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Claircombe  :: Titre :: Quartier Ascanien :: Un Ascanien, même aimable, n'en reste pas moins un Ascanien... [PV Ernst] ::
Un Ascanien, même aimable, n'en reste pas moins un Ascanien... [PV Ernst]
Raina Visenrov
Raina Visenrov
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Sam 14 Nov - 17:46
7ème jour, Premier mois de l'Automne, An 82





Tout semblait s'accorder pour dire qu'on était bien loin d'une journée idéale pour une milicienne Utgardienne.
D'abord, il faisait frais en cette fin d'après-midi de début d'automne. Le temps n'était pas spécialement mauvais : heureusement, il ne pleuvait pas... Mais un vent glacial balayait Claircombe par bourrasques, qui vous gelait instantanément, mordait la peau, décoiffait chacun et brûlait la gorge et le nez si, d'aventure, vous n'aviez pas de quoi vous couvrir lorsque le souffle terrible du ciel vous fouettait le visage. C'était désagréable au possible et beaucoup préféraient rester bien au chaud et à l’abri chez soit plutôt qu'à flâner dans les rues.
Mais il était des gens pour qui ce choix de confort n'était pas de mise... Pour les gardes, par exemple.

Ensuite – et cette partie était bien le comble -, fallait il vraiment qu'on lui affuble une tâche aussi détestable, comme pour enfoncer encore un peu plus le clou ? Car pour ce jour, Raina avait été envoyé en patrouille : simple ronde parmi les citoyens pour s'assurer que l'ordre était bien respecté et que rien de d'inconvenant n'était entrain de se produire. Pas bien grave, le quotidien d'une milicienne, direz vous... Oui, mais le lieu était un choix discutable : car c'était dans le quartier Ascanien que la jeune femme devait effectuer sa besogne quotidienne...
Une représentante Utgardienne, lâchée au milieu de la population Ascanienne... Vous voyez ce que je veux dire ?

Raina, comme à l'accoutumée vêtue de son armure de la garde de Claircombe, portait à sa ceinture sa hache et dans son dos son bouclier. Ses cheveux sombres étaient ramassés en deux tresses, qui retombaient de part et d'autres sur ses épaules. Sa petite taille, son jeune âge et le petit air poupon que les deux lui conféraient, étaient compenser par un regard sombre, dédaigneux et méprisant, qu'elle posait immanquablement sur chaque personne qui avait malheurs de la dévisager un peu trop. Son attitude, militaire, fière et qu'on devinait féroce, trahissait son potentiel au combat et un caractère bien trempé d'Utgardienne, peu enclin à se laisser marcher sur les pieds.
Ce qui, bien évidemment, ne lui attirait pas la sympathie de ses ennemis naturels qui pullulaient tout justement dans les environs, puisqu'il s'agissait tout justement là de leur habitat naturel.

Vous direz sûrement : « Oui mais, en entrant dans l'armée de Claircombe, la milicienne n'a-t-elle pas prononcé des vœux disant tout justement qu'elle ne ferait aucune différence avec les autres sangs de la ville, et deviendrait parfaitement impartiale ? ». Oui, bien sûr... C'est beau de rêver... Les habitudes ont la vie dure, l'éducation et les souvenirs aussi... Et si elle était prête à faire bien des efforts, c'était comme viscéral : les Ascaniens restaient pour elle un peuple tout bonnement haïssable.
Ils le lui rendaient bien, d'ailleurs, lui lançant des regards mauvais et méprisant en biais, s'agaçant de sa présence, se moquant même d'elle dans son dos...
Raina n'était vraiment pas de bonne humeur, et ne manqua pas de rappeler à l'ordre quiconque osait enfreindre un tant soit peu les règles en vigueur de la ville.

La journée passa lentement, très lentement. Et entre les civils qui lui semblaient tous bien hostiles et le vent mordant son visage blême, il tardait à la milicienne de regagner la caserne pour se réchauffer et manger un morceau. Elle avait un sentiment d'injustice profond quant à sa présence dans ce quartier, comme si l'on l'avait puni pour une bêtise qu'elle n'avait en vérité pas commis.
Mais sa garde ne promettait pas de se finir tout de suite...

Alors que la déception de n'avoir aucun réel litige à se mettre sous la dent laissait finalement place à un sentiment de lassitude profond, Raina qui patrouillait lentement, mais alerte, dans la rue entrevit non loin un visage qui ne lui était pas tout à fait inconnu.
Très grand et imposant, l'homme discutait de manière animée avec un autre Ascanien qui semblait bien contrarié. Ces cheveux châtain, ces yeux verts et cette morphologie si particulière... Bon sang, elle était sûr de l'avoir croiser à plusieurs reprises...
Il fallut un instant à Raina pour remettre un nom sur ce visage, temps durant lequel elle plissa les yeux de concentration. Il lui revint tout subbitement.
Ernst Grison-Ebermann, préfet de la rue du Cloître, cavalier et tenancier d'une menuiserie... Et de surcroît, un Ascanien, lui aussi.

Non, la milicienne ne le connaissait pas personnellement. Ils s'étaient déjà croisés et entretenus dans des affaires concernant la surveillance de la rue sur laquelle il avait autorité. Ils n'avaient jamais eu de conversation réelle, et même s'il ne s'était avéré ni désagréable dans ses paroles et son attitude, ni physiquement pour le reste, elle ne s'en portait pas plus mal.
Un Ascanien, même aimable, n'en reste pas moins un Ascanien...

La brune allait se détourner de son observation quand le sort en décida autrement. Par le fruit du hasard, sans doute, le préfet tourna ses prunelles émeraudes en sa direction. Leurs regards se croisant, il parut évident à l'Utgardienne qu'elle se devait de se montrer courtoise, en raison de ses titres, et ne pas poursuivre seulement son chemin en l'ignorant tout à fait. Aussi, un minuscule sourire aux coins des lèvres, elle lui fit un petit signe de tête en guise de salutation...
Ernst
Ernst
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Dim 22 Nov - 22:29

Ernst, le temps est venu.
Il regarda les oeufs brouillés dans son assiette qui n’en finissaient pas de se disperser sous sa fourchette. La vieille avait sonné l’hallali, les jeunes soeurs tournaient leurs regards et leurs silencieux jugements vers lui. Un épuisant combat perdu d’avance touchait à sa fin ; il avait déjà perdu, deux fois. Et jamais deux sans trois.
Au début je misais sur le désespoir de quelques pauvresse, mais c’est peine perdue. Ta réputation te précède alors nous allons nous tourner vers d’autres horizons. Les femmes amaranthis sont bien trop vulgaires pour l’idée dans avoir une un jour à cette table soit supportable. Voir un de ses dragons digérer de ses dents crochues notre héritage, ça jamais ! Alors ne nous reste que les vauriennes d’Hurlsk, au moins celles-là, elles ne savent pas compter, la paix.
Le couperet tombait. La vieille sceallait son destin : il allait devoir choisir une nouvelle femme.
Alors j’ai discuté avec monseigneur le cardinal qui a bien voulu me recevoir en audience à ton sujet.
Le couperet retombait : quelqu’un allait lui choisir une nouvelle femme.
Il a longuement réfléchit - la perpétuation de nos valeurs et de notre sang est une priorité -, et il m’a proposé une liste de nom qui pourraient convenir que voici. Réfléchis-y avec soin, ce n’est pas une chose aisée et c’est très important.
Une liste sortait d’un tiroir, d’une belle écriture, avec des noms de femmes, des descriptions de leur situation.
D’ailleurs, ce serait une erreur de dire comme ça, sur un coup de tête laquelle te plaît le plus. Prend ton temps. Laquelle éliminer en premier ?
Ah mais perfidie ! C’est à ce point ? Pas mieux ? Vous m’en proposez même une dans la garde, Quelle horreur !
La vieille fit sortir sa langue pensivement.
Celle-ci… hum. Très bien, nous la prenons.
Mais vous venez de me dire d’en éliminer une…
Oui, il ne faut pas d'attaches, l’amour dans un couple est perfidie.



Ainsi se retrouvait notre ami préfet au coin de la rue en fin d'après-midi. Il avait envoyé son ami Buckhart à la pêche au infos et savait enfin où trouver la belle. Ernst s'était déjà fait une raison, il s’était mis pour l’occasion dans sa tenue la plus flatteuse, celle du cavalier Ascanien. Ernst n’était jamais autant à son avantage qu’en portant du cuir, et il le savait. C’est ainsi qu’il alla trouver l’élue sous la conduite de son ami.
— Elle arrive, mais êtes vous sûre qu’elle en soit digne ?
Ce n’est pas moi qui ai choisi, mais qu’importe. Peu me chaut quelle dinde sera fourrée pour les fêtes.
— Tout de même quel gâchis, vous qui êtes un parangon de l’amour courtois, gâcher cela pour une utgardienne.
Il suffit Buckhart, ma décision est prise.
— Mon ami, n’y a-t-il pas d’autres chemin ?
Il n’y en a point, la vieille a parlé.
Buckhart se détourna, une larme au coin de l’oeil.

Le préfet était plus qu’un sage, c’était un vétéran de l’amour. Il avait connu plusieurs champs de bataille et l’ennemi ne l’intimidait plus. Il était loin cet Ernst naïf à l’affût de la Providence dans l’hymen. Dans la recherche de l’être parfait, chercher une femme était déjà une compromission ; de là, il comprenait que toute espérance était vaine. Celle-là au fond n’était pas pire qu’une autre, elle aurait pu ressembler à quelque chose habillée convenablement et à chanter dans une chorale de l’Eglise. Sous son équipement, elle avait le genre qu’ont toutes les femmes dans le métier des armes, son allure hurle : “à défaut d’avoir une légitimité, je manie une épée”. Et de là toujours leurs grimaces et leurs intimidations, autant d’aveux de faiblesse. Son origine païenne était sur sa face mais le préfet n’était pas du genre à juger durement. La mode utgardienne était d’être bas du front, ajoutez les peaux de bêtes et vous aviez résumé leur civilisation ; il fallait pourtant faire avec et  s'épargner toute calomnie gratuite.

Cette courge ne pouvait avoir de meilleure perspective de mariage que lui alors l’affaire ne prendrait pas plus que quelques minutes. La concurrence possible, ce serait un mari utgardien à qui elle ferait les couettes ou une bleusaille de la garde qui lui obtiendrait du rab’ à la cantine. Pour n’importe quelle potiche de son genre, il était l’espoir inattendu capable de conquérir les coeurs par sa générosité. Elles étaient là, petites choses cachées derrières des singeries d’indépendance à attendre la vraie sécurité et lui arriverait avec sa situation, sa fonction, et sa menuiserie qui avait plusieurs employés. Il y avait de quoi faire plier la volonté de n’importe quelle petite garde occupée tout le jour à se balader en arme. Elle était déjà amoureuse, elle n’avait plus qu’à se l’avouer.

En s’approchant d’elle, sa paire de tresses lui rappelait le discours d’un utgardien saoul qu’il avait mis en geôle : “Les deux nattes, c’est pour se faire prendre en saillie comme les chèvres”. Encore aujourd’hui, Ernst restait perplexe de cet aveu. Il concluait néanmoins que les utgardienns étaient férues de crudité et de propos explicites. Cela n’effrayait pas le préfet, de ce côté là, la vie lui avait donné une très solide expérience et il en savait plus que la plupart. Dans sa fougueuse jeunesse sa femme, il avait même fait la chose en face à face.

Pour l’heure, il allait attaquer sans concession. Il approcha de la jeune femme sans se soucier du reste pour être très direct. Rien ne ressemblait plus à une déclaration d’amour qu’un combat de boxe, sa diction était comme son punch.
Direct gauche - Sans concessions.
Vous êtes Renée ?
Pas de côté, direct gauche - approche virile
Je suis un homme,
Très gros direct droit - appât irrésistible
cavalier ascanien
Crochet gauche fatal dans les cotes flottantes - explosion de crudité :
et je commande une menuiserie.
Si avec une telle déclaration elle ne comprenait pas où il voulait en venir, elle était bête à manger du foin. Il l’acheva courtoisement.
Crochet droit dans le foie.
Je suis Ernst.

Enchaînement parfait, arguments affûtés. Un peu trop crût et vulgaire, mais elle était utgardienne. Elle était donc conquise.
C’était plié. Elle allait rougir, remercier le ciel et plus qu’à trouver une date.
Raina Visenrov
Raina Visenrov
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Mer 2 Déc - 23:44
Raina, après son bref salut, s'apprêtait à reprendre sa ronde sans plus s'occuper de l'Ascanien. Elle allait d'ailleurs détourner le regard, et son sourire n'avait été forcé que par pure courtoisie, pour ne pas paraître hostile au préfet qui était, contrairement à elle, dans son habitat naturel. Mais les yeux de celui-ci, fixement posés sur elle, lui mirent un doute quant à la brièveté de cet échange. Il ne répondit d'ailleurs pas, se contentant de la regarder en répondant à son interlocuteur.
L'Utgardienne n'entendait et ne devinait rien de ce que les deux hommes étaient entrain de se dire – et ce n'était pas plus mal!-. Mais l'un semblait contrarié, l'autre résolu. Et même si elle ignorait tout de l'affaire, le fait qu'il ne décrocha pas son regard d'elle ne lui inspirait rien qui vaille.
L'autre homme s'éloigna, le visage décomposé par une tristesse dont elle ne savait rien. Le préfet, quant à lui, avait toujours les yeux rivés sur elle. Il bougea...

Raina ralentit son allure, prise d'un doute. N'était ce qu'une impression, ou l'Ascanien venait en sa direction ? Son pas était résolu, presque conquérant. Il clignait à peine, regard fixé vers elle... Plus il avançait, plus la crainte s'avérait être fondée...
Pourquoi diable approchait il ?

La milicienne s'arrêta tout à fait, fronçant légèrement les sourcils. Qu'est-ce qu'il pouvait bien lui vouloir ? Avait ce un rapport avec la morosité de son interlocuteur, suite à leur discussion animée ? Sur quel problème allait elle encore atterrir ? N'aurait il pas pu se contenter de rester dans son coin, à l'ignorer ou à répondre à peine, avec toute la sympathie dont les gens de son peuple et de son rang étaient capables ?
Non, il fallait qu'il s'approche. Il fallait qu'il vienne vers elle.

Elle, elle n'avait aucune envie d'avoir à faire à lui.
Simple racisme Utgardien à Ascanien, direz vous ? Mais comment vouliez vous qu'elle l'apprécie, lui qui se pavanait presque au milieu de ses semblables ? Lui qui s'avançait, avec la démarche d'un lion dominant sa proie. Se pensait il être le coq, au milieu de la basse cours ? Mais du coq, il n'avait que tout au plus la crête, et ses manières hautaines étaient des plus agaçantes à la vue de la milicienne dont le regard s'assombrit d'une lassitude évidente. Pourquoi fallait il que les gens de ce peuple soient si... méprisables ? Et ce même avant de n'avoir prononcé le moindre mot.
Comment vouliez vous qu'elle parte avec un bon sentiment, alors qu'il n'avait pas même daigné répondre à sa salutation, et qu'il venait vers elle pour X problème dont elle n'avait cure, étant donné qu'ils concernaient un ensemble de personnes aussi appréciables que ce bon préfet ? Lui qui ne semblait manquer de rien, de toute évidence, de ses vêtements propres et raffinés, à sa carrure d'homme ne criant pas famine ?

Les Ascaniens se pensaient tous supérieurs... Pourtant ils n'étaient que des lâches et des traîtres, vivant aux dépends des autres. Ils sacrifiaient des peuples entiers, juste pour leur gloire. C'était des personnes sans honneurs, sans paroles, pas plus respectables que des rats. Ils étaient un poison... Une gangrène pour tout ceux qu'ils n'étaient pas de leur sang. Ils se croyaient tout permis, vaniteux et arrogants.
Ils n'apportaient rien de bon. Que de l'injustice et de la souffrance.
Alors comment vouliez vous qu'elle l'accueille, sourire aux lèvres, de son humeur la plus légère ?

Elle n'était pas bonne actrice. Ce n'était de toute façon pas son rôle. Et quand bien même se montrait elle cordiale, il est des choses que leur deux sangs décidaient d'avance pour eux.
Ils n'étaient tout simplement pas fait pour s'entendre, dès le départ.

Il s'arrêta net face à elle, droit et fier, la dominant de toute sa hauteur, plantant un regard émeraude emplit d'une confiance excessive dans ses yeux à elle, un petit sourire éclairant son visage soigneusement entretenu des cheveux à sa barbe. Et si tôt, elle eut la conviction que la haine que lui avaient inculqué ses aînés à propos des Ascaniens était tout ce qu'il y avait de plus légitime.

Et ce n'était encore rien, comparé à lorsqu'il ouvrit finalement la bouche. Rien que cette voix, grave, dure, mais qui avait presque une dimension charmeuse, suffisait à irriter la jeune femme qui posa sur lui un regard farouche.
Elle n'était pas au bout de ses surprises, ni de ses peines. Car si elle pensait qu'il venait la voir pour une quelconque affaire en rapport avec la justice ou le militaire, la discussion était plutôt... Énigmatique. Ca ressemblait vaguement à des présentations... Mais des plus arrogantes et peu courtoises. Il semblait la prendre de haut, d'autant plus qu'il avait écorché son prénom. Détestable attitude...
Et encore, elle était bien loin de se douter de la véritable envergure des choses, ni d'à quel point le personnage qui lui faisait face aurait pu lui paraître désagréable.

Abasourdie, Raina resta un instant les yeux grands ouverts en une expression de surprise, à le dévisager. Les mots lui manquaient, il l'avait prise de court. Finalement, s'éclaircissant la voix d'un petit raclement de gorge, la milicienne reprit son expression peu chaleureuse habituelle, à laquelle s'était un agacement mal contenu et dissimulé.
Elle ne savait pas bien pourquoi, mais elle avait une furieuse envie de remettre le préfet à sa place, comme s'il avait s'agit d'un combat où ils n'avaient pour seul arme que leur parole.


- Euh, oui... Tout d'abord, c'est RAINA, et non Renée.

Elle appuyait volontairement sur les deux prénoms, comme s'il s'agissait de deux parades effectuées simultanément d'un côté puis de l'autre.

- Ensuite, il me semble assez évident que vous êtes un homme. - Pour ne pas dire, un Ascanien ! - Je ne vois pas l'utilité de le préciser.

Elle employait un petit ton condescendant et cassant, pour le tourner au ridicule, et son regard le détaillait de bas en haut avec mépris, tel un crochet balancé en plein milieu de sa fierté masculine.

- Et vous me voyez ravie d'entendre que vous faites partie de la cavalerie Ascanienne, comme de votre propriété d'une menuiserie. Mais à vrai dire, j'en étais déjà informée, puisqu'à plusieurs reprises vous et moi avons déjà eu à faire l'un à l'autre...

Une arrogance évidente dans la voix, elle esquivait tout simplement dans un faux semblant de politesse...

- … Ce dont vous ne semblez bien évidemment pas vous rappelez, Ernst Grison-Ebermann.

… Avant de répliquer d'un méchant coup en plein dans l'estomac. Elle plongea un regard noir et fusillant dans ses prunelles vertes.

- Et si vous n'avez rien de plus à l'idée que celle de me faire la conversation, vous devinerez peut être à ma tenue que je ne suis pas venu ici – de son plein gré ? - en ayant pour seul objectif que celui de vous tenir compagnie. Je suis garde, pour information, et j'ai à faire.

Un coup de botte, éjecté du ring : victoire, aurevoir et bonsoir !
Sur ces paroles, elle se détourna, non sans un nouveau regard hostile, et reprit d'un pas fier bien que tremblant. Tremblant ? Oui, disons que l'idée lui avait étrangement traversé l'esprit de lui sauter au cou... Mais pas pour des mamours. Et se retenir provoquait en elle des spasmes difficilement contrôlés.
Ah ! La cordialité interraciale..

Au final, la milicienne n'avait pas la moindre idée de ce qu'il avait bien pu lui vouloir. Mais puisque ça ne semblait pas concerner un problème relatif à la justice, à l'ordre, à la sécurité ou à la politique, ce n'était tout bonnement pas son problème. Et puis, il avait eu don de l'agacer, dans ce simulacre de présentation arrogante, alors qu'en plus de cela ils se connaissaient déjà.
Grinçant des dents, elle siffla plus pour elle même que pour son interlocuteur laissé sur le carreau :


- Ces Ascaniens... Ils vont vraiment finir par me rendre chèvre !
Ernst
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Jeu 3 Déc - 22:24

Alors elle a dit quoi ?
Je crois que je l’ai surestimée, soupira Ernst.
Toute la famille attendait patiemment son rapport, ses petites soeurs étaient très à l’écoute des choses touchant au mariage, désespérées qu’elles étaient de ne jamais l’être elles-mêmes.
Je n’ai pourtant pas fait subtil, j’ai été aussi clair qu’on peut l’être, presque vulgaire. Et elle est restée là, sans comprendre, à marmonner des choses.
Elle a dit quoi ?
Roh des trucs de bonne femme.
Un peu de précision Ernst !, s’agaça la désagréable vieille
Bah c’était à base de “je suis pas Renée, mais Roniette, enfin “Renée” prononcée à l’utgardienne quoi. Rénéj.
Reneudj, proposa une soeur.
Rheinardt, suggéra une autre.
Oui, bah je vais pas vous prononcer ça correctement moi, vous n’espérez pas que la poule fasse caqueter le loup.
Mesdemoiselles, arrêtez de vous ridiculiser à singer les nasillements des quartiers nord. Toi Ernst, qu’est-ce qu’elle a dit d’autre ?
Bah, elle a rien compris.
Mais comment ça elle n’a rien compris ? Tu lui as dit que tu avais une menuiserie ?
Oui…
Hihihi, ricanaient les sœurs mises un peu mal à l’aise par la crudité des avances.
Avec des employés ?
avec des employés.
Hohoh, les joues des jeunes filles étaient très rouges.
Et elle a dit quoi ?
Qu’elle le savait.
et… ?
Et elle est partie.
Nooon ? S’étonnèrent les soeurettes.
Elle est partie ? Mais comment ça elle est partie ?
Elle n’a rien compris.
Oh ! Providence nous enseigne que ces urgardiens sont bêtes ! Mais tout de même !
C’est à vous désespérer.
La vieille réfléchissait tandis que Ernst se lamentait.
Bonne bête, bonne brue.
Pardon ?
Elle est bête, c’est un fait. Je trouve ça très bien. Tu vas y retourner. Il nous la faut.
C’est obligé ?
Bah, on va pas obtenir une étincelle en frottant deux andouilles, je vais m’en occuper.

Ernst regardait sa vieille, elle avait les yeux qui brillaient d’une lueur mauvaise.
Je vais voir le cardinal.


Quelques jours plus tard, un courrier parvenait au commandant Auguste Degure.

Commandant,

J’ai le regret de vous informer du trouble subit par notre quartier par l’action de l’un de vos gardes.
En effet, les épanchements amoureux de Raina Visenrov
(l’auteur maîtrisait l’orthographe Utgardienne, mais prononçait en privé “Renée Vuizeuse”, comme tout le monde) à l’encontre du sieur Ernst Grison-Ebermann ont suscité un désordre dans l’ordre public. Il y a certains mots, certains gestes, qui ne doivent pas être faits sur la voie publique ; lorsque les personnes s’y adonnent pourtant sans être unie dans un temple, c’est grande Perfidie. Les bonnes moeurs sont une priorité et nous attendons que Providence soit respectée de toute personne en l’enceinte de notre quartier, à fortiori celles y exerçant l’ordre public. J’ai reçu plusieurs plaintes de mères qui apprécient fort peu l’implantation des pratiques désinvoltes du garde Visenrov. Son outrecuidance sans borne envers l’honneur et la vertu du sieur Grison-Ebermann nous paraissent irréconciliables avec les valeurs de noblesse et de respect que véhicule la garde. C’est pourquoi j’ai la tristesse de devoir vous informer de la situation et d’exiger la révocation de cette personne.
Vous et moi nous connaissons, vous savez ma probité et mon engagement pour le bien commun ; je préfère garder cette histoire privée et ne pas nuire plus que nécessaire à ceux qui en sont acteurs malgré eux. Malheureusement, je ne vois pas d’autres issues, à défaut de pouvoir faire retrouver la morale à l’agresseur et sa victime dans le mariage, mais je doute fort que l’honnête famille Grison-Ebermann accepte une telle issue. Je puis leur en parler, mais une entente serait un miracle de Providence. La révocation me semble inévitable, je vous sollicite pour que l’affaire se fasse en toute discrétion, sans quoi je devrais en référer au Gouverneur Krox lui-même et me voir extirper votre nom dans un moment désagréable.
J’attends votre réponse.

Que Providence veille sur vous
.”

Il était écrit et signé de la main du cardinal des ascaniens.


Tandis qu’Auguste Degure se faisait des rides au fond de sa caserne, une voix anonyme de la rue du Cloître venait troubler la nouvelle garde de Raina :
— Sale morue ! Faire tant de mal à un brave homme !
C’était la jalousie d’un Buckhart révolté. La foule acquiesçait, tout le monde savait ou croyait savoir quelque chose.
Raina Visenrov
Raina Visenrov
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Métier : Garde de Claircombe
Dim 13 Déc - 19:50
Raina, quant à elle, était bien loin de se douter de la missive qui venait d'être remise à son supérieur, Auguste Degure, et qui faisait mention d'un comportement déplacé de sa part à l'égard de Môsieur Grison-Ebermann. Elle n'était pas plus au fait de l'ultimatum lancé sur elle, de la menace planant sur sa tête, ni des manigances à son encontre, orchestrées dans les plus beaux quartiers de la ville. Comment aurait elle put ne serait ce que l'imaginer, d'ailleurs ? Elle qui n'était qu'une soldat, Utgardienne de surcroît... Comment aurait elle pu se figurer n'être que la marionnette d'un complot marital, visant à redonner à une haute famille Ascanienne de quoi perdurer encore dans leur lignée ? D'ailleurs, si tôt l'avait elle remis à sa place que la brune en avait déjà oublié Ernst.
Pour l'heure, c'était encore dans une relative insouciance que notre milicienne passait ses jours, enchaînant ses gardes et ses entraînements sans voir pointer au loin le terrible orage...



* * *


Ce matin-là, c'était à nouveau avec un grand déplaisir qu'elle avait accueilli son assignation. Quartier Ascanien, de nouveau. Pourquoi elle ? Degure ignorait il toute la rancœur que ces « gens » nourrissaient à l'égard d'une figure d'autorité Utgardienne ? Ne voyait il pas combien il était dur pour elle de progresser dans ces rues, au près d'un peuple qu'elle ne pouvait tout bonnement pas voir en peinture ? C'était la mine boudeuse qu'elle s'était rendu sur les lieux, car inutile de remettre en question les décisions de son supérieur. Sa position de femme, son jeune âge combinés à sa petite taille, lui fermaient toutes portes de discussion.
Encore que, Auguste devait s'en être bien mordu les doigts, en recevant son courrier du jour, à peine une heure après son départ...

Mais il était loin d'être la personne qui passerait la plus mauvaise journée d'entre les deux.
Raina, à peine arrivée dans le quartier Ascanien, sentit que les habitants s'y trouvaient plus hostiles encore qu'à l'accoutumé. La dernière fois, ils l'ignoraient, lui jetant un regard discret et hautain tout au plus. Cette fois-ci, c'était différent...
Nul ne détournait les yeux sur son passage et – peut être était ce dû à une forme de paranoïa anti-ascanienne -, mais il lui semblait que tout ce joli monde parlait à voix basse, se confiait des cachotteries dont elle ignorait tout, mais qui devaient sans nul doute être à son propos. Naturellement, cette impression mettait l'Utgardienne plus que mal à l'aise : elle s'en sentait vexée, intriguée, presque menacée. Pour peu, elle se serait méfier d'un possible soulèvement, mais fort heureusement... Ce n'était qu'un peuple de couards et sans honneur, elle ne craignait pas grand chose de leur part.

Le vent soufflait anormalement fort en cette matinée, et il n'avait de cesse de libérer de longues mèches de cheveux sombres de sa coiffure faite à l'arraché. Raina maudissait ce temps, et ces lieux qu'elle détestait purement, ainsi que toutes les personnes déplaisantes qui en peuplaient les rues.
Jetant un regard noir aux passants qui s'arrêtaient pour faire des messes-basses en la fixant, l'Utgardienne corrigeait son chignon négligé lorsque le glas de la véritable Perfidie commença, enfin, à résonner à ses oreilles.


- Sale morue ! Faire tant de mal à un brave homme !

La brune, mains levées pour ajuster les mèches rebelles de ses cheveux, se stoppa nette dans sa ronde. Elle pivota, cherchant des yeux le trouble fête qui avait parlé, et ne tarda pas à le débusquer. L'homme, furieux, se tenait poings serrés et sourcils froncés. Et si elle s'était attendu à le voir vociférer à l'encontre d'une quelconque autre tiers personne, il plantait fermement son regard haineux sur elle, le menton fièrement levé dans un signe de mépris des plus certains.
La soldat, malgré une expression d'un naturel peu commode, ne put s'empêcher de cligner des yeux d'incompréhension. De quoi parlait il, cet imbécile ? Elle n'en avait pas la moindre idée. Mais plus inquiétant encore... La foule, elle, semblait parfaitement savoir de quoi il faisait mention. Des acquiescements de têtes, des « C'est bien dit ! », et un tonnerre d'autres « morue » courant dans l'assemblée qui s'était pour l'occasion arrêter dans toutes ses occupations, grondaient à proximité de la scène, tous en chœur. La milicienne les balaya un à un d'un regard abasourdi. Qu'est-ce qui se passait, d'un seul coup ?
Peut être, qu'en fin de compte, elle n'était pas tant que ça en sécurité, là au milieu...
Ramenant doucement sa main sur le pommeau de sa hache, elle finit par reposer les yeux sur son interlocuteur après plusieurs secondes d'un silence gêné.


- Pardon ? Puis-je savoir ce qu'il vous prend de vous adresser à un garde de la sorte ?
- Tu le sais très bien, garce !


Cette fois, la voix était celle d'une femme, perdue dans la foule, et qu'elle ne parvint pas à détecter en jetant un regard hostile, mais bref.
La lèvre de l'homme tremblait, tant sa rage était évidente.


- Comment oses-tu revenir ici, après ce que tu as fait ?

Raina, elle aussi, sentait la colère lui monter au nez. D'autant qu'elle n'y comprenait rien, et ne rien comprendre avait dont de l'énerver – comme beaucoup de choses, je vous l'accorde -.

- Mais de quoi parlez vous, bon sang ?! Expliquez vous !

Son interlocuteur, menaçant, s'avança d'un pas dans sa direction. L'Utgardienne resta immobile et droite, souhaitant véhiculer une image forte et sure d'autorité certaine. Sa prise, pourtant, se resserra sur son arme. Il pointa un doigt accusateur sur elle, sifflant entre ses dents :

- Ne fais pas l'innocente ! - pour peu, on sentait qu'il était tenté d'ajouter un « chienne d'Utgardienne » qui lui aurait sans doute coûté les fers – Nous avons tous été témoin de ton comportement outrageux à l'égard de notre préfet !
- De votre préfet ? … Grison-Ebermann ? Qu'est-ce que vous me chantez là ?
- Aguicheuse ! Trainée !


Raina était complètement dépassée. Son regard allait en tout sens, aussi véhément de colère que d'incompréhension. Les insultes allaient bon train, pendant plusieurs secondes où elle se sentait tout bonnement acculée, craignant d'un seul coup que les couards, sous l'effet de groupe, en viennent aux mains et qu'elle dû s'en défendre seule. Et puis, elle ne comprenait toujours pas un traître mot de ce qu'on était entrain de lui reprocher. Finalement, elle retourna son attention sur le plus courageux d'entre eux. S'il brûlait d'une haine évidente, au moins avait il mérite de répondre quand elle lui posait une question.

- De quel comportement outrageux m'accusez vous ?
- De t'avoir donner en spectacle, de part tes minauderies
– mot qu'elle ne connaissait pas – et propos déplacés, et d'avoir tenter de pervertir notre si respecté préfet, Ernst Grison-Erbermann ! Et en publique, en plus ! Tu n'as pas honte ?!

Là, c'était le chaos dans l'esprit de la jeunette. Elle revoyait la brève entrevue qu'ils avaient eu, avec le cavalier Ascanien, lors de son dernier passage dans ce quartier. S'il avait été en effet des plus étranges et déplaisants, elle n'avait pas souvenir d'avoir fait ou dit quoi que ce soit de tendancieux, susceptibles d'être mal interprété. Une fois encore, c'était une grande incompréhension qu'on pouvait lire sur le visage de la malheureuse, qui continuait de se faire insulter à tout va par des anonymes qui prenaient soin de rester dissimuler dans la foule.
Raina grinçait des dents. Ce ne pouvait être qu'une erreur... C'était tout bonnement grotesque. Des racontars de bar, des rumeurs sans fondement... Mais l'ennui, avec la voix du peuple, c'est qu'elle va en s'accroissant, et si elle revenait aux oreilles des plus hauts placés, elle pouvait faire des dommages conséquents.
Au fond d'elle grondait une colère sourde, car elle avait bien conscience que tout bruit qui court avait une source. Et elle en voyait difficilement une autre que celle d'un Ascanien, meurtri d'humiliation et de vexation, souhaitant se venger en la tournant au ridicule.
L'Utgardienne grogna entre ses dents.


- Je vais éclaircir cette méprise, et vite ! Où se trouve votre préfet, à cet instant ? Je dois lui parler sans tarder.
- N'as-tu pas déjà fait assez de mal ? Reste éloigner de lui !


En deux pas résolu, elle attrapa l'homme par le col. Elle était certes petite et jeune, mais elle avait une poigne de combattante. Son interlocuteur en perdit toute sa contenance.

- Parle, avant que je donne à ton peuple de quoi alimenter ses potins.
- D'a... D'accord... Il... Il doit être dans sa menuiserie ce matin !


Sans accorder un mot de plus à son opposant, elle le relâcha dédaigneusement et prit sans tarder la direction de la menuiserie. La foule, sous son regard assassin, s'écarta pour la laisser passer.
Les langues de vipères ne reprirent qu'une fois qu'elle fut suffisamment éloignée pour ne pas pouvoir porter son courroux sur leur déplaisante personne.



* * *


Sur le chemin la menant à la menuiserie, la moutarde était encore un peu plus montée au nez de l'Utgardienne. C'est d'un pas lourd, emprunt de colère, qu'elle passa la porte de l'établissement en faisant fit des réserves des deux employés à l'entrée. Ses yeux noirs cherchaient rageusement autour d'elle le tenancier des lieux.
Un malheureux ouvrier l'approcha, soucieux et méfiant.


- Vous cherchez ?
- Ernst Grison-Ebermann.
- Vous aviez rendez-vous ?


A sa voix, on devinait qu'il en doutait fortement. Elle lui jeta un regard assassin, et l'écarta de son chemin d'un geste ferme de la main. Après tout, elle était en tenue officielle... Ascanien ou non, et elle Utgardienne ou pas, il n'en était ni plus ni moins qu'un civile et elle une représentante de l'autorité.

- Je dois le voir immédiatement. Et je n'ai pas de temps à perdre en politesse.

Elle lui passa sous le nez et il fut bien impuissant de la retenir.
C'est alors qu'elle le vit au loin, discutant avec plusieurs de ses employés. Il était tout sourire, l’insouciant. N'avait il pas flairer la tempête qui s'apprêtait à s'abattre sur lui ? Sa bonne humeur évidente n'avait que don d'exaspérer un peu plus la jeune femme qui traversa la menuiserie jusqu'à lui d'un pas rapide et fermement décidé à tirer les choses au clair. Peu avant d'arriver à son niveau, elle lança d'une voix forte et d'un ton des moins commodes possible.


- C'est quoi ces histoires, Grison-Ebermann ?

Au diable les bonnes convenances et les grades ! Elle n'aimait pas cet homme, et encore moins à présent. Elle était bien convaincu que c'était lui qui avait lancé ces rumeurs et elle contait bien lui apprendre de quel bois elle se chauffait ! (Ahaha... Menuiserie... Bois... C'est drôle ! è_é)
Ses associés écarquillèrent des yeux surpris, et reculèrent d'un pas. Il fallait dire que l'attitude de la milicienne semblait, de l'extérieur, des plus hostiles. Elle se planta tout devant le cavalier aux yeux d'émeraudes, les bras croisés sur son plastron. La différence de taille entre eux deux l'obligeait à lever la tête bien haute, mais cela ne semblait pas déranger la soldat qui plantait un regard noir dans celui de son interlocuteur.


- On peut savoir pourquoi tout le quartier Ascanien est persuadé que je vous fais des avances, et pas des plus distinguées, par-dessus le marché ?

Bien sur qu'elle le prenait de haut, à cet instant. Bien sur qu'elle se fichait éperdument qu'il y ait des témoins de cette querelle. Bien sur qu'il était évident qu'elle ne croirait pas un traître mot sortant de sa bouche, s'il s'avisait de nier.
Et bien sur qu'elle n'était pas forcément des plus futées... Mais, après ça, tout le monde connaîtrait le fin mot de cette histoire.
Ernst
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Métier : Gère une menuiserie - Cavalier Ascanien
Jeu 17 Déc - 23:11

Ce jour-là, dans une maison accolée à une menuiserie, il y avait un homme fatigué.
L’ire de l’officier ascanien résonnait encore désagréablement à ses oreilles, la matinée s’était passée dans les cris, les injonctions, les rappels aux devoirs : “Mais bougez-vous Grison-Ebermann !” disaient-ils tandis que sa monture imbécile le trahissait un peu plus à chaque pas. Qu’y pouvait-il s’il était dernier ? Les jambes de sa jument n’étaient pas les siennes et si elle décidait de ne point se prêter aux exercices, en était-il vraiment responsable ?
Il se sentait accablé, les pieds nus dans une bassin d’eau chaude à réfléchir sur sa destiné et les nombreux obstacles qui se dressaient sur la route, mais sa vue se brouillait. Il s’était abîmé la rétine à regarder ses ouvriers œuvrer piteusement. Sans lui, ces ignorants ne sauraient pas comment travailler, ils venaient toujours à lui avec des questions stupides : “Le père Auguste ; vous m’avez pas dit dans quel bois il voulait son armoire quand vous êtes allé le voir. Il faut quoi ?” En pin triple buse ! En pin ! Il fallait toujours tout leur dire à ces idiots là ! Qu’ils étaient épuisants ceux-là à toujours faire perdre du temps avec des questions ! Ils n’avaient rien de mieux à faire qu’à déranger le monde !
Le massage de pied que lui faisait sa soeur ne suffisait à lui faire passer sa mauvaise humeur, il se disait qu’il était bien mal traité pour tous les efforts qu’il faisait, mais tel était le devoir. Il philosophait ainsi lorsqu’on força sa porte. C’était buckhart, la mine défaite :
— Ernst, mon brave, la louve est débusquée, elle veut vous faire face ! A vous mon ami !
Enfin que se passe-t-il ?
Son ami lui raconta le terrible attentat qu’il venait de subir.
— J'ai du courrir pour la devancer !
Elle est dévorée par la passion, cracha Ernst, consterné par l’attraction si puissante qu’il pouvait exercer. Il devait apprendre à maîtriser son pouvoir, mais des cris lointains se firent déjà entendre.

A ce point du récit, il faut rappeler que toutes les races ne se répartissent pas l’élégance de la même façon entre les sexes. Tandis que la biche rait discrètement, le cerf brame à tout vent ; au contraire de l'homme qui parle avec sagesse et de la femme qui hurle avec prolixité. Ici point d'exception.

Buckhart s’éclipsa à la demande d’Ernst, il s’essuya les pieds négligemment et remis ses sandales, s’avançant dans l’atelier.
— Monsieur Grison-Ebermann, que sont ces cris ?, demanda le jeune Pavolov qui trainait avec l’apprenti.
C’est une chèvre qui mime les sirènes de l’amour, répondit-il en souriant.

Il n’eut pas le temps d’en dire beaucoup plus que Renée lui fit face. Elle parlait mal, avec un accent très désagréable qui forçait sur les graves. Elle était rouge, visiblement énervée - une colère de bonne femme -, et semblait animée d’un sentiment contraire. Tout se mélangeait dans cet esprit peu éduqué à la réflexion et n’en sortait qu’une bruyante confusion. Elle croisait les bras, signe d'impuissance.
Ernst prit un ton docte.
Vous Reunaïe - il essayait de ne pas écorcher son nom -, encore ? Vous forcez à présent ma porte pour me voir à tout heure et me surprendre. Vous me croyez courtisé et vous perdez la raison. Vous fracassez les convenances, mes paroles ont du trouvé un écho jusqu’à vous débrayer la fente et libérer les poisons de l’hystérie. Hélas, on ne s’introduit pas chez les gens pour faire tout un raffut jeune fille. Vous n’êtes pas dans une de vos chaumières utgardienne humide où domine l’odeur du poisson, de la sueur et des fèces qui sèchent dans le jardin. Aujourd’hui fut une journée de grand exercice et je suis las. Je vous prie de calmer vos pulsions femelles et vous montrer présentable. Les moeurs utgardiennes passent peut-être outre le mariage mais il va falloir élever un peu les manières pour fréquenter des ascaniens.
Si j’accepte ce que votre tempérament libidineux vous hurle, ce sera dur pour vous bien sur de vivre ici, mais plus dur encore pour nous. Faisons dès à présent tous un effort et restons calme.


Ernst prit l'allure mystérieuse qu'il réservait pour les questions d'argent.

— Quelle dot avez-vous ?


Les ouvriers s’étaient respectueusement éclipsés.
Raina Visenrov
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Dim 27 Déc - 18:28
Si le visage de Raina se déforma encore plus de colère alors qu'il écorchait – ou plutôt, massacrait – une nouvelle fois son prénom, elle déchanta bien vite de sa fureur en écoutant le petit monologue de l'Ascanien.
Pourquoi, direz vous ? Eh bien essayons de voir ce qui se passa en l'Utgardienne, tout du long...

La colère d'abord. Évidemment, il ne s'était pas souvenu de son nom, alors que ça avait tout justement été l'élément initial de leur précédente prise de bec, au beau milieu de quartier Ascanien. C'était peut être même l'élément déclencheur de toute cette méprise, et de la rumeur grotesque qu'avait dû lancer Ernst à son propos. Il y avait de quoi bouillonner d'agacement, car dans cette histoire elle était bel et bien la victime, et ce cher Môsieur, non content de l'avoir ridiculisée et d'avoir entaché sa réputation, s'obstinait sans vergogne à prononcer de manière tout à fait risible des prénoms qui ne ressemblaient pas même vaguement au sien. Pour qui se prenait il, cet abrutit là ? Se croyait il à ce point supérieur à elle ? Ne jugeait il pas intéressant un instant de savoir nommer son interlocutrice, même en pareille situation ? Il n'était vraiment pas très futé ni instruit, cet imbécile d'Asca...
… En fait, si... Il l'était... Un peu trop à son goût même.
Au milieu de tout ce discours, il y avait une telle quantité de mots et d'expressions employés par Ernst dont elle ignorait tout bonnement toute la foutue signification qu'elle plissa les yeux dans un effort pour chercher à comprendre. De la colère, son expression faciale passa à un masque d'incompréhension ultime, et sa bouche s'entrouvrit quelque peu, dans un signe d'hébétement certain. Ses bras retombèrent le long de son corps, comme si elle se trouvait démunie. Ses yeux, clignant, cherchaient désespérément sur le visage de l'homme une traduction de ce qu'il était entrain de dire, comme s'il avait parlé une toute autre langue dont elle ne connaissait rien.
Oui, avouons nous le, il était évident pour quiconque les observait que la jeune femme était muette face aux flots de paroles qui se déversait de la bouche de Ernst. Elle avait l'air d'une parfaite petite sotte, face à lui.
A sa décharge, on n'employait jamais de mots aussi compliqués, dans les quartiers Utgardiens... Et si un individu s'avisait à nous prendre de haut en sortant ce type de parole, on le faisait tout simplement taire en lui brisant la mâchoire...

Néanmoins, la jeune femme comprit certaines choses dans ce monologue indéchiffrable. Il était question de raffut, il insultait les manières Utgardiennes, et elle n'en était pas certaine, mais n'avait il pas aussi sous-entendu que les femmes étaient inférieures aux hommes ? Mais alors pour le reste... Il avait fait mention de « mariage », mais elle ne comprenait absolument pas de ce que ce terme pouvait bien faire là.
Raina avait la sensation qu'il lui manquait quelques pages à cette histoire... Mais en vérité, elle ignorait qu'on l'avait carrément privé de plusieurs chapitres.

Quoi qu'il en soit, il l'incitait à garder son calme. Et c'était contre sa volonté qu'il l'avait obtenu, car la jeune femme demeurait immobile, sonnée, dans un flou des plus total.
Le visage de Ernst devint plus sérieux encore, et il lui sembla qu'il s'efforçait à se donner plus de prestance encore. Il lui posa une question... Enfin, oui, ça semblait être une question... Mais ce qu'il demandait, une fois encore, elle ne le comprenait pas.

Demeurant silencieuse, elle le dévisagea encore un instant dans une expression ahurie. Puis s'agitant, mal à l'aise de son manque de culture, elle chercha désespérément du regard une aide ou un appui au près de n'importe quelle autre personne étrangère à leur échange. Mais les employés s'étaient retirés, retournant à leur occupation. En balayant la menuiserie du regard, elle croisa les yeux de quelques curieux qui les observaient de loin. Mais si tôt repérés, ceux-ci baissèrent la tête, comme pour ne pas avoir à se mêler d'affaires qui ne les regardaient de toutes évidences pas.
Le visage blême de Raina s'était empourpré au niveau des joues. Qu'il était inconfortable de se retrouver ainsi muette d'incompréhension en plein litige avec son opposant ! Et elle était seule, de surcroît, au beau milieu de son territoire à lui, avec ses gens... Et des Ascaniens, qui plus est !

Après ce qui parut être une éternité, l'Utgardienne tourna de nouveau son regard sur Grison-Ebermann, qui patientait pour avoir sa réponse. Elle devait réagir, tout de même... Aussi, elle secoua la tête, comme pour se reprendre et tâcha de retrouver une allure moins... Enfin, moins de petite imbécile...


- Je... - elle toussota, retrouvant une voix un peu moins hébétée – Je ne comprend pas une traître mot de tout votre charabia. Moi, je suis venue ici parce que, de toute évidence, il vous amuse de dire à tout va à qui veut bien l'entendre que je suis une espèce de... De... - elle bafouillait encore, pas bien certaine de pouvoir reprendre l'avantage cette fois – D'aguicheuse ! Et que j'aurais jeté mon dévolu sur vous. Et vous savez aussi bien que moi que ce qu'il en est.

Malheureuse... Elle ignorait que son discours, une fois encore, était à double tranchant...
Et si Raina ne pouvait rien en savoir, elle paraissait d'autant plus suspecte dans son attitude mal assurée. Elle avait la sensation, tout d'un coup, que les yeux verts posés sur elle de son interlocuteur avaient le pouvoir de la déstabiliser à nouveau à tout instant. Pas pour les raisons que s'imagineraient les spectateurs, mais bien parce qu'elle avait en horreur de ne pas comprendre ce qu'on lui racontait.
Poursuivant, sa voix monta à nouveau d'un ton, et elle pointa fébrilement un doigt accusateur sur lui.


- Je venais ici simplement pour vous demandez de réparer ça, et au plus vite ! Je ne souhaite pas voir ma réputation être salie davantage, ni que ça vienne me gêner dans mes fonctions et obligations.

Elle reprenait un peu d’aplomb, à mesure qu'elle retrouvait le bon chemin dans ses réflexions. Raina écarta quelque peu les bras, ses sourcils se fronçant, une moue sévère aux lèvres. Elle secoua la tête comme pour bien signifier que ce qu'il disait n'avait aucun sens, et pas seulement parce qu'elle n'en comprenait pas un traître mot.

- Alors, par le ciel ! Pourquoi me parlez vous de mariage ou de dot ?

La jeune femme planta son regard sombre dans celui de son interlocuteur, attendant des explications de sa part... Ou au moins une confirmation qu'il avait bien compris ce qu'elle attendait de lui et qu'il s’emploierait à lui donner satisfaction dans les plus brefs délais.

Ces Ascaniens, je vous assure ! Une plaie ! Vraiment ! Et celui-là, ce devait vraiment être la cerise sur le gâteau !
Pour peu qu'elle ne soit pas imbibée, en plus, toute entière d'un quelconque alcool, cette cerise...
Ernst
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Sam 2 Jan - 1:05

Ernst n’écoutait que d’une oreille, trop occupé par la contemplation d’un gobelet de bois grossièrement taillé oublié par l'apprenti. Il songeait. Des verres, on en faisait de toute sorte comme ce gobelet de bois ; ceux pour le vin, pour l’eau, les grands, les petits, ceux en bois, ceux moulés, ceux sculptés, à pied, évasé, long, il en avait même vu en vitrine de jadis en verre avec des formes étranges pour des usages obscures. Hélas ! se disait Ernst, de femme il n’existe qu’un seul type : la cruche.

Il faut dire qu’Ernst était un parfait goujat, un opportuniste, un monsieur-je-sais-tout dardé d’un égo mal soigné. Du haut de toute sa bêtise il toisait la pauvre enfant, Raina, pure et supposée métaphoriquement chaste, parangon de vertu, innocence coincée entre ses bottes et son armure. Elle disait “ je ne comprends pas...”, il songeait “évidemment”.

A travers Ernst se faisait l’echo de mille scelérats, de mille cheffaillons, de mille coeurs jaloux heureux de s’en prendre à l’autre. Possédé malgré lui par les usages décadents, les modèles viciés, les morales corrompues, le préfet était sourd à toute récrimination, à toute logique, ses croyances étaient ses oeillères. La détresse de Raina glissait sur lui comme la misère sur les passants. On pourrait le juger durement, mais ce serait durement juger un homme d’être né au mauvais endroit. Nulle âme éclairée ne choisirait d’être ainsi faite.
Ernst était-il vraiment coupable ?

C’est justement pour vous aider à réparer que je vous propose le mariage. Votre situation me parait compromise mais pourtant, je vais vous faire une fleur et maintenir la porte ouverte. Je pourrai vous chasser, appeler vos collègues et dénoncer votre acharnement jusque dans ma demeure. Mais je ne vous veux aucun mal, autant que je le puis, j’essaie de vous comprendre. Il est une issue pour vous, une alternative au déshonneur.

Ernst commençait à marcher, les mains dans le dos, pensif.

J’ai la faiblesse de penser que vous n’êtes pas une ingrate. Manifestement, à vous voir, la vie ne vous a pas gâté - un air dédaigneux mais compatissant appuyait le propos - et j’espérais mieux. Mais enfin, Providence vous mets sur mon chemin et je l’accepte. Le destin vous est plus favorable alors vous devriez en faire autant. Laissez-vous une chance, je vois que vous êtes perdue, que vous avez souffert, vous avez dû être très mal pour choisir d’intégrer la garde alors que vous êtes une femme. Mais songez aux arbres, songez à ces hivers où les troncs secs se couvrent de glace, aux branches abandonnées de toute vie qui menacent vainement le ciel. Cet arbre austère et émacié, c’est vous, rendue misérable par le froid. Mais voyez, vos pas qui vous mènent à moi, c’est la première brise du printemps. Il est temps de vous remettre à espérer, de trouver la foi qui vous portera. Lorsqu’on a trop souffert, qu’on s’est trop battu, on ne voit plus clairement, on se trompe, l’évidence devient l’énigme. Je suis devenu pour vous cette énigme qui devrait être une évidence, vous ne savez plus que faire. Chantez dans votre cœur pour faire défiler les saisons, retrouver cette douce brise printanière qui vous mène à moi. Lorsque vous la sentirez, tenez-là fermement, liez-vous aveuglément à elle, épousez là et vous sentirez à la chaleur des beaux jours vous envahir, la sève circuler en vous, les feuilles s’enhardir à nouveau et un beau jour, un beau jour sans plus y penser, vous verrez poindre avec amour votre premier fruit. Le cycle de la vie vous aura comblé, la satisfaction d’avoir tenu votre rôle pour Providence égaiera vos soirées. Ce serait une belle vie.

Ernst y croyait. Il y croyait profondément. Toute cette histoire lui déplaisait, mais il puisait en lui tout ce qu'il avait  de bonté pour aider cette sauvage utgardienne. C'était peu pour un homme, mais c'était beaucoup pour un serpent. Qui peut jeter la pierre à celui offrant toute la bonté octroyé par le destin à un inconnu, à un garde, à une femme ? Jugerez-vous durement celui qui ne pourrait faire plus ? Si vous jugez durement cet homme, vous jugez durement la peine d'un nain combattant un géant et vous commettez une injustice. S'il fallait bien y regarder, il faudrait constater que les femmes sont faîtes pour être mères et que destin leur donne l'immense pouvoir d'aimer pour cela. L'utgardienne, comme la dernière des louves ou des loutres était également pourvue de ce don pour l'amour. Mais elle n'en usait pas pour Ernst. Face à face, l'un des deux faisait tout ce qu'il pouvait pour aider l'autre qui pourtant ne faisait que lui nuire en refusant d'aider à son tour. Si l'on regardait les moyens de chacun, il fallait voir que la femme, comme toujours, était la vraie coupable.

—  Je sens la colère en vous, mais aussi la peur, l’incompréhension, le trouble des sens. Ne tournez pas le dos à la main tendue, il y a peut-être encore un espoir pour vous, Reneykjavik Vueenrose, écorcha-t-il
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Dim 3 Jan - 18:08
Allez dire à la malheureuse petite créature qu'ainsi était faite la vie !
En proie au terrible serpent, se dirait elle bêtement que la vie était ainsi faite ? Qu'elle n'était qu'une proie, et que c'était par sa nature reptilienne qu'il enserrait son étau sur sa pauvre personne ? Se contenterait elle simplement de baisser les bras, en se disant que c'était la fatalité, et qu'il était tout à fait normal qu'il dispose d'elle comme d'une vulgaire friandise à se mettre sous la dent ? Non, la petite souris, tout aussi démunie et chétive était elle, ne se débattrait elle pas, se défendant à coup de crocs et des griffes, dans le vain espoir de changer la donne de cette destinée semblant déjà toute tracée ? Regarderait elle son prédateur, l'excusant d'être affamé, lui pardonnant de jeter sur elle son œil mauvais de dominant, prétentieux et tout supérieur qu'il se croyait ? Lui accorderait elle, tout sourire, toute aimable, le repas qu'il croyait lui être dû, et dont elle faisait office, parce qu'ainsi en avait il été décidé, depuis leur naissance ? Le reptile dévorait les fragiles musaraignes, et on ne peut lui en vouloir, vu qu'il était un reptile et elle était si faible et si désarmée face à sa grandeur et ses atouts...
Vous peut être, mais la souris, elle, souhaitait vivre plus que tout. Vous peut être, mais la souris, elle, voyant ses crocs et sentant l'odeur fétide de son haleine, ne pouvait qu'associer ça à la mort. Vous peut être, mais la souris, elle, n'admirait pas le serpent pour le reptile qu'il était : elle le détestait, pur et dur, pour l'ennemi naturel qu'il était pour elle.
Faudrait il alors en vouloir à la souris de refuser son triste sort ?

Pourquoi s'en étonné dans ce cas, que l'Utgardienne ne pardonne pas l'Ascanien d'être né et d'avoir été élevé en Ascanien ? Qu'elle reste là, plantée devant lui, le défiant de toute sa petite personne ? A son sourire, elle devinait les crocs. A ses paroles, elle sentait le poison. A sa gestuelle, elle ressentait l'étreinte sournoise et fatale de sa queue.
Là où il y avait méprise, toutefois, c'était que Raina, loin de s'imaginer en musaraigne transit de peur, se voyait plutôt en louve prête à se défendre avec hargne.

Qu'en était il alors, dans ce combat sanglant ? Lequel des deux était le prédateur, alors que l'autre ne faisait plus qu'office de proie ? Qui l'emporterait de ses armes et de son esprit ? Quelle nature, quel instinct, l'emporterait dans cet affrontement incongru ?
L'Ascanien, ignorant n'être pourvu que d'une langue de vipère et mettant que trop de confiance sur l'engouement qu’engendrait sa queue ? Ou la petite Utgardienne, qui se figurait aussi grosse et forte qu'une louve ?

Il lui sembla que le gong du ring venait de sonner, alors que des lèvres de l'homme s'échappait à nouveau le mot « mariage ». Si elle n'y avait rien compris, à son premier discours, les pièces du puzzle pour elle se mettaient d'un seul coup en place. Bien sûr, la jeune femme ignorait toujours le pourquoi du comment ils en étaient arrivé là, ni le couperet qui stagnait au dessus de sa tête – et elle n'était pas prête d'en prendre conscience -, mais au moins comprenait de quoi retournait le flot de paroles se déversant encore de la bouche de Ernst. Et nul besoin de vous dire que c'était pas du tout à son goût.
C'était de leur union qu'il faisait mention. Le cœur de Raina s'emballa. Loin d'être transie d'amour, c'était l’œil profond et captivant du serpent qui jetait son dévolu sur elle, et qui la contraignait, dans un premier temps, à ne pouvoir qu'ouvrir une bouche béate et surprise, le corps raide de stupeur face à la menace qui pointait le bout de son nez. Un malentendu sans doute... Si elle ne bougeait pas, le prédateur se désintéresserait peut être d'elle.
Mais insinuait il que c'était elle qui venait de se jeter corps et âme dans sa tanière, prête à s'offrir au nuisible personnage qu'il était ?

Pire encore, osait il dire que c'était pas pure bonté d'âme, pour ainsi dire par charité, qu'il lui accorderait la faveur de la dévorer toute entière ? Il entamait sa danse, perdu dans ses songes. Quelles viles pensées et autres sournoiseries hantaient son esprit alors qu'il posait un pas, puis un autre, tournant autour de la malheureuse pétrifiée qui n'en croyait pas ses oreilles ?

Sa voix, chaude et charmeuse, semblait vouloir communiquer un sentiment de réconfort, de sympathie, de gentillesse. Mais cette plaidoirie, cette tentative pour la convaincre, pouvait elle avoir le moindre poids alors qu'il ne dissimulait pas sa langue pointue ?
Mot après mot, il l'irritait un peu plus. Les yeux bruns de la milicienne le suivaient dans sa ronde et s'assombrissaient un peu plus à mesure qu'il poursuivait son discours.
A quiconque observait cet échange devinait l'attaque à venir, d'un côté, ou d'un autre. Les plus malins liraient que c'était en elle que bouillonnait le plus de haine. Elle peinait à se contenir. Une furieuse envie de se jeter sur lui pour le déchiqueter grandissait en elle. Elle serrait les dents comme les poings, tremblait d'une rage qu'elle ne cherchait pas même à dissimuler.
Le monologue enjôleur, bien loin de la convaincre d'accepter la proposition, lui inspirait au moins l'envie d'un corps à corps endiablé avec lui. Mais il n'aurait sans doute pas eu pour mérite de lui plaire, à lui...

Comme quoi, les anciens avaient raison : Un Ascanien, même aimable, n'en restait pas moins un Ascanien.

Les métaphores se succédant, un sentiment de n'être plus considérée que comme une pouliche à saillir frappait l'Utgardienne de plein fouet. Il ne pouvait pas être plus à côté de la plaque : pour des raisons qui ne tenaient qu'à elle, Raina ne s'était jamais figurée prendre un jour époux – ni même amant – et moins encore de porter un jour la vie en son sein. Toutes les louves n'étaient pas des mères... Il en était certaines qui préféraient avant tout la chasse et la guerre. C'était son cas.

Son discours arrivait à son terme, et elle ne revenait pas de ce qu'elle était entrain de vivre.
C'était sa toute première demande en mariage et elle était plus détestable encore que tout ce qu'elle aurait bien pu imaginer.

Si la brune était restée aussi immobile que silencieuse, se contentant de le haïr du regard en cherchant à refréner des pulsions meurtrières, les derniers mots de l'homme eurent raison de sa patience déjà nettement éprouvée.


- Raina Visenrov ! Je m'appelle Raina Visenrov, abruti !

Elle avait hurlé sans même le vouloir ou s'en rendre compte, et sa voix, comme son corps, tremblait d'une rage explosive. Ses paroles ricochèrent sur les murs, et il n'était plus possible pour personne, dans cet atelier, d'ignorer la mésentente qu'ils traversaient tout deux. Mais la jeune femme s'en fichait éperdument. Poussée à la colère, elle en oubliait jusqu'à son armure officielle.

- Si vous voulez demander ma main, vous pourriez au moins apprendre à dire correctement mon nom ! En fait, vous devriez le connaître dans tout les cas. Nous avons déjà collaboré tout deux, nous nous sommes rencontré à plusieurs reprises. C'est une question de politesse et de respect, par Njörd !

Pas le plus prioritaire, pensez vous ? Oui, mais c'était la goutte d'eau qui faisait déborder le vase. Et comme elle n'avait nulle envie de lui laisser loisir de reprendre ses couleuvres, elle prenait à son tour l'initiative de faire les sangs pas, rouge de rage, répandant sa hargne comme son mépris à la figure de son détestable adversaire.

- Je ne sais pas quelle mouche vous à piqué, ni pourquoi il vous prend subitement le caprice de me demander en mariage. Mais je vous avoue que je m'en fiche comme de ma première hache ! Jamais,Ô Grand Jamais ! Je n'épouserai quelqu'un d'aussi odieux que vous ! Un Ascanien, par dessus le marché ! Mais qu'est-ce qui vous prend ? Êtes vous tombé sur la tête ou êtes vous tout simplement fou ?

Elle posait sur lui un regard furibond, peinant toujours à dissimuler – comme à maîtriser – son désir brûlant de l'étriper. C'était tout bonnement insensé. Tout bonnement improbable. Outre le fait qu'elle ne nourrissait pour lui que du dégoût et de l'aversion, imaginez un peu le scandale d'une pareille union ?
Un Ascanien et une Utgardienne... Un préfet et une milicienne...
Un serpent et une musaraigne...
C'était tout bonnement contre-nature.


- Si je suis pour vous une telle source de répulsion, que vous espériez mieux – pour reprendre vos mots -, et que je suis une espèce de ratée tout juste bonne à jeter à vos yeux, alors pourquoi, par le ciel, vous acharnez vous à me convaincre de devenir votre femme ?

Raina écartait les bras, levant les yeux au plafond, un masque de colère toujours bien présent sur son visage. Autant pouvait elle être mignonne, la petite sauvageonne, autant en pareille humeur inspirait elle plutôt la peur.

- Je vais vous ôter d'un lourd fardeau, mon ami...

Les mots étaient empreint d'une condescendance et d'un dédain évident.

- Je ne vous apprécie pas du tout. Et je partage votre ressentiment à l'idée de nous unir. Alors abandonnez cette idée, Ô Sauveur au Grand Cœur que vous pensez être, parce que ça ne se fera pas. JAMAIS.

A s'y méprendre, on aurait presque entendu les grognements menaçants et le hurlement d'une louve...
Les vannes ouvertes, elle poursuivait, parlant vite, presque hystérique, pour ne laisser aucune occasion à son compère de reprendre l'avantage des paroles ou de déverser son venin.


- Oh ! Et pendant que j'y suis ! Ne vous donnez pas bonne conscience en cherchant des excuses à mes choix de vie et ne vous torturez plus à imaginer mes peines. Je suis parfaitement heureuse et épanouie ainsi, parmi l'armée de Claircombe, et je ne crois pas un instant être une âme en perdition qu'il vous faudrait sauver. Ne prétendez pas connaître mon passé. Ni même me connaître d'ailleurs, si vous n'êtes pas fichu de m'appeler par mon nom !

On en revenait au point de départ. La boucle était bouclée.
Et le serpent n'avait plus qu'à se mordre la queue.
Ernst
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Dim 3 Jan - 21:50

Ernst était un homme d'expérience. La nature féminine, chose aussi douce que fade, n'avait plus de secret pour lui. Il savait que pour elles, en plus de la miction et la défécation, il y avait ces petits cris aiguës sporadiques, ces mises en demeure, ces menaces, ces éclats ; leur nature faiblarde ne pouvait supporter une émotion sans en être envahie. De là ces excès, ces malaises, ces paroles ineptes qui s’étalaient comme du cagadou aux pieds des hommes, témoins involontaires autant qu’innoncents de leur intrinsèque faiblesse.
Ernst se voyait comme quelqu’un de bon et s’inspirait pour ce qui concernait les femmes des meilleures penseurs dans le domaine : la religion, les coutumes, les prêtres et les harangues du cardinal.

Lui, toujours maître de lui-même puisqu’un torrent d’émotion ne fait pas frémir un bonhomme, prenait en pitié ces pauvres hères que sont nos amis les femmes. L’enfant - les femmes sont de grands enfants par l'esprit - n'était vraiment pas lucide, l'urgarderie mêlée à son genre achevait de la desservir et il se remémorait les vaches trop vieilles que l’on se résout à abattre sans haine. La vérité égale parfois un coup de massue :

Vous êtes d'une féminité indécrassable, constata-t-il. J’ai l’impression de voir un loup qui dédaigne un lapin pour manger ses crottes. Je fais tout mon possible IRENE VUIZEUSE - il y mettait effectivement de la bonne volonté - pour prononcer l’imprononçable, mais j’ai une bouche faîtes pour l’amour et non pour mimer les beuglements de pochtrons. Si vous avez un nom gutturale, adressez les reproches à vos parents et joignez les miens car je ne goutte guère ces sonorités. Je ne vous retiens pas, ni vous ni votre appétit de bête lubrique, faire une scène de ménage avant l’hymen, c’est pire que l’avoir déjà descellé ! C’est sacrilège et cela s’ajoute à l’immense dette que vous devez à notre famille. Retournez humez les odeurs fétides de vos cloaques et ne dérangez pas plus un honnête homme.

Bonjour, fit une voix de mort venue d’un coin sombre.
Ce mot innocent sortis de nulle part était terrifiant, même Ernst eut pour la première fois un mouvement de peur. Sorti de l’ombre, le visage ridé et monstrueux de la vieille émergeait. On s’étonnait que le jour ne fasse point brûler cette peau blanche zébrée de ride, roussie par endroits, froissés de rides comme un vieux livre maltraité. Elle avait les yeux bleus et l’air noir, les cheveux gris et la voix grave, les dents effacés et l’appétit vorace. Telle la voyait Ernst qui perçait sa vraie nature, le quidam ne voyait qu’une grand-mère bien trop agée posée sur sa canne. Naïf.
Je vois que vous faîtes connaissance, c’est très bien.
Elle avait l’air bienveillant qu’ont les plantes carnivores pour les moustiques.
Vous êtes la garde Visenrov, j’ai entendu beaucoup de bien à votre sujet.
Ernst se demandait comment sa vieille s’informait ; quant à la prononciation correcte, elle venait de la nature démoniaque de l’ancêtre sans doute.
Je ne veux pas interrompre vos pourparlers, mais que diriez-vous de venir boire un thé chez nous pour que vous nous racontiez tout ? Je sais que mon petit fils est.. Eh bien c’est mon petit-fils voilà tout ! Venons parler ensemble entre gens de bonne compagnie et ne restons pas vulgairement à discuter dans une menuiserie comme des ouvriers. Ah mon Ernst, quel tempérament, discuter ainsi en plein air !
La vieille invitait à la rejoindre dans la maison. Elle avait un sourire sincère mais ne montrait pas ses dents.

Selon Ernst, soit qu’elle n’ait plus de dents, soit qu’elle cachait des crocs.
Raina Visenrov
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Mer 20 Jan - 1:59
Raina s'était plantée devant lui, droite et fière, le défiant du regard d'oser répondre quoi que ce soit à sa petite tirade. On n'aurait su être plus clair : c'était non. Allez savoir même pourquoi une idée aussi hallucinante avait bien pu germer dans l'esprit du préfet. Et puis quoi encore ? Qu'est-ce qui pouvait bien avoir pousser l'Ascanien à croire qu'un tel projet était ne serait-ce qu'imaginable ?
C'était, aux yeux de la milicienne, tout bonnement aberrant et il l'avait mise dans une colère furieuse dont elle n'était pas prête de redescendre.

C'était bien les hommes de se croire intouchable, tout puissant. Car voyez vous, ces messieurs ne demandent pas, ils exigent. Et ils s'attendent à ce que les faibles et craintives femmes se soumettent à tout leur bon vouloir et désir. Ils se croyaient supérieur... Et pourquoi, on se le demande ?!
Et cet homme-là, de surcroît, n'était vraiment pas de la meilleure espèce. Il était au moins aussi méprisable que méprisant. Le plus amusant, dans cette histoire, était qu'il soit tout persuadé de l'avoir à ses pieds et qu'il lui fit une faveur en lui demandant sa main. Vous ne voyez pas le comique ? Si vous entendiez les rumeurs et la petite réputation courants au propos de l'héritier Grison-Ebermann concernant ses conquêtes amoureuses, vous comprendriez le pourquoi du comment...

Malgré l'avertissement plus qu'explicite que communiquait le regard assassin de l'Utgardienne, le préfet, pourtant, ne put pas tenir sa langue. Et bien mal lui en prit.
On pouvait trouver bien des qualités à Raina, en apprenant à la connaître, l'apprivoiser et en l'observant avec un peu plus d'attention. La patience et le sang-froid, en revanche, n'en faisaient pas partie.
Elle bouillonnait à cet instant d'une rage indescriptible, atteignant des sommets jusqu'ici rarement atteints. Elle en avait connu des lourdauds, des imbéciles finis fanfaronnant tout persuadés de la surpasser. Mais là, celui-là, il avait gagner sa couronne.

Ses poings étaient si serrés que ses ongles meurtrissaient la paume de ses mains. Sa mâchoire s'était crispée à son maximum, signe qu'il n'était plus heure aux débats diplomatiques. Il continuait de la prendre de haut, à l'insulter et la traîner dans la boue. Il le faisait sans une once de remord ou d'hésitation, à la vue de tous, à elle qui n'était pas des ces petites mignonnes faiblardes et impressionnables, à elle qui portait l'uniforme officiel de la garde de Claircombe.
Il allait l'avoir, sa leçon, et il allait s'en souvenir longtemps... Son nez aussi.

La milicienne tremblait de tout son corps, sous l'emprise de l'adrénaline de la fureur. Un mot après l'autre, il l'a poussait un peu plus à répondre à ses instincts...
Et il ne se contenta pas de franchir les limites... Il en défonça les barrières au bélier.
Sans qu'elle n'y réfléchisse, sans qu'elle ne le décide, son corps répondait à l'appel meurtrier semblant sonner dans ce discours. Elle avait dors et déjà levé son poing gauche, prêt à frapper, déjà armé. Dans quelques brefs instants, l'impulsion serait donnée et elle lui offrirait une danse qu'il n'était pas prêt d'oublier.

Tout se joua à une fraction de seconde...
… Car une voix l'empêcha d'aller jusqu'au bout de son mouvement.

Raina se stoppa nette, surprise d'entendre au milieu de cet atelier et cette conversation houleuse un chevrotant « Bonjour ». La jeune femme, restée pendue dans son geste, tourna la tête en direction de la nouvelle arrivant pour découvrir une vieille dame reposant sur sa canne, qui les observait tout deux. Perplexe de cette apparition soudaine, l'Utgardienne ne pensa pas même à répondre et se contenta de la fixer d'un petit air interrogateur. Qu'est-ce que c'était encore que ceci ?
D'abord, ça partait mal. Faire connaissance n'était pas franchement les termes qu'elle aurait choisi à leur échange, à Ernst et elle... D'autant qu'elle s'apprêtait à y mettre le point final. Ou peut être fallait il dire plutôt « le poing final ».
Mais son visage se détendit quelque peu en entendant son nom, correctement prononcé cette fois, sortir tout naturellement de la bouche de la vieillarde qui, au demeurant, était somme toute amicale. D'autant que, bien qu'Ascanienne sans l'ombre d'un doute, elle ne se privait pas de lui faire publiquement un compliment. Le bras de Raina s'abaissa doucement alors qu'elle retrouvait un semblant de calme. La voix encore tremblante de sa colère, elle s'efforça de se montrer un maximum respectueuse envers la seule personne s'étant montrée charmante avec elle depuis son réveil du matin.


- Oui, Madame, c'est bien cela. Et je me contente de faire mon travail, Madame...

A vrai dire, il y avait un petit quelque chose de gratifiant et d'appréciable à cette phrase... Si elle n'avait pas été en proie à tout ses sauts d'humeur, Raina se serait sans doute rendu compte qu'il y avait anguille sous roche : elle n'était franchement pas très populaire au sein de la garde et peinait toujours beaucoup trop à faire reconnaître la valeur de son travail.
Allez savoir d'où la vieille inconnue tenait ses informations, mais l'on pouvait dire que, sitôt, elle s'apparenta à la seule potentielle alliée que la milicienne pouvait se trouver, dans cette affaire.

La jeune femme se tenait droite, fière, à la manière des soldats. Elle crevait toujours d'envie de balancer sa main et tout ce qui s'en suit à la figure de Ernst, mais jugea plus blessant encore d'ignorer sa présence. D'autant qu'un rapide coup d'oeil dans sa direction lui apprit qu'il semblait tout aussi bouleversé qu'elle par l'arrivée de la dame.
Peut être la connaissait il ?

La réponse ne tarda pas car l'inconnue lui révéla alors être la grand-mère du préfet. Allons bon, toute la famille qui s'emmêlait... Mais au moins, celle-ci semblait avoir un peu plus de bon sens et ne la prenait pas de haut.
Elle invita alors Raina à venir discuter du malentendu -pensait elle du moins- en privé, dans leur résidence. L'Utgardienne, un peu prise de court, dansa d'un pied à l'autre quelques secondes.


- C'est que... Je suis de garde, Madame... Je ne pense pas pouvoir quitter mon poste comme cela... J'aurais sans doute des ennuis.

La brune se mordait légèrement la lèvre, tiraillée.
Jamais, au grand jamais, elle n'avait quitter son poste durant son travail. Elle prenait ses responsabilités très à cœur : la milice était toute sa vie, en dehors de ses frères et de sa sœur. Son plus grand rêve étant de gravir les échellons au sein de l'armée de Claircombe, il était peut probable d'atteindre ses objectifs en faisant l'école buissonière.
D'un autre côté, tirer au clair toute cette histoire semblait primordiale. Elle n'avait aucune envie de laisser grossir la rumeur qu'avait colporter Ernst à son égard. Et pire encore : elle ne souhaitait pas le laisser impuni de ses verbes à son encontre. La grand-mère Grison-Ebermann semblait être de son côté à elle... Elle l'aiderait sans doute à mieux comprendre toute cette vaste plaisanterie et remonterait les bretelles de son bon à rien de descendant. C'était du moins ce qu'elle espérait...
Et puis, après tout, retourner faire une ronde dans les quartiers Ascaniens pourquoi, hein ? Vous pouvez nous le dire ? Parce qu'au dernière nouvelle, elle était la nouvelle « Persona non grata » des lieux... Dure d'imposer son autorité, quand on était même plus un tant soit peu respectée, et que toute la population se faisait un malin plaisir de l'insulter allégrement.

La jeune femme hésita encore un instant, pesant le pour et le contre. Puis finalement, elle prit le partie de se dire qu'elle pourrait sans doute en toucher un mot à ses supérieurs, lorsqu'elle reviendrait à la caserne.


- Oh et puis zut. Il faut vraiment qu'on règle cette histoire, de toute manière. Le plus tôt sera le mieux.

Elle fit un signe de tête à la vieille et lui emboîta le pas, ne connaissant pas l'itinéraire à suivre. L'Utgardienne ne se gêna pas de lancer quelques regards noirs aux ouvriers, comme aux passants, qui la dévisageaient sur leur passage.

- Je vous assure que je ne comprends rien à tout ce qui vient d'arriver. Votre petit-fils, sauf votre respect, a littéralement perdu la raison...

Toujours résolue à ignorer la présence de cet imbécile de Ernst, elle parlait de lui comme s'il n'avait plus été là.
Ernst
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Ven 22 Jan - 21:24
A quelques distance de toute cette agitation, dans un bureau au fond d’une caserne, un officier tournait en rond. Les mains repliées dans son dos trahissaient son agitation. Il avait une petite mèche, un des rares uniformes de la garde et tout un tas de distinctions sur ses épaules, colifichets attachés ou cousus, autant de passe-droit pour enguirlander tous les pégus qu’il croisait.
Auguste Degure, homme distingué de l’élite Ascanienne adorait enguirlander ses subalternes, convaincu que cela faisait de lui un meilleur officier. C’était un de ses tempéraments étranges, difficile à cerner, froid, distant la plupart du temps ; parfois, dans un éclat il devenait chaleureux et sincèrement bienveillant. On y comprenait rien et l’on restait méfiant. Cet homme avait deux passions dures à concilier pour expliquer son attitude. Il adorait les conflits et détestait l’ordre établi. Surprenant pour un homme engagé loyalement dans la garde, s'il n'y pouvait concilier ceci : engueuler des subalternes et faire enrager les nobles ascaniens au conseil.
Car Auguste Degure détestait les élites ascaniennes. En premier lieu, car elles lui étaient passées sous le nez à cause d’un frère ainé, ensuite car on lui avait refusé un mariage et enfin, parce qu’il exécrait le cardinal.

Tandis qu’il s’agitait à faire les cents pas, un sourire cruel déformait ses lèvres fines et teintait de noir un regard habituellement clair. Il avait une opportunité. Cette lettre reçue du cardinal, son odieux chantage, ces exigences fantasques et sa mise en demeure : c’était une  insulte à la garde, une insubordination du clergé, une déclaration de guerre ! En bon noble, le commandant lisait aisément entre les lignes, il voyait les manœuvres, entendait les toiles se tisser dans les ombres. Aucune cabale, aucun complot, aucune machination, aucune conspiration ne verraient le jour. Il ne serait dupe de rien ! Le cardinal voulait jouer, il allait jouer ! Du fond de sa soutane, il actionnait quelques leviers, il bougeait quelque pion et il pensait gagner. Ce n’était pas un jeu, c’était la GUERRE ! Auguste en avait fait son métier, il allait lui montrer de quoi la garde était faite, à lui, cet empafé en chaire et la cour des nobles obséquieuse. Le menacer d’aller voir le gouverneur Krox ? C’était au cardinal de craindre une confrontation !

Auguste jubilait tandis qu’il articulait son plan. D’abord, la défense. Cette Visenrov, c’était un pion, mais un pion au centre de l’échiquier. Il allait falloir le couvrir, le protéger, le choyer. Peu importait s’il devait le perdre, mais que cela coûte cher à l’adversaire. Il allait le mettre au centre de l’attention, verrouiller les positions, désamorcer les pièges et mieux tendre les siens. D’abord, reprendre le contrôle sur cette Visenrov. Il ne savait pas grand choses d’elle, il la voyait comme une petite fleur qui se voulait chardon mais ça ne voulait rien dire. Il se gardait d‘être définitif avant d’avoir vu les gens en action.

Qu’un soldat cherche de la compagnie durant ses rondes, ce n’était pas la première fois, on lui signalait souvent des rixes et des acoquinements avec la population. Auguste était d’une droiture extrême et excellait à remettre les soldats étourdis dans le droit chemin. Il avait une technique infaillible, il les engueulait, il les martyrisait, il les mettait plus bas que terre s’il le fallait. Il leur hurlait dessus jusqu’à les transformer en une patte molle qu’il resculptait. Aucun doute que cette Visenrov, quoiqu’elle ait fait, aurait l’attitude voulue après une indispensable “explication” et cesserait de se compromettre dans les rues bêtement. Il la sortirait de force des griffes de ce Grison-Ebermann, qu’importe ce qu’elle en pense.
Ensuite, il prendrait un malin plaisir à nier toute relation entre son soldat et ce préfet, même si cela semblait déjà évident. Tant pis, il effacerait les traces, il tuerait leur amour dans l’oeuf, convaincrait cette Raina de renoncer à son amant définitivement et ferait un scandale de l’ingérence du cardinal. S’il le fallait, il la foutrait au cachot le temps qu’elle se calme.

Le plan était bon. Il fallait commencer sans tarder. Il ouvrit la porte avec détermination et envoya son larbin chercher la trop chaleureuse garde. Il continuait les cents pas en attendant.
– Elle est en patrouille dans le quartier ascanien, non loin, commandant.
Perfide Perfidie ! Elle allait déjà se compromettre et foutre son plan par terre ! Hors de question !
Une patrouille en arme avec moi pour la trouver, tout de suite !
Et sans attendre la réponse du larbin, il prenait son arme à la ceinture. Il mit ses protections habituelles et son casque avant de se diriger vers la grande porte. Une patrouille assemblée à la va-vite l’y attendait.
Nous devons trouver le garde Visenrov, très vite.
Ainsi fut dit, ainsi fut fait. Une enquête expéditive le renseigna.

Le commandant Degure était jusqu'alors désagréable comme à l'ordinaire, il entra dans une vive colère en apprenant que “cette aguicheuse” était “chez son amant” “à faire des choses en tête-à-tête à ce qu’on disait”. Il recoiffait nerveusement sa mèche, le rouge lui montait au joue ; la première bataille n’avait pas commencé et il lui semblait déjà avoir perdu la guerre. Quelle ignominie d’aller déserter pour roucouler chez son fiancé ! Plus que les atteintes à la morale, le commandant détestait perdre. Ça n’avait plus rien à voir avec les amourettes de deux idiots, avec la désertion de cette goulue pour voir son homme ; c’était entre lui et le cardinal, entre la garde de Claircombe et la noblesse Ascanienne. C’était général et c’était personnel. Il enrageait. La patrouille était spectatrice de sa déconvenue et cela l’énervait encore plus. Au milieu de la foule qu’il fendait, il se voyait en pleine bataille à chercher l’ennemi. Enfin il arriva à la menuiserie des Grison-Ebermann.
Avez-vous vu une garde ? demanda-t-il sans amabilité aux ouvriers.
Les ouvriers pouffèrent de voir un tel officier venir tirer des oreilles, cela décupla encore le ressentiment d’Auguste. Lorsqu’on lui pointa l'entrée de la maison, il espérait avoir encore le temps de séparer les deux débauchés.
Lorsque la porte sur laquelle il tambourinait s’ouvrit, il vit celui qui devait être le fiancé. Il s’en trouva rassuré, mais sa colère ne s’essouffla point, il écarta rudement cet Ernst pour hurler avec toute sa hargne :
GARDE VISENROV ! JE VEUX DES EXPLICATIONS ! ET TOUT DE SUITE !
Raina Visenrov
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Mar 16 Fév - 18:11
Ils avançaient tout trois lentement, suivant le rythme de la vieille dame qui se trouvait en tête. Les regards curieux, peut être même scandalisés, se tournaient en direction de cet étrange trio qui ne passait pas inaperçu. Tant par leur précédent tapage, que par les visages respectés des Grison-Ebermann en présence d'une representente des autorités de la ville, en tenue officielle, et - ô ! horreur ! - une Utgardienne qui plus est. L'Ascannienne avançait fièrement, à une allure désespérément molle, le nez en l'air. Ruina piétinait un peu en la suivant, un petit pas en arrière pour ne pas paraître la commander.Apres tout, ce n'était qu'une vieille dame, il n'avait pas lieu de la brusquer. D'autant que celle-ci lui était apparu en sauveuse dès son intervention.Sans prendre la peine de se tourner vers la jeune femme qui la suivait, elle répondit.

- Nous aurons tout le temps d'en reparler lorsque nous serons en privé, Garde Visenrov.  Pour l'heure, mieux vaudrait pour vous, comme pour mon petit-fils, qu'on évite de vous donner un peu plus en spectacle. Inutile de nourrir un peu plus les rumeurs à vos sujets, ne croyez vous pas ?
- Si, Madame...


Un petit ton boudeur, l'Utgardienne pourtant était forcée d'admettre qu'elle avait raison et se contenta donc de se laisser guider par la doyenne, en tachant toujours de conserver une distance hautement raisonnable avec son detesté préfet à l'origine de toute cette mésaventure.

Ils arrivèrent finalement à la demeure de la famille Grison-Ebermann et y pénètrèrent par la grande porte sans avoir de compte à rendre à personne. De là, Raina fut introduit, en compagnie des deux propriétaires des lieux, dans un salon qui servirait sans doute à leur discussion.
C'était peut être là que le faussé entre leur deux mondes parut le plus évident. Là où tout était ordonné, décoré avec autant d'élégance que d'exentricité, aussi confortable que pompeux, Raina, elle, faisait tâche dans le décor. Elle restait debout, mal à l'aise, raide comme un I en se balançant légèrement d'un pied à l'autre. On pouvait dire que chez les Utgardiens, le mode de vie était aux antipodes de ce qu'elle devinait simplement dans ce salon.La grand-mère s'était installée dans un canapé et regardait les deux autres protagonistes avec intensité. Ernst ne semblait pas plus tenir qu'elle-même à cette discussion. On eut dit deux enfants sur le point de se faire réprimander.


- Eh bien, qu'attendez vous ? Asseyez vous, qu'on règle tout cela.
- Je préférerais rester debout, pour ma part, si ça ne vous ennuie pas...
- Ça m'ennuie un peu pour tout vous dire.


Raina cligne des yeux de surprise en regardant l'Ascannienne. Si sa voix demeurait doucatre et amicale, il lui semblait pourtant qu'il y avait là comme un léger changement de ton.

- Croyez moi, ça sera bien plus facile pour tout le monde si nous sommes tous à notre aise. Donc permettez moi d'insister, Garde Visenrov,  et installez vous avec nous.

L'Utgardienne hésita encore un instant. Ernst, quant à lui, obéit sans discuter. Il semblait boudeur... Et il fallait avouer que cette constatation était quelque peu jubilatoire pour la brunette qui n'avait pas régressé dans sa colère à son égard. Le regard insistant de son "alliée" finit pourtant par la faire céder, et elle s'asseya quelque peu à contre-coeur à l'autre bout du canapé où se trouvait déjà le préfet. La Grison-Ebermann, qui était face à eux, les toisa un instant en silence.

- Bien. Nous allons pouvoir commencer. Expliquez moi donc quel est le problème. 

Raina jeta un regard en biais à l'homme qui gardait le silence - ce qui n'était pas plus mal -. Puis levant les yeux au ciel, quelque peu exaspérée, l'Utgardienne prit la parole, tachant de maîtriser sa colère et de rester, autant que possible, polie et respectueuse.

- Il semblerait que votre petit-fils, Madame, s'amuse à dire à qui veut bien l'entendre que j'aurais... Comment dire ça ? ... Un béguin assez démonstratif pour lui ? Et pire encore, il semble s'être persuadé lui-même qu'une union entre lui et moi serait de mise et...
- Et ce n'est pas le cas ?


Raina cligna des yeux, surprise d'une question et prise de court par cette interruption, la bouche encore à demi-ouverte. La vieille la regardait fixement, très calme, sans ne serait-ce qu'un brin de surprise dans le regard. C'était curieux... On eut dit que rien de tout cela ne la surprenait vraiment.

- Non, biensur que non !

Elle avait repondut presque sans réfléchir et se rendit compte que cette précipitation pouvait aussi être interprètée comme une forme d'irrespect,  voir de mépris à l'égard d'Ernst,  et donc par extension à sa famille.

- Je... Je veux dire... Pardonnez moi Madame, ce que je tente d'expliquer, à vous dans l'immédiat, et à Monsieur Grison-Ebermann tout à l'heure, c'est qu'il s'agit d'une terrible méprise. Je n'ai jamais cherché à le charmer de quelque façon que ce soit, pas plus que je n'ai projeté de... Enfin que l'on...

Elle jeta un regard en biais au préfet,  comme si elle cherchait à ce qu'il confirme lui aussi qu'il y avait erreur. Mais elle n'espérait en vérité pas grand chose de sa part.

- Et... Ce n'est pas quelque chose d'envisageable ? Réfléchissez bien, Garde Visenrov.

Un frisson parcourut l'Utgardienne qui se raidit en entendant ces paroles. Elle tourna des yeux choqués sur la dame, ne comprenant pas en quoi cette question avait lieu d'être. En vérité, elle ne comprenait pas grand chose à toute cette histoire depuis son début. D'une voix quelque peu tremblante d'anxiété tant d'incompréhension,  elle mit un petit temps avant de répondre.

- Je vous demande pardon ?

C'est à cet instant qu'on entendit avec fracas tambouriner à la porte. La brune eut un petit sursaut inquiet avant de retourner son regard sur les deux propriétaires des lieux. La vieille, elle, était d'un calme exemplaire. Sans se presser, elle fit signe à son petit-fils d'aller ouvrir la porte. Celui-ci, sans piper mot, s'empressa d'obéir. Désormais seules, les deux femmes se contentaient de se regarder dans les yeux. La Grison-Ebermann avait un demi sourire et se refusait à réponse. Le silence avait quelque chose de terriblement gênant pour Raina.

Mais il ne le demeura pas très longtemps... Car bien vite une voix tonitruante éclata, à la porte que Ernst venait d'ouvrir. Et cette voix... Raina la connaissait que trop bien. La jeune femme, les yeux écarquillés, sauta sur ses deux jambes instantanément.  Après un petit signe de tête empressé,  elle se dépêcha de regagner le couloir menant à l'entrée de la demeure, le cœur battant d'angoisse, la démarche militaire de quelqu'un qui ne va pas manquer de se prendre un fâcheux savon.


- Officier Degure ! Je vais tout vous expliquer..
- Il vaudrait mieux, Visenrov ! Un abandon de poste, c'est inadmissible !
- J'en ai conscience, officier. Loin de moi était cette idée... J'ai rencontré un problème, dû à un terrible quiproquos avec Monsieur le Préfêt ci-présent... Et... Et les Asca... Les civils, je veux dire... Ils menaçaient de se soulevé à cause de ce malentendu, je ne parvenais pas à...


Avouer avoir perdu toute autorité sur le peuple, ce n'était peut être pas la meilleure des idées, étant donné sa position. Elle avait déjà bien du mal à se faire bien voir de son supérieur, inutile d'ajouter de l'eau à son moulin. Raina prit une grande inspiration pour retrouver un calme plus professionnel. Puis se plantant militairement devant Degure,  elle conclut :

- Je vous prie de m'excuser, Officier. J'aurai dû vous informer des difficultés que je rencontrais et ne pas prendre la liberté de quitter mon poste en plein service. Ca ne se reproduira plus...
Ernst
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Dim 7 Mar - 0:24

Ça je peux garantir que ça ne se reproduira plus ! Finies les escapades en plein jour avec votre amant ! Votre consigne est surveiller les endroits les plus malfamés, pas de vous y allonger ! Interpellez moi celle-là et foutez à la caserne, je vous rejoins.

Et joignant le geste à ses ordres, l’autorité du commandant se saisit de Raina par l’action de deux gardes. Ils l’éloignèrent aussitôt de cette maison où elle s’était déshonorée.

Pour ce qui est d’elle, je vais m’en occuper. Mais vous - il pointait Ernst -, je ne sais pas à quoi vous pensiez pour séduire mes gardes ! Vos sales pattes l’ont corrompue et voilà qu’on m’envoie des lettres pour me dénoncer une affaire d’état ! On me menace ! On ose me menacer ! Je connais les méthodes du cardinal, et je ne vais pas me laisse intimider. Vous ne croiserez plus Visenrov, vous ne chercherez plus Visenrov ! A partir de maintenant, elle n’ira plus dans le quartier Ascanien et vous aurez l’herbe coupée sous le pied, séducteur !
Ernst, qui certes se savait séducteur et doué pour cet art, n’accepta pas les remarques du commandant.
Il est des murs, il est des barrières, mais aucun obstacle ne m’arrêtera. Si Rainette et moi devons nous marier, nous nous marierons.
Les quelques gardes autour pouffèrent.
Vous… vous l’appelez “Rainette” ? Je… je ne veux pas le savoir et je ne veux pas connaître les jeux auxquels vous vous adonnez. Quel est votre nom ?
Je suis Ernst Grison-Ebermann
Eh bien monsieur Grison-Ebermann, je vous interdis d’aimer la garde Visenrov.
Le préfet ne se sentait pas concerné par le fond, mais il était révolté par la forme. Il avait de fortes tendances réactionnaires et décrédibiliser la garde était une tradition dans le milieu où baignait Ernst. Savoir que la garde, par un officier, venait chez lui pour lui soustraire une femme rendait celle-ci immensément désirable, temporairement au moins.
Comment ? Comment interdire à un homme d’aimer ? Qui êtes-vous monsieur pour me dire ce que je dois aimer ? Vous croyez-vous habité par Providence elle-même pour dicter… ?
Je suis le commandant de la garde, banane, et j’ai tout autorité pour te dénoncer comme traître si le coeur m’en dit. Saisis-tu à qui tu as affaire ?
Alors c’est ainsi ?
C’est ainsi.
…la garde s’autorise donc désormais à menacer la cavalerie Ascanienne ?
… pardon ?
Vous intimidez nos préfets monsieur le commandant Degure ? glissa très insidieusement la Vieille aux yeux mauvais.
L’officier fronça les sourcils un instant, cette femme connaissait son nom ? Ce type était un préfet ? Et la garde Visenrov, parmi tous les ascaniens, avait choisi un préfet de la cavalerie Ascanienne ? Il enragea intérieurement de cette complication et jura de la faire payer chèrement à la fautive. Auguste Degure, comme tout homme de haut rang, savait qu’il fallait fuir les complications comme la peste.

Je n’intimide personne madame, je vous demande de ne plus nuire au travail de la garde.
Vous accueillir chez nous quand vous le demandez, et subir vos irruptions vociférante, ce serait nuire à la garde ? glissa encore cette vieille à l'étincelle féroce.
Vous ne m’intimiderez jamais ! glapît Ernst en s’enfuyant par la porte pour retrouver sa fiancé.
Allons madame, tout cela est un malentendu. Nous n’avons rien contre les autorités Ascaniennes.
Pourtant je vous ai entendu, comme tout le monde ici, menacer un préfet. La garde a-t-elle décidé de fouler au pied ses accords avec les Ascaniens ? Le gouverneur Krox vous a donné l’ordre de venir saccager mon logis, où c’est une initiative personnelle, monsieur le commandant Dégure ?
Le commandant fulminait. Mais qui était cette foutue peau-de-vache dont il ne parvenait à se défaire ?

De son côté, Ernst rattrapa les hommes qui emportaient Raina. Hélas, l’un d’eux se détacha pour l’arrêter. Ernst, sans se débattre, continua d’avancer pour rester à porté de voix de Raina, il lui déclamait ses mots pour l’encourager, ou peut-être il chantait :
Ne me demande pas pourquoi notre amour est impossible, moi je travaillais pour nous, mais ton officier est devenu fou. On prenait notre couple en exemple, notre histoire était si belle, si attendrissante. Tu sais… comment peuvent-ils faire pour tout gâcher ? Toujours à espionner, on ne faisait que s’aimer et Providence en soit témoin

La foule s'agglomérait autour d'eux, chacun était témoin de cette séparation déchirante, l'émotion était sur tout les visages.
Pourquoi la garde se montrait si cruelle ? Quelles horreurs ces hommes allaient faire à cette femme pour lui faire renoncer à son amour ?
Le pourraient-ils d'ailleurs? Non, cet amour semblait au delà des obstacles, dans la plus pure tradition ascanienne. Si l'un on l'autre devait revenir sur cet amour, il deviendrait parjure, et par là même, bien méprisable.

Ernst déclamait encore tandis que Raina rejoignait la caserne, à cause de la distance à présent, il devait hurler et être entendu de la moitié du quartier curieux :
Je voulais que tu portes mon nom ! Qu'on s'aime à notre façon !
C’était ce qu’on s’était promis, A la mort, à la vie !


Crying or Very sad
Raina Visenrov
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Mer 24 Mar - 1:52
La moutarde commençait à sérieusement monter au nez de l'Utgardienne dont le regard se faisait de plus en plus noir, de seconde en seconde, alors que Degure déversait son flot de paroles aussi blessantes qu'infames. De quel droit lui parlait il de la sorte ? De quel droit la traitait il ainsi ? Comment pouvait il se permettre de la traîner dans la boue, sans écouter aucun de ses explications, ni même lui laisser le bénéfice du doute ? Elle était innocente, bon sang ! La seule et véritable victime dans cette histoire ! Et comme si elle n'avait pas déjà eut son lot de misères depuis le matin, voilà qu'on l'humiliait une fois de plus à la vue et l'oreille de tous ! D'une part, par le scandale des paroles proclamées à tue-tête, de l'autre en donnant encore un peu plus de raison et d'existence aux rumeurs infondées qui couraient déjà.
Supérieur ou pas supérieur, la milicienne ne pouvait tolérer qu'on lui parle ainsi, et une furieuse envie de lui balancer son poing dans la figure venait d'éclore subitement au plus profond de son être. Elle tremblait de tout ses membres, se retenant avec force et violence d'écouter ses bas instincts, mais la colère se faisant plus grande mot après mot, la petite Utgardienne ne put se retenir d'ouvrir la bouche, prête à répliquer.

Elle n'en eut toutefois ni le temps ni l'occasion. Les gardes la saisirent, et sans sommation, la forcèrent à avancer pour l'éloigner de la demeure des Grison-Ebermann. La jeune femme se débattait, pour le principe.


- Lâchez moi ! C'est n'importe quoi ! Un véritable complot ! Lâchez moi immédiatement !

Mais rien n'y faisait, ses collègues – qui finissaient par bien connaître la petite furie qu'elle savait être -, la tenaient fermement sans se donner la peine de lui répondre quoi que ce soit.
Elle eut beau grogner, jurer, menacer, distribuer coup de pieds comme coups de coudes, elle ne parviendrait à se défaire de ses geôliers qu'une fois rentrer à la caserne, et dans l'intimité du bureau de Degure.

Alors qu'on l'éloignait par la force, à une allure militaire, Raina entendait une dispute se poursuivre aux portes de l’habitation ascannienne. Elle ne saisit pas les propos, tout occupée qu'elle l'était avec ses propres soucis, mais il était évident qu'un désaccord persistait entre Ernst et le capitaine de la milice. Le ton montait, et il lui sembla même à un moment que la vieille s'était mêlée au litige.

Alors que leurs voix s'estompaient à mesure qu'ils avançaient, tout soudain sans qu'elle n'y fut préparé, elle entendit la voix du préfet résonner entre les murs de la ville.
Et c'était une belle douche froide...

La déclaration était des plus gênantes. Instantanément, Raina eut l'envie de se cacher dans un trou de souris... Ca ressemblait à l'une de ces sérénades à deux sous, qui loin d'être mignonnes inspirent un profond malaise et une furieuse envie de rire.
Tout les regards étaient tournés sur elle... Et elle n'avait aucune envie de rire, les joues rouges de honte, et elle priait Njörd que l'imbécile derrière elle daigne se taire.
Comment vouliez vous prouver à qui que ce soit que tout ceci n'était pas fondé, et que ce n'était qu'un triste malentendu ? Sa cause était perdue...

De là, l'Utgardienne cessa de se débattre, et tête baissée, résignée et abattues, elle se laissa escorter jusqu'à la caserne.



*~*~*


- Mais je vous assure, Commandant, je n'ai pas la moindre idée de ce à quoi cette lettre fait mention !
- Cessez de mentir, Visenrov !
- Mais non, je vous le jure ! Je n'ai rien fait du tout ! Je ne connais que vaguement Monsieur Grison-Ebermann et jamais je ne me suis ou ne me serais permise quoi que ce soit à son encontre !
- Et pourtant, c'est bien chez lui que nous vous avons trouver tout à l'heure. Et durant l’exercice de vos fonctions, en plus !


Raina se trouvait autant désemparée que sous le choc. La journée, qui avait déjà été forte en émotions depuis son tout commencement, semblait vraiment aller de mal en pie. C'était tout bonnement une histoire de fou, depuis le début.
D'abord les accusations dans la rue, puis la confrontation avec Ernst, la vieille femme, des propos concernant un mariage, des insultes à son égard, l'éruption de Degure dans le salon... Le plus dingue restant encore cette déclaration mal venue, devant une foule de témoins, et qui était sorti de la bouche du préfet comme si une mouche l'avait piqué, au pire moment où elle pouvait tomber.
Et à présent, cette lettre l'incriminant, et venant tout droit de personnes hauts placées, que le Commandant Degure aurait reçu le matin même. Elle l'avait lu – deux fois – et en était restée muette de stupeur tant tout cela était hallucinant. La conclusion était glaçante : le mariage ou son renvoie de la garde de Claircombe. Et autant vous dire qu'aucune de ces deux options n'étaient envisageables pour la jeune Utgardienne. Elle comptait bien défendre sa cause, bête et ongle.

Mais malheureusement, le Commandant ne semblait pas très disposé à lui prêter l'oreille.


- Ce n'est pas ce que vous croyez...
- Vos bonnes excuses, je m'en moque, Visenrov ! Moi je crois ce que je vois et uniquement ce que je vois. Et je vous ai vu, dans sa maison, avec lui, après que l'on m'ait reporté des faits similaires. Je l'ai entendu vociférer ses idioties dans la rue.


Il omettait de préciser également qu'il ne l'avait jamais eu à la bonne de toute manière et qu'il n'était sans doute pas mécontent d'avoir un bon prétexte pour lui passer un savon.

- Commandant Degure, écoutez moi s'il-vous-pl...
- Assez ! Sortez maintenant.


Il désigna un des soldats présent avec eux dans la bureau.

- Vous, là. Escortez Visenrov jusqu'à son dortoir, qu'elle puisse y récupérer ses affaires.
- Quoi ?! Mais non, je...


Le Commandant leva la main pour la contraindre au silence et Raina sentit son cœur sombré ; la peur, l'incompréhension et la colère se mélanger dans sa tête.

- Vous serez suspendue jusqu'à la fin de la semaine, Visenrov. Et sans solde, bien sûr. Le temps que je décide de votre cas.
- Ce n'est pas juste !
- Bien, alors disons plutôt jusqu'à la fin de la semaine suivante.


Sourcils froncés, autant contrariée que folle de rage, Raina ne répondit plus rien, comprenant qu'elle ne faisait qu'aggraver son cas. Elle baissa les yeux, telle une enfant se faisant gronder par son père, et serra si fort les poings que tout son corps fut prit de violents tremblements.

- Parfait. Maintenant, déguerpissez ! Vous serez convoquée lorsqu'une décision vous concernant aura été prise.

Accompagnée du garde, la milicienne tourna les talons.
Elle bouillonnait... Non, ce n'était pas du feu d'un quelconque amour la consumant, mais bel et bien d'une colère explosive et dévastatrice.


- Oh, et... Bien sûr... Je vous déconseille vivement de retourner voir votre amant. Sinon, je pense que j'aurais besoin de bien moins de temps pour décider quoi faire de vous.

Et ça, c'était bien la pire des sentence. Car Raina ne rêvait dès lors plus que d'une chose : retrouver Ernst et s'assurer qu'un dieu quel qu'il soit se serait charger de lui décocher une flèche en plein cœur...
Sans quoi, elle se ferait un plaisir d'y planter elle-même une hâche.
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