait Audélia. Certes, la pudeur de la jeune fille semblait battre des records mais il devait bien avouer que, rôle inversé, il n’aurait pas fait le fier non plus.

Mesquinerie masculine surement, Noth ressenti une légère excitation à laisser son invitée un moment devant les faits. La pauvre semblait se décomposer…
Même si l’envie ne lui manquait pas d’attendre de la voir se décider, il reprit la parole après ces quelques instants de blanc pour la rassurer un tant soit peu et atténuer son supplice.

- Je pourrais profiter du temps que vous aurez besoin pour nous préparer un repas frugal en vous tournant le dos ?

C’était le moins et le plus qu’il pouvait proposer. Restait à savoir comment, elle allait le prendre…

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L'atmosphère semblait pesante face à la position dans laquelle chacun se trouvait. Le jeune homme ne dit mot pendant un laps de temps. Audélia, elle, se noyait dans ses souvenirs ; évitant ainsi de torturer son esprit au dilemme qui l'attendait...

Que penserait sa famille en la voyant ainsi, avec un jeune homme rencontré depuis peu, enfermés dans cet endroit exigu au milieu de nulle part ? Elle aurait sûrement eu droit à un sacré sermon de la part de son oncle, malgré leurs confiances en la jeune fille, qui n'était pas volage et savait se défendre. C'est d'ailleurs grâce à ces critères et son caractère buté qu'ils l'avaient laisser partir seule sur les chemins.

Une voix lui fît relever la tête. Son regard dirigé vers le jeune homme faisant son mea culpa sur les événements de la journée, Audélia voulu sitôt le rassurer comme elle le pouvait sur le fait que tout n'était pas son entière faute. Mais ce dernier ne lui laissa pas le temps de s'exprimer, le jeune homme étant parti dans un long monologue…

Audélia ne pouvait lui en vouloir, bien au contraire. Il avait été présent et attentif pendant tout ce périple. Le stress et l'angoisse des dernières heures faisait qu'il devait se libérer l'esprit. Elle écouta donc avec patience les tirades de son compagnon de fortune ; hochant parfois la tête, entrecouper de quelques sourires discrets qui ne furent qu’éphémère lorsque les dernières paroles raisonnèrent, la ramenant au présent

Nothjaan se tût enfin et elle profita de cet instant pour lui répondre.

Tout n'est pas de votre faute dans ce qui est arrivé. J'ai aussi ma part de responsabilités. J'aurais dû vous écouter plus sérieusement ; écouter ma famille également sur les divers dangers de ce périple. Faisons-nous toujours le bon choix dans nos actes ? Malheureusement je ne le pense pas. Chacun fait des erreurs de jugements en toute circonstance

Et de poursuivre…

Il faut regarder le bon côté des choses. Le principal en effet, c'est de s'en être sortie sans trop de dommage. De plus, je ne sais que peu nager. L'instinct de survie ou la trouille ressentie a fait que je ne me suis pas noyée face aux événements.

Léger sourire, puis son regard se tourna de nouveau dans le logis.

Vous n'avez aucunement à être désolé. Je ne peux que vous remercier de bien vouloir m'héberger. J'espère simplement que demain, je trouverai une chambre dans une auberge moins malfamée que celle dans laquelle j'ai fait mes premiers pas en arrivant. Et ainsi vous soulager de ma présence…
Il est vrai que je ne suis pas habituée à ce genre de logis…

Hésitant un instant avant de poursuivre… Allait-elle lui confier quelques aspects de sa vie ?
Le regard tourné à nouveau vers le jeune homme.

J'ai souvent eu la sensation ces dernières heures que quelques choses vous intriguait sur ma personne. Je me trompe ?

Veille à la réaction de Nothjaan avant de poursuivre.

Voyez-vous ! Je suis assez secrète sur ma vie en général, mais je pense pouvoir vous faire assez confiance à me laisser aller à quelques confidences. Je vous raconterai quelques aspects de ma vie, sur l'endroit d'où je viens, et de ce qui m'as amenée jusqu'ici...

L'heure n'en était pas encore aux confidences, Audélia ne pouvait se permettre de rester ainsi plus longtemps dans des vêtements souillés. Elle se tût un instant, afin de réfléchir à la proposition posée par le jeune homme.
Nouveau regard vers celui-ci. Ennuyée de ce qui aller suivre…

Pour votre dernière proposition, je crois bien que je n'ai pas d'autre choix. Je ne peux rester indéfiniment ainsi. Et j'ai une petite faim…
J'accepte ce marché, mais… promettez moi que vous resterez le nez dans vos casseroles !

Fixant le jeune homme du regard ce dernier opinât de la tête.

Audélia s'occupa alors à remettre ses effets dans sa besace afin de libérer la table et d'aller préparer le nécessaire pour sa toilette. Elle tira ensuite un fauteuil juste à l'endroit précis face à la bassine. Ce dernier lui cacherait, peut-être, une partie de son anatomie…
Elle vérifia son installation puis s’enquit de la couverture qu'elle plaça sur le fauteuil à portée de main, avant de se tourner de nouveau vers Nothjaan. Il s’attelait à la préparation du repas. Audélia, bien que peu rassurée malgré la promesse qui lui fût faite, s'occupa vivement, afin d'ôter l'odeur et la souillure qui lui coller à la peau, un œil discret à surveiller de temps à autre Nothjaan…

Le temps passa ainsi chacun de son coté, sans un mot.

Une bonne odeur envahie l'habitacle et vint chatouiller les narines d'Audélia qui, toilette terminée, s'enroula dans la couverture qu'elle fixa d’un repli sur le haut, ne laissant apparaître que ses épaules et bras nus. La ceinture, une fois quittée les brais immettables vu leur état, vient être positionnée autour de la taille de la jeune fille afin de retenir l’habit de fortune.

Ainsi apprêtée, elle rangea son désordre. Et malgré la gêne de sentir ses épaules nues, la faim qu'elle ressentait l'emportait sur son état d'âme. Elle prit les devants pour mettre la table et d'attendre sans mot dire le moment ou Nothjaan, muni de ses plats, mettrait fin à la douleur de son estomac...

Autant que puisse être embarrassante la situation pour la jeune fille, elle n’eût d’autres choix que d’accepter sur parole la bonne foi du jeune homme. Noth regardait Audelia préparer son nécessaire et agencer l’espace à sa guise. Il se fît la remarque que le fauteuil était plus un rempart psychologique pour la jeune fille qu’un réel paravent. Il lui serait aisé de se décaler d’un pas pour éliminer l’obstacle visuel.

Toutefois, il avait bien l’intention de respecter sa parole et se tourna tout en farfouillant dans ses quelques réserves entreposées dans la cabine. Il n’avait clairement pas les ustensiles nécessaires pour faire un réel diner mais les aliments qu’il détenait étaient de qualité. En tout cas du point de vue d’un habitant moyen de Port-aux-Echoués.
Il commençait à se dire que son invitée avait été habituée à un niveau de vie nettement supérieur à la moyenne. Elle l’avait sous-entendu en faisant référence au logis ; puis cette histoire de discrétion sur sa vie lui laissait imaginer qu’il était peut-être encore loin de la vérité.

Dans tous les cas, il n’allait pas pouvoir proposer meilleur festin. Il aimait les objets et victuailles de qualité mais ne prenait jamais à l’excès. Pour le moment, il préférait économiser pour atteindre son but le plus rapidement. Cependant, il n’allait pas se montrer radin sur le repas alors qu’il accueillait une invitée ; et à défaut de pluralité de mets, il prévoirait une quantité satisfaisante.

Noth sortit tout d’abord assiettes, couverts, verres et broc d’eau, puis les déposa sur un coin du meuble. Ensuite, il prit une planche et un couteau et coupa de fines tranches de viande fumée et autres charcuteries qui avaient l’avantage de bien nourrir tout en se conservant bien.

Pendant qu’il agençait de manière ordonnée les victuailles sur la planche, le jeune homme eut le regard attiré par un mouvement au niveau des vitraux en poupe. Quelque chose était-il de l’autre coté à l’extérieur ?
Noth avait son palpitant qui tambourinait dans sa poitrine. Il avait eu sa dose pour aujourd’hui, même pour l’année là… Cette satanée journée ne semblait pas vouloir finir.
Un nouveau mouvement fût perceptible…

Il ne comprit que tardivement que ce n’était pas une menace extérieure. La seule créature qui bougeait était à l’intérieur. Le vitrail ne faisait que refléter ce qui se passait derrière lui !
Il put discerner facilement le corps de la jeune fille lui tournant le dos sans aucun vêtement pour la couvrir. Les yeux du jeune homme s’attardèrent sur la scène qui lui était offert…

Prenant conscience après plusieurs secondes de ce qu’il était en train de faire, Noth ferma les yeux un instant et détourna le regard des vitraux. Il n’avait pas voulu manquer à sa parole ; pourtant cela lui demanda un effort conséquent de renoncer à la vue.

Son calme difficilement retrouvé, il continua sa tâche en choisissant une miche de pain fraiche pour la transformer en tranches qui accompagneraient le reste du repas.
Audélia avait eu le temps de terminer alors que Noth essayait de ne pas se perdre dans ses pensées et achevait la découpe du pain. Il apporta alors ce qu’il avait préparé et invita Audélia à s’installer tout en la regardant. Elle ne semblait clairement pas à l’aise de se retrouver face à lui ainsi. Pourtant, même si elle n’était parée que d’une couverture, elle l’avait agencée d’une manière qui lui donnait un air digne. A l’image d’illustrations de l’ancien monde représentant des statues d’une période révolue drapées de toges.

- Ce ne sera pas un festin mais ça aura le mérite de remplir le ventre.

Puis Noth se mis à faire le service. Une fois installés autour de la petite table, Noth laissa le temps à Audélia de prendre quelques bouchées avant de revenir sur quelque chose qu’elle avait dit avant de se débarbouiller.

- Tout à l’heure vous avez dit rester secrète sur le pourquoi de votre venue… C’est donc bien qu’il y a quelque chose de peu ordinaire dans votre histoire ? Mais ça je m’y attendais pour tout vous avouer. Et je pense que je n’étais pas le seul…

Noth faisait allusion au groupe qui semblait très intéressé par Audélia quand ils étaient en taverne. A vrai dire, elle pouvait vouloir rester discrète en ne disant rien ; mais une nouvelle arrivante comme elle à Port-aux-Echoués attire facilement l’attention. Quelqu’un qui ne sait à ce point, pas comment ça se passe ici et qui vient quand même… c’est qu’il a une bonne raison.

- Non, chacun a le droit d’avoir ses secrets. Même si en savoir plus sur vos motivations satisferait clairement ma curiosité.

Noth avait lui-même son histoire. Et il ne rentrait clairement pas dans les critères d’un villageois ordinaire. A commencer par son lieu d’habitation qui le faisait passer la plupart du temps pour un fou. Il s’adressa de nouveau à Audélia.

- Pour être honnête avec vous, ce qui me perturbe c’est votre manière d’être. A mi-chemin entre… beaucoup de chose.

Il ne savait pas comment la définir et s’était bien ça qui le chiffonnait.
Avant de savoir ce qu’elle faisait ici, Noth aurait déjà aimé la cerner un peu plus et comprendre qui elle était…

Date d'inscription : 05/05/2021 Messages : 19

La soirée semblait douce et reposante après cette journée éprouvante qu’ils venaient de passer. Audélia profitait de ce moment pour écouter les bruits qui l’entouraient. Le léger tangage du navire était pour elle une sensation nouvelle qui avait le pouvoir de dissiper le mal-être ressenti quelques instants plus tôt.

La faim lui tiraillait les entrailles. Un œil vers Nothjaan déposant les plats de victuailles sur la table la fît sourire et l’invita à se restaurer sitôt le repas servi.

Ce dernier débutait dans le silence, après qu’elle l’eût remercié poliment.

Mais la curiosité de son hôte qui semblait couver depuis leurs rencontres, devait éclore à un moment.

Audélia l’écoutait parler en silence. L’heure en était-elle arrivée aux confidences ? Pouvait-elle vraiment lui faire confiance ?

Les questionnements du jeune homme la fît réfléchir un instant sur ce qu’elle pouvait lui confier ou non sans que cela ne porte préjudice à elle, ou à sa famille. Puis elle ne souhaitait pas se retrouver séquestrer dans ce navire sur demande de rançon.
Du peu qu’elle avait pu constater, l'homme avait sans aucun doute un besoin pour financer les travaux de son bateau…

Audélia le dévisagea plus que d’ordinaire, essayant de capter au mieux dans son regard les réelles intentions de cette curiosité la concernant.

Réflexion faite, elle se dit qu’il avait bien le droit d’en connaître un peu plus sur sa personne et sa venue en ce lieu, mais sans pour autant qu’elle ne dévoile tout de son milieu familial.

Si ce dernier était pourvu de mauvaises intentions à son encontre, il ne se serait pas donné autant de mal, pensa-t-elle.

Il l’avait aidé et sauvé des griffes des prédateurs, peut-être l’aiderait t’il dans sa quête …?

Nothjaan s’était tu, un instant de silence s’empara de l’habitacle. Son regard toujours fixé sur le jeune homme, Audélia prit enfin la parole.

• Je suis en effet restée secrète sur ma venue. Et malgré la curiosité de celle–ci, je ne me confie pas facilement aux inconnus. Vos compagnons et vous-même l’avez bien compris je suppose ?
Mais je dois vous avouer, et je pense pouvoir vous faire assez confiance après la journée que nous venons de passer pour cela, que si je suis venue à Port aux Echoués, c’est dans l’espoir de retrouver mes parents ou tout au moins leurs traces.

Audélia fit une pause, avant de reprendre.

• J’arrive du quartier Ascanien d’où je suis native, j’ai grandi auprès de mes parents jusqu’à l'âge de dix ans pour être, un bon matin, abandonnée avec pour seule explication que j’étais bien trop jeune pour qu’ils m’emmènent avec eux. Que c’était pour me protéger.
Je me suis donc retrouvée dans une famille de fermier que je n’avais jamais vu, ni entendu parler, pour apprendre par la suite que nous étions de la même famille… Et oui les secrets font partir de l’héritage familiale ! Dit-elle en soupirant.

• Ce matin-là j’ai regardé mes parents partir en direction de Port aux Echoués, pensant dans mon esprit d’enfant, qu’ils reviendraient vite me chercher. Mais les mois passant, je n’ai jamais eu de leurs nouvelles. Je me suis promise secrètement, que dès qu’il en serait possible je partirais à leur recherche.
Neuf années ont passées depuis, mais j’ai mis du temps à connaître la raison de leurs abandons, et à force de persévérance dans mes questionnements, mon oncle m’a enfin avoué le pourquoi de ce départ. Et me voici, gardant espoir malgré toutes ces années de retrouver leurs traces.

Audélia se tût, ne voulant pas en dévoiler plus sur sa famille. Il serait bien temps de se confier plus en détail si l’occasion venait à se produire et sa confiance se confirmer au fil du temps.

Mais seul l’avenir lui dira si ces deux-là partent chacun vers un chemin différent, ou s’ils restent unis dans la quête qui attend Audélia…

Noth écoutait attentivement le récit d’Audélia en même temps qu’il se restaurait un minimum. Les épreuves de ces dernières heures lui avaient clairement coupé l’appétit. Des images n’en finissait pas de passer et repasser dans sa tête sans qu’il arrive à s’en débarrasser.

Se concentrer sur l’histoire de son invitée venait donc comme un remède bénéfique pour sa santé mentale en plus de venir combler en partie sa curiosité.
En effet, la jeune fille ne prenait même plus la peine de cacher le fait qu’elle ne disait pas tout. Etait-ce parce qu’elle lui faisant suffisamment confiance ou juste que la journée commençait à être vraiment très longue et que la fatigue l’empêchait de camoufler correctement son jeu ?
Dans tous les cas, le jeune homme préférait clairement ça. Il y voyait une certaine franchise.

Au fur et à mesures des dires de l’Ascanienne, Noth faisait le rapprochement avec sa propre existence. Même si les circonstances étaient radicalement différentes, ils avaient tous deux grandis dans une famille de substitution jusqu’au jour où ils décidèrent de suivre leur propre voie. Certes pour lui c’était arrivé plus tôt, mais il pouvait comprendre les motivations de la jeune fille de 19 printemps ; et oui il avait fait le calcul quand Audélia avait parlé de l’âge où elle avait été séparée de ses parents et le temps écoulé avant qu’elle se décide à suivre leur trace.

Le calcul, il l’avait aussi fait pour savoir s’il y avait eu une chance qu’il ait pu croiser ces personnes sur Port-aux-Echoués.
La période coïncidait avec l’époque où il était chez son grand père d’adoption. Il n’y avait aucune chance qu’il les ait croisés, à part s’ils étaient restés plusieurs années sur les lieux.

Noth voyait mal comment Audélia allait pouvoir suivre une piste qui remontait à quasiment une décennie si elle n’avait pas un peu plus que des souvenirs d’enfant et des explications orales de membres, éloignés semblait-il, de sa famille. La probabilité de les rencontrer sur Port-aux-Echoués était surement nulle. Premièrement, des Ascaniens ici, ça ne trainait pas les rues… C’était pas trop le style du coin et fallait bien se dire que même après 9 années, ils ne seraient sans doute toujours pas réellement acceptés par le reste de la population du bourg. Deuxièmement, s’ils ont abandonné leur fille ce n’était surement pas pour venir s’installer et refaire une nouvelle vie ici. Troisièmement, Audélia avait laissé comprendre qu’il y avait une raison précise à leur départ, comme s’ils étaient liés à une quelconque quête. Dans ce cas, Port-aux-Echoués n’était surement qu’une étape avant un plus long périple. La question qui restait en suspend c’était une étape vers quelle destination ? Après Port-aux-Echoués, il n’y a rien ! C’est la mer, et comme beaucoup se plaisent à lui répéter… le Kraken

Ces nouvelles informations fournies par son invitée lui donnaient matière à réflexion. Et pour le coup, ce n’était pas de refus. Il savait pertinemment qu’il n’arriverait pas à dormir correctement ce soir et préférait cogiter sur ce sujet que sur ses dilemmes de consciences.

Quand Noth comprit que la jeune Ascanienne avait fini son récit, ou du moins était allée au bout de ce qu’elle avait décidé de révéler, il se surpris à chercher les bons mots pour ne pas faire tomber son invitée dans le désespoir en lui annonçant qu’elle n’allait pas trouver de pistes avec si peu d’éléments sur une affaire qui remontait à autant d’années. La franchise trop « brusque » qu’il pouvait souvent avoir dans sa manière de parler, ne serait sans doute pas la mieux venue en cet instant.
Elle n’avait rien demandée, mais pourtant il se sentait dans l’obligation de lui répondre.

- De ce que vous en dites, vos parents sont venus à Port-aux-Echoués pendant la période où je n’étais pas là. Mais on trouvera peut-être quelqu’un qui se souvient d’eux. Toutefois, plus vous aurez d’informations à fournir et de détails distinctifs sur eux, plus vous aurez de chances de trouver des réponses.

Et il espérait pour elle qu’elle en avait plus que le simple résumé qu’elle venait de lui faire. Sinon personne ne se rappellera d’un couple de voyageurs passant par là il y a de cela près de 10 ans.
Il avait bien compris qu’elle rechignait à dévoiler son passé mais elle allait bientôt être face à un choix. Soit elle racontait toute l’histoire et pour ça il allait falloir qu’elle fasse entièrement confiance à quelqu’un à un moment donné, soit elle piétinerait dans sa quête de réponse.

Mais ce n’était clairement pas le moment d’insister sur le sujet. La journée avait été longue et le jeune homme voyait bien que son invitée tombait de fatigue. La nourriture étant engloutie, il débarrassa rapidement la table avant de reprendre la conversation.

- Quoi qu’il en soit, il est temps d’essayer de se reposer un peu. On jour la couverture à pile ou face ou elle est assez grande pour deux ?

Noth essaya de garder le plus possible un air sérieux mais il dû se résigner assez rapidement à montrer un large sourire indiquant qu’il titillait la jeune fille sans arrières pensées.

Puis d’un signe de la main vers le couchage.

- Le lit et la couverture sont à vous. Vous avez besoin de repos. Les fauteuils me suffiront amplement pour une nuit. De toute façon je ne suis pas certain d’arriver à fermer l’œil pour ce qu’il reste de la nuit.

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Jour sans fin…

L’état d’esprit dans lequel elle se trouvait en cette première soirée loin de sa famille, la perte de son chat qui ne quittait pas ses pensées, la fatigue sans doute dû aux émotions depuis son arrivée ; tout ça pesait lourdement sur ses épaules en cet instant.

Audélia écoutait les bruits extérieurs avec l’appréhension de voir apparaître au milieu de la pièce un de ces prédateurs auquel elle avait réussi à échapper comme par miracle. Un regard circulaire de l’habitacle ou elle se trouvait la rassura quelque peu. Le maître des lieux, habitué à ce genre de situation, devait en connaître les rouages pour se protéger du mieux qu’il le pouvait.

La présence de Nothjaan la ramena à la réalité par ses questionnements, auxquels elle répondait sans pour autant tout dévoiler, lui ravivant des souvenirs qu’elle pensait enfouis au fond de sa mémoire.

Elle était devenue muette et sauvage suite à l’abandon de ces parents au sein de cette nouvelle famille. Pourtant, les soirs de veillées, chacun à leur manière, essayait de l’apprivoiser au mieux. Au fil du temps, Audélia avait retrouvé confiance et protection auprès de chacun d’eux, et comme en cette soirée les questionnements avaient fusé afin d’apprendre à se connaître.

- Cette soirée me fait penser aux veillées familiales qui semblaient ne jamais finir.

Sourire suivi d’un regard vers ce dernier, elle se leva pour récupérer sa besace et en prendre son bracelet, qu’elle déposa devant Nothjaan.

- Je sais qu’il est tard et que la journée fût longue, mais j’ai décidé de vous dévoiler ceci dès maintenant. On dit que la nuit porte conseil et en voyant ce bracelet peut- être que des souvenirs feront jour dans votre mémoire ?
Il m’a été offert par mes parents qui portent le même. Il ne quitte jamais mon poignet, sauf qu’à mon arrivée j’ai préféré le ranger bien à l’abri des regards. Vous voyez sur la médaille, il y a gravé des épis de blé ainsi qu’une colombe, ceci est le symbole de notre famille.

Audélia le laissa prendre connaissance du bracelet, surveillant sa réaction. D’autres questions viendraient sûrement à la suite mais pour l’heure, le repas terminé et la table débarrassée, le sommeil se faisait ressentir. La journée qui les attendait n’allait sans doute pas être de tout repos ...

Elle ne se fît pas prier lorsque le jeune homme lui avait cédé son lit et la couverture qui lui servait de vêtement provisoire, malgré un instant de doute qui l’avait fait sursauter.

- Vous me voyez désolée de vous abandonner ainsi à votre sort, mais je meurs de sommeil après cette grande journée. Je vous dis à demain et essayez de vous reposer également. Demain nous avons du pain sur la planche qui nous attend. Et surtout un grand merci pour tout.

C’est rassurée qu’elle prit la direction du lit prenant soin de bien se couvrir au mieux afin de ne dévoiler aucune partie de son anatomie pendant son sommeil.
Et de cette journée qui semblait ne jamais se terminer, Audélia plongea doucement dans les abîmes rejoindre les bras de Morphée ...

Le jeune homme laissa Audélia filer se reposer sans dire plus de mots qu’un « Reposez-vous bien. »

De toute façon la jeune fille était dans un état de fatigue avancée et Noth s’était bien gardé de réagir sur le bracelet montré quelques instants au préalable. Pour le moment tout ce que ça lui disait, c’est que son invitée forcée ne venait pas de n’importe quelle famille. Quelle que soit la peuplade, quand quelqu’un a des armoiries distinctives, c’est qu’il ne fait pas parti du bas du panier.

A vrai dire cela ne l’étonnait guère ; et la jeune fille avait eu raison de ranger ce signe distinctif et de ne pas crier sur tous les toits ses origines.
Restait que gens de la haute, surtout Ascanienne, ce n’était pas vraiment le genre de la population locale ; et ce n’était clairement pas le profil le plus apprécié par ici… Le seul point positif était que si ses parents s’étaient présentés tel quel, ils n’avaient pas dû passer inaperçus. Il allait juste falloir trouver à qui poser la question sans que cela vienne compromettre la sécurité déjà précaire d’Audélia…

Depuis que la jeune fille était en voyage dans le royaume des rêves, Noth s’était agencé une couche d’appoint avec les fauteuils de la cabine. Assis sur l’un et les jambes étendues sur deux autres, il jeta un dernier regard à son invitée avant de souffler la dernière flamme émettant de la lumière.
La situation était revenue au calme. On pouvait entendre des anthropophages à l’extérieur fouler le pont du bateau, mais rien de plus alarmant que chaque nuit. Ils erraient comme dans les rues de la ville. Tant que rien n’attirait leur attention, il n’y avait rien à craindre.

Le jeune homme continua de cogiter dans le noir. Même s’il se savait à l’abri, sa caboche avait trop de choses qui virevoltaient à l’intérieur pour lui offrir tout de suite un sommeil réparateur. Son esprit repartit dans la réflexion de la situation d’Audélia et de qui elle pouvait être vraiment. Avait-il recueilli chez lui, dans son épave à peine flottante, la crème de la crème ? Si ça se trouve, elle était de la famille du Gouverneur Krox lui-même.
Cette pensée lui décrocha un sourire avant de se dire que son imagination partait trop loin.

Quoi qu’il en soit, Noth avait beau tourner et retourner le problème dans tous les sens depuis une durée qu’il aurait eu bien du mal à définir, il trouvait ça périlleux pour la demoiselle de quérir des renseignements auprès de villageois. Les nouvelles vont vite dans ce genre de bourg, et arrivent souvent aux oreilles d’arrivistes prêts à tout pour en profiter.
Surtout que la jeune fille ne lui avait donner que des bribes d’information. Qu’est-ce qu’elle pouvait bien encore cachée qui la mette encore plus en danger ? Il se fixa de parler de ses doutes avec Audélia le lendemain avant de tomber lui aussi dans un sommeil profond.

**********

Ce sont les courbatures dues à sa position pour la nuit qui réveillèrent le jeune homme aux premières lueurs du jour. Sa phase de sommeil avait surement été courte, mais il en avait vu d’autre. Ce n’était pas un gros dormeur de tout façon.

Après s’être mis sur ses deux pieds et étiré, il jeta un œil vers son lit. Il était toujours occupé par son invitée de la veille, qui semblait bien partie pour jouer les marmottes une partie de la matinée. En attendant qu’elle émerge, Noth allait avoir le temps de faire quelques corvées dont la principale sera le nettoyage de leurs frusques qui même enfermées dans un tonneau commençaient clairement à embaumer la cabine.

Avant de sortir de ses quartiers, Noth sortit un morceau de pain qu’il déposa sur la petite table avec un couteau à côté. Il n’était pas du genre à manger dès son réveil mais c’était peut-être le cas d’Audélia. Il laissa donc tout le nécessaire en évidence pour que la jeune fille comprenne qu’elle pouvait se servir.

Il s’attela ensuite aux linges. Se doutant de la puanteur qu’il allait rencontrer, il transporta le fût à l’extérieur avant de l’ouvrir… Et quel bien lui en a fait. Même en plein air, c’était dur à supporter. Tous les textiles diffusaient ce mélange d’odeurs de pourritures et de marée. Décaper tout ça n’allait pas être de tout repos mais Noth avait une certaine habitude. Il faisait souvent des boulots assez salissants et à force d’expérience on arrive à des résultats.
Un à un les vêtements se voyaient trempés, frictionnés, essorés, vérifiés puis s’ils passaient l’œil vigilant du laveur, ils étaient mis dans une panière qui serait ensuite hissée pour que chaque pièce soit étendue afin de sécher.

Cette première tâche réalisée, Noth s’occupa de la barque qu’il n’avait pas eu le temps, la veille, de sortir de l’eau, ni même de remettre dans le bon sens. C’est en la regardant flotter ainsi, coque vers le ciel, qu’un déclic se fît dans sa tête…

Ses sacs de clous !!!
Il les avait placé sous l’assise.

Pourvu qu’ils ne soient pas tomber au fond de la baie. Ces deux sacs représentaient une grosse partie de ses économies actuelles. Il avait prévu la quantité nécessaire pour l’ensemble des réparations. Les métaux, même les plus simples, étaient rares dans ce monde, et les perdre serait terrible pour lui. Cela retarderait énormément.

Le jeune marin remonta rapidement la chaloupe, angoissé par le fait d’avoir perdu son matériel. Une fois l’esquif déposé sur le pont, Noth fouilla frénétiquement l’embarcation. Il retrouva tout d’abord un sac intact. Même si la nuit dans l’eau de mer, n’était clairement pas l’idéal pour des clous, ils allaient de toute manière gouter à l’iode tôt ou tard.
Mais le jeune homme n’eût pas le temps d’être soulagé car il ne trouvait pas son deuxième colis. Il chercha encore et encore, multipliant les contrôles méthodiques, avant de devoir se rendre à l’évidence. En plus d’avoir risqué sa vie hier, il avait perdu la moitié de ses achats…

Noth était furieux. Il sentait l’énervement et la colère monter en lui et savait très bien que ça n’allait pas passer tout seul. Il allait devoir s’occuper et se défouler.
Tout en bougonnant tout haut, il alla attraper outils et planches puis descendit au pont inférieur entamer de suite les réparations de son navire. Même si les clous du sac retrouvé n’étaient en rien responsables si leurs congénères s’étaient fait la malle dans le grand bleu ; ça allait faire du bien au marin de leur taper dessus pour installer des bordages et ainsi rendre hermétique et clos les espaces du pont inférieur.

Rien que la remise en état de cette partie lui prendrait plusieurs jours, mais sur le moment, il ne pensait pas à ça. Avec l’impatience dont il savait faire preuve, il avait besoin d’avancer. Sans réfléchir à autre chose. Juste taper sur des bouts de ferraille et rafistoler sa raison de vivre, son objectif. Il n’avait plus que ça en tête à présent. Au point d’en oublier qu’il n’était pas seul. Au point d’en oublier que les coups répétés sur la coque du navire allaient sans doute être l’origine d’un réveil des plus brusque pour Audelia…

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C’est par une nuit sans lune qu’Audélia se retrouva perdue au milieu de nul part dans cet endroit qui lui était inconnu ; entourée d’arbres et de buissons, ne sachant quelle direction prendre.
Elle marchait à l’aveugle avec prudence dans cette lande, lorsque des bruissements se firent entendre. L’angoisse s’immisça dans ses entrailles lui faisant stopper sa marche. Essayant, dans cette pénombre, de percer d’un regard d’éventuels dangers. Sans plus bouger, à l’écoute de tout bruit, sa vue s’adaptant doucement, elle vit des ombres non loin de là.

Ce ne sont que les arbres dont les feuilles bruissent dans le vent, se dit-elle pour se rassurer.

Elle reprit doucement sa marche quand soudain d’autres bruits lui vinrent aux oreilles. Un regard rapide dans leurs directions lui laissa juste le temps d’apercevoir une ombre qui, dans la nuit, semblait énorme et hideuse. Celle-ci se rapprochait dangereusement de la jeune fille qui, en cet instant se retrouva figée par la surprise et l’incompréhension de ce qui se déroulait sous ses yeux.
Rien à voir avec les arbres qui m’entourent, se dit-elle avec stupeur
Prenant ses jambes à son cou elle fila droit devant, elle s’éloigna le plus vite qu’elle le pouvait ; gardant espoir de se trouver un endroit ou se mettre en sécurité loin de cette créature sortie droit des ténèbres.
L’ombre à ses trousses se mit à hurler dans la nuit, la peur qui s’emparait d’Audélia lui donna des ailes au point qu’elle n’avait jamais courue aussi vite de sa vie à la recherche d’un abri sécurisé.
Une cabane pointait devant elle, rapidement elle s’y engouffra, refermant la porte derrière elle, pour aller se tapir dans un coin. Essayant de reprendre ses esprits, elle écoutait, attentive à tout bruit. Mais plus rien. Que le simple silence de la nuit. Elle se leva, pour s’aventurer à nouveau dehors, mais n’en eu pas le temps. Des coups assourdissant se firent entendre sur la paroi de la cabane. Prenant peur à nouveau, elle chercha par tous les moyens un endroit ou se cacher…
De nouveaux coups raisonnèrent dans l’espace… Audélia se réveilla en sursaut hébétée et perdue.
Un simple regard aux alentours lui suffit à reprendre ses esprits. Soulagée de se savoir en sécurité, elle se leva, rajustant la couverture qui lui tenait lieu de vêtement, puis posa son regard à l’endroit où elle avait la veille déposé ses effets.
Ceux–ci avaient disparus, tout comme Nothjaan qui était absent des lieux. Du pain et un couteau trônaient au centre de la table. Elle en profita pour se servir une tranche afin de se remplir l’estomac criant famine, puis se dirigea vers la porte de la cabine quand … !
D’autres coups se firent entendre. Perplexe, elle hésita un instant sur le pas de la porte, tendant l’oreille à d’autres bruits suspects.
Après un temps de réflexion et au regard de la lumière du jour, elle se souvint que les prédateurs ne sortaient qu’à la nuit tombée. Les coups entendus ne faisaient en fait pas parti de son cauchemar mais étaient bien réels, quelque peu rassurée, elle s’aventura enfin hors de la cabine à la recherche de Nothjaan, qui, pensa-t-elle, était en train de travailler à son bateau.
Pas à pas elle se dirigea vers le pont, découvrant peu à peu l’endroit où son hôte résidait.
Continuant son avancée en jetant un œil ici et là, elle voit du linge battant au vent et découvre ses vêtements accrochés avec ceux du jeune homme. Ceux -ci n’étant pas à sa portée, elle chercha le moyen par lequel Nothjaan avait bien pu les suspendre, puis abandonna l’idée de peur de faire une bêtise. Son vêtement de fortune ferait encore l’affaire quelque temps pensa t’elle en vérifiant la fiabilité de ce dernier à se maintenir en place pendant sa recherche du jeune homme.
Déambulant ainsi vêtue, Audélia affronte l’extérieur des lieux. Regardant ici et là afin de repérer l’endroit où ils avaient laissé la barque la veille. Elle vît enfin celle-ci qui avait retrouvé sa position initiale.

Nothjaan ne devait plus être très loin se dit-elle.

Quand des coups raisonnèrent à nouveau non loin de là, Audélia en prit la direction mais toujours pas trace du jeune homme.

Où pouvait-il bien se cacher ? pensa t’elle

Sachant de par expérience au sein de sa famille que les hommes n’aimaient pas être importunés en plein travail ; Audélia passa toutefois outre pour la première fois de sa vie de jeune fille, et se mit à l’appeler de sa plus forte voix, continuant à déambuler dans l’espoir de le croiser enfin…

Le jeune homme continuait d’un air décidé les réparations de son navire. Il n’entendit pas de suite les appels de son invitée. Il faut dire qu’il était dans une position assez périlleuse. Harnaché à un montant du bastingage du pont supérieur, il était suspendu dans le vide afin d’entreprendre les réparations par l’extérieur du trou dans la coque au niveau du recoin faisant office de salle d’hygiène. De son avis, c’était la cavité prioritaire à rafistoler. Au-delà de la pudeur, il pouvait être agréable d’être à l’abri des rafales de vent pour faire ses ablutions. Pendant qu’il s’affairait à enlever les planches pourries pour les remplacer par des viables ; il pouvait observer de temps en temps des petits esquifs dédiés à de la pêche de petit volume sortir du port et passer près du Phénix pour se diriger vers la baie pour leur journée de travail.

Noth était toujours en train de ruminer intérieurement quand il perçut la voix d’Audélia venant du pont supérieur. Il n’avait compris que son nom. Si la jeune fille lui disait autre chose, il n’en pipa pas un mot. Voulant continuer sa besogne sans devoir se détacher pour aller voir ce qu’elle voulait, Noth se mit lui aussi à crier pour ce faire entendre.

- Je suis occupé en bas. Vous trouverez un accès le long de la cabine à bâbord pour me rejoindre.

Obnubilé par le raccommodage de la coque, il reprit de plus belle ses efforts en attendant qu’Audélia arrive à son niveau. Il savait qu’elle n’y était pour rien concernant la malheureuse perte de ses matériaux mais, inconsciemment, il ne pouvait s’empêcher d’avoir dans un coin de sa tête un petit ressenti de colère contre elle.

Après quelques minutes, Noth vît la silhouette de son invitée se mouvoir à l’intérieur du pont inférieur. Sa tête virevoltait de droite à gauche, elle fouillait du regard l’ensemble des lieux.
Il est vrai que c’était la première fois qu’elle descendait. Elle avait dû avoir le même réflexe quand elle sortit de la cabine en découvrant la vue extérieure du navire. Le pont supérieur n’était pas reluisant de par son gréement en piteux état et ses voiles déchirées, mais comparé au pont inférieur il était comme neuf. En effet l’étage qui devait servir de lieu de vie pour un éventuel équipage était clairement en ruine. Seul le sol et le plafond était en bon état. Le reste devait être renforcé voire reconstruit.

Audelia présentait un regard plein d’étonnement, que Noth imaginait facilement remplis de stupeur. De ce qu’il avait pu apprendre d’elle la veille au soir, l’Ascanienne ne devait clairement pas avoir l’habitude de loger dans des taudis. Et clairement, l’épave du Phénix devait appartenir à cette catégorie à ses yeux.

La voyant approcher de lui, il termina d’enfoncer son clou puis la fixa du regard.

- Oui ?

- Bonjour…

- On va dire qu’il est bon oui, vu que nous sommes toujours vivants.

Il n’était pas compliqué pour la jeune fille de comprendre que son hôte faisait preuve d’un certain agacement. Elle ne pouvait pas savoir pourquoi, mais la tension palpable qu’imposaient les répliques sèches du marin envers elle, ne pouvait que la mettre mal à l’aise et ne pas se sentir la bienvenue.
La meilleure solution dans ces cas-là était d’écourter…

- Je ne voudrais pas vous déranger plus que nécessaire. Je vous remercie pour votre aide hier et si vous pouviez avoir l’obligeance de me déposer à terre, je ne vous importunerai plus.

Audélia serra machinalement les plis de son vêtement de fortune, ce qui lui rappela de rajouter à sa demande, un air un peu gêné :

- Hum… J’ai vu que vous vous étiez occupé de nos effets. Pourrais-je récupérer les miens ?

Noth l’écoutait sans dire un mot. Il savait pertinemment au fond de lui que les requêtes de son invitée étaient légitimes. Mais cet énervement constant qui était en lui depuis ce matin, semblait le forcer à être désagréable. Ne voulant de ce fait faire aucun effort, il gardait le même ton que pour ses premiers mots du jour pour la jeune fille.

- Ce n’est pas possible pour le moment. Il faut que je termine ceci avant. Ca fait depuis longtemps que ça devrait déjà être fait. Et pour vos « effets », vous pouvez toujours grimper pour aller voir s’ils sont secs si vous êtes pressée. Le vent en altitude accélère le travail en général.

Indubitablement, le jeune homme était conscient que, si l’Ascanienne prenait ses mots au pieds de la lettre, elle allait avoir toutes les difficultés du monde pour atteindre ses habits. Tout d’abord, elle n’avait pas l’habitude de ce type d’exercice et sans connaitre le gréement du navire, il y avait plus de chance de se rompre le cou en s’appuyant sur un cordage érodé que d’atteindre son objectif. De plus, la tenue actuelle qu’elle arborait n’allait pas lui permettre une grande marge de manœuvre.

Noth retourna à sa besogne. Manière de faire comprendre que tout avait été dit pour l’instant et que le programme de la journée n’était pas sujet à discussion.

Date d'inscription : 05/05/2021 Messages : 19

Ce début de journée s’annonçait sous de bon augure, malgré sa nuit cauchemardesque et son réveil en fanfare. Elle allait enfin pouvoir retrouver terre, et s’affairer à la recherche d’un logis, mais surtout partir à la recherche de son compagnon, son jeune chat qui lui avait échappé face aux prédateurs de la nuit ...

En escapade au sein du navire à la recherche de son hôte, le vent lui caressant le visage, le soleil qui n’était pas encore à son Zenith, lui réchauffait doucement les épaules. Audélia à cet instant, malgré sa tenue sommaire, se sentait libre et sereine.

Jusqu’au moment où elle avait enfin trouvé le jeune homme, qu’elle avait rejoint à l’endroit indiqué. Après quelques échanges entre eux, la jeune fille un peu désorientée par l’intonation de sa voix, tantôt froide, tantôt ironique, resta un instant perplexe ne sachant plus trop comment réagir. Pensant que la mauvaise humeur du jeune homme était dû en grande partie de sa faute, Audélia garda une apparence calme, ne voulant pas faire d’esclandre sur un terrain où elle était hébergée. Mais elle se jura qu’en terrain neutre une explication serait de mise sur le comportement de Nothjaan en son encontre ; désirant comprendre le pourquoi du comment de ce changement d’humeur radical depuis la veille.

Pour l’heure Audélia se dit que la journée risquait d’être plus longue que prévue.

• Nothjaan ! Je vous laisse à votre humeur, enfin à votre travail !! Vous saurez ou me trouver lorsque vous en aurez terminé. Je ne peux pas aller bien loin de toute façon vu le contexte…!

Sur ses mots, elle laissa donc le jeune homme tranquille, un dernier regard à l’endroit où elle se trouvait avant de quitter les lieux.

De retour sur ses pas Audélia profita du paysage qui l’entourait, respirant l’air à plein poumon afin de calmer la tempête qui la menaçait.

• Moi qui imaginais avoir trouvé un allié, voir un ami, en arrivant en ce lieu… Pauvre idiote que je suis !

Il m’a juste aidé car il ne pouvait faire autrement voilà tout !

Sur ses paroles qui lui avaient échappées, elle continua son chemin quand elle vit de nouveau leurs effets séchant au vent, elle haussa les épaules en repensant aux paroles du jeune homme quelques instants plus tôt.

Ça aussi doit bien l’amuser.

Une pensée soudaine traversa son esprit.

Et si je coupais dans ses cordages ? Je pourrai ainsi récupérer mes vêtements. Puisque je suis trop idiote pour trouver le comment faire pour pouvoir les décrocher par moi-même…!!
Allez Audélia, évite les bêtises. Encore un peu de patience…

Tout en marmonnant pour elle-même elle reprit son chemin jusqu’à la cabine où elle entra, non sans arrière-pensée !

Restant un instant à regarder de nouveau les lieux, avant de s’occuper l’esprit dans l’attente du retour du jeune homme.

Le temp semblait s’égrener lentement malgré le rangement et ménage qu’elle avait entreprit au sein de la cabine, elle avait profité également pour se faire un brin de toilette avant le retour du maître des lieux.

Durant ce temps interminable à son gout, elle décida de faire le bilan de sa besace. Assise à la table, elle vida le contenu de celle-ci, mais l’odeur pestilentielle qui en échappait lui fît ranger le tout qu’elle emporta à l’extérieur de la cabine, laissant la porte de cette dernière ouverte afin de faire rentrer de l’air frais.

Sur le pont elle trouva un endroit ensoleillé où elle s’installa à même le sol, et y vida de nouveau le contenu de sa besace. S’affairant à faire le tri dans ses effets, elle n’entendit pas les pas qui s’approchaient. C’est la voix du jeune homme qui l’a fît sursauter. Se tournant vers ce dernier, elle lui sourit timidement, espérant que celui-ci annoncerait enfin le moment du départ.

Elle vît qu’il avait avec lui leurs vêtements propres, ce qui redonna de l’espoir à Audélia de retrouver enfin une tenue décente. L’humeur du jeune homme n’avait pas changé, froidement il lui confia les habits qu’elle réceptionna en se levant écoutant au même instant les consignes d’aller se préparer au départ.

Sentant la tempête se réveiller, elle toisa le jeune homme un bref instant, mais le lieu et le moment étant mal choisi ; sa conscience lui intima de se calmer tant qu’ils ne seront pas sur la terre ferme pour une explication à son comportement.

Lui tournant le dos, sans un mot, elle prit la direction de la cabine. La voix du jeune homme lui donnant rendez-vous prêt de l’embarcation raisonna dans les airs à cet instant. Sans se retourner, continuant son chemin, elle fît signe de sa main libre qu’elle avait compris.

Quelques temps plus tard, Audélia avait rejoint l’embarcation et son occupant qui l’attendait de pieds ferment. La traversée se fît dans le calme jusqu’au rivage. Les pieds sur terre Audélia se tourna vers le jeune homme.

• Vous allez être débarrassée de ma présence désormais, mais j’aimerai avant tout avoir une explication sur la raison de votre comportement envers moi depuis ce matin ? Si j’ai fait quoi que ce soit de répréhensible je veux savoir... dit-elle sur un ton aussi froid qu’elle le pouvait.

• Je n’ai pas souvenir d’avoir été désagréable envers vous ? Dans tous les cas, je tiens malgré tout à vous remercier encore une fois de votre aide. Sans vous j’ignore où je serai à cette heure. Mais voilà je pense que l’aventure s’arrête ici. Vous allez pouvoir retrouver votre liberté ; et de mon côté, je vais aller vivre ma vie.

Puis sans attendre, Audélia tourna les talons pour rejoindre l’auberge, mais aussi afin que le jeune homme ne découvre pas l’émotion qui pouvait se lire sur son visage. Elle s’était habituée à sa présence et pensait s’être trouvé un ami. Mais les derniers événements lui fient sentir que le jeune homme, plutôt solitaire, ne dévoilerait pas si facilement la raison de son comportement…