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Claircombe  :: Titre :: Quartier Amaranthis :: Le Lys d'Argent :: Le prix de l'innocence (Adrian & Raina) ::
Le prix de l'innocence (Adrian & Raina)
Adrian Mayr
Adrian Mayr
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Âge du personnage : 31 Ans
Métier : Apothicaire
Ven 25 Déc - 21:21
Le froid de l’automne devenait mordant à cette heure tardive où le soleil avait définitivement déserté les rues de la cité. Bien qu’il n’ai pas plu de toute la journée, l’air saturait en humidité rapidement à mesure ou la soirée avançait. Les pavés bien entretenus des rues du quartier Amaranthis réfléchissaient les lueurs chaudes des lanternes et autres torches accrochés sur les devantures des habitations et commerces qui jonchaient les rues. Comme souvent au début de l’automne, les habitants du quartier Amaranthis avaient tendance à se réunir rapidement en intérieur, désertant les rues relativement tôt dans la soirée. Les tavernes et restaurants fermaient leurs portes et fenêtre, ne laissant échapper qu’un bourdonnement de discussions qui filtrait péniblement au travers des murs épais.
La partie nord du quartier Amaranthis n’était pas la plus fournie en lieu de divertissement, si bien que passé une certaine heure le silence avait tendance à régner en maître. C’était le cas à ce jour, le vent s’engouffrait dans les rues déserte, envoyant les feuilles morte s’écraser contre les murs massifs des habitations. Si les rues n’avaient pas été si larges et entretenues, on aurai pu se demander si on ne mettait pas les pied dans un coupe-gorge tant il n’y avait pas âme-qui-vive ce soir la.
Au détour d’une rue ressemblant à toutes les autres, un bruit semblait cependant s’élever dans les airs, raisonnant aux alentours. Ce bruit était un mélange de voix, de cris, de pas hésitant...et de douleur. L’écho d’une souffrance non dissimulée.


______


Un pas....Un autre...puis un autre...Adrian mobilisait les forces encore présente en lui pour ordonner à ses jambes de le porter au maximum. Sa vue lui jouait des tours, ses oreilles bourdonnaient tel un tambour de guerre annonçant une bataille, le goût ferreux du sang emplissait sa bouche à chaque instant de la lente progression des protagonistes. S’il se concentrait pour rester debout, il était bon d’admettre qu’il n’aurai jamais pu rester sur ses deux jambes à cet instant sans l’assistance de sa compagne de fortune, Raina, la milicienne Utgardienne qui avait partagé sa mésaventure plus tôt dans la soirée.

Bien que plus petite que lui, la soldate le maintenait fermement debout en lui fournissant un appui du coté ou sa jambe était particulièrement meurtrie par le choc qu’il avait subit. Sur son autre flanc, un civil qui répondait au nom de Sieg avait proposé de les assister pour ramener Adrian chez lui. L’homme prétendait connaître «Monsieur Mayr», comme il le disait si bien, celui-ci lui aurai déjà porté assistance pour soigner sa femme. A cet instant, l’apothicaire n’aurai pu remettre un nom sur un visage, à moins qu’il ne connaisse personnellement l’individu...Ce qui n’était pas le cas. Cependant, il ne crachèrent pas pour de l’aide.

Adrian avait donc un soutien solide de part et d’autre, mais cela n’empêchait pas la progression d’être lente et fastidieuse. Derrière le claudiquant cortège, une fine et irrégulière traînée de sang teintait les pavés de sang. Le liquide rougeâtre semblait dessiner une piste menant directement au blessé. Parfois, Adrian devait tousser pour évacuer des afflux de sang qui emplissaient sa bouche. Ce n’était pas bon signe...Et se mouvoir n’arrangeait pas les choses. Il s’efforçait de rester le plus droit possible, car il sentait que ses cotes n’étaient pas en très bon état et qu’elles étaient probablement la cause des saignement internes.

L’apothicaire était pâle, bien qu’il ne se vide pas de son sang à grande vitesse, il avait perdu beaucoup du fluide vital tout au long du périple. Les cernes autour de ses yeux semblaient s’être accentuées, donnant l’impression que ses yeux s’enfonçaient dans son visage au regard voilé. Les yeux mi-clos, il se guidait aux repères clés pour donner les informations essentielles, une devanture reconnaissable, un arbre planté au coin d’une intersection, information qu’il retranscrivait par des «droite» «gauche» à ses compagnons.

Le trajet lui semblait durer une éternité. Au lointain, il entendait la voix de sa compagne de fortune qui semblait essayer tant bien que mal de le tirer de sa souffrance, tant par le soutien moral que physique. A aucun moment Adrian n’eut besoin de douter du renfort d’appui qu’elle apportait à sa jambe la plus meurtrie. Instinctivement, il avait déjà placé sa confiance en Raina au moment ou elle l’avait aidé à se redresser, dans la taverne. A cet instant, la voix étonnamment plus bienveillante de la milicienne était un fil de soie guidant Adrian à travers les ténèbres, l’empêchant de sombrer dans l’inconscience, lui faisant même parfois oublier la douleur pendant quelques secondes. C’était d’ailleurs la seule chose qu’il entendait au travers du bourdonnement du sang qui pulsait dans ses veines et raisonnait dans ses tympans. A chaque fois qu’il manquait de sombrer, la voix de sa compagne de fortune raisonnait à nouveau, le ramenant à la réalité.

Après une fastidieuse et lente progression dans les rues déserte, l’intersection reconnaissable par ses quatre maisons identiques à chaque coins apparut au devant du petit groupe. L’une de ces quatre enseigne était l’échoppe d’Adrian. Bien que d’une hauteur loin d’être démesurée , ces quatre bâtisses surmontée de deux étages et d’une toiture ressemblant à une petite chapelle évoquaient des tours séparant les quartiers en quatre lieux distinct. Cet effet était renforcé par le fait que chaque rue commençant ici se composait de maisons à un seul étage, voir de plein pied. Objectivement, quiconque appréciait l’architecture trouverait la construction du lieux fort élaborée...Mais la n’était pas le sujet qui préoccupait les protagonistes.

Arrivant en titubant devant la porte, Adrian s’appuya un temps contre le mur de la façade, près de la lourde porte de bois au sommet arrondit. Ils y étaient, le calvaire de la marche à l’agonie touchait à sa fin. Bien que non tiré d’affaire, l’apothicaire s’accorda un instant de répit, le temps d’une pause....Mais fut très vite rappelé à l’ordre par son corps meurtri. Il eut l’impression que chaque parcelle de son corps était dans un sale état. Bien que beaucoup de blessures soient superficielles, l’ensemble combiné de toutes les éraflures et injures plus graves malmenait sa gestion de la douleur. Il serra les dent et retint de pousser un cri, marmonnant un grognement de douleur contenu. Quelle idée avait-il eu de jouer aussi gros? Il n’en savait rien. Probablement avait-il espéré que le mercenaire qui se situait près de cette fameuse porte n’était pas un combattant...Regrettable erreur.

Bien que l’esprit embrumé, il se demanda si le marchand qu’il avait neutralisé avait finalement put s’en sortir. Après tout, Raina et lui était partit prestement de la taverne, probablement que tout ça n’aurai donc bel et bien servi à rien. Aura-t-il finalement des problème avec la justice? C’était probable. Dans tout les cas, il ne pouvait s’autoriser à divaguer, pas maintenant en tout cas.

Adrian releva la tête vers Raina. Son regard partiellement embrumé ne l’empêcha pas de sentir un vif réconfort à la vue de la milicienne, qui ne l’avait en aucun cas laissé tomber comme elle aurai pu le faire. Une chaleur inexpliquée naquit à nouveau au niveau de son plexus, effaçant la douleur pendant une fraction de seconde, avant de se dissiper. A vrai dire, le fait de ressentir ce genre de chose était assez inédit pour l’Apothicaire qui avait plutôt une tendance à se détacher involontairement de tout ressentit inconnu. Dans d’autre circonstance, il aurai sourit à cet instant, mais son visage déformé par la douleur ne lui permettait pas cela. Il toussota à nouveau quelques gouttes de sang avant de prendre la parole.


"En rentrant...vous allez devoir avancer dans le noir...Ayant l’habitude des lieux je n’ai pas installé d’éclairage à l’entrée....Vous devrez précisément faire cinq pas en avant, tourner à gauche sur cinq pas à nouveau, puis droite sept pas, droite trois pas et enfin à gauche...Pour arriver au fond de la pièce ou vous trouverez de quoi éclairer la pièce."

Bien que cela puisse paraître bizarre de guider les gens au travers d’un chemin précis, cela devenait logique lorsque l’on entrait dans l’échoppe de jour. Jonchée de parterre de plantes et autres bacs emplit de végétaux, il n’était pas aisé de s’y retrouver dans le noir sans heurter quelque chose. Intérieurement l’apothicaire salua son défaut de perfectionnisme qui l’avait amené un jour à compter précieusement le nombre de pas qui séparait le comptoir de la porte d’entrée.

Se détachant du mur, Adrian appuya sa main ensanglantée à cause de la coupure sur sa main en plein sur l’écriteau du mur qui indiquait :

«Le Lys D’argent, Herbes et préparations médicinales
-A&L»

Une tache de sang était venu s’imprimer sur la pancarte, sous la main de l'apothicaire. Le souffle court, Adrian reprit tant bien que mal la parole.

"Il va falloir rapidement retirer rapidement les fragments de bois, je vais devoir m’en remettre à vous, dame Raina...Je n’aurai pas la force de le faire seul, et j’ai besoin de quelqu’un d’appliqué...Une fois au fond de la pièce...Je devrais avoir ce qu’il faut pour les soins.."

Sans aucune intention de vexer l’homme qui les avait accompagné, Adrian avait bien plus confiance en une milicienne entraînée qu’en une personne dont il ne connaissait rien. Il avait cependant conscience qu'il était encore possible que Raina ne concède pas à l'aider plus qu'elle ne l'avait déjà fait, bien que ce scenario ne lui paraisse guère possible.

Adrian plongea son regard partiellement voilé dans celui de Raina pendant quelques secondes. Un vague sourire se dessina sur son visage sans qu'il ne dise mot, il était déjà grandement reconnaissant que la soldate lui porte assistance au risque de laisser s'enfuir un malfrat. Plus tôt dans la journée, il n'aurai pas juré qu'elle ferai ce choix. Adrian aurait voulu la remercier à cet instant, mais il n'avait pas réellement la force de le faire, espérant que ce sourire déjà difficile à formuler suffirait à illustrer son propos.  
Raina Visenrov
Raina Visenrov
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Dim 27 Déc - 22:15
S'il faisait frais, Raina n'eut pas loisir de s'en préoccuper. Depuis leurs mésaventures à la taverne, la milicienne, après avoir abandonné sa proie sur les lieux, n'avait plus eu qu'une chose en tête : porter secours à Adrian qui semblait plus mal en point de seconde en seconde.
Il avait beau ne pas être bien gros, ni tout spécialement grand comparé à certains hommes, ni même encore lourdement vêtu ou équipé, le poids du corps de l'apothicaire pesait lourd à la longue pour la petite personne qu'était Raina. Sans son entraînement et sa musculature, beau nombre de femmes – et même d'hommes – n'auraient été en mesure de l'assister que sur quelques mètres, tout au plus. Il fallait dire que les pas de l'homme étaient mal assurés, et que revenant à sa jambe blessée, il avait tendance à se reposer davantage sur l'épaule de sa compagne que sur les forces qui restaient à son propre corps.
La progression était longue, pénible... Raina, au bout de plusieurs minutes, rêvait secrètement de faire une pause, de s'étirer et reprendre son souffle. Mais elle ne se l'autorisa pas même une fois. Le temps pressait, la vie d'Adrian était en danger. Et chaque gémissement, chaque sanglot étouffé, regonflait la détermination de la jeune femme à le sortir de ses souffrances et du danger sérieux que représentait l'ensemble de ses blessures.
Oh que non, elle ne voulait pas le perdre. Oh que non, elle ne le permettrait pas.
A chaque fois que les yeux émeraudes roulaient dans les orbites du malheureux blessé, à chaque fois qu'il semblait faiblir contre elle, Raina s'efforçait de le tirer de l'inconscient, l'encourageant à rester avec elle, au près d'elle, de tenir bon. C'était comme si elle partageait sa souffrance... Sa voix, qui cherchait à être douce et rassurante, tremblait d'inquiétude et sous la dureté de l'effort qu'elle se devait d'accomplir.

Qu'il ne meurt pas... Pitié, qu'il ne meurt pas...

A l'orée du quartier Amaranthis, un homme s'approcha d'eux et proposa son aide. D'abord méfiante, Raina n'avait pas su si elle se devait d'accepter ou non qu'il se joigne à eux. Il expliqua alors connaître Adrian, une histoire de bonne femme malade ou on-ne-savait-quoi-et-on-s'en-fichait-pas-mal... La milicienne avait alors posé son regard sur l'apothicaire, cherchant confirmation de ces dires. Mais celui-ci regardait sans voir les pavés bien entretenus de la rue, et était plus fiévreux que jamais.
Alors la brune accepta. Et son corps endoloris l'en remercia... Si ce fut plus facile d'assister ainsi Adrian, il ne demeura pas moins pénible d'avancer, et chaque seconde écoulée accentuait un peu plus l'angoisse chez Raina, dont le cœur battait à tout rompre contre sa poitrine... Si fort, qu'elle avait la sensation que tout le monde pourrait le voir pulser, au travers de son haut autrefois clair, qui était désormais souillé et tâché du sang noir de son compagnon...



* * *



L'Utgardienne commençait à désespérée d'arriver à destination. Il lui semblait que cela faisait des heures qu'ils marchaient et qu'ils avaient parcouru des kilomètres au moins. Elle n'en pouvait plus d'entendre Adrian gémir, de le sentir peiner un peu plus à chaque pas. Il grelottait, suait à grosses gouttes, et devait s'arrêter tellement souvent pour cracher une flopée de sang qu'elle doutait qu'il lui en reste encore beaucoup.
Tout était relatif, c'était sans doute sa peur qui lui faisait voir les choses ainsi. Mais les regards du dénommé Sieg n'allaient pas pour la rassurer non plus.
Ses encouragements étaient devenus presque machinal. Les mots n'avaient pour ainsi dire plus le moindre sens tant elle les avait déjà prononcé. Elle était tétanisée de douleur et se refusait à s'écouter. La peur prédominait dans son ventre, son esprit était trouble. Un mélange de compassion, de sentiment de culpabilité et une forme étrange d'attachement tourbillonnaient en elle en une tempête dévastatrice.

Qu'il tienne... Qu'il tienne...

Où elle était, cette fichue boutique ?
La voix fébrile de l'apothicaire ne se faisait audible que pour des simples gauche et droite. C'était étrange. La ville semblait tout bonnement dépeuplée, déserte. Leurs bottes résonnaient en écho contre les murs de pierres de la rue. Elle aurait pu entendre mille et une choses... Les discussions dans les demeures, les volets qui se ferment, les pas timides des amoureux se retrouvant secrètement dans les ruelles, leurs embrassades sous les étoiles... Les pas lourds d'un garde, plus bas dans la rue, exerçant sa ronde. Les messes-basses de quelques truands organisant leurs casses du soir... Mais dans ses oreilles, elle n'entendait que la respiration pénible du blond, qui se faisait plus sifflante d'effort d'instant en instant.

Ne pas le perdre... Ne pas le perdre...


- C'est ici.

Raina leva la tête soudainement, comme si un rayon timide de lune venait éclairé enfin leur chemin d'un relatif espoir. Devant eux, à quelques pas, se trouvait quatre bâtisses identiques, et en suivant le doigt pointé de Sieg, elle comprit que l'une d'elle était la boutique de l'apothicaire.
Un soupir de soulagement passa ses lèvres, alors qu'elle levait les yeux vers le ciel en remerciant silencieusement Njörd de leur être venu en aide.
Raina ne se délecta pas de l'architecture des lieux. Déjà, parce qu'elle n'y connaissait rien et n'était pas fervente amatrice en la matière. Ensuite, parce qu'il ne fallait pas crier victoire trop vite. Adrian était toujours en piteux état et n'était pas tiré d'affaire. Ils avaient juste atteint le lieu où ils avaient le mince espoir de pouvoir le soigner.

Raina aida l'Amaranthis a s'appuyer contre la porte de sa boutique. Celui-ci releva les yeux vers elle, et voyant ses cernes noires creusant son visage, elle ne put s'empêcher de mordre quelque peu sa lèvre inférieure. Elle avait l'étrange sentiment... Que ses nerfs pourraient la lâcher d'un instant à l'autre. Et pourtant, elle se devait d'être forte et de garder la tête froide. C'était le seul moyen d'aider Adrian.
Il lui indiqua un chemin à suivre pour trouver de quoi éclairer les lieux, une fois à l'intérieur. La milicienne hocha la tête, en signe de compréhension, et répondu d'une voix plus douce qu'elle ne l'aurait supposé.


- Entendu, j'irais chercher ça.

… En vérité, elle avait déjà tout oublié de ses indications. Mais il fallait aussi dire qu'elle était bien sur qu'elle n'aurait pas de mal à trouver de quoi avoir un peu de lumière.
Elle comprit que ce ne serait pas si simple, dès lors qu'ils pénétrèrent dans le bâtiment. Il y faisait une obscurité impressionnante. Même en plissant très fort les yeux, l'Utgardienne ne distinguait que tout juste ce qui se trouvait à porter de main. En plus de cela, le sol semblait encombré d'on-ne-savait-quoi qui manquaient de la faire trébucher à chaque pas. Sieg les suivit, lui non plus pas tellement plus à son aise.

La milicienne se tourna vers Adrian, dont elle ne distinguait que vaguement le visage. Elle ouvrit la bouche, prête à lui redemander ses indications de chemin, lorsque celui-ci la coupa dans son élan. Il lui indiqua les premières démarches qu'ils allaient devoir effectuer pour espérer le maintenir en vie.

Rester forte... Rester forte...

Le temps pressait. La jeune femme referma la bouche, déglutissant avec peine. Un simple petit bruit de nez confirma à l'apothicaire qu'elle avait bien compris. Elle tourna les talons, ne jugeant pas nécessaire de lui faire gaspiller ses forces à se répéter.

D'abord, la lumière.
La tâche se montra plus complexe encore qu'elle n'y paraissait. Dans le noir, Raina était obligée de tendre les mains devant elle pour éviter de se cogner. A deux reprises, elle manqua de tomber en se prenant les pieds dans l'un des parterres jonchant le sol. Une autre fois, elle tomba même genoux à terre en jurant à voix basse. Elle se cogna une épaule contre un mur, avant de finalement trouver l'un des bureaux dans un bruit de fracas de verre.
… Elle venait sans doute de casser une fiole s'y trouvant.


- … Désolée …

Elle farfouilla le bureau, mais rien n'y ressemblait de prêt ou de loin à quelque chose pouvant fournir de la lumière. Scrutant autour d'elle, il lui sembla alors qu'un autre établi se trouvait non loin, et elle s'y aventura, avec plus de précaution encore.
Ce bureau-ci était beaucoup plus dégagé et elle y trouve rapidement un chandelier. Non loin de celui-ci se trouvait un briquet et des mèches en amadou. Avec précipitation, elle entreprit d'en allumer une. Ses mains tremblaient tellement qu'elle dû s'y reprendre à plusieurs fois. Finalement, une gerbe d'étincelle jaillit et elle put enfin allumer une à une les bougies sur leur support.
Elle revint donc avec considérablement plus de facilité jusqu'au deux hommes. A la lumière tremblante des chandèles, Adrian lui semblait en plus mauvais état encore. Sieg avait prit l’initiative de le maintenir à son tour, du côté de sa jambe abîmée. Raina s'efforça d'afficher un visage des plus confiants possible. Sa voix retrouva une certaine fermeté.


- Ramenez le là-bas, on va l'allonger sur l'un des comptoirs.

De retour au centre de la boutique, il parut évident que le bureau où elle avait trouvé de quoi les éclairer était le moins encombré et donc le plus adapté à la pénible et sanguinolente tâche qui les attendait.
Elle balaya les dossiers s'y trouvant d'une manchette, les laissant choir au sol sans autre cérémonie. Pas le temps pour le tri et le rangement, ça attendrait.
Leur compagnon de route aida alors Adrian à s’asseoir, puis à s'allonger sur la table d'opération improvisée. Il releva alors les yeux vers la soldat, attendant ses commandement.

C'était l'Amaranthis qui avait placé sa confiance en elle. Et c'est tout naturellement que l'autre homme s'en était remis à son jugement également. Tout se passait sans mal. Et sans doute que la milicienne aurait pu apprécier de se retrouver d'un seul coup comme une chef au milieu de ces hommes... Mais à vrai dire, elle n'eut pas le luxe de le savourer ne serait ce qu'un instant.
Et Sieg, lui, semblait plutôt soulagé de ne pas devoir intervenir lui-même sur les blessures de l'apothicaire. Comment le devinait elle ? Eh bien, il était presque aussi blanc que le blessé lui-même... Il ne devait pas nourrir un grand amour pour le sang, celui-là...
Elle le regarda un instant, avant de lui tendre une bougie qu'elle décrocha du chandelier.


- Faites le tour de toute la pièce et offrez moi le plus de lumière possible.
- Bien, Madame.


Il saisit la chandelle et s'exécuta, allumant chaque torches, brasero et autres chandeliers qu'il trouva.

Durant ce temps, Raina observait la jambe d'Adrian. Elle avait reposé son propre chandelier sur la table, effleurant les plaies de ses doigts. Ce n'était vraiment pas beau à voir... L'entièreté de la jambe était ensanglanté, couvertes de coupures et éraflures diverses... Et bien évidemment, le plus impressionnant restaient encore les deux gros éclats de bois qui s'étaient plantés dans sa cuisse. Elle n'avait que peu de visibilité sur l'ensemble des séquelles de son membre, aussi, elle avisa des ciseaux, et sans lui demander son autorisation, commença à découper grossièrement le tissus de son pantalon pour mieux voir ses blessures. Par endroit, le tissu collait à sa chair, et une expression de douleur s'échappait de l'apothicaire alors qu'elle tirait dessus par mégarde.
Elle lui adressa une moue désolée.


- Excusez moi...

Elle s'arrêta dans sa découpe quelques centimètres plus haut que le dernier éclat de bois. Loin de elle l'idée de déshabiller le malheureux blessé.

Sieg revint, sa tournée finit.
Ils échangèrent un regard, puis la milicienne reporta son attention sur la jambe ensanglantée d'Adrian. Son assurance semblait s'être envolée l'espace d'un instant. Leur compagnon, lui, l'observait elle, et il devait bien deviner tout ce qui lui passait pas la tête à cet instant.


- Il faut vous décider...

Elle sursauta quelque peu. Son regard alla de Sieg au visage d'Adrian. Elle serra les dents un instant. Elle ne se sentait pas prête... Non vraiment pas...
Sa voix reprit une certaine douceur :


- Pourriez vous indiquer à notre ami où il peut trouver tout le nécessaire pour... Ca... Adrian ? Oh, et... Auriez vous... Je ne sais pas moi, quelque chose pour atténuer votre douleur ? Une décoction de je-ne-sais-quoi... Ou peut être vous reste-t-il un peu du liquide que vous transportiez dans cette fiole... Vous savez... Celle que je vous ai confisqué un peu plus tôt...

Une vague de souvenirs lui remonta alors. Le visage soigné et apprêté de l'homme dans la foule... Son air inquiet, lorsqu'elle l'avait observé échanger au loin avec le marchand... Son étonnement en ouvrant la cassette... Le visage paisible qu'il avait offert au ciel... Son sourire alors qu'elle l'interpellait... Ses yeux d'un vert émeraude...
Un tas d'émotions confuses se bousculaient.
Ça semblait si lointain... Pourtant, ça c'était passé le matin même.
Comment avaient ils pu en arriver là ? Comment auraient ils pu ne serait ce que l'imaginer d'ailleurs ?

Elle eut un frisson. Et alors que Sieg s'éloignait, trifouillant dans les affaires de l'apothicaire, Raina se pencha quelque peu – et timidement – vers Adrian. Sa main se posa doucement sur son épaule, et d'une voix plutôt basse, en le regardant droit dans les yeux, elle s'efforça de paraître le plus apaisante possible :


- Ca va allez, Adrian. Vous allez vous en sortir. Je vais tout faire pour que vous soyez à nouveau sur pied, d'accord ?

Elle se risqua à un petit sourire maladroit, qui était presque imperceptible. Puis elle reprit.

- Vous allez me guider et me promettre que vous ne me laissez pas tomber...
Adrian Mayr
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Mar 29 Déc - 1:06
La traversée de la boutique lui avait semblé interminable, bien que le bâtiment ne soit pas si grand et qu'il le connaisse par cœur, ses repères étaient flous et il devait s'en remettre à l'assistance de ses compagnons.
Dans un autre contexte, Adrian y serai surement allé d'une remarque quelque peu acerbe en entendant les bris de verre de fioles se fracassant au sol. Machinalement, son cerveau avait même essayé de lui rappeler quelles étaient les préparations qui reposaient sur le bureau que la milicienne avait percutée. Evidemment, le rappel à l'ordre fut quasi immédiat et brutal, nul temps n'était à accorder à de telles futilités. Qui plus est, il n'avait qu'a installer des éclairages plus efficace à l'entrée de la demeure.

Economisant ses forces aux maximum, Adrian s'efforçait malgré tout de ne pas sombrer dans les ténèbres qui l'appelaient de plus en plus fort. Tel le champ de sirènes, il sentait la tentation de se laisser emporter dans les flots de l'inconscience gagner de plus en plus de terrain sur sa volonté. Chaque seconde semblait durer des heures, rythmé au son des battement de son cœur. Dans cette pénombre, seul la voix de sa compagne de fortune raisonnait au delà de l'appel du sommeil, le tirant presque de force hors de la torpeur qui le guettait. Il s'y accrochait tant bien que mal, forçant son subconscient à puiser dans les dernières forces qui lui restaient. Lorsqu'il entendit Raina parler de l'allonger, il sut qu'une partie de son calvaire venait de se terminer...Et qu'une nouvelle allait maintenant commencer.
S'asseoir puis s'allonger s'avéra effectivement être un véritable soulagement pour l'apothicaire qui pouvait enfin laisser ses cotes malmenées au repos, limitant l'afflux sanguin qui remontait dans sa bouche. Il laissa échapper un bref soupire, mais ne s'autorisa pas à fermer les yeux, le risque de sombrer était bien trop grand.

Alors que Sieg s'affairait à exécuter les ordres de Raina, Adrian s'autorisa une pause silencieuse, les yeux perdus sur le plafond obscur de sa boutique. Les senteurs de plantes omniprésentes de l'échoppe avaient quelque chose de rassurant, un sentiment qu'il n'avait jamais réellement ressentit avant entre ses murs. Était-ce vraiment le lieux familier, ou la présence de la milicienne qui s'affairait maintenant à examiner sa blessure qui lui procurait ce sentiment. S'il n'avait pas eu si mal, il aurai sourit à ce moment...Ou peut-être l'avait-il fait quand même malgré tout? Difficile à dire dans son état.
Il ne se serai jamais attendu à se retrouver dans une telle position. Être celui qui avait besoin de soin, en urgence qui plus est, n'était pas dans ses habitudes, lui l'Amaranthis à la paisible vie. Beaucoup de choses tournaient dans sa tête, des émotions qu'il n'avait que peu voir jamais ressentit, il avait presque l'impression de rencontrer une partie inconnue de lui même.

L'apothicaire salua intérieurement le soin avec lequel sa compagne de fortune examinait sa blessure, bien qu'il du serrer les dents quand le tissu dut se décrocher de ses plaies, ne pouvant toujours retenir une exclamation. Adrian profitait de ces quelques secondes de répit pour regrouper ses forces au maximum. Il dessina mentalement son environnement qu'il connaissait si bien, chaque recoins de la pièce, l'emplacement des éléments important. Il n'avait aucun doute sur le fait qu'il devrait fournir des informations cruciales au bon déroulement des soins. Adrian écouta sa respiration, s'efforçant tant bien que mal de la rendre régulière et lente. Le calme intérieur gagna son esprit malgré les vives douleurs toujours présente, il avait atteint cet état de stase qui lui permit de s'économiser au maximum. Sans qu'il n'eut son mot à dire, cette image de calme se matérialisa dans son esprit en un visage qui lui était devenu familier depuis ce matin même, celui de la jolie milicienne brune au regard sombre…

Le moment de revenir sur terre frappa presque comme un coup de massue, ravivant toute les douleurs de son corps. Il ouvrit les yeux doucement mais ne tourna pas la tête, restant dans l'économie de mouvement maximale pour l'instant. Il écouta attentivement les dires de Raina, les interrogations qu'elle pouvait avoir. Elle allait être les mains qui le tirerait d'affaire, la moindre des choses serai qu'il ne reste pas planté inutilement à subir. Il prit la parole, plus facilement et distinctement cette fois, bien que d'une voix assez basse.


"Monsieur Sieg...Vous trouverez dans le meuble du fond un placard sous les étagère, il y a du matériel médical, dont une pince qui devrait servir pour retirer les éclats. Ramenez-moi également une des fioles au liquide bleu sombre reposant sur l'étagère la plus haute. Ensuite, vous allez récupérer le couteau qui doit être sur le meuble et le chauffer tout le temps de l'extraction des éclats."

Il marqua une très courte pause pour reprendre son souffle, déjà court après si peu de mots...

"Dame Raina...Dans un autre contexte, je prendrai un calmant puissant pour la douleur...Mais je crois que je m'endormirai, et ça ne serai pas bon signe....Je vais boire une décoction avec l'effet inverse, qui devrait m'accorder un maximum de lucidité le temps que le plus difficile soit passé. Je vais essayer de vous assister sur la méthode et le rythme a adopter...Mais pour résumer, voici les deux étapes clés, retirer avec lenteur les deux éclats...Et cautériser en appliquant le plat de la lame chauffée à blanc sur la plaie."

C'était peu ragoutant, et cela allait être tout sauf une partie de plaisir, tant pour Raina que pour Adrian, mais c'était le moyen le plus simple et efficace pour faire un soin rapide et limiter les dégâts. L'apothicaire aurai tout le "loisir" de compléter la médication avec des onguents plus tard, l'urgence résidait dans le fait de se débarrasser des éclats et de refermer les plaies.

Un très étrange sentiment s'éveilla alors en Adrian, directement suivi d'un frisson qui lui sembla plus fort encore que toute ses blessures réunies. Ne comprenant pas dans un premier dans ce qui lui arrivait, il constata rapidement en détournant légèrement la tête que la Milicienne était maintenant à coté de lui, une main posé sur son épaule. Ce geste d'une grande douceur n'eut pas finit de surprendre Adrian, provoquant chez lui une chaleur qu'il ne s'expliquait pas, effaçant à nouveau ses maux pendant quelques secondes.
Voila par trois fois déjà -au moins-, que la présence de Raina lui provoquait ce sentiment. Sa main opposée se rapprocha de celle de la milicienne, mais s'arrêta juste sous son cou, au niveau du plexus. Il planta son regard émeraude dans les yeux sombre de la jeune femme, sondant ce regard métamorphosé qu'elle lui adressait, empli de bienveillance et d'inquiétude à son égard. Le temps se figea en un battement de cœur interminable qui semblait avoir raisonné dans toute la pièce quand il cru voir un sourire qui ne fut pas sans lui rappeler ce sourire très naturel qu'il avait aperçu plus tôt dans la journée…

Il acquiesça d'un signe de tête à ses dires, décrochant presque un sourire à nouveau. Il rassembla ses force à nouveau pour parler distinctement, d'une voix plus assurée.


"Vous ne m'avez pas laisser tomber, je ne le ferai pas non plus, Raina."

Il reposa doucement sa tête en arrière, sondant le plafond à nouveau, conservant son calme bien que la douleur refasse surface de plus en plus. Il serra les dents et les poing pour ne pas manifester plus encore sa souffrance. Sieg revint alors avec une pince médicale, des bandes de soies et la fiole qu'Adrian lui avait demandé. L'apothicaire redressa son buste tant bien que mal, identifiant très clairement les cotes endommagées dans la foulée tant la douleur était atroce. Il cracha presque nonchalamment le sang qui était rapidement remonté dans sa bouche du coté ou personne ne se tenait, en plus petite quantité que lorsqu'ils déambulaient dans les rues de la cité.
Il saisit fermement la fiole que l'homme avait débouchonné pour lui, inspira un grand coup et but la décoction d'une traite. Il grimaça, c'était infect...Qui plus est, Adrian ne consommait que rarement des médicaments destiné à réveiller le système nerveux, au contraire.
Il laissa tomber la fiole qui s'écrasa au sol dans un petit son de bris de verre, n'ayant pas eu le temps ni la force de la redonner à Sieg. Les effets ne seraient pas immédiat, mais les risques que l'apothicaire sombre dans un dangereux sommeil s'amenuisaient à partir de maintenant. Il s'adressa une nouvelle fois à ses compagnons de fortune, les yeux légèrement plissés sous le coup de l'épuisement et le front ruisselant de sueur.


""Maintenez la lame à chauffer, Sieg, tant que le premier éclat n'est pas extrait...Raina je...Je m'efforcerai de ne pas bouger pour vous faciliter la tâche...Mais je vous guiderai malgré tout."

Adrian se laissa retomber presque lourdement sur le bureau, ayant du mal à se porter sans douleur avec le buste relevé. Il savait très bien que tout ne se passerai pas sans douleur, mais il n'avait pas d'autre choix s'il voulait s'en tirer. Son sort ne reposait presque plus entre ses mains désormais.
Raina Visenrov
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Jeu 31 Déc - 0:37
Sieg avait acquiescé et, sans perdre de temps, était parti en quête de tout le matériel nécessaire à l'opération qu'ils se devraient bientôt d'effectuer. Pas d'anesthésiant, vraiment ? Il fallait être fou pour prendre une pareille décision. Sans qu'elle ne fut à sa place, loin des douleurs qu'il pouvait dors et déjà ressentir, Raina ne pouvait s'empêcher d'imaginer les souffrances par lesquelles il allait passer tout du long qu'elle s’affairerait à lui sauver la vie. Et même en songe, cela paraissait tout bonnement insoutenable.
Bien évidemment, la jeune femme accueilli cette nouvelle avec un certain soulagement. Poursuivre ces manipulations avec son soutien et ses conseils avait un petit quelque chose de rassurant. Elle se voyait mal faire toutes ces manœuvres sans qu'il ne soit conscient, à la guider et la conseiller, et devoir sans arrêt se poser la question de s'il était toujours en vie ou de s'il avait sombré dans un terrible sommeil plus définitif encore. Mais il allait souffrir... Atrocement... Et il ne saurait ni le cacher ni le contenir. Et si à cet instant elle essayait de se convaincre qu'elle serait plus forte et détachée que les hurlements qu'il pousserait, quelque part au fond d'elle, elle savait qu'elle était loin de se douter de la difficulté de ce qui l'attendait.

Alors que le troisième compagnon fouillait les étagères et placards, Raina avait taché de rassurer l'apothicaire. Une main sur son épaule, un frêle sourire et une voix anormalement apaisante, elle se serait surprise elle-même à faire étalage de tant de douceur. Ce n'était pas dans ses habitudes d'agir de la sorte... Bon, il fallait dire aussi qu'opérer un Amaranthis dans sa propre boutique n'était pas non plus une situation coutumière. Mais la scène y était elle pour quelque chose, ou était-ce plutôt dû à l'émeraude des yeux qu'il reposait alors sur elle ?
La milicienne ne remarqua rien du mouvement de la main du blessé. Son regard était plongé dans le vert clair du sien. Elle cherchait à lui transmettre sa force, autant qu'elle cherchait à gagner la sienne. Il leur faudrait être courageux et confiants, tout deux, chacun à leur manière. Oui, c'était ce qu'elle recherchait... Pourtant...
Le temps semblait s'être suspendu, l'espace de quelques secondes. Elle n'aurait su dire ni comment, ni pourquoi, mais elle avait soudainement la sensation que tout irait bien. Ils allaient tout deux s'en sortir, ce n'était qu'un mauvais moment à passer... Durant ce bref instant, tout semblait simple, futile, sans conséquence... Il lui assura qu'il ne la laisserait pas. Le sourire qu'elle lui offrit en guise de réponse était sincère, survenu sans qu'elle ne cherche à l'afficher.  De manière presque imperceptible, son pouce doucement entama une infime caresse à son épaule, et...


- Ca y est, je crois que tout y est.

L'Utgardienne eut un sursaut et instinctivement retira sa main vivement du bras d'Adrian. Un léger rose vint teinté ses joues, comme s'il eut s'agit d'un acte honteux qu'il fallait cacher à l'inconnu à tout prix. Elle releva les yeux sur Sieg qui revenait avec ses trouvailles et qui ne semblait ne rien avoir remarqué du trouble de la soldat. Ou peut être mettait il ça sur le compte de la situation angoissante dans laquelle ils étaient tout trois plongés.
Le regard de Raina alla vivement de l'un à l'autre des deux hommes. Il lui sembla qu'elle venait de se prendre un mur à grande vitesse, alors que l'enjeu de ce qu'ils s'apprêtaient à faire lui revenait subitement en pleine figure. Ce n'était pas une épine qu'elle allait devoir lui enlever, mais belle et bien deux grands éclats de bois qui s'étaient figés dans sa cuisse. Ce n'était pas une goutte de sang et quelques larmes qu'elle allait lui arracher... Ce n'était pas son humeur qu'elle avait entre les mains, mais bel et bien sa vie.
Elle secoua la tête, comme pour se réveiller et revenir à la tragique réalité. Et elle n'était pas du tout plaisante.

Sans un mot et plus aucun sourire, la milicienne observa Adrian alors qu'il buvait d'une seule traite la potion que lui avait ramener le sbire. La fiole se brisa dans un nouveau fracas de verre, et la vision de l'apothicaire étendu au sol dans la taverne, au beau milieu de débris tant de bois que de choppes éclatées lui remonta un mémoire, faisant manquer un battement à son cœur, tout comme la toute première fois où elle avait assisté à ce spectacle.
Du liquide d'un bleu foncé roulait encore du coin des lèvres de l'homme, venant se joindre aux tâches sombres de rubis qui souillaient désormais sa barbe blonde jadis si soignée. Il se laissa retomber sur le dos et la jeune femme comprit avec horreur que dès lors c'était désormais à son tour de jouer.

Sieg avait tout préparé et se tenait à côté d'elle. Il tenait d'une main la lame plongée dans le feu d'une bougie, et de l'autre il se tenait prêt à tendre tout ce dont Raina pourrait bien avoir besoin pour le bon déroulement de ses affaires.
Mais l'Utgardienne, elle, avait seulement baissé les yeux sur la jambe de son compagnon. Dans ce mélange de sang et de chair, de bois et coupures, elle cherchait au fond d'elle le courage d'aller jusqu'au bout.

Tu y es... Tu vas réussir... Tu es forte... Tu n'as pas le choix...

Tant et tant de choses passant par son esprit. Mais aux paroles d'encouragements se mêlait le doute, l'incertitude, et un peur féroce. Pourquoi ? Pourquoi elle ? Elle n'y connaissait rien... C'était son métier à lui, pas à elle. Et si elle se ratait, elle savait qu'elle s'en voudrait jusqu'à la fin de ses jours. Et plus encore...
La violente tempête qui la secouait était tout aussi évidente vu de l'extérieur. Elle se penchait sur la table, les mains bien au plat posées sur sa surface. Elle baissait la tête, quittant la jambe du regard, pour venir regarder sans voir le plancher de la boutique. Puis d'un coup, elle fermait les yeux, prises de nausées. Sieg, inquiet, chercha à la ramener des dédales sombres de ses songes.


- Dame Raina...
- Ne m’appelez pas comme ça, ça m'énerve.


Elle était sèche, presque furieuse. Qui eut cru qu'un si petit bout de femme était capable de tant d'animosité ? Le gaillard, lui-même, fut prit d'un mouvement de recul. Il lui laissa un instant de plus de silence.
Raina se redressa, s'éloignant de la table d'un seul coup. Elle semblait faire les cents pas, nerveuse, rongée jusqu'au sang par l'angoisse. Les mains derrière la tête, elle levait les yeux au plafond, des bourrasques d'émotions contraires la secouant. Elle n'entendait que les battements de son cœur affolé, sans être capable un instant de les contrôler. Elle devait se calmer, à tout prix, retrouver son sang froid.

Allons, Raina, ça ne te ressemble pas...

Tout ça n'avait aucun sens. Le matin même, elle maudissait l'ennuie régnant sur la Place du Capitaine. Et voilà que maintenant au calme avait succédé la tempête.

Elle ne pouvait pas faire ça... Si, pourtant, elle le devait.

Un instant, elle se tournait résolu vers le blessé, décidée à agir. Le suivant, elle tournait les talons, prise d'une violente crise d'angoisse. Une minute, deux... Trois. Ils perdaient un temps fou avec le conflit intérieur dont elle était victime.
Le dénommé Sieg, finalement, posa sa main sur son épaule et elle tressaillit, prête à se jeter sur lui, comme si elle ne le reconnaissait plus, et qu'il s'agissait d'un ennemi. A sa grande surprise alors, elle découvrit qu'il lui tendait une flasque qu'il sortait de sous sa chemise. Dans les yeux de l'homme on lisait l'inquiétude, mais surtout beaucoup de compassion.
Raina hésitait, ses yeux lorgnant sur le flacon qu'il lui proposait. Elle s'était toujours interdit de boire... Et ce, pour cause ! Quand on voyait où ça avait mené son père... Les dégâts que la boisson avaient occasionné à sa famille... Les séquelles irréparables dans son esprit. L'alcool était une calamité. Elle en avait toujours été convaincu. Mais là encore, pourtant...

Pourtant, pour la toute première fois, elle entrevoyait une raison à l'usage de ce breuvage... Un simple aperçu, lointain et flou, dont elle aurait été bien incapable de définir l'origine, d'un fléau plus grand encore.

Après quelques secondes d'hésitation et d'une main tremblante, la milicienne se saisit de la flasque et en dévissa le capuchon. Elle l'arrêta un instant encore, à un rien de ses lèvres. Mais décidant qu'il s'agissait là ni plus ni moins qu'une potion de courage, elle en avala une grosse lampée. C'était de vin, ignoble, de celui qu'on qualifiait de « rouge qui tâche ». C'était affreux à avaler, et ça se vit à la grimace qu'elle ne put retenir. Cependant, ça ne l'empêcha pas de s'en reprendre une gorgée, plus minime, avant de rendre sa gourde à son assistant qui approuva d'un signe de tête.
L'alcool ne pouvait avoir déjà agit. Mais le médicament agissait en placebo. L'Utgardienne avait retrouvé tout de son calme et c'est la mine sérieuse d'une militaire qu'elle revint à la table d'opération de fortune.

Il ne fallait pas penser qu'Adrian était Adrian. Il fallait juste penser que c'était un homme et qu'il mourrait si elle ne faisait rien.


- Allons y...

C'était un murmure plus pour elle que pour le blessé ou son partenaire. Les yeux rivés sur la jambe, elle ne se concentrait plus que sur les blessures.

La jeune femme posa sa main à la base du pieu le plus bas. En rencontrant la peau meurtrie, l'apothicaire se contracta de tout son corps, et bien qu'il eut les dents serrés, une plainte de douleur lui échappa. Elle attendit que ses muscles se détendent, ses propres mâchoires crispées, sentant sa douleur raisonnée en elle. Elle ne pouvait pas flanchée... Elle ne devait pas compatir... Il mourrait sinon...
La brune attrapa la pince et, en douceur, saisit avec le poignard de bois. De nouveau, l’entièreté d'Adrian témoigna de sa souffrance. Elle déglutit avec difficulté, s'interdisant formellement de lui jeter un regard. Elle patienta quelques secondes, puis doucement, tira sur l'éclat...

Durant des nuits et des nuits, longtemps après, le cri qu'il poussa alors hanterait son sommeil. C'était le hurlement de souffrance le plus terrible qu'il ne lui ai jamais été donné d'entendre. Tout son corps fut prit d'un soubresaut atroce, et son brame semblait mêlé à un début de sanglot des plus déchirants.
Raina lâcha tout à cet instant, pour éviter de lui causer plus de dommages qu'il n'en avait déjà subit. Elle ferma les yeux, fronçant les sourcils d'horreur, le cœur tellement serré dans sa poitrine qu'il lui en faisait mal. C'était insupportable, insoutenable, de l'entendre souffrir à ce point. C'était inhumain de lui faire tant de mal...


- C'est impossible, on y arrivera jamais...
- Tiens le.


Il y avait une dimension très froide dans sa voix, renforcée par le passage soudain au tutoiement. Situation d'urgence, trêve de politesse et mondanité. Sieg fut prit de court.

- Je vous demande pardon ?
- Place toi derrière lui, au niveau de sa tête, et maintiens lui tout le haut du corps, avec autant de force que tu en es capable. Il ne doit plus pouvoir bouger d'un pouce. Pour sa jambe, ça ira. J'appuierai plus fort.
- Mais, Monsieur Mayr m'a dit de chauffer le couteau pour...


Elle releva sur lui des yeux d'un noir profond, presque menaçant, et avec une pointe d'agressivité elle lui reprit l'instrument des mains, le reposant brutalement sur la table.

- Fais ce que je te dis. Je chaufferai la lame.

Le malheureux civil, face à tant d'aplomb, ne put que s'exécuter sans plus rien répliquer. Il était blanc comme un linge, celui-là aussi.
Raina prit quelques secondes pour visualiser l'enchaînement des choses qui allaient se produire. Le ventre encore retourné, elle songea alors qu'il serait plus facile de procéder si la voix suppliante d'Adrian ne lui revenait pas sans cesse aux oreilles.
Saisissant une poignée des compresses sur la table, la jeune femme les fourra dans la bouche du malheureux blond pour le faire relativement taire.
Elle attarda un instant sa main le long de la joue de l'apothicaire. Son visage était plus pâle et creusé que jamais, et des grosses gouttes de sueurs perlaient ci et là.


- Je suis désolée, Adrian... C'est pour votre bien.

Une grande respiration, elle détourna les yeux du minois de l'Amaranthis et retourna à sa jambe. Dans sa tête, un décompte... Et c'était parti.

L'Utgardienne recommença la même opération que précédemment. Elle posa sa main sur la plaie, appuyant néanmoins avec plus de force pour être certaine de le maintenir. Si à son gémissement furieux et à sa tentative de bouger, on devinait aisément toute la souffrance dont il était victime, Sieg l'immobilisait à merveille et Raina ne s'attarda pas cette fois en attendant que sa crise ne passe.
Ne vaut il pas mieux souffrir un bon coup puis être débarrassé ensuite ?
Elle empoigna solidement le pieu de sa pince et tira vers le haut, dans l'axe du morceau de bois. La tâche n'était pas aisée... Déjà, car l'intru faisait résistance, retissant à l'idée de quitter le fourreau de chair dans lequel il s'était logé. Ensuite, parce qu'il fallait vérifier qu'à aucun moment celui-ci ne se brise, rendant impossible ou très ardu son extraction. Et enfin, évidemment, car le patient sans anesthésie aucune à cet instant était entrée dans une folie furieuse de douleur hurlante, que même le bâillon de fortune peinait à étouffer.
L'Utgardienne était comme détachée de ses gestes, procédant pour sa survie, tachant de faire abstraction des exclamations et sanglots déchirants de son compagnon.

Finalement, elle délogea le premier gros débris. A la vue de sa pointe ensanglantée, elle eut un léger vertige. Par Njörd ! Comment était il possible que tant de bois se soit trouver enfoncé à l'intérieur de son corps.
Sieg détourna subitement les yeux, en toussant. Elle devina à son expression qu'il réprimait une furieuse envie de vomir.
La brune reposa plus loin sur la table l'épine démesurée et ce, sans tarder. Aussi sec, elle prit plusieurs compresses et les appuya avec force contre la plaie sanguinolente qui dégoulinait du fluide vital du beau blond. De sa main gauche qui était libre, elle plongea à nouveau la lame dans la flamme de la bougie.

C'était un moment très angoissant, où ses yeux bruns ne cessèrent de faire des aller retour entre le couteau et les compresses déjà gorgées du liquide sombre. L'attente lui sembla durer une éternité et elle due par deux fois changer les pansements et appuyer plus fort encore pour tenter de garder le fluide à l'intérieur du corps du blessé.

Enfin, la lame vira au rouge...


- Ne le lâche pas, Sieg... C'est maintenant qu'arrive le pire pour lui.

Raina prit une grand inspiration...
Puis retira sa main, les compresses, avant d'apposer, à même la peau du malheureux, la lame brûlante...

Un crissement terrible... Une odeur nauséabonde... La peau fondant pour se sceller sur la lame... Ce n'était rien comparé à la quasi agonie d'Adrian à cet instant.
Elle retira la lame, la reposant sur le côté. Ses muscles étaient tétanisés, ses clos avec force, et luttait pour ne pas vomir ni pleurer, toutes la douleur infinie de son compagnon raisonnant jusqu'à dans ses entrailles. Elle aurait voulu mourir pour qu'il ne souffre plus...
C'était tout bonnement de la torture.

Un long moment s'écoula avant qu'Adrian ne s'apaise ne serait ce qu'un peu. Long moment où les deux médecins de fortune restèrent interdits, silencieux, s'évitant du regard, évitant plus soigneusement encore de regarder le visage de la victime.
Lorsqu'elle jugea que l'Amaranthis était relativement prêt pour la suite, Raina réouvrit les yeux, et de la même façon, recommença l'opération pour l'éclat de bois qui s'était planté plus haut dans sa cuisse.

Passons les étapes déjà décrites... Ce ne fut pas parce que c'était la seconde fois que ce fut plus facile, pour aucun d'eux. En plus de cela, cette fois, le pieu se brisa alors qu'elle tentait de le sortir. Entre plusieurs jurons, elle parvint malgré tout à le déloger en totalité.
Compresse... Tout ce sang... La lame dans le feu qui se paraît des couleurs de la souffrance du pauvre Adrian. Et encore... Encore ce son... Cette odeur prenante et détestable... Et encore, l'horreur de l'expression du supplice du torturé...

Elle reposa la lame sur la table. Elle respirait avec peine, malade. Malade de tout ce sang. Malade de cette odeur de chair brûlée. Malade de ce qu'elle avait du faire... Mais plus malade encore du supplice qu'elle avait du infliger au bel apothicaire qui n'était plus que l'ombre de lui même.
Elle tourna un regard morne, terrassé, vers son assistant. Sa voix trahissait derrière son désir d'image de milicienne forte un profond dégoût pour tout ce qui venait de se produire.


- On va faire une pause... Trouve lui un peu d'eau, qu'il s'hydrate.

Sieg, la mine défaite, le pas chancelant, ne répondit à peine que d'un léger signe de tête avant de partir en quête d'un peu de boisson fraîche pour leur patient.

Raina elle-même avait la tête qui tourne et une nausée violente. Pourtant, avec douceur, elle s'approcha du visage du malheureux Adrian. De deux doigts tremblants, elle libéra sa bouche de son bâillon. Impossible pour elle de lui offrir ne serait ce qu'un semblant de sourire. Néanmoins, elle posa un regard presque... tendre ? … sur l'Amaranthis en souffrance. Elle parlait à voix basse, comme lors d'une conversation intime, et cela donnait à sa voix un timbre particulier qui était difficile à décrire.


- Le plus dur est fait, je crois... Vous avez été très fort et courageux.

Peu d'hommes auraient été capable d'encaisser de pareils souffrances en restant conscient. Et même si son éveil n'était dû qu'à sa potion, Raina n'en était pas moins impressionnée.
Impressionnée et soulagée surtout...
Même si, elle le savait, tout n'était pas encore terminé...
Adrian Mayr
Adrian Mayr
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Dim 3 Jan - 15:50
Dans un autre contexte, Adrian n'aurai jamais prit la décision d'ingurgiter un excitant pour subir une opération. Dans son cas précis cependant et aux vues de la quantité important de sang qu'il avait laissé derrière lui, cela relevait de la nécessité. Dans tout les cas, la présente situation n'était pas comparable à un événement commun, une milicienne et un civil opérant un médecin, tout semblait à l'envers dans cette sombre histoire. Il avait donc fais le choix de subir entièrement l'opération de manière consciente. L'apothicaire avait déjà pratiqué ce genre d'interventions médicales, soit en assistant sa défunte femme lorsqu'elle officiait ici, soit lorsqu'un urgence se présentait à sa porte. Cette fois, il était sur la table et c'était à son tour de remettre sa vie entre les mains de quelqu'un. L'idée l'angoissait, habitué au scénario inverse, il n'était pas du tout à l'aise avec sa position actuelle, au delà de l'urgence de ses blessures, il savait bien qu'il demandait à Raina de pratiquer quelque chose de très éprouvant pour les nerf. Il aurai voulu s'excuser de lui imposer cela, mais il resta allongé en silence. Le temps qui passait lentement sans que rien ne se passe confirmait le fait qu'il ne devait pas perturber sa compagne de fortune qui devait probablement lutter intérieurement. L'apothicaire resta les yeux ouvert fixés sur le plafond, attendant que l'enfer commence pour lui.

"Enfer" était une bien maigre définition de ce qui suivit…

Il avait beau avoir déjà entendu les complaintes d'un blessé qu'on opère, il n'aurai jamais pu s'attendre à la déferlante de douleur qui s'empara de lui à cet instant. A dire vrai, cette souffrance était même indicible. Adrian agrippa instinctivement les deux cotés du bureau de ses deux mains à la seconde ou l'opération commença. Il eut beau essayer de serrer les dents et de retenir ses cordes vocales de s'arracher, mais la douleur l'emporta sur la réflexion et l'apothicaire expulsa toute sa souffrance aux yeux de ses compagnons. Il ne s'était passé que quelques secondes et pourtant la douleur lui parut durer une éternité, avant que celle-ci ne redescende à un niveau supportable. Raina s'était stoppé net et Adrian fut presque tenté de lui demander de ne pas reprendre. Son souffle était rapide, haletant et ponctué de hoquet d'un souffle impossible à retrouver. A cet instant précis, il regretta d'avoir ingéré une décoction pour rester éveillé, bien que celle-ci eût été nécessaire. Son cerveau éclata dans une migraine foudroyante, rendant son regard déjà voilé encore plus inquiétant.

Dans un court instant de lucidité, Adrian se maudit de n'avoir pas dit à ses compagnons de l'aider à rester immobile sur la table. La seconde suivant cette réflexion fut celle ou la jeune femme ordonna à Sieg de tenir l'apothicaire. S'il existait un dieux à cet instant, Adrian l'aurai remercié pour avoir comme sauveuse une personne qui savait prendre les bonnes décisions. Reprenant son souffle tant bien que mal, il vit Sieg se placer et le maintenir en place, fermement appuyé sur ses deux épaules. Très bien...Au moins ses cotes ne craindraient pas un choc car Adrian n'avait aucunement la force de bouger.
Il ne vit pas vraiment venir cependant les compresses qui lui coupèrent presque le souffle une fois dans sa bouche. Son regard capta très brièvement la belle milicienne au regard sombre. A vrai dire, il n'en distinguait que la silhouette, seul des images rémanentes de la journée lui permettait d'imaginer ce visage qu'il trouvait de plus en plus captivant.  Il sentit l'étonnante douceur du geste de la jeune femme contre sa joue, faisant contraste avec ce qu'elle semblait incarner dans la vie de tout les jours. Son esprit divagua pendant une fraction de seconde, ravivant à nouveau cette image mentale du sourire de la milicienne qu'il avait entre aperçu une seule fois durant la journée.

Il hocha la tête pour lui signaler du mieux qu'il pouvait qu'il comprenait qu'elle agissait pour sa survie.

Le retour à la réalité n'en fut que plus brutal. A l'instant même ou l'opération reprit, Adrian eut envie d'hurler toute sa souffrance à nouveau, les yeux écarquillés, injectés de sang et laissant couler des larmes le long de son visage pâle et creusé. De son poing, il frappa le bureau si fort qu'il sentit qu'un de ses doigt n'avait pas vraiment apprécié l'exercice. Son regard se posa un instant sur le pauvre Sieg, pâle comme un mort, embarqué dans cette histoire juste pour avoir voulu aider. Malgré tout, le regard d'Adrian exprima à cet instant une forme de colère, car l'homme le tenait fermement contre ce bureau en bois massif qui lui rappelait de plus en plus un autel sacrificiel. Bien entendu Adrian comprenait que le malheureux agissait pour le bien, mais son esprit était incandescent et criait un besoin de liberté déchirant dans l'esprit de l'apothicaire.
Il lui semblait que chaque centimètre de ces maudits éclats de bois prenait des heures à s'extraire, ce qui n'était pas le cas en réalité. Adrian marmonna même un supplique inaudible dont il ne contrôlait pas le propos, étouffé par les compresses qui l'empêchait d'expulser vocalement sa peine.

Quand enfin...Un bref sentiment de libération s'empara d'Adrian. Le premier éclat était sortit. Ce n'était malheureusement que la première étape. L'apothicaire rassembla toute ses forces morale et physique le plus rapidement possible, se forçant à rester lucide pour ce qui allait venir. Le médicament qu'il avait ingéré prenait tout son sens. S'il ne l'avait pas consommé, il aurai très certainement prit le chemin de l'inconscience à la seconde ou la douleur avait ralenti. Adrian sentit alors la compresse s'éloigner de sa plaie. Il sut que le moment était venu.

La lame, cette chaleur incandescente, l'odeur, le bruit de crépitement de la peau, tout cet ensemble dessinait un bien sombre tableau au milieux des milles et une senteurs de plantes médicinales qui jalonnaient la boutique de l'apothicaire. Ce n'était pas un cri, mais un sanglot suppliant qui s'était échappé d'Adrian, épuisé par la souffrance.
Pour se rappeler à son effort, l'esprit d'Adrian dirigeait irrémédiablement ses pensées vers l'Utgardienne au regard sombre, comme si le seul moyen pour lui de tenir était de le faire pour honorer sa promesse envers Raina. Il revoyait en son fort intérieur les scènes de la journée, allant du regard inquisiteur qu'elle avait posé sur lui la première fois à ces yeux plein d'inquiétude qu'elle avait eu pour lui dans la taverne, en passant bien sur une nouvelle fois par cet inimitable sourire.

Le deuxième éclat se passa dans des conditions tout aussi difficile, la violence de l'opération eut même faillit avoir raison des dernières force d'Adrian. Il tint bon malgré tout, il le fallait…
Le silence uniquement entrecoupé seulement du souffle peiné de l'Amaranthis tremblant sur sa table d'opération faisait peine à voir. Contracté de tout son être, il avait presque envie que tout s'arrête ici et maintenant pour lui. Il ne put retenir des larmes de douleur de couler le long de ses tempes pour venir s'écraser sur le bureau en bois massif. L'esprit embrumé par l'épreuve, il eut presque l'impression que la torture allait reprendre de plus belle dans quelques secondes. Il tourna sa tête vers Raina qui s'était rapproché de lui, son regard presque vide essayant tant bien que mal de distinguer les traits du visage de la milicienne.

Lorsqu'elle retira le bâillon de fortune de sa bouche, Adrian toussota légèrement, encore quelques gouttes de sang, avant de prendre de grande respirations, autant que son corps meurtri le lui permettait. Bien qu'elle lui adressa la parole à bas volume, il eut l'impression d'entendre sa voix avec un écho dans son crâne, emplissant son espace.
Il fallut un long moment avant de pouvoir formuler une réponse. Adrian se tourna légèrement sur le coté, minimisant tant bien que mal la mobilisation de ses cotes endommagées, puis il prit appui sur un bras pour redresser son buste et relever un peu la tête de cette table de torture qu'était devenu son bureau. Il du prendre le temps à ses yeux de faire correctement la mise au point tant le mouvement l'avait rendu nauséeux. S'il en avait eu la force, il lui aurai sourit à ce moment là, l'avait-il fait? Impossible pour lui de le savoir.
Il se rendit compte alors que Raina était bien plus proche qu'il ne l'imaginait, se retrouvant avec son visage à une vingtaine de centimètre de celui de la jolie brune. Il plongea ses yeux dans ceux de la Milicienne, le regard d'un homme épuisé, mais en vie...Il prit la parole d'une voix fatiguée.


"Raina je...vous...enfin je suis..."

Il agita doucement la tête de gauche à droite comme pour remettre ses idées en place, puis reprit.

"Merci...Vous avez été formidable..."

Cette fois-ci, il était sur d'avoir esquissé un timide sourire plein de sincérité, bien que cela ne put durer qu'un instant.

L'apothicaire balaya l'espace du regard, aussi loin que lui permettait sa mobilité, soit un angle très modeste...Tout ce sang...Il remarqua également seulement maintenant que la milicienne était elle-même couverte du fluide vital qui avait coulé en abondance. Un élan de culpabilité s'empara de lui. De quel droit avait-il pu se prétendre à embarquer quelqu'un dans une telle mésaventure, tout ça pour finir entre la vie et la mort et donner la responsabilité de sa survie à la pauvre milicienne qui aurai sûrement préféré rentrer chez elle après une telle journée. Il constata également qu'elle était elle-même très pâle et nauséeuse, sûrement aux portes de l'épuisement moral. Sans vraiment s'en rendre compte, il posa sa main sur l'avant bras de la jeune femme, dans un mouvement emprunt d'une grande délicatesse, un geste qu'il n'aurai su expliquer lui-même.
Ce geste cessa presque aussi vite qu'il avait commencé lorsque Sieg revint avec un verre en terre cuite remplit d'eau et qu'il le tendit à Adrian. L'apothicaire qui semblait quand même grandement soulagé de ne plus se vider de son sang récupéra le verre de sa main qui ne le soutenait pas et but très doucement. L'eau fraîche lui fit plus de bien qu'il ne l'aurai imaginé, réalisant qu'il était déshydraté à un degré avancé. Il consomma l'entièreté du liquide à un rythme lent, reprenant un souffle qui se voulait légèrement plus régulier.

La redescende de l'intensité de la douleur suite à la cautérisation de ses plaies avait donné à Adrian un répit, tant le contraste entre la torture qu'il venait de subir et les blessures qui sévissaient encore sur tout son corps était important. Cependant, cette trêve prenait fin petit à petit et les douleurs semblaient envahir tout son corps peu à peu. Il grimaça sous le coup de spasme de migraines, maudissant intérieurement cet excitant qui l'avait maintenu éveillé. A aucun moment son regard ne se posa sur sa jambe meurtrie...il aurai bien tout le loisir de s'y "intéresser" lorsqu'il devrait prodiguer des compléments de soins. Il parvint à rester en appui sur son bras, évitant de se rallonger pour faciliter la communication. Il prit une grande inspiration à nouveau avant de reprendre la parole, toujours à un volume relativement faible.


"Je vais avoir besoin de votre aide à nouveau. Sieg, pourriez vous me rapporter de l’eau dans un plus grand contenant ? Ainsi que d’autre bandages et un récipient creux, il doit y en avoir au même endroit où vous avez fouillé tout a l’heure. Également, vous devriez trouver un gros bocal en verre bleuté sombre tout en bas d’un des rangements et de petites boites en bois à coté de celui-ci...J’en aurai besoin...S’il vous plaît."

Sieg était une bonne personne, ça se voyait. Bien qu’il se laisse porter par les décisions des protagoniste, l’homme exécutait sans rechigner et donnait ce qu’il pouvait pour alléger la peine des deux compagnons de fortune. Adrian s’en voulait presque d’abuser de sa bonté.

Adrian reporta son attention sur Raina, ses yeux plissés et injectés de sang à cause de la migraine qui n’en finissait plus de torturer sa boite crânienne. Ses yeux émeraude dégageaient malgré ce triste tableau une expression inquiète concernant le niveau de fatigue de la milicienne. Il reprit la parole assez rapidement après sa dernière élocution.


"Da....Raina, vous avez besoin de faire une pause aussi...Vous êtes vraiment très pâle. Je vais préparer un cataplasme simple pour mes blessures, vous pouvez peut-être vous débarrasser de tout ce sang en attendant et vous reposer un peu, si vous voulez un peu d’intimité, il y a de quoi se nettoyer a l’étage, ainsi que des parures chaud à vous mettre sur le dos. Votre chemisier est...plein de sang également...J’aurai besoin de vous ou de Sieg pour appliquer l’onguent dans un second temps mais s’il vous plaît, faites une petite pause."

Adrian était réellement inquiet pour la santé de la jeune femme dont le regard était également voilé par la fatigue. Il ne voulait pas qu’elle souffre, et encore moins pour lui. Il espéra ainsi qu’elle se repose un peu, le peu énergie qu’il avait suffirai pour le moment à gérer la situation.

Sieg revint alors avec le fameux pot en verre sombre et le matériel demandé qu’il déposa sur le bureau près de l’apothicaire. Il ramena dans un deuxième temps les deux boites en bois qu’il entreposa doucement à coté du bocal.
Adrian aurai aimé se redresser, mais au moindre mouvement de bassin sa jambe le rappelait à l’ordre, le laissant à demi-allongé dans une position bien inconfortable dont il dut s’accoutumer. Des gouttes de sueurs perlaient du front de l’apothicaire et des frissons parcouraient son corps par intermittence. Son était fiévreux n’était pas inquiétant, mais il rendait la tâche difficile pour l’Amaranthis blessé.

Fort heureusement, le médicament lui accorda suffisamment de lucidité pour procéder à la préparation du cataplasme. Adrian prit d’abord le pot dont il ôta le bouchon, laissant échapper une odeur de terre assez puissante. De l’argile en poudre. Il en versa le contenant directement dans le bol creux et ajouta de l’eau. N’ayant rien pour mélanger, et n’y ayant décidément pas pensé, il se saisit du couteau qui était resté près de lui en soupirant contre son manque de discernement.
L’odeur nauséabonde de chair brûlée lui donna la nausée, la lame était tachée de sang et de peau noircie par la lame autrefois incandescente. Il prit l’ustensile à l’envers et mélangea sa préparation avec le manche du couteau, évitant de se concentrer sur les souvenirs de l’opération.

N’ayant qu’une main de disponible et aucunement l’envie de solliciter une fois de plus ses camarade pour le moment, il reposa la lame une fois le liquide épaissi par l’argile puis il ouvrit la première boites une par une pour y récupérer des herbes séchées rougeâtre ainsi que des fleurs bleutées également déshydratée. Il les broya en serrant le point et les laissa tomber dans la préparation avant de reprendre le mélange dans le silence. Ses yeux étaient rivés sur la mixture, il devait se concentrer pour faire correctement chaque mouvement. Bien que cela eut put sembler être hasardeux, le dosage de chaque ingrédient était mentalement mesuré et plus précis qu’il n’y laissait paraître. Une odeur mentholé se mélangea aux senteurs de terre humide.


"Il faut laisser reposer le mélanges quelques minutes. Pourriez-vous mettre de l’eau à chauffer Sieg s’il vous plait ? Je ne voudrai pas abuser de votre bonté. Une fois l’eau tiède, placez-y le contenant de ceci"

Il lui tendit la deuxième boite encore fermée. Celle-ci renfermait un mélange de plusieurs plantes et autres graines qui aurai pu ressembler à la formule secrète d’un chimiste fou, alors qu’il s’agissait simplement d’une infusion aux vertus relaxantes, pas de quoi faire des miracle, mais il était possible que cela soulage un peu les trois compagnons de boire quelque chose de chaud.

Quelques minutes passèrent pendant lesquelles le crépitement du petit feu qui chauffait l'infusion était le seul élément perturbateur dans la pièce. Adrian était concentré sur un examen interne de son corps. Les yeux mi-clos, il tournait la tête doucement pour observer les contusions visible sur ses bras, son torse. Il bougeait ses articulations dans de très petit mouvements pour sentir les zones les plus atteintes. Il évita cependant toujours soigneusement de intéresser à sa jambe meurtrie.

La fatigue commençait à le gagner à nouveau peu à peu malgré les effet du médicament.
Raina Visenrov
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Dim 17 Jan - 23:01
Quiconque pénétrait dans cette pièce aurait juré qu'une boucherie sauvage s'y était déroulée. Ou un quelconque rituel obscur rendant grâce à quelques dieux démoniaques.
Une forte odeur de fer emplissait la boutique dont l'ambiance tamisée avait un petit quelque chose d'inquiétant et d'oppressant. A celui-ci se mélangeaient une multitude de senteurs indéchiffrables de plantes et d'aromates, de suifs et de chair brûlée. De l'autel où trônait encore le malheureux blessé d'ailleurs, gouttaient encore, une à une, des perles de sang noir, dont le reflet rubis chatoyait à la lumière dansante des flammes des diverses bougies et torches disposées ça et là, et qui n'offraient qu'une vision toute relative de la scène d'épouvante qui s'y était jouée.
Une atmosphère calme mais néanmoins encore électrique y stagnait. Et le son le plus récurrent y était la respiration éprouvée du tenancier des lieux. On devinait, à ses inspirations et expirations, qu'il était dans des heures sombres de son existence. Mais au moins, les protagonistes, qui n'ignoraient – à leur grand damne – rien de ce qui s'était déroulé dans cette pièce, savaient qu'il était désormais en moins grand danger qu'un peu plus tôt.

Le front d'Adrian était luisant de sueur. Nul doute que son opération, combinée à ses mésaventures de la soirée, avait provoqué chez lui une montée fulgurante de fièvre. Il était si pâle que l'on devinait le réseau de veines sous sa peau. Loin l'image du bel Amaranthis soigné, sa barbe était souillée et grasse du sang qu'il avait recraché. Ses cheveux lui collaient au visage, décoiffés au possible, et avaient une teinte nettement plus sombre qu'au matin de leur rencontre. Sa prestance, n'en parlons même pas. Ses vêtements étaient tachés, déchirés, craqués. L'entièreté de sa personne ne respirait plus le distingué et pompeux dont son peuple avait pour habitude de se draper. Il n'était plus qu'un homme, blessé, à l'article de la douleur et de la maladie, suppliant les dieux de bien vouloir le tirer de ses tourments.
Pourtant, aux yeux de la jeune Utgardienne, il avait quelque chose ainsi de plus authentique, de courageux même, et c'était aussi désolée qu'admirative qu'elle lui prononçait ses quelques mots d'encouragement, comme s'ils pouvaient avoir les pouvoirs d'un baume permettant au jeune homme un plus prompt rétablissement.

En guise de réaction, l'apothicaire tourna sur elle des yeux vitreux, témoin de la fièvre dont il était victime. Il chercha à se tourner vers elle, se redresser même, et la jeune femme inquiète le soutint à son mieux.


- Hey, doucement...

Si elle avait réparé le plus urgent de sa personne, il n'était pas encore tiré d'affaire.
Lorsqu'elle releva les yeux vers son visage, elle eut la surprenante surprise de le trouver curieusement bien proche du sien. Malgré son teint pâle, exacerbé par tout le sang et la souffrance qu'elle lui avait arraché, un léger rose lui monta aux joues.
Elle ne se posa pourtant pas des quantités de questions. La voix de l'Amaranthis avait retrouvé une certaine stabilité, bien qu'emprunte d'une fatigue évidente et toute naturelle au vu de ce qu'il venait de subir.
A ses quelques mots et son léger sourire, la brune ne put répondre que par un imperceptible et gêné mouvement de tête. « C'est tout naturel » aurait elle pu tout aussi bien dire. Mais elle se sentait bien trop nauséeuse et éprouvée pour avoir le courage d'ouvrir une nouvelle fois la bouche, si tôt.

Un bref silence s'installa où le blond sembla la dévisager davantage. Elle, pour sa part, établissait à ses traits un pronostic vital plus hasardeux. Il avait de la fièvre, mais il semblait tenir bon. Rien de grave... A moins que ça ne le soit ? Et si ce n'était que dû aux effets de la potion qu'il restait conscient et en vie ? Et si en vérité, un mal plus grand et invisible le consumait de l'intérieur ? Il n'allait pas mourir, hein ? Il ne devait pas mourir... Par Njörd, qu'il ne meurt pas ! Et...
Un contact à son avant bras. Son cœur fit un bond. Tirée par la douceur de sa soudaine crise d'angoisse, elle baissa les yeux sur la main du jeune homme qui venait de se poser sur elle. Et si tôt... Elle eut la conviction que tout allait bien se passer. La nuit d'horreur n'était peut être encore pas fini... Mais un nouveau matin finirait par se lever. Et ça, c'était encore bien le plus important.

L'instant de lumière s'estompa presque aussi tôt, car comme elle un peu plus tôt, Adrian brisa le contact au retour de Sieg. Il rapportait l'eau qu'elle lui avait commandé d'aller chercher. Le blessé ne se fit pas prier pour en vider le contenu. Bien qu'épuisée et encore sous le choc, la milicienne restait à côté de lui, au même emplacement, avec un calme de soldat.
Ce n'était pas fini, elle le savait. Il restait encore beaucoup à faire pour réparer les dommages que leur escapade avait coûté au beau blond. Elle attendait donc patiemment qu'il la guide pour la suite des opérations.

Une fois qu'il se fut désaltéré, l'apothicaire donna ses premières instructions. Elles étaient destinées à Sieg, qui en bon assistant qu'il était, reconnaissons le, s'empressa de s'exécuter. La milicienne le suivit un instant du regard, comme si elle eut été son superviseur. Mais le fait est qu'il se débrouillait très bien sans elle, et qu'il s'avérait être d'une discipline surprenante. Lui aussi avait des nerfs solides, malgré son dégoût évident pour le sang.
Les deux jeunes gens se regardèrent à nouveau et les craintes de l'Utgardienne lui revinrent au galop. Ce qu'il pouvait avoir l'air fatigué... Vivement qu'ils en finissent, et qu'il puisse se reposer un peu...

Mais visiblement, elle n'était pas la seule à se faire du mouron.
Adrian, aussi mal en point pouvait il être, trouvait encore moyen de se faire du soucis pour elle et la suppliait de bien vouloir se reposer un peu. La milicienne, interloquée, ouvrit alors la bouche en signe de protestation, mais ne souhaitant pas interrompre, le laissa poursuivre jusqu'au bout. De toute évidence, dans l'immédiat, elle n'était plus que d'une utilité réduite. Au mieux, elle pourrait servir de support à l'apothicaire, mais elle ignorait tout de la confection des mixtures. Même le mot « cataplasme » lui sonnait curieux. Elle fronça légèrement les sourcils, d'abord très réfractaire à l'idée de le laisser, même si elle savait qu'il ne serait pas seul, vu qu'il resterait Sieg, à qui elle accordait volontiers sa confiance.
C'est lorsqu'il fit mention de son état vestimentaire que l'Utgardienne revint sur sa conviction. Il parlait de son chemisier souillé, et elle baissa alors les yeux pour se contempler elle-même. Et aussi résistante était elle – et avait elle prouvée être -, en découvrant ses mains et ses bras maculés de sang, son haut autrefois clair devenu noir et poisseux, empestant la boucherie et la mort, elle sentit comme un vertige la gagner et ça n'alla pas pour arranger ses hauts le cœur.

La gorge serrée, elle referma discrètement sa poigne sur la table pour que ses jambes flageolantes ne trahissent pas sa faiblesse. Relevant les yeux vers le courageux bien que soucieux Amaranthis, elle s'essaya à un sourire qui était plus qu'évidemment forcé.


- Vous avez raison... Mieux vaut repartir au propre pour la suite. Je reviens vite, alors promettez moi de vous tenir tranquille.

Elle tourna lentement le regard vers Sieg, découvrant qu'il s'était interrompu dans ses préparations pour les observer discrètement un moment. Un petit bond au cœur, et la jeune femme retrouvait subitement sa prestance de soldat. Elle se racla la gorge, pour quitter le ton doucet qu'elle employait dans la conversation qu'elle avait cru intime avec son compagnon d'aventure.
Au fond, qu'est-ce qu'elle n'appréciait pas dans le regard du troisième protagoniste ? La possibilité qu'il la juge faible, elle qui n'était qu'une femme, si petite et si jeune ? Ou cette lueur attendrie lorsqu'il posait ses yeux sur eux-deux ?


- Je vous laisse le soin de veiller sur lui. Je n'en aurais pas pour longtemps.

Elle désignait en même temps Adrian, d'un petit geste plus froid que ce dont elle avait usé jusque là. La milicienne était de retour. Enfin, c'était l'étrange sentiment qu'elle avait... Ou qu'elle voulait donné ? Elle ne le savait plus très bien...
Mais il lui pressait de quitter cette pièce oppressante. Pire, elle suffoquait presque d'être couverte de ce sang, d'être submergée d'images sombres et glauques, d'être tiraillée entre l'envie de vomir et de se laisser choir au sol...
Elle devait se montrer forte, jusqu'à ne plus être visible des deux hommes au moins.

Sans autre cérémonie, elle traversa la pièce à grandes enjambées tout en s'emparant d'une bougie. Gravissant les escaliers presque deux marches par deux marches, elle sentait sa respiration d’accélérée, son cœur bondir.
Elle déboucha sur un vaste salon, sobre mais néanmoins spacieux. Tout assorti à la bâtisse, le mobilier y était élégant, soigné, et tout était disposé dans un ordre méticuleux, si bien qu'elle s'en serait demandée si quelqu'un vivait réellement en ces lieux. Mais tout était propre, aucune poussière... Tout à l'image de son propriétaire, le boudoir était impeccable.
Mais la jeune femme ne prit pas beaucoup le temps de l'observer en détail, tout empressée était elle de se défaire des vestiges de son opération. Elle fureta vivement, repérant une porte qu'elle s'empressa de pousser de sa main sale pour découvrir, cette fois, une large chambre à coucher tout aussi coquette que la pièce précédente. Elle referma presque dans l'urgence la porte derrière elle.

De là, presque immédiatement, sa respiration se fit plus qu'audible, suppliante, souffrante... Tous ses membres se trouvèrent assaillis de tremblements féroces, et sa poitrine, haletante, était secouée par des sanglots qu'elle peinait à retenir. Elle posa la bougie et avisa un tonneau dans lequel était sans aucun doute entreposée l'eau en réserve et en rempli tant bien que mal une bassine avec empressement. Elle y plongea ses mains et ses avants-bras, les frictionnant avec acharnement pour en défaire la couche rubis les recouvrant. Plus l'eau se teintait de rouge, plus l'angoisse semblait la gagner. Elle se défit dans la hâte de son chemisier, rendue hystérique, et continua sa toilette avec la même fougue, changeant l'eau à de multiples reprises.

Des images remontaient, encore et encore, dans son esprit en proie à la panique.
D'abord, ça avait été tout ce long et terrible processus d'un peu plus tôt. L'opération d'Adrian, son sang, sa souffrance, ses hurlements de douleurs... Tout le supplice et l'horreur dont elle avait été actrice, elle la tortionnaire, lui la malheureuse victime... Puis, la scène dans la taverne... L'épée sous sa gorge... L'apothicaire étendu dans les débris de verre et de bois... Le fracas des meubles qui se brisent sous son pauvre corps projeté...
Mais alors que ses yeux sombres, des quels ruisselaient déjà timidement quelques larmes, se posèrent sur ses mains pour vérifier qu'elles étaient enfin propres, elle redécouvrit, à la faible lumière que lui offrait la bougie, la fine et longue cicatrice blanchâtre qui lui encerclait l'avant-bras pour venir mourir sur le dos de sa main.
Et ce fut une toute autre scène d'horreur, bien plus ancienne, qu'elle revit se jouer sous ses yeux...



Il faisait un temps bien différent que celui de cette nuit.
Un grand soleil brillait au dessus de Claircombe, baignant la ville d'une coupole bleutée aux rayons éclatants. Une fine brise balayait les rues, transportant l'entêtant parfum des fleurs, des embruns marins et des fumets des mets soigneusement préparés par les femmes dans leur foyer. Partout résonnait la guillerette rumeur des discussions et des rires, les appels des marchands et potins de bonnes femmes aux lavoirs. Tout se concordait en une promesse d'une journée radieuse, placée sous le signe de la bonne humeur et de la joie. Une journée heureuse dont se remémoreraient, sourires aux lèvres, les petites filles au bras de leur mère.
Nul ne laissait présager, tout au contraire, qu'il s'agirait là de la journée la plus traumatique de son existence, pour l'une d'elle.
Elle était si jeune, si petite, si innocente. Le monde pour elle n'était encore qu'un immense terrain de jeu et la vie semblait s'offrir tout entière à elle. Elle serait quelqu'un un jour, et elle accomplirait des grandes choses. Parce qu'elle n'était pas n'importe qui : elle était Raina Visenrov, fille de Drarg et Nathea Visenrov, digne descendante de purs Utgardiens bien intégrés à leur clan, au sein de la ville de Claircombe. Du moins, c'était ce que sa mère lui avait toujours répété... « Tu veux être une combattante, ma fille ? Tu le seras. N'en doute jamais et ne laisse jamais personne te convaincre du contraire. Tu es forte et volontaire, et aussi souvent que tu le seras, tu réussiras dans tout ce que tu entreprends. »
Qu'il est facile de tout réussir, lorsqu'on a six ans...
Et Raina était convaincue que rien ni personne ne pourrait jamais détruire ses convictions, pas même son désagréable père.
Jusqu'à ce jour, du moins...
Sa main dans celle de sa mère, elle tenait fièrement le panier de victuailles qu'elles ramenaient du marché. Fortes et intouchables, c'était ainsi qu'elle les voyait tout deux. Elle se figurait déjà ses jeux du jour... Si Père ne mobilisait pas Galdor à son apprentissage, elle le provoquerait en duel. Galdor était fort, grand, un vrai bon Utgardien en devenir. Elle avait tout à apprendre de lui... Et il était, sans l'ombre d'un doute, plus que son frère : il était son meilleur ami, son protecteur, son confident.
Elle le vit au loin. Il devait s'être extirpé des griffes de leur père pour venir à leur rencontre. Un large et beau sourire se dessina sur le visage de la petite fille qui déjà le récriait. Elle voulut partir au devant de sa mère, comme à leur habitude, mais à peine eut elle fait deux pas que la poigne de sa mère sur la sienne s'était refermée, la tirant en arrière. Elle ouvrait des grands yeux et elle ne comprenait pas. Galdor, lui, s'était figé, et son expression n'avait plus rien de joyeux. Un hurlement, terrible, déchira la bulle de gaieté dans laquelle ils s'était tous trouvé jusque-là. La fillette tourna lentement les yeux vers sa mère...
Le rêve s'était mué en cauchemar...
Des gerbes de sang, jaillissant de la gorge tranchée de sa mère qui s’époumonait encore. Cet homme qui se repaissait du sang de la malheureuse. Nathea fixait dans un regard de détresse sa si jeune fille qu'elle agrippait encore. « Raina... »... L'enfant tirait pour s'extirper. « Raina... ».. Des mains fortes la tirèrent en arrière, et dans un même temps la libéra de l'étreinte de la main de sa mère qui restait tendue vers ses deux enfants qui la dévisageaient d'épouvante.
Galdor attrapa sa sœur et l'emmena à l’abri. Elle pleurait. Elle pleurait à chaudes larmes. A six ans, on a apprit ce que la mort signifie... Mais on n'y croit juste pas. On ne peut ni le réaliser, ni le comprendre. Mais à ce jour, à cet instant précis, la candeur et l'innocence s'étaient évaporées. Elle ne devinait pas encore tout... Mais elle pardonna parfaitement à son frère de la quitter et de le voir, un instant plus tard, éclater la boîte crânienne du monstre... Puis celle de leur mère.
Sa cicatrice était le vestige de la vérité frappante...
C'était la dure réalité. Aussi fort puissions nous être, aussi volontaire puissions nous nous montrer, il y avait toujours un monstre, quelque part, se languissant de nous dévorer. La Mort, elle, se fichait éperdument du mérite de chacun, et frappait à son bon gré au hasard tout le monde, tôt ou tard, sans moindre distinction.



Aux gerbes de sang se mêlait la flaque noire sous le bureau... Au cri déchirant de Nathea se mêlait les suppliques de souffrances d'Adrian... Au visage défiguré de sa mère se mêlait celui épuisé de l'Amaranthis... Et tout n'était plus que confusion dans l'esprit de l'Utgardienne.

Raina se laissa tomber à genoux, en proie à ses souvenirs et ses craintes, dans une angoisse dévorante. Les larmes et sanglots cascadaient de ses joues, le long de son menton et roulant sur sa gorge dévêtis. Elle se serrait elle même de ses bras, cherchant un réconfort dans cette tempête de souffrance et de peur. Elle tremblait de tout son corps, aussi fragile que cette petite fille qui, un jour, dans une ruelle, avait regarder son frère ôter la vie à la femme qu'elle aimait le plus au monde sans être capable de rien faire.
Combien de temps cela avait bien pu durer ? Quelques secondes ? Plusieurs minutes ? Une heure, peut être deux ?
C'était effroyable... C'était douloureux... C'était libérateur...
Elle se battait pour refaire surface, tâchait de ne faire aucun bruit trahissant sa faiblesse. Mais elle était ballottée au gré de son esprit éprouvé par la piqûre de rappel que lui avait fourni tout ce sang, tout ces cris et cette Mort, cruelle et injuste, qui une fois de plus avait tenté de voler une vie sous ses yeux.

Non.
Dis-le Raina... Dis lui que ça ne serait pas pour cette fois. Dis lui que tu es forte et volontaire, et que tu ne laisseras jamais rien ni personne te barrer la route.
Non, Raina. Ne te laisse pas abattre. Aussi longtemps que tu tiendras debout, plus jamais il n'arrivera que tout s'effondre.
Non, ne cède pas à tes démons. Car cette bataille-là, vous l'avez déjà gagné. Tu l'as déjà gagné.
Non, ça n'arrivera pas à Adrian.

Petit à petit, l'angoisse se dissipa. Sa respiration comme son cœur retrouva un semblant d'apaisement. Les tremblements s'estompèrent et ses membres se détendirent. La jeune femme ouvra les yeux pour redécouvrir la vaste chambre. Il lui sembla lui falloir une éternité pour se décider à se relever. Elle prenait soudainement conscience des bleus occasionnés par la bagarre devant la taverne. Rien de méchant en soit, et c'était très supportable, mais désagréable. Elle le paierait seulement de quelques douleurs musculaires le lendemain, sans doute.
Mais en soit, son âme se trouvait apaisée. Pleurer ne lui arrivait presque jamais et elle oubliait parfois combien il pouvait être libérateur de laisser s'échapper toutes ses souffrances enfouies. La pression ainsi évacuée, elle se sentait fatiguée, certes, mais dans sa tête tout était bien plus limpide et clair.
Ce n'était pas fini, elle avait encore du travail pour assurer le plus de chance à Adrian de s'en sortir avec moindre mal.

Sur ses pieds, elle plongea les mains dans la bassine pour s'asperger le visage d'eau et faire disparaître toutes les preuves de son égarement. L'Utgardienne acheva de faire sa toilette, puis s'empara de son chemisier qu'elle baigna, à de multiples reprises, sans réussir réellement à le détacher.
Foutu, mais bon. Elle le mis à sécher contre le rebord de la baignoire.

La brune hésita un instant, la main posée sur la porte de la penderie. Pouvait elle vraiment se servir dans les affaires de l'apothicaire ? Mais quoi, sinon ? Redescendre avec un chemisier trempé, ou sans un vêtement couvrant le haut de son corps ? Ce n'était pas franchement plus respectueux, non ?
Elle tira la porte à elle et dénicha un haut sombre qu'elle enfila sans autre cérémonie. Différence de gabarit oblige, si l'Amaranthis était assez svelte pour qu'elle ne flotta pas allégrement dans le vêtement, celui-ci toutefois tombait bien bas sur sa silhouette.
Elle allait refermer la porte lorsqu'elle remarqua, dans un rayon tout en bas de l'armoire, un vêtement dont les tissus et les couleurs semblaient dénotés du restant de la garde robe...

La curiosité l'emporta et du bout des doigts, elle tira le chemisier pour l'observer. Et... Ce fut frappant : il n'appartenait pas à Adrian, mais à une femme.
L'Utgardienne se trouva un peu confuse de sa découverte. En fait, plus confus encore était l'étrange sentiment que celle-ci lui provoquait. Elle contempla un instant sa trouvaille avant de le ranger à nouveau à sa place et refermer la porte de l'armoire.
Un tout nouveau regard venait de s'ouvrir. La milicienne jeta un œil autour d'elle, sans bouger. Comment avait elle fait pour ne rien remarquer avant ? Tout semblait dans l'endroit assorti, comme par deux, fait pour un couple...
Dire qu'elle ne s'en était pas même posé la question... Et étrangement... Sans qu'elle ne put expliquer pourquoi... Cela la contrariait un tantinet.

Mais trêve de révélations et de sentiments étranges...
Quoi qu'il en soit : elle avait encore du pain sur la planche.
La jeune femme prit une grande inspiration et saisit la bougie. Elle fit le trajet inverse d'un peu plus tôt et descendit les marches des escaliers plus sereinement.
Elle ne put s'empêcher de remarquer alors, au centre de la table dans le coin cuisine du grand salon, un bouquet de lys dorés.

Lorsqu'elle passa la porte, Raina regarda instinctivement en direction du bureau. Son cœur fit un bond d'abord, car voyant le malheureux blondinet allongé, les yeux mi-clos, elle crut qu'il ne respirait plus. Mais il eut un mouvement et elle lâcha un discret soupir de soulagement.
Ses yeux tombèrent sur les tâches de sang maculant le sol. Elle crut un instant qu'elle allait à nouveau se sentir mal.

Mais un bruit de vaisselle, plus loin, la tira de sa torpeur. Elle eut un sursaut en tournant la tête vers l'origine de ce tintement. Or, là encore, ce n'était qu'une fausse alerte.
Sieg venait de retirer le couverte d'une casserole et il servait son contenu dans trois choppes, devant l'âtre du feu.
Elle avait presque oublié qu'il était là, celui-là...
L'homme tourna vers elle un regard étonné en la voyant souffler, la main sur la poitrine.


- Bon sang ! Vous m'avez fait une de ces peurs !
- Pourquoi donc ? Que vouliez vous qu'il arrive ?


La milicienne se mordit légèrement la lèvre inférieure, pas sûre de la réponse adéquate. Il n'était peut être pas très sage de faire part à un civil du pourquoi et du comment ils s'étaient tout deux retrouver en pareille posture. Pour l'heure, mieux valait s'assurer d'avoir toute l'aide possible, pour le bien d'Adrian.

- Allez savoir. Un voleur, un intrus. Peu importe...

L'homme leva un sourcil, puis haussant les épaules il reprit sa besogne. Raina, quant à elle, décida de refaire le tour des portes menant à l'extérieur, juste pour bien s'assurer que toutes se trouvaient bien fermées à clef. Et c'était le cas.

Elle revint dans la pièce principale de la boutique et Sieg lui apporta alors l'une des choppes. La jeune femme regarda curieusement le breuvage, comme l'homme.


- Qu'est-ce que c'est ?
- C'est à Monsieur Mayr qu'il faut le demander, moi je fais juste ce qu'il me...


Il se coupa dans sa phrase, la dévisageant. L'Utgardienne lui rendit son regard, d'abord méfiante quant à son attitude. Puis elle comprit... C'était ses yeux, gonflés, rouges, qui provoquaient ce trouble chez son compagnon de fortune. Il comprenait de ce fait qu'elle avait pleurer.
Et de son soudain silence, elle comprenait qu'il le comprenait. Et ça ne lui plaisait pas du tout. Son regard se durcit sur l'homme et, en silence, de ses simples prunelles, elle le garda de s'aviser de faire la moindre remarque. Sieg, bien avisé, se reprit après un léger raclement de gorge.


- Monsieur Mayr m'a dit de vous le donner. Que ça vous ferait du bien.
- C'est ça...


Marmonna-t-elle...

Choppe en main, elle s'approcha de la table ou se trouvait Adrian. Elle prit une grande respiration et s'efforça d'offrir à l'apothicaire un visage apaisé et confiant, semblable à celui qu'elle avait eu tout le restant de leur épopée.
L'attendrissement de Sieg, sa faiblesse et sa découverte dans la penderie de la chambre ayant fait leur œuvre, sa voix avait perdu son timbre doucet et intime d'un peu plus tôt.


- Comment vous sentez vous, Adrian ? Pensez vous être assez fort pour qu'on poursuive vos soins ou préférez vous vous reposer, pour l'instant ? J'ignore même ce qu'il nous reste à faire, mais sachez que pour ma part, je suis prête.

Elle évitait soigneusement les prunelles d'émeraudes de son compagnon, ne glissant sur son visage qu'un regard rapide pour évaluer ses forces. Elle désigna son verre.

- Sieg m'a donné ça, mais il n'a pas su me dire ce que c'était...

Raina baissait les yeux, observant à son tour l'étendu des dégâts causés à son compagnon, comme pour essayer de deviner aussi bien son état que les différentes blessures qu'il lui restait à traiter.
Enfin, c'était aussi avant tout pour ne pas offrir de réelles possibilités à l'Amaranthis de faire la même constatation que le troisième protagoniste.
Son regard tombe sur le vêtement dérobé qu'elle portait.


- Je me suis permise de vous emprunter un vêtement, j’espère que ça ne vous ennui pas...
Adrian Mayr
Adrian Mayr
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Sam 23 Jan - 18:02
Une douce odeur d'infusion emplissait peu à peu la pièce à mesure que la préparation végétale diffusait ses essences dans l'eau chaude de la petite marmite. Adrian trouva un certain réconfort dans cette senteur familière. Habituellement, il préparait cette boisson pour calmer les nerf des patients anxieux à l'idée de recevoir des soins. Bien entendu, cette décoction avait de réelles propriétés apaisantes, mais le réel effet positif résidait dans le fait de consomme une boisson chaude au gout de plante, laissant penser à une sorte de médicament.
L'apothicaire termina son auto examen et se redressa non sans ménagement. Il était salement amoché, tel était le constat. En plus de sa blessure à la jambe, il souffrait au niveau des cotes mais également dans le bas du dos ou le choc avait raisonné dans toute sa colonne. Malgré la violence de l'impact qu'il avait subit cette soirée même, force était de constater que l'apothicaire avait été particulièrement malchanceux dans sa chute contre la table en bois massif. Son regard partiellement voilé s'égara sur ce bureau devenu pour un soir table d'opération...Le sang partiellement oxydé commençait à accrocher sur la surface boisée tandis que les dernières gouttes de sang encore fraiches finissait de s'écraser au sol pour y diffuser une marque ambrée.

Adrian soupira tandis que son esprit lui fit oublier ses maux pour lui rappeler que cette tâche serai infernale à retirer et que le bureau était potentiellement bon pour être remplacé. Ce fut sa cuisse qui le ramena à la réalité lorsqu'il eut instinctivement un mouvement de repli de sa jambe meurtrie. Appréhendant toujours l'état de celle-ci, il risqua pour la première fois un regard à l'étendue des dégâts.
Il fit une grimace au constat de sa double blessure encore maculée de sang séché noircie par la brulure. Au moins, grâce au courage de Raina et à la dévotion de Sieg, Adrian était tiré d'affaire, rien ne devrait s'aggraver de ce coté la et il leur en était reconnaissant.

Une vague d'inquiétude s'empara de lui à la seconde ou il pensa à la jeune femme, parcourant son corp d'un frisson lui glaçant les os. Bien qu'elle ne soit pas en danger et de solide constitution, Adrian avait bien vu que la milicienne était dans un état d'angoisse et de fatigue également très avancé, elle avait demandé à son corps et son esprit une quantité phénoménale d'énergie pour  mener à bien l'opération. Il l'avait d'autant plus remarqué lorsqu'elle avait quitté la pièce pour se rendre à l'étage, d'une démarche bien moins ferme et assurée que ce qu'il avait pu voir tout au long de cette interminable journée. Était-ce une bonne idée qu'elle reste seule à l'étage, et si son épuisement l'amenait à l'évanouissement, il ne pourrait se déplacer pour aller l'assister. Un tremblement parcourut sa main droite, était-ce ces facéties habituelles de son système nerveux ou bien cette soudaine inquiétude qui lui manifestait ces soubresauts ? Il n'aurai su le dire à ce moment. Son regard s'était fixé sur l'accès à l'escalier tandis que son esprit divaguait. Ses rêveries prirent fin lorsque Sieg s'approcha de lui, avec un léger sourire, cet homme dégageait une gentillesse qui semblait à toute épreuve.


"Vous savez, c'est une grande personne elle saura s'y retrouver..."

Adrian posa un regard interrogateur sur l'homme dont le sourire exprimait une forme d'attendrissement. Il lui fallut quelques secondes pour comprendre l'allusion, il faut croire qu'il avait décidemment l'air très inquiet en regardant cette fameuse porte...Ses joues se tintèrent légèrement de rouge malgré la pâleur qui le caractérisait depuis quelque temps. Il détourna la tête et toussota, un peu gêné par l'allusion. Intérieurement l'apothicaire dut admettre que Sieg avait raison, Raina savait se débrouiller toute seule, mais il ne pouvait s'empêcher de penser à ce qu'il l'avait forcé à faire.

"Je n'ai aucun doute sur sa capacité à s'en sortir pour trouver des vêtements de rechange, je réfléchissais simplement.
-Si vous le dites Monsieur Mayr…
-Appelez moi Adrian s'il vous plait, je suis votre débiteur et non votre médecin, je vous doit une fière chandelle."

Sieg eut une moue gênée à l'entente de l'éloge, si bien qu'il s'en retourna à ses occupation. Adrian esquissa un bref sourire timide en regardant l'homme faire volte-face, parler lui faisait plus de bien qu'il ne l'aurai pensé. Le médicament le forçant à rester éveillé se dissipait doucement, faisant naître un mal de tête qui faisait pulser son sang dans son crâne et ses tempes. Il se rallongea doucement sur le bureau et fixa le plafond obscur de la boutique. Les ombres projetés par le source lumineuses de la pièce dansaient dans un ballet hypnotisant qui apaisa l'esprit de l'Apothicaire. Il se força cependant à ne pas trop se laisser porter, sous peine de s'endormir un peu vite avant d'avoir pu terminer les soins importants. Une petite odeur de terre humide indiquait à Adrian que la préparation avait macéré suffisamment pour être efficace.

Perdu dans ses pensées, il n'entendit pas la Milicienne revenir avant qu'elle n'interpelle Sieg. Se voulant un minimum discret, il tourna la tête le moins possible, mais suffisamment pour poser son regard sur la jolie milicienne maintenant vêtue d'une tenue à lui, un peu longue pour elle mais au moins pas trop large. Il s'en trouva étrangement rassuré d'apercevoir la silhouette svelte se sportive qui commençait à lui devenir très familière. Sous la lumière tamisée relativement faible, il ne pouvait détailler grand chose de l’attitude de ses camarades de fortune. Il se rendit toutefois compte qu’une forme ce calme intérieur venait de s’installer en lui alors qu’il reprenait sa contemplation du plafond, ménageant ses efforts au maximum.

Lorsqu’elle s’approcha de lui, Adrian détourna la tête vers elle, les yeux mi-clos de fatigue. Il entendit alors la voix de la milicienne qui ne fut pas sans lui rappeler le ton qu’elle employait avec lui un peu plus tôt dans la journée. Adrian jugea d’abord que cette pause avait été bénéfique pour sa compagne de fortune. Il s’apprêtait à lui répondre lorsque son regard croisa pendant une fraction de seconde celui de Raina. Ses yeux sombres et envoûtants habituels étaient gonflés et rougis, bien que toujours marqué par ce petit air autoritaire qui la caractérisait si bien.
Adrian eut un pincement au cœur, être témoin de la douleur de la milicienne l’atteignait, sans qu’il ne puisse dire pourquoi, il était peiné de voir qu’elle venait certainement de se laisser déborder par ses nerf. L’apothicaire serra le poing, se sentant d’un coup bien coupable quant à l’épuisement moral que semblait traverser la jeune femme, lui qui l’avait embarqué dans une aventure des plus périlleuses pour une simple présomption d’innocence.

Perdu dans cette pensée inquiète qui tourbillonnait dans son esprit, il n’eut pas le temps de répondre avant qu’elle ne reprenne la parole. Son regard passa brièvement sur le verre que la milicienne tenait avant de revenir capter les yeux fuyants de la jeune femme. Une chose semblait assez évidente pour Adrian, elle évitait soigneusement de croiser son regard. Était-ce pour ne pas témoigner directement son épuisement? Avait-il fait quelque chose de mal? Et puis d’ailleurs pourquoi ce simple détail le tracassait tant, lui qui n’appréciait pas plus que ça les relations humaines.
Secouant légèrement la tête pour se tirer de cette rêverie à nouveau, il prit la parole d’une voix fatiguée mais qui semblait bienveillante.


"Je me sens mieux, en grande partie grâce à vous Raina. Je pense que je vais en effet encore avoir besoin d’un coup de main pour appliquer le baume, notamment sur mes côtes car ma mobilité est actuellement trop réduite, mais je ne veux pas vous imposer d’avantage...."

Il se redressa de manière un peu plus assurée que la première fois, plus accoutumé à ce que son corps lui permettait ou non de faire. Il prit la précaution de ne pas se retrouver à quelques centimètre du visage de la milicienne cette fois, n’ayant pas trop envie de la forcer à révéler sa détresse si elle ne le souhaitait pas. L’apothicaire avait cependant du mal à décrocher son regard de sa compagne de fortune.
Pour la première fois depuis très longtemps, il débordait d’une envie de demander à Raina si elle souhaitait se confier, discuter, afin d’aller mieux. Il se retint malgré tout de le faire, ne sachant même pas vraiment comment s’y prendre pour ne pas se montrer intrusif. Il reprit la parole, toujours sur le même ton. Il esquissa même un sourire.


"Cette boisson est une infusion de plante, simple et efficace pour aider à apaiser les nerf. Ce n’est pas fort et bien que je n’ai pu vous prouver efficacement mon innocence, je vous assure que nul poison ne constitue la boisson.."

Une nouvelle vague mal de tête fit pulser son sang dans sa tête, lui faisant faire une grimace. Parcouru d’un frisson, son corps meurtri sembla se réveiller entièrement pendant une fraction de seconde. Il avait besoin de soins, l’heure n’était pas vraiment à la plaisanterie malheureusement. Il reprit cependant une troisième fois la parole.

"Je suis désolé, j’aurai du vous dire que vous pourriez trouver des vêtement plus à votre taille en fouillant plutôt que de vous laisser chercher à l’aveugle..
Sa voix baissa subitement de volume, rendant sa phrase moins audible.
Ce n’est pas comme s’ils allaient me servir à nouveau....
"

Une pointe de nostalgie, voir même une certaine tristesse se dessina l’espace d’un instant sur le visage de l’Amaranthis. Cette mélancolie, ajoutée à son front ruisselant de sueur, sa barbe maculée d’une tache sombre rougeâtre et ses yeux creusés par la fatigue donnaient un bien triste tableau contrastant drastiquement avec l’Apothicaire Amaranthis que les gens connaissaient.
Détournant la tête, il rapprocha d’une main le récipient à l’odeur de terre humide pour analyser de plus près le mélange. Il l’agita doucement pour constater l’épaisseur et fit un petit hochement de tête avant de rediriger son regard vers la Milicienne à qui il s’adressa.


"Ce mélange est un cataplasme, une fois appliqué il sert à apaiser les douleurs et protège les zones meurtries par la même occasion. L’argile est un excellent remède, simple et efficace. Je peux l’appliquer moi-même pour la plupart de mes blessures, mais mes cotes me font souffrir, je vais avoir besoin d’aide...Encore.."

Adrian était réellement ennuyé de devoir demander de l'aide, il n’aimait pas avoir à dépendre des gens pour son confort personnel, mais cette situation inédite le prenait de court sur beaucoup de points. Il n’avait jamais été aussi mal en point de toute sa vie et il espérait ne jamais avoir à s’approcher de la mort d’aussi près à nouveau. D’ailleurs il n’y avait pas que physiquement qu’il vivait quelque chose d’inédit, car son esprit lui aussi était embrumé de sentiments qu’il comprenait à peine, voir pas du tout.
Raina Visenrov
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Ven 26 Fév - 13:44
Raina promenait son regard sur le corps meurtri de son compagnon. De sa jambe à son buste, de son buste à ses bras, de ses bras à ses chevilles. Mais toujours, elle évitait bien soigneusement de remonter ses yeux sur le visage de l'Amaranthis. Sa machoire demeurait crispé. Son attitude avait tout retrouver de son militaire, froid et distant, presque agressif, alors que quelques instants plus tôt, elle s'était montré plus douce et réconfortante que ce qui était dans ses habitudes.
C'était sottise. Les hommes sont tous les même... Et ces Amaranthis, des beaux parleurs de surcroît. Sans qu'elle ne sache vraiment le pourquoi du comment, l'Utgardienne se sentait irritée, contrariée, allons même jusqu'à dire qu'elle était sur les nerfs. La naïve et novice en la matière mettait bêtement cela sur le compte de la fatigue.
Mais à quiconque l'observait un peu, il était aisé de noté un changement radical dans son attitude.
De même qu'elle ne s'était pas rendu compte d'à quel point son visage se trouvait marqué par son effondrement d'un peu plus tôt.

Mais le patient n'en fit pas mention. Raina n'était quand même pas si stupide : elle se doutait qu'Adrian avait décelé les vestiges de ses pleurs à ses yeux gonflés. Mais lui non plus n'était pas bête, et avec tout le respect dont il avait toujours fait preuve depuis le matin, il se garda bien de lui en faire mention. Et cela convenait parfaitement à la milicienne qui n'aurait sans doute pas apprécier qu'on la prenne à traître sur ce sujet.
Et au fond d'elle, elle sentait qu'il y avait plus important à cacher que les larmes qu'elle avait versé. Une faiblesse plus grande, dont elle ignorait encore le nom.

L'Amaranthis la rassura sur son état. Il était faible, certes, mais en relativement bon état. Du moins, il était hors de danger de toute évidence. C'était au moins une bonne nouvelle.
Raina ne releva pas et ne répondit rien à la sorte d'allusion cachée lorsqu'il lui laissa choix de poursuivre ou non. Elle resta droite, les yeux se promenant loin de ses émeraudes, bouche fermée dans sa moue fâchée de soldate.
Il se redressa et elle se figea quelque peu, prête à faire un pas en arrière si d'aventure le hasard voulait que leurs visages se trouvent à nouveau proche l'un de l'autre. Elle ne pensait pas un instant qu'Adrian l'eut fait exprès, la fois d'avant. Mais elle sentait que le jeune homme cherchait à capter son regard, pour que leurs yeux se croisent à nouveau. Fenêtre de l'âme, elle comptait bien garder pour elle le fruit de ses contrariétés, même si elle n'en définissait pas elle même réellement les origines.
Il faisait des efforts, cherchait à la rassurer et s'essaya peut être même à un trait d'humour, ou au moins à ce qui ressemblait vaguement à un petit rappel personnel de leur épopée. Quelques temps plus tôt, ce genre d'initiatives aurait sans doute arraché un sourire amusé, voir « amical » à la garde. Mais tête de cochon, elle était désormais renfermée, réfractaire à toutes approches, et se contenta de répondre d'une voix neutre, vibrant en fond d'une émotion qu'elle définissait elle même très mal :


- Je vous fait confiance. Je la boirai lorsqu'on aura terminé.

Son propre ton la perturbait. Qu'est-ce qui n'allait pas, subitement ? Elle se sentait grognon, chafouin, comme si un grain de poussière pouvait enrayer tout son système émotionnel et le faire déraper en colère d'un seul coup. C'était un drôle de sentiment, ce genre de chose que l'on sait au réveil, et qui nous pousse à nous dire qu'on ferait mieux de ne pas se lever le matin. Or, il ne pouvait s'agir de cela, car le saut d'humeur était apparu soudain et elle s'en demandait toujours la cause. Une chose plus perturbante encore, il semblait qu'Adrian accroissait ce sentiment d'irritation...
Il n'avait pourtant rien fait, et elle le savait parfaitement.

Il s'intéressa à ses vêtements, et c'est alors que, tout justement... La poussière tomba dans les engrenages.
Raina poussa un gros soupir alors qu'elle levait les yeux au ciel, nettement agacée, nettement irritée, comme piquée à vif par les phrases de l'apothicaire. Elle posa ses yeux sur le visage tiré du blond, comme pour l'inviter à se taire et ne pas se lancer sur ce sujet.
C'est là qu'elle comprit – et sachez qu'elle en était la première abasourdie – que toute cette mauvaise humeur n'avait pour source que le vêtement féminin, trouvé à l'étage.

Toutes personnes normales, je suis d'accord avec vous, aurait compris les insinuations d'Adrian, au moins par moitié. Un décès, une rupture, une disparition... On aurait même pu se poser la question du qui : femme, fille, sœur, mère... Oui, avec un brin de jugeote, n'importe qui aurait laissé le bénéfice du doute à l'apothicaire. D'ailleurs, l'on notera que quelques étaient les réponses à ces questions, il n'y avait pas mort d'homme. Lui avait il seulement menti ? S'était il montré déplacé ? Non, évidemment que non.
Mais à qui lira, ne vous est il pas déjà arrivé de vous trouver en pareille situation ? De tomber nez à nez avec un élément sans réponse, et qui curieusement vous met dans tout vos états ? Qu'il y aurait sans doute des pistes à explorer, un pourquoi au comment, mais qui, allez savoir pourquoi, vous indiffère totalement ? Vous vous bornez à une explication, parfois complètement fantaisiste et tirée par les cheveux, et vous ne voulez plus rien entendre de personne à ce sujet, comme s'il était tabou, comme s'il vous blessait, comme s'il s'agissait d'une honteuse trahison contre laquelle vous ne pouvez accorder votre pardon ? On ne vous le demande même pas d'ailleurs, parce que personne ne comprend de quoi il est question. Pas même vous... Et vous vous observez comme de l'extérieur, à deux doigts d'exploser, sans être capable de vous raisonner tant rien de cela n'a de sens.
Raina, pour qui tout cela n'était qu'étranger jusqu'à ce jour, ne trouvait pas de mot à cet état dans lequel elle se trouvait plongée.
Vous, vous savez qu'on appelle cela : la jalousie.

Le sentiment était tellement fort, que si elle remarqua la pointe de tristesse passer sur le visage du jeune homme, elle n'en fit pas fît un instant. Elle coupa court, en répondant sèchement :


- Ca ira très bien, et ne vous inquiétez, je vous le rendrais aussi vite que possible.

Ses yeux témoignaient très clairement d'une sorte de passage furieux, mais elle détourna presque aussi vite la tête, tâchant de se maîtriser un peu. Elle-même se demandait pourquoi elle agissait ainsi pour quelque chose d'aussi insignifiant. D'autant que ce n'était pas ses histoires... Non ?

Adrian lui explica la suite relative à ses soins, et elle écouta avec une expression boudeuse bien malgré elle. Appliquer un « catatruc » ne devait pas être bien compliqué, surtout après ce qu'ils avaient déjà accompli.
Mais Raina se trouvait elle-même indisposée par son humeur.


- Bien, nous allons faire ça. Sieg, aidez moi à lui retire le haut de ses vêtements.

L'homme hésita un instant, tournant ses yeux de l'un à l'autre des protagonistes, ne comprenant pas l'origine de ce soudain changement de ton entre eux deux. Il fallait dire que l'homme s'était déjà fait une petite idée sur l'Amaranthis et l'Utgardienne, et étrangement, toute sa théorie se trouvait chahutée par l'évidente mauvaise humeur de la milicienne.
D'ailleurs, le laps de temps de questionnement de l'individu eut dont d'exaspéré encore un peu la soldate, qui empoigna le manteau de l'apothicaire et l'aida à se redresser pour entreprendre de le déshabiller.
Mais rassurez vous... Elle n'y alla pas brutalement. Il était blessé tout de même... Et Raina n'était pas une méchante personne : même si elle était en colère, elle n'avait aucune volonté de faire mal au jeune homme. A lui tout particulièrement d'ailleurs, malgré ce que vous savez.

Sieg, finalement, vint en renfort. Leurs forces combinées, ils parvinrent à retirer les tissus, un à un.
La dernière épaisseur fut le plus compliqué, forçant Adrian a trouver appui sur elle, dans un contact plus soutenu, de manière à ce que le troisième protagoniste puisse passer le vêtement par dessus la tête de l'apothicaire.
La peau nue d'Adrian contre elle lui provoqua un étrange frisson, comme électrique. Et la colère, curieusement, sembla décroître instantanément de plusieurs crans, la laissant un peu penaude et les joues tintées de rose.

Avec un peu plus de douceur, elle l'aida à s'allonger de nouveau, jetant un œil si rapide à son buste qu'elle ne décela en vérité rien de ses contusion. L'observer torse nu la mettait mal à l'aise, et elle se trouvait toute gênée subitement, relevant les yeux sur le visage d'Adrian.
Ne la pensez pas si candide quand même... Elle était une Utgardienne, et une militaire... Des hommes à moitié nu, elle en avait déjà vu...
Mais pas l'Amaranthis. Et la situation rendait les choses très... bizarres.
Sieg capta son trouble et toussota pour capter son attention.


- Le cataplasme.. ?

Raina leva les yeux sur le bol qu'il lui tendait. Ses joues s'empourprèrent tout à fait alors que, d'un seul coup, elle comprit qu'elle devrait appliquer le baume à même le buste découvert du jeune homme... D'une main un peu hésitante, elle se saisit du récipient avant de tourner à nouveau son regard sur l'apothicaire.
C'était une Raina bien moins farouche qui parlait désormais, avec un petit ton de jeune femme prise au dépourvu :


- Il faut que... Je... Je l'applique avec ma main ?

Un bref flottement de silence... Sieg semblait attendre que les choses reprennent le chemin qu'il s'était figuré...

- Vous préférez que je m'en charge ?
- Non non, je peux tout à fait le faire... Enfin, c'est comme vous préférez, Adrian...


Elle posa de nouveau ses prunelles sombres sur le beau blond allongé, en jeune femme plus timide que jamais...
Adrian Mayr
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Lun 1 Mar - 19:17
Etrangement, Adrian percevait une forme de tension renouvelée dans la pièce, le regard de la milicienne s'était durci à nouveau et elle fuyait le contact visuel du mieux qu'elle le pouvait. L'apothicaire n'avait ni l'énergie ni l'expérience pour comprendre les raisons qui animaient la jeune Utgardienne à se comporter ainsi, presque soudainement. Instinctivement, il plaça ce soudain recul sur le contre coup de l'état de fatigue qu'elle traversait, culpabilisant quelque peu à nouveau de lui imposer tout ça. Adrian lisait un mélange d'épuisement traumatique et de colère dans ces yeux qui n'avaient de cesse de fuir depuis quelques minutes. l'Amaranthis se demanda même un instant si elle n'avait pas tout à coup pensé à revoir son jugement quant à la présomption d'innocence qu'il avait plaidé plus tôt dans la journée, une théorie qui ne l'enchantait pour ainsi dire pas du tout. Il n'osa en dire plus au sujet de la tenue tant le ton employé par la milicienne était froid et dénué de toute émotion.

Adrian ne se posa pas plus de question, il n'avait rien à exiger de la part de la soldate, bien que pour une raison qu'il ignorait lui même il crevait d'envie de demander ce qui avait perturbé à ce point la jeune femme. Non cependant, son cerveau ne fit pas la connexion qui aurai pu être logique et limpide aux yeux du plus grand nombre...Sieg par exemple avait très probablement compris.

L'heure n'étant cependant point aux tergiversations, Adrian se releva péniblement avec l'assistance de la jeune femme. La simple entreprise de retirer le haut de son vêtement fit naitre une grande appréhension chez Adrian, qui savait pertinemment que son corps ne serai pas clément avec lui. Cependant, l'apothicaire fut surpris de constater que le regard colérique et sombre de la milicienne ne faisait absolument pas écho à sa gestuelle, elle procédait du mieux qu'elle pouvait, avec une douceur qu'Adrian n'aurai pas soupçonné avant cela. La dernière épaisseur de vêtement arracha un petit cri de douleur à l'apothicaire, mais ce n'était pas l'élément le plus déroutant à cet instant. Pendant ces quelques secondes, Adrian eut l'impression que le temps s'était arrêté alors qu'il se tenait contre elle, sentant la chaleur de la soldate contre lui, bien qu'un vêtement les séparait. Une décharge électrique fit frissonner l'Amaranthis dans tout le haut de son corps, il ressentait comme puissant réconfort à ce contact, déroutant ses sens et lui faisant oublier tout ce qui s'était passé, pendant quelques secondes...Ses joues s'empourprèrent très légèrement alors qu'il se rallongeait, sans qu'il ne s'en rende compte. S'il n'avait pas été si pâle à cause de la fatigue, cela aurai même pu passer inaperçu. Lorsqu'il constata la moue gênée de la jeune femme, le processus s'amplifia...

Le flottement qui s'en suivi fut sauvé par Sieg qui de sa voix dissipa le silence. Adrian écouta à cet instant la discussion entre ses deux compagnons...Lorsqu'elle lui demanda son avis, il fut prit de court et bégaya.


"Moi? je...Ah leee...le cataplasme...EH bien je..comme vouu.."

Ce fut Sieg qui lui sauva la mise, un regard presque paternaliste posé sur l'apothicaire.
"Si vous pouvez le faire, faites le, je vais m'occuper de nettoyer un peu le bazar..."

Adrian ne sut jamais s'il avait rêvé à cet instant ou si Sieg lui avait adressé un clin d'oeil...Adrian planta sans détour son regard dans les yeux sombre de la soldate, donc l'attitude avait complètement changé, elle semblait au moins aussi gênée que lui, si ce n'est encore plus. L'apothicaire avait l'habitude d'être en contact avec des gens, médicalement parlant, l'application d'un baume était d'une banalité sans pareil d'ailleurs. Alors pourquoi se sentait-il aussi timide à cet instant, qu'est ce qui différenciait cette fois d'une autre. La réponse était devant ses yeux, pourtant il ne la capta pas consciemment. Il esquissa un sourire en demi teinte à cause de la fatigue.

"Désolé de vous imposer ça..."

Sa phrase resta sans réponse, difficile de dire qui était le plus mal à l'aise des deux. Pourtant, Raina dans sa détermination à assister l'Amaranthis plongea ses main dans le cataplasme et, après avoir contemplé pendant bien trente secondes le fond du bol, se lança. Une nouvelle fois Adrian nota avec quelle douceur l'Utgardienne au regard sombre s'employait à le soigner, surprenant contraste avec son image de dure à cuire. L'apothicaire s'efforçait de designer les zones qui nécessitait des applications, pour ne pas laisser plus encore la jeune femme dans sa gêne. Il capta son regard une nouvelle fois, lisant une concentration à toute épreuve soulignée par des joues rosies qui, admettons le, lui allait remarquablement bien au teint. Le contact des mains de la jeune femme, bien que malaisant en un sens, était surtout remarquablement apaisant pour les nerf de l'Amaranthis, dont la main avait cessé de trembler depuis déjà quelques minutes. Parfois, quelques petit mouvements appuyés par mégarde venaient le piquer de douleurs, mais la plupart du temps le contact se voulait réconfortant. S'il n'avait pas la volonté de ne pas s'endormir tout de suite, Adrian aurai bien pu sombrer dans le sommeil tant ce contact était déroutant de tendresse. Sentant une chaleur se propager sur ses joues, Adrian tenta de se faire discret en détournant légèrement la tête, fuyant un peu à son tour le regard de la milicienne. Il n'aurai pu se douter lui même que son visage dépeignait une mine bien plus apaisée que ces dernières heures, trahissant quelque peu son sentiment d'apaisement éphémère. Lorsque la milicienne eut fini, Sieg et elle s'appliquèrent à couvrir de bandages les zones meurtries du corps de l'Amaranthis, avant qu'un nouveau silence ne tombe.

Raina avait la tête baissée, Adrian regardait au loin, et Sieg laissait jongler son regard entre les deux idiots avec une moue attendrie des plus agaçante. Adrian toussota légèrement avant de reprendre la parole.


"Hum...Merci beaucoup...Raina, grâce à vous et a Sieg, je suis tiré d'affaire.."

Le visage ruisselant encore un peu de sueur, il se risqua à se redresser à nouveau, puis il fit basculer sa jambe meurtrie dans le vide. Dans un balancier qui manquait cruellement de souplesse, il se retrouva les deux jambes en balancier dans le vide, torse nu et assis sur le rebord du bureau...Près duquel la milicienne était encore, un peu plus près qu'il ne l'aurai imaginé. Son cœur manqua un battement par cette proximité une nouvelle fois involontaire, si bien qu'il détourna la tête. Bien qu'il ne se l'admette pas à lui-même, l'envie d'enlacer la jeune femme lui avait traversé l'esprit, tant parce qu'il lui était redevable que parce qu'il éprouvait une inexplicable affection pour la personne qui se trouvait à ses cotés à cet instant. Bien entendu, il n'en fit rien, car l'idée, aussi présente eut-elle été, avait déjà déserté toute trace de son esprit dès lors qu'il avait fallu faire preuve de bon sens. Adrian reprit la parole doucement.

"Il est tard...Si vous souhaitez tous les deux dormir un peu pour prendre un peu de repos, j'ai de quoi vous héberger pour la nuit à l'étage."

Sa voix s'était faite plus assurée, plus commune à ce que l'on connaissait de l'Amaranthis médecin, pourtant, son visage trahissait une fatigue grandissante, renforcée par le teint blanchâtre de son visage et les traces de sang qui subsistaient un peu partout sur lui.
Raina Visenrov
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Mar 23 Mar - 23:42
Bien sur que Raina remarqua le rouge teintant tout soudain le visage de l'Amaranthis pourtant si blanc depuis ces dernières heures. Mais là encore – oui, nous vous l'accordons, ces deux-là ne sont pas les plus malins -, elle se figura que l'exercice auquel ils s'étaient prêté l'avait seulement éprouvé, douloureux comme ça avait dû être pour lui, et que l'effort l'avait trop forcé à puiser dans ses forces restantes. Comment vouliez vous qu'elle aille s'imaginer qu'il avait, lui aussi, ressentit cette drôle d'onde chaude le parcourir au bref contact qu'ils avaient partagés ?
Pour rappel, elle était bien persuadée, quelques instants plus tôt, qu'il était marié.
Et ne reparlons même pas de la jolie marchande à qui il avait fait du rentre-dedans « pour le bien de leur enquête », le matin même...

Mais ce n'était pas ce à quoi elle pensait, pour l'heure.
Gênée, rouge comme une pivoine, ses yeux allaient du bol à Sieg, puis de Sieg à Adrian. Elle n'aurait su dire pourquoi ce qu'on lui demandait de faire la perturbait autant. Après tout, ne l'avait elle pas opéré, un instant plus tôt ? N'avait elle pas brûlée vive sa chair ? Pourquoi diable alors se sentait elle déroutée à l'idée d'appliquer un cataplasme à même la peau de l'Amaranthis ?
A moins... Que ce ne soit l'apothicaire lui-même qui la troublait ?
Mais non, enfin, c'était absurde.

Mais lorsque Adrian finit par ouvrir la bouche à son tour, il parut plus évident à tout le monde que quelque chose clochait... Mais quoi ?
Ce fut finalement Sieg qui trancha. Et si en temps normal, elle aurait songé « Mais de quoi il se mêle, celui-là ?! », c'était presque avec soulagement qu'elle prenait sa décision finale. Choisir elle-même, au vu de la gêne évidente d'Adrian, comme de la sienne, rendait sa réflexion impossible.
Mais à nouveau, le troisième compère s'éloigna, prétextant vouloir mettre un peu d'ordre dans le foutoir qu'ils avaient laissé. Ça tenait debout, mais l'Utgardienne releva brièvement les yeux sur lui, pas bien convaincue. Une fois encore, elle eut la curieuse impression que Sieg avait des soupçons, et qu'il se figurait des choses fantasques à leur propos. Il les laissait seuls, comme s'ils souhaitaient leur offrir un peu d'intimité.
Et ça aussi, c'était très perturbant.

Le beau blond planta à son tour ses prunelles dans les siennes, et une nouvelle fois, elle ne put s'empêcher de se faire la remarque que l'on connaît : qu'il était étrange et hypnotique, ce vert émeraude...
Il s'essaya à un sourire, mais la fatigue qui tirait ses traits ne le rendait pas aussi radieux qu'on aurait pu l'espérer. Étrangement, c'est de là qu'elle tira son courage : il était mal en point, il souffrait et était très faible... Il fallait lui donner toute l'aide nécessaire, le soulager autant que possible...

Elle aurait eut envie de répondre... De le rassurer, de le réconforter...
«  Ne vous en faites pas, vous ne m'imposez rien du tout. »
Mais les mots ne sortaient pas, et elle restait, bouche close, à le dévisager en dansant presque imperceptiblement d'un pied à l'autre.
Ca n'avait rien de semblable à un peu plus tôt : la dimension intime s'était évaporée. Même si elle avait réussi à maîtriser – ou plutôt si on lui avait chassé de force – sa colère, elle n'en gardait pas moins à l'esprit l'étoffe retrouver à l'étage. Mais là encore, ce n'était pas ce qui primait dans son esprit.
Ce qui occupait sa tête, à cet instant, c'était une mélange de timidité et de tristesse. Timidité, à l'idée de ce qu'elle avait à faire. Tristesse, d'abord pour l'état dans lequel il se trouvait, par sa faute à elle... Et puis, autre chose...

Un bref instant flotta, durant lequel elle détailla tant et tant le visage épuisé de l'Amaranthis qu'une détermination nouvelle revint au galop. Elle ne pouvait décemment pas le laisser dans cet état, elle devait au moins faire son possible pour le soulager.
Rappelons le, il en était là par sa faute. Et c'était sans doute elle, lors de l'opération, qui lui avait prit le gros de ses forces.

C'était pourquoi, sans un mot de plus, elle plongea sa main dans le cataplasme, tressaillant un peu à la texture étrange que celui-ci présentait. Ses yeux baissèrent sur le torse à nu du jeune homme et, une nouvelle fois, ses joues s'empourprèrent. Une nouvelle hésitation infime se dessina, alors qu'elle jetait un nouveau regard timide à Adrian. Mais elle se reprit vite, et à la gêne laissa place une forme de concentration chargée d'une sorte de malaise.
Fébrilement, elle posa ses doigts sur la peau meurtrie recouvrant les côtes du jeune homme. Suivant ses indications, elle l'étala timidement, frôlant la peau de l'Amaranthis, n'osant le toucher tout à fait. Peu à peu, la tâche effaça la gêne pesante qui planait. Concentrée, Raina s'appliquait, parcourant une à une les blessures invisibles comme les bleus qui couvrait le torse de l'homme. Elle ne relevait les yeux sur lui que lorsqu'un gémissement ou une plaine échappait de ses lèvres. Les lèvres pincées, son expression suffisait à traduire le « désolée » qu'elle n'était pas en mesure de prononcer. Et c'était avec une douceur renouvelée, dont elle ne se soupçonnait elle-même pas capable, qu'elle reprenait méticuleusement ses soins.
Pour peu, elle en aurait oublié que Sieg était présent. Toute la scène avait un petit quelque chose de très particulier, très spécial, qu'elle n'était pas capable de définir ou de traduire. Mais il était certain que l'impression de chaleur, la décharge électrique, d'un peu plus tôt n'avait pas été dû qu'à un simple premier contact, entre eux deux.
A mesure que la respiration et les tremblements d'Adrian s’apaisaient, elle se sentait elle même plus en paix. Elle n'aurait su dire si c'était l'effet du cataplasme qui calmait l'apothicaire ou simplement le caractère très doux de la situation, mais dans tout les cas, il était rassurant de le sentir moins en souffrance, comme si petit à petit, ils réussissaient tous ensemble à chasser le Mal jusqu'ici au affût.

C'était donc plus sereine qu'elle relevait les yeux une dernière fois sur le visage du blessé. Le regard détourné vers ailleurs, le blond semblait toujours mal à l'aise. Mais étrangement, elle n'aurait su dire pourquoi, il lui sembla malgré tout qu'il se trouvait quelque peu apaisé de cette dernière opération.

C'est à l'approche de Sieg que l'Utgardienne retrouva sa propre gêne quant à sa tâche et au torse nu de l'Amaranthis. L'homme lui adressa un léger sourire, approuvant son travail. La jeune femme se contenta de baisser les yeux et ils communiquèrent brièvement pour appliquer les bandages au mieux en tâchant de provoquer le moins de douleur possible au malheureux blessé.
L'exercice exigea une nouvelle fois qu'elle le prenne en appui contre elle, le temps que le troisième compère passe le tissu dans son dos. Une nouvelle vague de chaleur très étrange parcourut son corps, et une fois encore, elle sentit le rouge lui monter aux joues.

Un silence gênant s'était installé, et sous les regards insistants de Sieg, Raina préféra la fuite, fixant ses mains posées sur le rebord de table.
Et maintenant ?

Adrian brisa le calme pesant de la pièce, d'une petite phrase les remerciant de tout leurs efforts. Raina lui lança un petit regard en coin, et marmonna quelques peut timidement.


- C'est naturel...

Enfin, autant qu'il était possible de trouver naturel de rencontrer quelqu'un le matin, d'être prête à le jeter en cellule, et que le soir même on se retrouve à se débattre pour lui sauver la vie, coûte que coûte.

Le jeune homme se redressa et se tourna, prêt à se lever. Malgré ses grimaces et le mal évident qu'il avait à effectuer cette opération, la milicienne se contenta de l'observe, du coin de l'oeil, sans oser pourtant lui prêter assistance pour cette fois. Si vous vous demandez le pourquoi, et bien sachez que les soupçons de Sieg à leur égard commençaient à devenir aussi évident que le nez au milieu de la figure, et que même la jeune et naïve Utgardienne commençait à comprendre la dimension de ses regards insistants. Ne souhaitant pas l'encourager dans ses non-dits – et toujours retournée de sa découverte d'un peu plus tôt -, elle préférait éviter les contacts non nécessaires avec le blessé.
Il ne faudrait pas que Sieg aille s'imaginer des choses... Le Don Juan était plutôt du genre à aimer les belles blondes pas trop farouches. Elle en était bien convaincue.
Tout son opposé, en somme.

Néanmoins, elle se trouvait comme hypnotisée, incapable de bouger. Elle restait là, un peu penaude, tout contre la table, dans sa position initiale. Il ne lui vint pas même à l'idée de se décaler d'un pas pour laisser à Adrian toute sa liberté de mouvement dans sa manœuvre. Bien malgré elle, son regard – qu'elle croyait discret -, se promenait sur le torse nu bien que bandé de son compagnon. Elle observait curieusement chacun de ses muscles se contracter à ses mouvements, les perles de sueurs luisant à la lumière dansante des bougies, les contours qu'elle avait parcouru un peu plus tôt pour lui appliquer le cataplasme.
Il n'y avait là dedans aucune recherche, ni aucune curiosité. C'était bien inconsciemment que ses yeux rester fixés sur sa peau blême.

C'est d'ailleurs presque avec un sursaut qu'elle releva les yeux sur lui, alors qu'il venait d'achever de s'asseoir au bord de la table. Ils étaient si proches qu'au moindre mouvement, un nouveau contact serait provoqué. L'Utgardien rougit intensément en croisant brièvement le regard d'émeraude, qui eut vite fait de la fuir à son tour. Avait il capté le regard baladeur de la jeune femme ?

L'apothicaire alors leur proposa de finir la nuit ici. Raina dansa d'un pied à l'autre, mal à l'aise. Après tout, cela faisait bien des heures qu'elle était censée être rentrée à la caserne. Ses supérieurs ne veraient sans doute pas d'un très bon œil qu'elle passe la nuit chez un Amaranthis rencontré le matin même, et avec qui, de surcroît, elle avait causé une belle pagaille en ville...
Mais à la fois, elle n'avait pas très envie de laisser le beau blond seul... Une fatigue évidente tirait ses traits, et bien qu'il fut hors de danger, il n'en était pas moins très faible... Mieux valait que quelqu'un reste à ses côtés, au moins jusqu'au matin.

La garde leva les yeux sur le troisième protagoniste qui semblait lui-même hésiter, jouant toujours de son regard, d'un aller-retour entre les deux jeunes gens. Malgré cela, ce fut lui qui répondit le premier :


- Je vais veiller sur lui, s'il vous faut rentrer.
- Un peu plus, un peu moins, vous savez... Que je rentre maintenant ou dans cinq heures, je me ferais réprimander pareil...


Sieg lui adressa un demi sourire qui se voulait désolé, mais ce n'était en vérité la faute de personne.
Elle espérait au moins que les trésors qu'elle avait pu confisquer à l'Amaranthis le matin n'auraient pas bouger de leur place entre temps... Ces trouvailles auraient au moins mérite d'apaiser le courroux de Degure, et d'attester sa bonne foi.
L'homme se gratta le menton, regardant le plafond en semblant réfléchir. Raina, quant à elle, avait reporté son attention sur Adrian.


- Nous devrions vous aider à gagner votre lit, pour commencer. Vous êtes épuisé, et ce que vous venez de vivre était très éprouvant, autant pour vous-même que pour votre corps. Vous guérirez mieux avec un peu de repos.

Sieg approuva et contourna la table. Chacun d'un côté de l'apothicaire, ils passèrent ses bras autour de leurs épaules pour le soutenir de leur mieux et l'aider à se mettre sur pieds.
Tant bien que mal, ils firent support jusqu'à gagner l'escalier qu'elle avait elle-même emprunté plus tôt. Arrivé là, les choses devinrent compliquées. Le passage, trop étroit, ne permettait plus à Sieg de se tenir à côté d'eux. Il les laissa donc passer les premiers, restant juste derrière l'Amaranthis au cas où ses jambes ne le trahissent. La milicienne, quant à elle, mobilisait toutes ses forces pour aider de son mieux son compagnon à gravir les marches. L'effort était colossal, et la fatigue trop présente des deux côtés. A chaque marche, il lui semblait que les gémissements d'Adrian finiraient par lui faire perdre connaissance. Et même Raina, qui était pourtant une militaire entraînée, sentait qu'on entamait son énergie de réserve...
Elle ne parvenait encore à avancer que grâce à l'étrange vague de chaleur provoquée par leur contact. Elle avait comme l'étrange pouvoir de l'apaiser et la pousser à aller plus loin... Comme si elle était une nouvelle source de force et de volonté.
Une à une, les marches s'enchaînaient. De temps en temps, Raina marquait une pause, autant pour lui que pour elle. Dans un murmure, comme plus tôt dans la rue, elle l'encouragea à poursuivre ses efforts, le rassurant sur le fait que ce serait bientôt fini, qu'il pourrait enfin se reposer.
Sieg, derrière eux, restait tellement silencieux qu'elle en oubliait presque sa présence.

De retour dans le coquet salon, il revint en renfort aux deux jeunes gens pour en entamer la traversé. Plus curieux qu'elle, ses yeux se promenaient sur tout les recoins de l'étage. Lui, il devait avoir tout de suite noté que ce n'était pas une décoration d'homme célibataire... Une petite vague d'agacement revint à la jeune femme en arrière fond, comme si elle avait été vexé de son propre manque d'observation. Mais ce sentiment la quitta vite, en sentant de plus en plus le poids du corps de l'Amaranthis pesé sur ses épaules.
Il n'aurait jamais tenu sur ses jambes seul.

Ils passèrent la porte de la chambre et l'amenèrent jusqu'au bord de son lit. Ils l'aidèrent à s'y asseoir et tout trois prirent quelques instants pour souffler.


- Je vais redescendre chercher les mixtures que Monsieur Mayr m'avait fait préparé. Je pense que cette fois, nous avons amplement mérité de nous désaltérer.

Raina acquiésa en silence, tâchant de reprendre son souffle. Il fallait reconnaître qu'elle même était épuisée, mais à contrario de beaucoup de monde, être épuisé dans la milice ne signifiait pas qu'on n'était plus capable de rien faire. Aussi, elle était bien convaincue qu'elle serait capable sans mal de rejoindre la caserne, plus tard.

Sieg revint dans la chambre et posa sur la table de chevet les deux tasses remplies du liquide chaud qui leur était destiné. Il n'était plus aussi fumant que plus tôt.
Un peu gêné, l'homme se tourna alors vers la milicienne.


- Je m'excuse mais... Serait il possible que je repasse chez moi, rapidement ? Histoire de me changer, et de prévenir ma femme qui doit se faire un sang d'encre. Je ne voudrais pas qu'elle croit qu'il m'est arrivé quelque chose... Ou pire encore ! Qu'elle aille se mettre en tête que j'ai passé la nuit à boire ou dans les bras d'une autre !

L'homme poussa un rire de bon gaillard, qui força Raina a exprimer un faux sourire pour ne pas paraître accueillir sa blague de manière peu amical. C'était un homme gentil, et sans l'ombre d'un doute un bon mari. Il s'était montré aussi fort que compréhensif depuis leur drôle de rencontre. Raina l'appréciait, et elle souhaitait qu'il le comprenne.
Mais elle était fatiguée, et d'un naturel peu démonstratif, froid voir agressif. Il n'était pas aisé pour elle de communiquer ce genre de sentiment.
Néanmoins, l'homme ne sembla pas lui en tenir rigueur, et avec un sourire lui donna une petite tape sur l'épaule.


- Je peux vous laisser veiller sur lui un moment, et je reviens aussi vite que possible prendre la relève ?
- Bien sûr, il n'y a aucun problème.


Il la remercia, puis s'attarda quelques secondes, les regardant une nouvelle fois un à un, avant de tourner les talons et partir, en tirant la porte sur lui.

Désormais seuls, Raina était comme partagée... Elle se sentait soulagée de ne plus être sous le regard pénétrant et curieux de l'homme, mais à la fois, elle trouvait soudainement gênant de se trouver seule avec Adrian, qui en plus de cela était torse nu, et tout deux plongés dans l'obscurité relative de sa chambre.
Trompant le malaise, elle attrapa doucement l'une des tasses d'infusion et s'approcha d'Adrian.


- Buvez un peu. Ca vous fera du bien...

Elle parlait doucement... Mais elle n'aurait su dire pourquoi. C'était peut être le calme qui venait de s'installer dans la demeure... Ou l'intimité de la chambre... Ou simplement parce qu'elle avait prit habitude de parler ainsi avec l'apothicaire depuis qu'il avait été blessé. Toujours était il qu'elle même, à chaque coup, se trouvait surprise de sa propre douceur.
Devant lui, elle leva les yeux sur le visage du beau blond, la tasse tendue vers son visage.

Un petit bruit lointain leur indiqua que la porte venait de se refermer, à l'étage inférieur.
Adrian Mayr
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Mar 30 Mar - 1:29
Adrian s'était contenté d'acquiescer d'un timide signe de tête les dires de la milicienne, intimant l'apothicaire à rejoindre son lit pour prendre enfin un peu de repos. Cette solution, aussi limpide qu'elle soit, impliquait de gravir l'étroit escalier, chose que l'Amaranthis se mit à appréhender avec force, ne serait-ce qu'à l'imagination de l'appui forcé sur sa jambe meurtrie. Son mal de crâne continuait à lui vriller les tempes, l'empêchant d'avoir les idées claires. Il s'en remit à ses compagnons de fortune qui l'aidèrent à se relever, chacun en maintient de part et d'autre de l'Amaranthis en peine.

L'ascension vers l'étage n'avait jamais paru aussi interminable à l'apothicaire, pas même lors de ses tumultueux retours de tavernes ces fameux soirs d'ivresses. Cet ultime effort promettant le réconfort de son lit n'aurai été possible sans l'aide de ses compagnons de fortune faisant montre d'un soutien indéfectible envers lui. Les dents serrées, Adrian s'efforçant de ne pas exulter la douleur qui l'envahissait à chaque pas sur une nouvelle marche. Que ce soit sa jambes, ses cotes, sa tête ou les autre parties de son corps meurtries, rien ne semblait vouloir l'épargner, lui envoyant un rappel à l'ordre constant de son état plus que fébrile. Bien entendu, impossible pour lui de garder le silence tout du long, l'expression de sa peine fut ainsi audible à plusieurs reprises, provoquant une nouvelle pause à chaque fois pour s'assurer un appui supplémentaire. Bien que concentré sur ses propre maux, Adrian sentait l'épuisement physique et moral de Raina, s'acharnant tant bien que mal à le soutenir malgré tout. La tension des protagonistes était palpable et l'apothicaire tentait au mieux de ne pas se reposer à l'excès sur le soutien que lui apportait la milicienne, bien que sa condition ne lui permette pas vraiment grand chose. Tout deux ne tenaient que par cette force qui les poussait à finir le travail.

Arrivé enfin à cet étage qui eut semblé aussi long et fastidieux que l'escalade d'une haute montagne, Adrian soupira de soulagement lorsqu'ils entamèrent la dernière foulée vers la chambre, sur le sol plat de l'étage. Son réconfort s'amplifia d'autant plus lorsqu'enfin il se retrouva assis sur le rebord du lit. Peu prompt aux longues nuit de repos, l'apothicaire serai volontiers capable de passer une journée entière à dormir tant l'épuisement l'accablait. Les yeux plissés, le visage ruisselant de sueur et d'une pâleur extrême, le visage de l'Amaranthis était bien loin de son attitude soignée qu'on lui connaissait. Clignant les yeux de manière appuyée, chaque fermeture de paupière menaçait de l'emmener dans un profond sommeil. Il résista encore un peu, attentif à ce qui se passait autour de lui, attentif à ceux qui lui avait sauvé la vie. Il ne se manifesta pas outre mesure cependant, trop matraqué par sa migraine.

Lorsque Sieg quitta la pièce, une aura de calme sembla emplir la pièce alors qu'un petit silence s'installait entre les deux protagonistes. Perdu dans ses pensées, Adrian laissait trainer son regard sur le sol obscur de la chambre. Il releva alors la tête en entendant la voix désormais devenue familière de la milicienne.


- Buvez un peu. Ca vous fera du bien...

Dans l'obscurité, Adrian distinguait a peine le regard de la milicienne bien qu'il sentait que les prunelles sombre de la dame étaient posées sur lui. Accroupie face à lui désormais, elle lui tendit la tasse contenant l'infusion dont l'odeur familière offrit un bref réconfort à l'apothicaire. D'une main peu assurée et tremblante, Adrian récupéra la tasse, effleurant la main de la jeune femme succinctement. La douceur de la voix de Raina faisait écho dans sa tête, contrastant avec le moment de leur rencontre, soulageant par la même l'esprit embrumé d'Adrian. Il y trouvait la une forme de réconfort, sans elle, qui aurai pu jurer qu'Adrian serai encore de ce monde...Personne, il aurai possiblement fini par se vider de son sang avant de pouvoir faire quoi que ce soit. Le courage dont elle avait fait preuve suscitait chez l'Amaranthis une grande admiration, le forçant à réviser ses positions très arrêtée sur la capacité des gardes de la ville à agir efficacement. La lourde porte en bois venait de claquer en bas, officialisant la solitude des compagnons de fortunes.

Adrian porta la tasse à ses lèvres et but une gorgée de l'infusion. La boisson encore chaude procurait à l'apothicaire un réel sentiment de réconfort l'espace d'un instant, calmant ses nerf bien trop agités à cause de la décoction ingérée plus tôt. Bien que l'effet ne se soit presque estompé, les tremblements continuait à faire pulser les articulations d'Adrian de manière presque imperceptible. Posant la tasse au fond tiède sur sa cuisse valide pour éviter de trembler, il prit la parole d'une voix plus fatiguée encore.


- Je vous ait déjà remercié, Raina, et je pourrai le refaire une centaine de fois tant je vous suis reconnaissant...Je...Si tant est que ma culpabilité....Enfin je suis....

Il marqua une pause, son cerveau peinait à lui faire faire des phrases correctes et cohérentes. Il se racla la gorge avant de reprendre, toujours de cette voix pleine de fatigue.

- Ce que je voulais dire...Vous savez ou me trouver si jamais je suis coupable à vos yeux.

Pourquoi venait-il d'aborder le sujet à nouveau, à cet instant? Simplement car il avait un besoin impérieux de faire comprendre à la milicienne qu'il ne lui avait pas menti, pas une seule fois depuis le début de la journée Adrian ne s'était joué de la brune autoritaire aux yeux ténébreux. Après tant de péripétie, il lui semblait primordial de prouver son honnêteté et de s'assurer qu'il assumerai les conséquences des décisions de la milicienne quant à son cas. Bien entendu, si l'apothicaire avait été capable de s'exprimer plus franchement, il n'aurai pas forcément parlé de cela, à cet instant.

Son regard devenait de plus en plus flou...Il chercha un instant les yeux de la jeune femme, toujours en face de lui. Sans être vraiment sur de ce qu'il voyait vraiment, il plongea ses yeux émeraude dans ceux de Raina, un regard fatigué mais tendre ponctué par un sourire sincère. L'apothicaire se recula alors en arrière pour s'installer difficilement sur le lit, sans prendre le temps de tirer les draps. Torse nu et amoché de toute part, l'Amaranthis faisait peine à voir. Les yeux d'abord rivé au plafond, il tourna la tête vers la milicienne une nouvelle fois.


- Je vais...devoir me reposer, et vous devriez faire de même, prenez le temps que vous voulez...

Il ne put en dire plus, il ne put en faire plus. Le sommeil l'envahissait, presque contre sa volonté. Il savait que dormir était la seule solution, pourtant l'envie de prolonger cet instant avait traversé l'esprit de l'apothicaire. Ses paupières clignaient de plus en plus lentement, s'attardant peu à peu sur leur positions fermée. Vidé complètement de toute son énergie, un ultime mouvement de bras lui fit poser sa main en direction du bord du lit, du coté de la milicienne, comme une main tendue vers celle qui lui avait à ce jour sauvé la vie. Il sombra dans un profond sommeil.
Raina Visenrov
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Mer 14 Juil - 22:10
Malgré les ténèbres et la fatigue, la main de l'apothicaire demeurait distinctement tremblante alors qu'il la tendait pour récupérer son breuvage. Parcouru d'un discret frisson à l'effleurement de leur peau, Raina restait aussi silencieuse que soucieuse en le regardant siroter le contenu de son verre, n'osant bouger face à la fébrilité de l'Amaranthis, comme si une simple brise aurait tôt fait de le renverser et le briser.
Il en avait vécu, des mésaventures, depuis le matin. Pour sûr, il ne devait pas s'attendre à cela en se levant... Elle non plus d'ailleurs. L'Utgardienne, forte et inébranlable, se trouvait aussi bouleversée que l'était son compagnon.

La tempête était passée, laissant les deux protagonistes épuisés et meurtris un instant de répits amplement mérité. La pénombre et le calme de la nuit donnait à l'habitation un semblant de tranquillité, de paix et de douceur. L'adrénaline était presque tout à fait retombée.
Si elle n'avait pas été si inquiète, Raina se serait volontiers laisser glisser le long du mur et aurait sans doute sombrer dans le sommeil avant même que ses fesses n'aient touché le sol.

Adrian brisa le silence d'un murmure qui, s'il était doux, en était avant tout à bout de force. La milicienne posa sur lui des yeux qui n'avaient plus rien de noirs et bouche close, visage désolé, elle le laissa s'égarer dans des remerciements qui lui écorchaient le cœur.
De la gratitude ? Mais pourquoi ? Pour l'avoir accusé et interpellé à tord ? Pour l'avoir embarqué dans des péripéties dangereuses, tête baissée ? Pour l'avoir laissé seul, à la merci de l'ennemi ? Pour l'avoir laissé être blessé, sans bouger le petit doigt ? Pour l'avoir mal mené, charcuté et torturé dans sa propre maison ? Et tout ça pour quoi, hein ? Pour quelques boulettes de poison et des documents douteux, qui ne seraient peut être même plus là à son retour ?

Embarrassée, la milicienne baissa la tête comme les yeux. C'était un drôle de sentiment qu'elle ressentait alors... Perturbé, mélangé... Amer. La sensation que, malgré tout leur effort, malgré tout les résultats... Ils ne ressortaient pourtant aucunement vainqueurs dans cette enquête incongrue.

Après un bref silence, Adrian reprit la parole, d'une voix fuyante, sombrant dans les ténèbres. La jeune femme releva sur lui son regard, vérifiant sans même plus s'en rendre compte qu'il ne s'agissait là que de l’œuvre de la fatigue, et non pas les signes avant coureur d'un nouveau grand danger. Fausse alerte, c'était bien le sommeil qui achevait de gagner l'Amaranthis.


- N'en dites pas plus, et reposez vous. Vous en avez grand besoin.

Elle ne sut même pas s'il parvint à entendre ses mots, car déjà ses yeux se fermaient et sa tête retombait sur l'oreiller. Un dernier mouvement incita Raina à baisser les yeux. Sa main retomba sur le bord du lit, en direction de l'Utgardienne qui restait silencieuse en l'observant.
C'était comme plus fort qu'elle... Instinctif presque. Elle posa doucement sa main au côté de celle de l'endormi, ne touchant qu'à peine l'un de ses doigts. Et presque aussitôt, l'angoisse retomba... Laissant place à une fatigue telle qu'il était difficile de lutter pour ne pas se laisser emporter.

Combien de temps s'était il écoulé ? Quelques minutes ? Des heures peut être ?
A mesure qu'elle attendait, la milicienne s'était laisser glisser pour s'asseoir tout à fait à côté du lit. Sa main, quant à elle, n'avait pas bouger d'un pouce. La maisonnée était d'un calme absolue, et la jeune femme frissonnait par instant, saisie par le froid et la fatigue. Dans cette quiétude, seul était audible la respiration discrète de l'apothicaire. Bien que peinant, et gémissant parfois, elle semblait apaisée, et revenait de manière régulière.
C'était tel une douce berceuse... Comme le son des vagues qui allaient et venaient doucement, léchant à peine le rivage avant de se retirer dans un murmure... Comme le souffle d'une légère brise, chahutant à peine les feuilles d'un arbre... Comme un chant à peine fredonné dans le lointain, tout juste audible... Et qui s'éloignait encore... Et encore... Jusqu'à presque tout à fait disparaître...

Raina rouvrit les yeux dans un sursaut. Dans l'encadrure de la porte, qui s'était ouverte, une silhouette noire l'observait. Instinctivement, avec une rapidité dont elle ne se serait pas cru capable dans son état, elle quitta le contact de la main du beau blond pour se saisir de sa hache et se redresser, prête à se défendre de l'intrus.
Mais celui-ci leva une main en signe d'innocence, et approcha la bougie qu'il tenait de l'autre de son visage. Il fallut plusieurs seconde à Raina pour comprendre qu'il n'y avait en vérité aucun danger, et calmer les battements de son cœur.

Sieg s'approcha à pas de loups, en lui adressant un léger sourire de réconfort. L'Utgardienne baissa son arme et passa une main dans ses longs cheveux bruns bien décoiffés à cette heure. L'homme, plus qu'il ne se souciait d'elle, observa méticuleusement le blessé qui n'avait pas été, ne serait ce qu'un instant, réveiller par la soudaine panique de sa gardienne.
Le gaillard fit un signe de tête approbateur, avant d'intimer Raina à le suivre à l'extérieur de la chambre pour pouvoir converser à voix basse.


- Comment va-t-il ?

L'esprit un peu dans le vague, l'Utgardienne se frotta les yeux avant de répondre d'une voix qu'elle ne pensait pas si endormie.

- Il s'est endormi peu de temps après votre départ. Et depuis il dort comme un loir.
- Bien.. Il n'y a plus que ça à faire : prendre du repos. Vous devriez songer à faire de même...
- Ca ira. Je suis une soldat. Je n'ai pas besoin de dormir beaucoup.


Sieg sembla hésité, la fixant avec intérêt.

- Pour honnête... J'ai... Enfin... Je me suis demandé si je faisais bien d'entrer, avant de rentrer dans la chambre... Je pensais... Vous trouvez... Enfin...

La milicienne se stoppa dans son étirement, fixant l'homme avec un regard qui s'assombrissait de mot en mot. Curieusement... Ses joues aussi quittaient leur livide pour passer au rouge. Elle demanda sèchement :

- Quoi ?
- Eh bien... Vous savez... Monsieur Mayr et vous... Vous avez l'air de bien vous entendre... Et de vous appréciez.. ?


La jeune femme reprit une posture plus militaire et autoritaire que jamais.

- Vous vous trompez, Sieg. Adr... Monsieur Mayr ! Et moi même... Nous ne nous connaissons absolument pas. Et il était seulement de mon devoir de lui porter secours, d'autant qu'il m'a été d'une aide précieuse dans mon enquête. Tout ceci n'était que purement professionnel. Et vous ne devriez d'ailleurs pas encourager Monsieur Mayr à aller à l'encontre de son serment envers son épouse.

Sieg resta pantois, clignant des yeux quelques instants, avant de comprendre la méprise (et sans doute les précédents sauts d'humeur) de la jeune femme.

- Mais... Raina... Madame Mayr n'est plus de ce monde.

Difficile de vous décrire la douche froide et le sentiment de honte qui tombèrent sur la petite garde à cet instant précis. Elle se sentit tout soudain ridicule, et bouche entrouverte, elle ne trouva absolument rien à répondre à cela. Elle était... mouchée. Oui, c'était le mot. Mouchée de sa propre bêtise, de sa jalousie aussi incontrôlée qu'injustifiée... Mouchée de son comportement plus que déplacé en pareil circonstance.
Et... Apaisée ?


- Hm... Je pense qu'il serait préférable que je rejoigne la caserne au plus vite... Je vais sans doute me prendre un sacré sermon à mon retour.

Sieg approuva et la laissa regagner la chambre le temps d'y récupérer son arme laissée à terre. Passant à côté de l'Amaranthis, elle s'attarda un instant à détailler son visage, comme pour en graver les traits dans sa mémoire. Une curieuse envie de chasser une mèche rebelle de son front lui traversa l'esprit. Mais alors qu'elle levait la main, prête à l'ôter d'un effleurement, le gros toussotement de Sieg dans la pièce à côté la sortie de son désir hypnotique. Elle baissa doucement la main, et murmura seulement :

- Puisse Njörd veiller sur vous, Adrian Mayr...

Puis elle tourna les talons, sans un regard en arrière, et après avoir saluer et remercier Sieg, quitta la maison pour prendre la direction de la caserne.

En chemin, elle s'arrêta tambouriner à la porte de l'apothicaire. Un véritable miracle : celui-ci avait encore ET ses affaires, ET les biens qu'elle avait confisqué. Une chance incroyable.
Moins heureux en revanche fut son retour dans la milice... Et lors de son entretien des plus bruyants on ne retint que son absence la majeure partie de la nuit, et rien des exploits qui y avaient été accomplis.
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