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Les fantômes du passé
Nyxie
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Sam 27 Fév - 22:38


S’il fallait s’enfuir, il fallait imiter l’eau et leur filer entre les doigts. Meryl pointa une embarcation, Nyxie sauta dedans sans aucune hésitation. Elle s’attendait à ce que Meryl, la suive, elle avait même relevé ses avants-bras pour encaisser le choc de son amie s’écrasant sur elle, mais non. Armée d’une rame, la sauvageonne s’était lancée dans un brassage d’air intensif comme elle l’avait souvent fait dans l’enfance, à combattre des ennemis invisibles dotés d’un bâton. A une différence près, elle était désormais adulte, bien qu’elle conservait la même habileté au combat avec une arme à deux mains, elle semblait brandir une énorme spatule que les femmes utilisaient pour remuer la marmite. Sur les quais, les Shogs semblaient pétrifiés par cette démonstration de sa puissance brute et impitoyable. La nomade restait fascinée devant la blonde à la pagaie virevoltante.

Nyxie ne sortit de sa torpeur que lorsqu’on la somma de les sortir de là. A contre-coeur, ses yeux s’arrachèrent à ce spectacle incroyable, et ses sourcils se froncèrent tandis qu’elle évaluait ce qu’elle avait sous la main. La barque était accrochée aux quais par une corde, elle s’en saisit et tira pour se rapprocher de Meryl. Si « souquez les artimuses » voulait dire quelque chose c’était sans doute ça ! Bras tendu, elle attrapa la furie-brasseuse par la taille de son pantalon et tira pour la forcer à rejoindre l’embarcation. Surprise par cette attaque par-derrière, la majorette fit un moulinet plus large pour ne pas perdre l’équilibre et flanqua un coup magistral sur le crâne de la nomade.

Sarclée de la réalité, elle se mit à flotter dans le royaume de Shoggoth, comme lors des cérémonies. En transe, il lui arrivait parfois de faire des rêves-qui-voient alors même qu’elle était éveillée. Ses membres étaient beaucoup plus légers, son esprit semblait flotter autour d’elle, pas tout à fait dans son enveloppe. Des ombres furtives couraient autour d’elle, elle les apercevait dans sa vision périphérique sans jamais être certaine de les voir vraiment. De tout temps, les mères disaient qu’il ne valait mieux pas voir les ombres qui errent entre les mondes dans le sillage d’Anauroch pour corrompre les âmes abandonnées dans le Grand Vide.

Dans l’éther bleuté, Meryl se tenait là, devant elle, telle une créature d’eau, sa chevelure polaire flottait tout autour de sa tête. On aurait dit qu’elle dormait, les traits de son visage étaient sereins. Puis ses lèvres devinrent bleues, violacées même. Lorsqu’elle ouvrit les paupières, ses yeux étaient complètement blancs, aveugles, morts. Une expression de souffrance extrême tordit son visage. C’est là qu’elle s’aperçut que son amie d’enfance n’avait plus de bras gauche : la chaire putréfiée pendait de ses os, avait fait pourrir le membre jusqu’à la cage thoracique, jusqu’à son coeur.

Agitée par la vision d’horreur, Phoenyx essaya de reprendre son souffle, elle inspira une grande bouffée d’eau glaciale, se convulsa pour empêcher le liquide l’étouffer, alors qu’on la tirait sur la barque où elle se mit à vomir toute l’eau qu’elle avait dans les poumons. On l’avait fait rouler dans l’embarcation tandis qu’elle continuait à cracher. La barque tanguait de gauche à droite, on criait des choses, on s’agitait. Des gouttes d’eau tombaient sur son visage à un rythme irrégulier. Quand elle rouvrit les yeux, elle vit la reine des moulinets toute ruisselante, occupée à pagayer aussi vite qu’une seule rame lui permettait, s’agitant à gauche, à droite, à gauche. Elle était assise sur une drôle de caisse à travers laquelle on pouvait apercevoir des flacons comme celui qu’elle avait écrasé sur le garde. Etalée aux pieds de la voleuse, Nyxie s’était mise à fixer d’un air hagard le contenu des bouteilles qui suivait les mouvements de leur barque, gauche, droite, gauche, droite.

— Epi d’blé…. assise sur l’hydre au Méloute… bava-t-elle la joue aplatie contre le plancher sale.

Meryl
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Dim 28 Fév - 2:19
Meryl commençait à entrevoir la raison pour laquelle les Dieux avaient choisi de les séparer ; lorsqu'elle étaient ensemble, tout n'était que chaos ; un maelström de coïncidences idiotes, de hasards douteux et de malchances inexplicables. L'intégrité de l'univers était menacée et les Dieux se sentaient menacés par ce terrible pouvoir entropique. Oui, c'était l'explication la plus rationnelle.

Alors qu'on tirait sur son pantalon, sa pagaie décrivit un très grand arc de cercle au dessus d'elle, assommant son amie au passage. Pour la deuxième fois de la journée, elle se retrouva dans le fleuve à cause d'elle. Un peu moins prise au dépourvu cette fois-ci, Meryl s'extirpa de l'eau sans trop de mal, avant de repêcher sa sauvageonne ainsi que son arme improvisée. Peut-être pas dans cet ordre. Leur barque s'était éloignée du bord et la garde semblait hésitante quant à la conduite à tenir ; après tout, elles n'avaient assassiné personne, et le fruit de leur larcin n'était plus en leur possession.

Ni une, ni deux, la blonde se mit à pagayer avec cœur pour les sortir de là, elle et sa harpie des herbes dont les plumes étaient maintenant toutes froissées. La pauvre avait du prendre un sacré coup sur la tête et bavait maintenant des choses incompréhensibles alors que son regard était perdu dans le vide. Plus loin, des Utgardiens s'écrièrent :


- L'hydromel !
- Revenez !
- Sales voleuses !
- Ne les laissez pas partir avec la cargaison !
- L'hydromel, l'hydromel !

D'un bond, Meryl se leva rageusement pour leur faire face, alors qu'ils étaient tous entassés sur les quais et que le courant l'éloignait lentement.

- On l'a plus, l'hydromel, alors arrêtez de remuer le couteau dans la plaie et allez vous faire cuire le cul !

Toujours aussi rageusement, elle se rassit dans la barque avant de se remettre pagayer, mettant le plus de distance possible entre elle et ces bas du front. A gauche, puis à droite. A gauche, puis à droite. Et c'est ainsi qu'elles quittèrent Claircombe : avec panache. Lorsqu'elle fut certaine qu'aucun Utgardien armé de pagaie était à leurs trousses et que Claircombe n'était plus qu'un point dans l'horizon, Meryl s'accorda une petite pause et laissa leur barque dévier lentement alors que le courant les emportait vers la mer.

Massant ses bras endoloris, elle avisa son amie, à présent redressée, bien qu'un peu hagarde. Ce n'est qu'en se relevant qu'elle réalisa sur quoi elle était assise.


- Oh, par les Dieux, Nyxie, regarde... C'est...


L'émotion lui nouait presque la gorge.

- De toutes les foutues barques qu'il y avait sur ce quai, on se retrouve dans celle-là. Si ce n'est pas un signe, dis moi ce que c'est. Attends, je vais en ouvrir une... Il faut que je goûte.

Elle fit sauter les clous qui maintenaient la caisse en place avec son couteau et attrapa une bouteille avant d'un jauger la couleur, la senteur et enfin le goût. Encore meilleur que celui qu'elle avait chipé dans les réserves du tavernier ; c'était peut-être une cuvée spéciale destinée à Hurlsk lui-même. Si c'était bien le cas, elle allait avoir des ennuis ; des ennuis qui valaient indéniablement le coup. Meryl  garda la bouteille pour elle mais en tendit une autre à son amie avant de s'affaisser mollement dans la barque, le regard vers le ciel.

- Je meurs de faim.

Son estomac émit une sorte de gargouillis pour appuyer ses propos.

- Et je vais finir par attraper la mort à force de rester dans ses vêtements mouillés.

Elle retira ses bottes et vida leur contenu dans le fleuve, avant d'ôter presque la quasi totalité de ses vêtements pour les essorer un à un par dessus la barque. Ainsi vêtue, elle dévoilait une peau laiteuse qui ne demandait qu'à être réchauffée par les rayons du soleil, ainsi qu'une partie de sa cicatrice qui sortait quelque peu de son sous-vêtement. Ne prêtant pas attention au regard de Nyxie posé sur elle, elle se pencha davantage en avant pour ôter l'eau dans ses cheveux.

- Je crois que tu avais raison et que je vais te laisser nous faire un feu quelque part. Peut-être qu'on pourrait attraper de quoi manger. C'est pas bon de boire l'estomac vide, il paraît.
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Dim 28 Fév - 21:08


Allez vous faire cuire le cul, une expression typiquement Claircomboise semblait-il, mais qui illustrait bien le sentiment que la blonde ressentait. Au bout d’un moment Meryl cessa de ramer pour examiner l’Hydre. Immédiatement, une joie manifeste la prit, et elle se remit à « goûter ». Les nomades n’étaient pas de grands adeptes de l’alcool, ils préféraient largement les herbes ou les champignons à rêves, des produits qu’on devait trouver plus difficilement en ville qu’en vivant au milieu de la nature. Nyxie s’empara de la bouteille qu’on lui tendait, mi-figue, mi-raisin. Elle non plus n’avait pas tant envie de boire cette substance tant son estomac grondait, elle la déposa à côté d’elle. Vivre en ville n’avait pas l’air de tout repos. La tête de la guérisseuse bourdonnait encore depuis le fabuleux coup de spatule géant qu’elle avait reçu, et la migraine ne semblait pas se calmer.  Tandis que son amie s’évertuait à se débarrasser de l’eau, elle ne put s’empêcher de noter qu’elle avait les lèvres bleuies par leur deuxième baignade de la journée. La brise qui soufflait n’était pas pour les réchauffer. Elle la scruta davantage, ayant toujours en tête des bribes de son rêve. Deux phrases, deux mots. « meurs », « mort ». Qu’arriverait-il à Meryl si elle mourrait ? Son âme serait-elle abandonnée comme celle des Shogs ? Se relèverait-elle ? Assise sur les talons, les paumes de Nyxie se  posèrent sur les genoux nus et froids devant elle, l’air grave.

— Meryl.

Tout d’un coup, l’idée de s’entretenir sur la question fâcheuse des dieux fut écartée, encore une fois. Le contact avec sa peau lui fit réaliser que son amie était bien moins habillée qu’auparavant. A part ses grands yeux bruns, ses joues pleines et son grain de folie, elle n’avait plus grand-chose d’une enfant. Ses cheveux mouillés plaqués en arrière lui donnait un air sûr d’elle alors que l’air froid plaquait un peu plus ses sous-vêtements sur sa peau tendue. De toute évidence, la sauvageonne exilée avait froid.

— T’as un peu changé, en fait.

Si la remarque rappelait les traits d’humour dans la paille, le ton n’était plus tant à la plaisanterie. On y dénotait plutôt l’étonnement fasciné et le trouble. C’était un sentiment bizarre de se rendre compte qu’elles n’étaient plus ces petites filles insouciantes courant et grimpant partout. Celles qu’elles étaient, les sœurs qu’elles avaient été l’une pour l’autre, tout appartenait au passé. Dix ans de séparation avaient créé un fossé entre elle que Nyxie voulait combler à tout prix. Elle voulait connaître ces zones d’ombre de son amie qui avaient grandi et pris forme loin d’elle.

— Rien ne sera plus jamais comme avant, hein… soupira-t-elle, désemparée. Un élan nostalgique la prit. Son regard dégringola le long des courbes de ses hanches jusqu’à la … cicatrice. Elle ne put réprimer son besoin d’y porter la main. Meryl l’avait vu venir, elle se crispa d’appréhension, et tenta de l’en empêcher, mais la brune intercepta le geste de son autre main, manifestement contrariée.

On lui avait toujours tout cédé, alors son orgueil s’en était gonflé, au point qu’à peine adulte elle donnait des ordres à tout bout de champ à quiconque n’égalait pas le statut de sa mère, et encore. Même Jenna lui cédait tout et lui avait toujours tout cédé. Elle était la petite dernière, plus qu’une princesse capricieuse, elle se comportait comme si tout lui était toujours dû, car c’était le cas. Il lui était encore difficile d’assimiler que Meryl était en vie, plus difficile encore de réaliser qu’elle avait survécu à l’Ex-Maatricis. Maintenant, c’était là, sous ses yeux, elle ne pouvait le nier, elle ne pouvait l’éviter, c’était la marque apposée par leurs mères à la seule amie qu’elle ait jamais eue.

— Anauroch ne pardonne pas les Déchues qui détournent les âmes de leurs destinées.

Les vieilles lui avaient retiré  le pouvoir le plus puissant que possédait une femme, le pouvoir des dieux, le pouvoir de créer la vie. Elles avaient tué une partie d’elle alors qu’elle n’était qu’une initiée. Cette condamnation arbitraire n’était pas l’oeuvre des dieux mais de femmes orgueilleuses et effrayées par ce qu’elles avaient pu voir d’une enfant Sang-de-Shog trop prometteuse, sans doute. Vaarkarsh avait appâté leur orgueil, Shoggoth leur avait donné l’occasion, Anauroch avait imposé cet épreuve à une petite fille : mais elles avaient choisi. Elles avaient fait le choix de s’écarter de l’Accomplissement, elles avaient condamné leurs âmes à la Déchéance en perpétrant cet acte ignoble. Toujours à genou, elle se redressa pour envelopper le visage poupin de son amie entre ses mains.

— Depuis que tu es morte, chaque nuit ou presque, je rêve que je les tue toutes. Je les rendrai à Anauroch, comme Il me le réclame, pour qu’Il les broient pour l’éternité.

Phoenyx avait toujours douté des pouvoirs chamaniques de sa sœur, d’autant plus qu’elle-même faisait des rêves-qui-voient depuis toujours alors que Taelle avait dû l’apprendre. Peut-être qu’en laissant tout le monde se fourvoyer sur son aînée elle faisait partie du problème, qu’elle y avait contribué en un sens. Quand elles avaient châtié Meryl, on l’avait empêchée de la voir, on l’avait droguée pour la calmer et on l’avait trimballé à dos de protecteurs alors que la tribu levait le camp. Même si elle savait qu’elle n’aurait pas pu agir différemment, elle regrettait son incapacité à changer les choses. Front-à-front, le bout de leurs nez se touchait presque. La vie de nomade leur apprenait à ravaler leurs pleurs d’enfants, mais on pouvait voir dans ses yeux verts mouchetés d’ambre des larmes qui auraient dû couler il y a bien longtemps. Une idée timide passa près de leurs lèvres, et puis s’envola alors que Nyxie prenait son âme-sœur dans ses bras, coeur contre coeur.



Dernière édition par Nyxie le Mar 2 Mar - 0:05, édité 1 fois
Meryl
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Lun 1 Mar - 0:07
Si Meryl accepta le regard de son amie posé sur elle, elle tenta de se soustraire à la main qui effleurait le bas de son ventre, lentement, le long d'un stigmate dont la souffrance était restée muette. Mais sa fougueuse harpie n'était pas du genre à renoncer à ce qu'elle désirait, et Meryl n'avait jamais su lui dire non. Alors, malgré son regard désapprobateur, elle capitula.

Plus que la brise contre l'humidité de sa peau, c'est le contact de ses doigts qui la fit le plus frissonner, et elle tremblait déjà tout à fait lorsque Nyxie se redressa pour attraper son visage entre ses mains. Elle n'avait pas touché à la bouteille, ce n'était donc pas l'alcool qui émoussait ses sens. Elle la sentait si proche, tout à coup, qu'elle en était presque intimidée, mais elle ne put rien faire d'autre que soutenir son regard.

Il n'y avait de toute façon rien d'autre à faire lorsque l'on était ainsi pris au piège. Et une petite partie d'elle-même appréciait de ne plus avoir la maîtrise de quoi que ce soit, de se laisser entraîner par le courant, et d'offrir sa gorge en soumission à son plus grand prédateur.

Leur étreinte n'avait plus rien de l'innocence de leurs jeunes années, alors que Meryl posait l'une de ses mains dans le creux de ses reins et que l'autre s'égara dans sa chevelure noire et trempée. Elle sentait son cœur battre tout contre le sien, les battements de ce dernier se faisant d'ailleurs de plus en plus erratiques. Y avait-il seulement une personne sur cette terre dont elle s'était un jour senti aussi proche ? Est-ce que n'importe qui d'autre l'avait un jour prise dans ses bras comme le faisait Nyxie ? Impulsivement, elle resserra son étreinte, comme si elle ne voulait plus jamais la laisser partir.


- Que sais-tu de ma destinée, harpie des herbes ? Et si les Dieux n'avaient rien prévu pour moi ?  Et si ce que tu avais vu n'était pas destiné à se produire ?

A contre cœur, elle s'écarta légèrement pour pouvoir la regarder dans les yeux. Leurs corps se touchaient encore, lui apportant une chaleur réconfortante.

- Tu dis vouloir les tuer toutes, sais-tu que j'en suis incapable ? Ce jour-là, elles n'ont pas pris que mon futur, elles m'ont pris toute ma colère, toute ma rage, toute ma hargne. Je n'ai plus rien, et la dernière chose que je souhaiterais, c'est que tu en aies pour deux.

Peut-être commettait-elle une grave erreur en exhibant ainsi sa faiblesse à celle qui avait toujours méprisé ceux qui en faisaient preuve. Mais ici et maintenant, elle n'avait pas d'autres choix que de se mettre à nue, et pas juste littéralement.

Ses mains virent chercher sa nuque, alors que leurs fronts se rencontraient. Meryl ferma les yeux un instant, comme pour graver cette image dans sa tête. Comme si elle savait, au fond, que tout ceci ne durerait pas. Elle avait envie d'y croire pourtant, et cette envie lui lacérait les tripes.


- Ne t'en vas pas.

C'était une supplication.

- Partons ensemble, recommençons tout quelque part. Ensemble, on n'a besoin de personne, pas même des Dieux.
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Mar 2 Mar - 0:03


Jle sais car je te vois. Je ne veux pas les tuer, je les tuerai juste. Leur destinée transcende ma volonté, ça aussi je l’ai vu. Elle se pinça les lèvres pour retenir ses paroles, car au fond, à part Baldhramn, personne ne la comprenait vraiment. Parfois, elle se demandait si sa chamane de mère avait jamais entendu comme ils entendaient eux. Ce qu’elle savait de sa destinée ? Un peu trop depuis quelques minutes. Avait-elle entrevu une possibilité ou un avenir inéluctable ? Elle refusait l’idée même de cette dernière option. Ce qu’elle voyait n’était pas toujours destiné à se produire, en revanche, plus un rêve était récurrent, plus l’avertissement était grand. Nyxie ne voulait pas les tuer toutes, elle devait, elle les tuerait. Si Meryl n’en avait pas la force, ni la volonté, ce n’était pas important. Elle n’avait pas « plus rien », elle l’avait elle. Et elle, Vaar Orée Phoenyx, n’avait aucune limite et trop d’orgueil pour s’en imposer. Après tout ce que l’exilée avait vécu, l’aveu de sa faiblesse était moins méprisable car il était induit par l’acceptation de son sort. A vivre parmi les Shogs, était-ce si surprenant qu’elle en soit venu à s’accommoder de vivre dans l’égarement et à subir les aléas de Shoggoth ? Elle l’aurait mépriser de s’être laissée mourir, de s’être laissée détruire par tout ça, mais jamais d’y survivre. A son tour, elle la retenait, comme si à tout moment, elle pouvait s’évanouir en une fumée vaporeuse, l’implorait de rester.

— Je ne vais nulle part sans toi.

Il semblait même que les battements de leur coeur s’étaient synchronisés alors qu’elles se contemplaient à travers les lucarnes de leur âme. On pouvait dire tout ce qu’on voulait sur les yeux clairs, des grands yeux bruns marbrés d’or comme les siens trahissaient une essence sauvage et insaisissable. Pourtant elle était là, dans cette réalité, entre ses mains ; elle la saisirait. Sans plus réfléchir, ses lèvres se plaquèrent contre celles froides et humides de Meryl, profitant de sa surprise pour en tirer une caresse ardemment désirée. Aussi brutalement qu’elle l’avait embrassée, elle s’y arracha, assez satisfaite  et se laissa tomber en arrière pour attraper la bouteille lâchement abandonnée à leurs pieds.

— Partons ensemble, quelque part. Je t’y fais un feu et on s’empoisonne avec cet… horreur… fit-elle en reniflant l’alcool, toujours pas convaincue qu’un tel liquide pouvait être consommé par plaisir. Elle en but une gorgée et tout son œsophage s’enflamma elle toussota comme si elle venait d’avaler le pire poison.

— C’est de... la pisse de cobra ton truc... on va crever… Arrête-toi, il faut qu’on mange une dernière fois avant de voir les Trois.

Meryl
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Ven 5 Mar - 11:00
Sans le goût persistant de ses lèvres contre les siennes, Meryl aurait pu croire qu'elle avait rêvé cet instant. Elle n'eut ni le temps de s'en offusquer, ni le temps de s'en amuser, ni le temps de l'apprécier, à peine le temps de regretter qu'il ne dure pas plus longtemps. Les nomades ne s'encombraient jamais de fausse pudeur ou d'excès de timidité, aussi ne fallait-il y voir ici rien d'autre qu'une manifestation d'affection, guidée sous l'impulsion du moment. Mais Meryl avait beau avoir grandi en territoire nomade, plusieurs années d'éducation ascanienne étaient venues semer le trouble dans son esprit, un trouble qui persista longtemps après que le buste arrogant de Nyxie se soit éloigné du sien.

Les bras le long du corps, elle resta un moment à contempler sa harpie des herbes avant que les rouages de son cerveau se remettent à fonctionner normalement. Elle haussa finalement les épaules, souriante, avant de saisir la bouteille que la nomade tenait entre ses mains pour la porter à ses lèvres.


- C'est juste une question d'habitude. Et au moins, ça réchauffe.

Après avoir essoré chacun de ses vêtements par dessus la barque, Meryl se rhabilla avec une lenteur calculée, consciente que les yeux de Nyxie étaient sur elle, suivant et mémorisant le moindre de ses gestes. Non, décidément, le trouble ne voulait pas disparaître. Armée de sa fidèle pagaie, la jeune femme guida leur embarcation près de la berge et l'attacha solidement au tronc d'un arbre. Elle prit quelques bouteilles d'hydromel dans son sac mais laissa le reste sur la barque.

- Tu crois qu'ils vont venir les chercher ?

Avisant les environs boisés, Meryl n'eut pas le moindre doute sur sa capacité à échapper à quelques Utgardiens en colère s'ils se risquaient à les poursuivre, aussi décida t-elle ne pas prendre de précautions supplémentaires. Et puis Nyxie était avec elle, que pouvait-il lui arriver de mal ?

- Je m'occupe du feu, occupe toi du repas !

Elle ne lui laissa pas le temps de protester et se mit en quête de bois mort, tout en avalant quelques gorgées d'hydromel en chemin, histoire de se réchauffer un peu. Perdue dans ses pensées, elle anticipait déjà la suite. Nyxie et elle ne pourraient pas battre la campagne seules indéfiniment, il leur fallait trouver une tribu. Trouver ? Non, créer leur propre tribu. Une tribu dans laquelle les Sang de Shog ne seraient pas mis à l'écart, pointés du doigt et parfois même forcés à s'exiler. Si tous les laissés pour compte des tribus nomades se joignaient à elles, loin des règles sclérosées des vieilles matriarches, rien ne pourrait les arrêter, les empêcher de faire exactement ce qu'elles voulaient.

Une odeur de fumée la ramena dans le présent et elle se mit rapidement en quête de sa source. Revenue sur ses pas, elle vit Nyxie, devant un feu de camp alors qu'elle dépeçait un lapin ; cette dernière lui lança un regard narquois, avisant le peu de bois mort qu'avait récupéré Meryl, à peine de quoi faire vivre un feu plus d'une minute.


-Oui, bon. J'étais un peu distraite, tenta t-elle de justifier avant de se laisser tomber lourdement à côté du feu, sa précieuse bouteille pressée contre elle.

La chaleur ne parvenait pas encore à réchauffer ses os, mais bientôt l'humidité dans ses vêtements ne serait plus qu'un lointain souvenir. Allongée face à son amie, elle la regarda s'affairer sur le pauvre lapin, hypnotisée par ses mouvements et par les flammes qu'elle voyait se refléter et danser dans ses yeux.
Nyxie
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Dim 14 Mar - 0:22
Lâche. Phoenyx avait été lâche, elle le savait. Pleutre, comme un homme. Elle avait profité d’une faille, d’une faiblesse, s’y était engouffrée pour prendre ce qu’elle voulait par la surprise. Ce qui aurait pu être agréable, partagé, réciproque, savouré, elle l’avait aussitôt arraché des mains de Meryl, comme pour l’empêcher de trop s’y habituer. Comme si elle savait que rien de tout ça ne pouvait être éternel, mais qu’égoïstement elle voulait entretenir cette illusion que rien n’était impossible. D’ailleurs pourquoi parler d’illusion ? Pourquoi parler d’impossible ? Qu’est-ce qu’il leur manquait pour être heureuses ensemble ? Plus aucune vieille pour les mépriser, plus aucune hiérarchie stupide à respecter, plus personne à craindre, juste les dieux à vénérer, et l’autre à aimer. La brune n’avait pas besoin du poison shog pour sentir qu’un nouveau feu brûlait en elle, et ce n’était pas seulement ce qu’elle regardait qui le ravivait, mais plutôt un espoir. Une lueur dans la nuit profonde. Gare à ces Shogs qui oseraient faire irruption dans leur rêve, leurs vies insignifiantes envieraient la longévité de leur alcool auprès de Meryl. Cette dernière sembla s’en rendre compte par elle-même puisqu’elle ne semblait pas plus inquiétée à l’idée de voir les trouble-fêtes. Puis, désignée comme responsable de chasse, la nomade accepta d’un signe de tête. La tâche n’était pas des plus difficiles, les bois regorgeaient de petit gibier. Il était regrettable d’avoir laissé la somptueuse lance-à-poils shog là-bas dans la cité maudite. Maintenant, la nomade se retrouvait avec son seul couteau pour chasser des proies bien plus rapides qu’elle. Son œil exercé repéra une branche particulièrement droite qu’elle tailla en pointe. Voilà qui suffirait à percer le cuir d’un lièvre gras. Finalement, la chasse fut moins longue que la confection de l’arme en elle-même et lorsqu’elle revint près de la barque, elle n’y vit ni Meryl, ni fumée. Restait à espérer que la citadine ne se soit pas perdue entre les trois arbres de la lisière. Nyxie alluma le feu certaine qu’au moins la fumée indiquerait le chemin, puis elle entreprit d’écorcher sa proie. L’égarée ne tarda pas à se présenter avec un petit fardeau de bois mort dans les bras. Ses excuses élargirent le sourire moqueur que la nomade affichait déjà.

— Un peu distraite… répéta-t-elle, en pinçant les lèvres pour tenter de cacher son amusement. Du coin de l’oeil, elle observait son amie allongée avec sa bouteille, le regard dans le vague. Les humains étaient sensibles à un tas de drogues. L’alcool avait bien trop de pouvoir sur le corps et l’esprit pour exercer une quelconque attraction aux yeux de la nomade. Les concoctions élaborées par l’homme perdaient leur superbe à côté de ce que Tridéité faisait poussait au coeur de la nature. Comme beaucoup de nomades, elle préférait les herbes ou les champignons à rêves.

— C’est ta boisson qui te distrait, conclut-elle en arrachant d’une traite la fourrure autour de ce qui serait leur repas. Les viscères comestibles furent déposés sur une pierre propre posée au bord du foyer où elles cuiraient doucement, les déchets furent jetés au feu, le rôti, embroché sur la lance éphémère qui fut transformée en broche. Elle s’empara de la fourrure pour la rincer en même temps qu’elle laverait ses mains couvertes de sang. Elle déposa la fourrure au soleil sur l’herbe, cuir en l’air. Lorsqu’elle revint Meryl semblait plus hagarde que jamais.

— Ralentis un peu, tu vas sombrer avant que ça ait fini de cuire. Moi qui espérais pouvoir t’empoisonner avec ma cuisine raffinée, fit-elle avec un air sophistiqué qui contrastait étrangement avec sa personne toute entière. A son tour, elle s’affala aux côtés de son amie. Notant que le niveau de la bouteille avait nettement baissé, elle la lui arracha des mains en interposant un index autoritaire pour descendre une goulée qui lui arracha une grimace.

— Que Vaarkarsh protège mon estomac, fit-elle en lui rendant le flacon, incommodée par la chaleur qui brûlait sa gorge. Désormais assise avec plus rien à faire, Nyxie ôta son pantalon, dont l’humidité devenait désagréable. Délicate comme jamais, elle s’empara de son talon et de la pointe de sa bottine souple pour la retirer quand quelque chose entailla profondément sa paume, elle lâcha un cri de surprise en interrompant son geste. Un éclat transparent tâché de sang était planté dans la semelle. Elle retira le débris de verre qui se mit à luire en renvoyant la lumière des flammes. Une étrange vague l’accabla. Toute cette histoire pour des bouts de métal, de la monnaie, alors qu’elles n’avaient rien demandé de plus que le couvert et un feu. Cette ville était pourrie par le vice, rien n’y avait plus de sens. En à peine une heure, il lui semblait qu’elle en avait vu suffisamment pour savoir que le monde des Shogs n’était pas celui de l’entraide. Personne ne respectait personne, chacun défendait son droit à n’avoir que peu tant qu’il n’avait pas à le partager. Alors que le partage aurait pu permettre à tous d’avoir un peu plus. Les Sangs-Maudits avaient perdu leur capacité à raisonner, ils avaient construit un monde de propriété, comme si en appartenant, ils devenaient quelqu’un. L’idée qu’on puisse vivre des années durant en telle compagnie était inimaginable, cruel même.

— Comment as-tu survécu entre ces murs avec des fous ? On dirait qu’il n’ont aucun bon sens. Ces gens sont fous, Meryl, ils sont pourris à l’intérieur. Se battre pour de la nourriture, de la boisson, c’est fou, Meryl. Ca n’a aucun sens, même les enfants ne font pas, s’exclama-t-elle, incrédule en tendant le bout de verre, comme s’il était la preuve de la folie des sédentaires. Se rendant compte que le sang coulait le long de son avant-bras, elle laissa tomber l’éclat tranchant et serra le poing pour forcer la plaie à se refermer. Car c’est comme ça qu’on panse une plaie n’est-ce pas ? On la serre très fort, et on pense à autre chose, on fait comme si rien ne s’était passé.

— Mais c’est terminé maintenant, tu n’auras plus à vivre ça.

Elle posa sa main sur l’épaule de Meryl, en la regardant dans les yeux, comme si en la convaincant, elle se convaincrait elle-même que leur destinée n’était pas immuable, qu’elles étaient libres. Libres d’arrêter de souffrir à cause de choses qui ne les concernaient pas et qui ne les avaient jamais concernées. Elles n’avaient été que les victimes de circonstances créées par d’autres, et ces autres seraient punis, mais elles, elles n’étaient pas obligées de s’infliger autant de peine.


Dernière édition par Nyxie le Ven 19 Mar - 23:24, édité 1 fois
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Dim 14 Mar - 23:58
- C'est pas la boisson, avait murmuré la blonde si faiblement qu'aucune oreille n'y prêta attention. La cause de son trouble lui faisait face en ce moment même, ignorante de l'effet qu'elle produisait, indifférente à l'attention qu'elle suscitait, aveugle aux regards tourmentés posés sur elle. Partout où elle s'affairait, les yeux mordorés de Meryl la suivait, sans jamais ciller. Un nœud dans sa gorge avait fini par se former, à force de ressasser des paroles qu'elle aurait voulu dire à haute voix, sans y parvenir.

Lorsque son amie se laissa tomber brusquement à ses côtés, Meryl se força à enfin détourner son attention et sourit lorsque Nyxie avala une rasade d'hydromel tout en pestant sur son goût. Comment avait-elle fait pour survivre toutes ces années dans la cité maudite ? Avec un petit peu de volonté et quelques rencontres qui avaient enjolivé l'expérience. Mais elle n'avait pas réellement envie de parler de ce sujet avec Nyxie, convaincue que cette dernière s'était déjà fait son propre avis et n'en démordrait plus. La nomade avait toujours eu le jugement facile, le mépris également, et Meryl n'était pas vraiment en état de plaider pour tous les Shogs qui lui avaient un jour tendu la main, sans rien demander en échange.

Et il fallait aussi avouer que certaines de ces belles rencontres s'étaient mal terminées.

D'un geste doux mais ferme, elle saisit le poing ensanglanté de Nyxie dans sa main, avant de lui faire ouvrir doucement la paume pour observer la blessure.

- Voici donc les nouvelles techniques secrètes des guérisseuses nomades : on ferme le poing et on attend que ça passe. Et toi, Nyxie, comment as-tu fait pour survivre dans la nature en prenant si peu soin de toi ? Laisse moi nettoyer ça.

Meryl fouilla son sac pour y chercher un linge mouillé : ce ne fut pas très compliqué, tout était encore trempé là-dedans. Délicatement, elle essuya le sang, d'abord dans le creux de sa main, puis autour de son poignet, avant de remonter le long de son bras, presque jusqu'à son coude. Ses gestes étaient lents, comme si elle avait enfin trouver une tâche digne de toute son attention et qu'elle avait bien l'intention d'y consacrer un temps démesurément long. Elle ne releva pas une seule fois les yeux vers Nyxie dans le processus.

Une fois propre, la plaie fut couverte d'un vieux baume qui traînait dans ses affaires ; plus de première fraîcheur mais qui ferait néanmoins l'affaire. Et pour parfaire le tout, un petit bandage fut même noué autour de sa main. Sa main qu'elle avait gardée dans les siennes et qu'elle ne semblait plus vouloir lâcher. Sa main qu'elle finit par lever doucement pour la porter près de son visage, avant que ses lèvres ne viennent se poser sur le bout de ses doigts, aussi léger qu'une plume.

Leurs yeux se rencontrèrent finalement et les siens descendirent lentement vers les lèvres de la sauvage, trahissant ce qui se tramait dans sa tête. Si elle n'avait pas déjà eu un avant goût de ce qui allait suivre, sans doute aurait-elle renoncé. Une main se perdit dans sa chevelure d'ébène et elle se pencha résolument vers elle, mêlant un cours instant leurs souffles avant de sceller sa bouche à la sienne. Son baiser n'avait rien d'hésitant, bien qu'il fût dénué de brusquerie. Meryl ne volait rien, elle demandait gentiment. Peut-être trop gentiment pour l'impatiente harpie des herbes qui émit un grognement approbateur lorsque leurs langues finirent enfin par se toucher.

Son corps invita celui de la nomade à s'allonger alors qu'elle la recouvrait de toutes ses attentions. Une fois n'était pas coutume, c'était elle qui mènerait la danse. Elle mêla ses doigts aux siens pendant que sa bouche déposait des baisers le long de sa mâchoire, si lentement que c'en était presque déchirant. Puis elle descendit doucement sur son cou, appréciant un moment le rythme erratique de son pouls contre ses lèvres avant de se redresser légèrement pour l'observer. Échevelée et pantelante, elle était magnifique, et Meryl ne sut retenir le léger rire qui naissait dans sa gorge. Elle aurait voulu lui dire quelque chose, n'importe quoi, mais elle restait sans voix, et c'était sans doute pour le mieux.

D'aussi loin qu'elle se souvenait, Nyxie avait toujours été la personne dont elle s'était sentie le plus proche. Émotionnellement, mais pas uniquement. Ses bras avaient toujours été un bouclier contre le reste du monde, les caresses dans ses cheveux un réconfort lorsqu'elle cauchemardait au milieu de la nuit. Mais elle ne l'avait jamais vue comme elle la voyait aujourd'hui. Cette vision était tout droit sortie d'un rêve et elle n'avait absolument pas l'intention de se réveiller.

Ignorant l'odeur de brûlé qui commençait à s'élever de ce qui était censé leur faire office de repas, la main de Meryl s'attarda sur le corps de la nomade dont elle voulait mémoriser les moindres détails. Elle voulait tout connaître. Chaque point sensible, chaque petite marque qu'avait gravé le temps qu'elle avait passé loin d'elle sur sa peau. Elle explora chaque recoin. Avec ses doigts, dans un premier temps, jusqu'à ce que ses lèvres prennent le relais. Elle était toute dévouée à sa tâche, ne laissant aucun répit à sa harpie et fut bientôt récompensée par son souffle de plus en plus court, et les vagues de plaisir qui semblaient traverser tout son corps.

Et lorsqu'elle eut fini, elle recommença.
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Mar 16 Mar - 20:04
Tout aurait pu être si simple et si paisible. Ce moment était un aperçu de ce qu’elles auraient pu vivre toutes ces années si l’horreur ne les avait pas séparés. Son frère aîné Baldhramn avait su la consoler un temps, avait toujours joué son rôle de protecteur en prenant son parti quand c’était nécessaire, l’avait toujours encouragé dans sa voie. Jusqu’à ce qu’il l’abandonne, à son tour, il y avait de ça trois ans. Cette fois complètement seule, Phoenyx s’était refermée comme un coquillage, ne s’était plus attachée à rien ni personne pour ne plus avoir à souffrir de leur disparition. Cette carence qu’elle s’était imposée, ces murailles qu’elle avait érigé autour de son coeur l’avait laissé seule avec son ego et sa foi, les seules choses qu’elle possédait vraiment et que personne ne pouvait lui soustraire.

Mais tout aurait pu être différent. En Meryl, elle aurait pu trouver le point d’ancrage qui manquait à sa personnalité tumultueuse et instable. Tout ça, on lui avait refusé. Tout ça, elle le retrouvait aujourd’hui, sans pourtant savoir quoi en faire ni comment la conserver auprès d’elle.

Impossible de la ramener et l’imposer au sein de la tribu. Jamais Meryl n’accepterait d’y retourner, jamais elles n’y vivraient sereines ou même heureuses. La marche arrière n’était pas une option.

Impossible aussi de vivre avec elle cette vie de vagabond dans ou autour de cette maudite cité pour respecter le Trois-Nul-Car comme des parasites qui n’ont ni place ni rôle au sein d’une communauté.

Plongée dans ses dilemmes, Nyxie observait son amie lui prodiguer les soins que même un Initié aurait pu faire seul. Les rayons obliques du soleil sur ses cheveux leur donnaient des reflets neige. Quoi qu’en dissent les vieilles, elle avait tout des traits nomades : l’angle de sa mâchoire, ses pommettes hautes et ses arcades basses. Même la couleur de ses yeux cherchait à démentir son sang shog. Tout occupée à ses soins, elle ne lui adressa un regard qu’après avoir embrassé le bout de ses doigts. Certains feux s’allument d’une seule étincelle, et ce baiser timide était de ceux-là. Chaque caresse, chaque attention ravivait les flammes de ce brasier incontrôlable qui n’en put plus lorsque Meryl se stoppa, au-dessus d’elle, entourée d’un halo brillant comme une muse de Vaarkarsh s’il en était. Un étrange jeu de lumière donnait des reflets dorés à ses yeux pétillants, son éclat de rire lui arracha un sourire émerveillé. Elle la laissa découvrir tout de son corps et de ses sensibilités, elle s’abandonna délicieusement à ses mains curieuses et à sa bouche avide d’amour. Il est des plaisirs qu’on ne peut ressentir que par le coeur et au rythme ou le sien battait, difficile d’ignorer les sentiments que Meryl lui inspirait. Elle n’était pas son amie, elle ne l’avait jamais été et peut-être qu’elles deux l’avaient toujours su. Elles étaient deux moitiés enfin unies pour n’en faire qu’une, elles étaient la manifestation même de l’âme-sœur. Comme elle se l’avouait enfin, une nouvelle frustration naquit en elle et se mit à grandir jusqu’à devenir incontrôlable. Elle agrippa Meryl et la fit rouler sur le côté pour se retrouver au-dessus d’elle. Son besoin de contrôle devenait plus grand que son envie de recevoir. Aussi, les terribles plaisirs que Meryl lui avait fait subir lui revenaient de droit. Comme un enfant défait un paquet, les couches superflues de vêtements volèrent avec impatience. Bien moins douce que sa comparse, elle laissa libre court à sa passion sauvage et qu’on se le dise, le quolibet de « Harpie des Herbes » ne lui avait jamais sis aussi bien. Seul témoin de leurs ébats énamourés, le soleil en rougissait encore à l’horizon. Les braises elles-mêmes s’étaient lassées d’attendre leur attention, il ne restait plus que de la cendre et un lapin trop cuit d’un côté. Elles pouvaient tout de même se consoler d’avoir au moins un de leurs appétits comblés. Pas vraiment embarrassée par sa nudité, Nyxie s’approcha de la carcasse froide, l’oeil critique. La tête encore pleine de plaisirs coupables, elle se mit à gratter le brûlé avec son couteau en fredonnant un vieille ballade nomade qui parlait de deux amants épris de liberté. Bientôt, elle tendit une patte à Meryl.

— Tiens c’est encore mangeable, c’est mieux que rien.

Pas convaincue, la blonde tenta une bouchée l’air dégoûté.

— J’ai l’impression de bouffer de la cendre.
— Ta vie chez les Shogs t’as pas rendue aimable. Ni polie, lança la chasseresse avec un regard en noir qui l’intima de goûter à nouveau. Elle avait chassé ce lapin, elle avait dépecé ce lapin, elle avait embroché ce lapin, elle avait fait cuire ce lapin. Et maintenant, elle boufferait ce lapin, seule s’il le fallait ! Meryl profita d’un instant d’inattention pour se jeter derrière elle la patte carbonisée. L’appétit vient en mangeant, dit-on, c’était certainement vrai après tout ça. Après une brève prière, c'est à pleines dents que la nomade mordit dans la chair si cuite qu’elle se détachait des os. Elle racla la viande jusqu’à la carcasse. Les doigts et le menton couverts de graisse, elle alla sur la grève pour se débarbouiller. Quand elle s’y trouva, Meryl la rejoignait d’un pas nonchalant.

— Crois pas que je vais pécher un poisson pour que tu refuses de le manger, capricieuse ! l’avertit-elle d’une voix forte, comme pour briser le silence béat qui régnait encore entre elles. L’euphorie retombait doucement et laissait place à des inquiétudes qu’elle repoussait encore et encore. Après avoir nettoyé ses mains, Nyxie retint son épaisse chevelure pour se rincer le visage. Elle se releva et vit son amante près d’elle. Son visage ou peut-être la pointe d’une question dans ses yeux la fit révéler ce qui la torturait. Nyxie prit une grande inspiration, car s’il fallait que ça sorte, mieux valait qu’elle ne soit pas interrompue.


— Toutes l’ont vu. Elles racontaient toujours la venue d’une prophétesse. Tu t’en rappelles ? Toutes les chamanes, sauf Jenna. Comme Jenna n’en rêvait pas, et que les Oracles ne pouvaient pas avouer que leurs prédictions étaient fausses, elles ont trouvé le problème. C’était toi. Enfin, Jenna leur a dit. Elle leur a dit que depuis que tu étais née, ses visions s’atténuaient. Que ta présence seule brouillait les visions que donnaient les dieux. Que le cours de l’histoire changeait à cause de toi et des rêves que tu l’empêchais de faire. Qu’il fallait t’éliminer et s’assurer que tu ne reviendrais jamais.

Elle éclata d’un rire nerveux. Le dégoût et le mépris tordaient ses lèvres tandis qu’elle poursuivait.

— Jenna ne voyait plus grand-chose. Baldrhamn le savait, c’est pour ça qu’il est parti, lui aussi. Ca et le fait qu’il voyait plus qu’elle. Jenna avait peur d’être défiée. Tellement peur… Les plantes qu’elle donne à Taelle… elles ne l’aident pas à voir, elles la droguent. Si elle devient chamane…

De mémoire de nomade, on n'avait pas de souvenir d’une chamane indigne de son statut. Celles qui ne voyaient pas été évincées, sinon… On n’entendait plus jamais parler de leur tribu. Car c’était aux chamanes mettre leur don à l’épreuve pour guider les leurs jusqu’à l’accomplissement. Elles étaient les envoyées d’Anauroch, et leur voix appartenait à la Tridéité.

— Il n’y a pas de prophétesse, il n’y a même plus de chamane. Il n’y a que la punition de la Tridéité pour leur imposture, et toute la tribu paiera pour ce blasphème. Ca, moi, je l’ai vu.

La rage nouait sa gorge au point qu’elle en avait les larmes aux yeux. Elle traînait tout ça depuis des années avoir personne à qui le confier sans remettre en cause sa place dans la tribu. La journée avait été une longue succession ininterrompue de sentiments puissants, contradictoires et libérateur et voilà qu’elle se sentait au bord de l’implosion.


Dernière édition par Nyxie le Dim 11 Avr - 14:23, édité 1 fois
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Sam 20 Mar - 22:52
Son univers entier n'était que plénitude et euphorie, un univers dans lequel Nyxie était la reine. C'était quelque chose d'aimer à ce point là... Et lorsque cet amour était rendu, il ne restait plus qu'à s'y perdre. Elle était prête à pardonner tout, à tout le monde, car sans la souffrance, sans les obstacles, peut-être qu'elle ne serait pas ici à cet instant, avec elle. Peut-être que tout arrivait bien pour une raison, même si Meryl avait cessé de croire à ce genre de choses il y a bien longtemps.

Elle soupira d'aise alors qu'elle rejoignit la nomade au bord du fleuve avant d'envoyer quelques gouttes dans sa direction pendant qu'elle se nettoyait le visage, joueuse, mais Nyxie l'ignorait royalement, visiblement perdue dans ses pensées. Des pensées désagréables aurait parié la blonde. Sa chemise froissée mais désormais sèche dans la main, elle se rhabilla doucement avant d'approcher timidement sa harpie, bien décidée à lui faire partager son fardeau.

Leurs yeux se croisèrent et elle n'eut même pas le temps de poser sa question.

Les nuages masquèrent un instant le soleil, les plongeant toutes deux dans l'ombre, comme un avertissement. Meryl avait détourné le regard à la fin de ses paroles, les yeux rivés à présent sur le fleuve. L'eau avait quelque chose de sinistre tout à coup. « Pourquoi tu me dis tout ça ? » avait-elle eu envie de dire. « Pourquoi me dire tout ça maintenant ? ». Parce que cette vérité l'accablait, et qu'elle voulait partager ce fardeau. N'était-ce pas ce qu'elle avait voulu en la questionnant du regard ? Elle n'en était plus si sûre.

Et finalement, la question franchit ses lèvres.

- Pourquoi tu me dis tout ça ?

Elle n'avait rien demandé. Elle n'avait jamais rien demandé à personne.

- Tu crois que j'ignore avoir subi la pire des injustices ? Un éclair de colère traversa ses iris dorés et s'y accrocha. Que ce soit pour cette raison ou pour une autre, quelle importance ?

Ses mains se mirent à trembler contre son corps, elle fut obligée de les serrer très fort pour s'arrêter.

- Pourquoi tu me dis ça ?!

Cette fois, elle avait presque crié. Ce n'était pas tant après Nyxie qu'elle était en colère. Elle était juste en colère. Non, elle était la colère. Elle qui avait affirmé en être dépourvue quelques heures auparavant, voilà qu'elle se faisait presque mentir.

- Et est-ce que tu penses que le sort de Vaar Orée m'intéresse ? Peu importe tout ça. Que la tribu paie. Nous n'avons pas besoin d'elle, nous n'en avons jamais eu besoin.

Meryl avait fait le même rêve pendant des années, un rêve dans lequel elle voyait sa forêt natale brûler. Elle et tous les visages des gens qui avaient été sa tribu. Sa famille. Seule Nyxie avait de l'importance. Le reste pouvait être emporté par la folie des hommes ou par le feu de Vaarkarsh lui-même. Ça n'avait pas d'importance.

Ça n'avait pas d'importance.

Et plus Nyxie essayait de faire éclater sa bulle, plus elle s'obstinerait à en créer une encore plus grosse. Nyxie finirait pas lâcher prise, comme elle l'avait fait avant elle.
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Lun 29 Mar - 22:49

Quand le sort s’acharne et m’envoie à dérive
Berce mon corps au creux de tes bras sans une étrive
Si la mort m’engloutit et enfin me délivre
Traîne l’erreur dans tes eaux sans espoir de survivre
Seul le coeur fait foi pour que le souffle puisse s’ensuivre

Sous la surface de l’eau, sa peau était blême et ses doigts se tordaient comme des tentacules. Elle fixait ses mains difformes onduler, comme absorbée par leur danse. Les vaguelettes du courant les faisaient presque ressembler à des flammes verdâtres.

Oui, pourquoi.

Phoenyx ne cherchait ni la compassion de Meryl, ni son aide. Au contraire. Elle n’avait jamais espéré la retrouver vivante, maintenant que le bonheur irradiant des retrouvailles se dissipait, elle comprenait que ce qu’elle lui donnait ne suffisait pas. Elle avait besoin de bien plus que de l’amitié inconditionnelle ou de la tendresse.

— Viens dans les Bras de Shoggoth, Meryl, invita-t-elle à voix basse avec un calme étrange. Ses yeux scrutaient les paumes de ses mains à travers l’eau, comme si quelque chose pouvait s’y inscrire d’un moment à l’autre. Doucement, la nomade se laissa glisser sur le dos. Près de la berge, le courant n’était pas fort et l’eau était peu profonde.

Après avoir passé autant de temps à se sécher, pourquoi diable retournerait-elle dans l’eau ? La mine peut convaincue de Meryl ne fit pas long feu, après un soupire exaspéré, elle consentit  à la rejoindre. Cette brève mention de son ancienne tribu avait brisé la simplicité et l’insouciance du moment. Pourtant, même irritée par ses propos, la blonde ne pouvait pas résister à l’envie de la suivre. N’avait-elle pas toujours pris sa défense ? N’était-elle pas la seule qui l’ait toujours aimée ? Leurs regards perdus dans la voûte céleste, elles restèrent silencieuses un moment à flotter tête-bêche.

— Les injustices sont les faits des faibles; tout comme la pitié, le pardon et l’oubli. Et tu me dis que tu vas attendre que quelqu’un les fasse payer. Elle étendit une main pour caresser sa joue et se rapprocher de  son oreille, sans cesser de flotter. Quelqu’un le fera.

Alors voilà, pourquoi. Phoenyx voulait puiser en elle le sentiment le plus puissant et le plus dévastateur qu’un être humain puisse sentir. L’Amour. Mais pas la version qu’elle avait fait fleurir cet après-midi là, cet amour-là ne menait guère plus loin qu’au bonheur paisible. On n’a jamais rien détruit en toute sérénité. Ce dont elle avait besoin, c’était sa version la plus chaotique et la plus déchaînée, celle qui dévorait de l’intérieur, qui changeait l’attention tendre en obsession malsaine, qui tordait l’instinct de protection en jalousie possessive, celle qui poussait à tout anéantir. Comme elle réalisait ça, elle avait l’impression de se consumer d’un coup comme de la paille est absorbée par le brasier.

— Je le ferai. Mais avant j’ai besoin de toi. Tu vas me faire passer l’épreuve de Shoggoth, murmura-t-elle d’un ton décidé. Puisqu’elles n’avaient aucune chamane à part-elle même, elle n’avait pas d’autre choix que demander l’aide d’une personne de confiance pour la noyer. Jamais Meryl ne lui ferait perdre l’Epreuve, elle irait jusqu’au bout, elle était la seule qui en était capable.
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Ven 9 Avr - 23:56
Shoggoth avait toujours revêtu une importance particulière pour celle qui n'avait jamais vraiment su quelle était sa place dans le dessein des Dieux. Dans ses bras, elle était chez elle ; ne l'avait-on pas appelée « Sang de Shog » presque toute sa vie ? Il est vrai qu'elle incarnait très bien certaines de ses facettes : la spontanéité, certes, mais aussi l'égarement, et la perdition. Meryl était perdue, son âme était perdue. Elle n'avait pas arpenté un chemin qui l'avait simplement éloignée de son trajet initial et qui allait finir inexorablement par l'emmener là où elle devait être, elle s'était détournée, résolument, et marchait sans véritable but vers une destination inconnue.

On pouvait dire qu'elle avait abandonné les Dieux, qu'elle avait abandonné ses croyances, elle préférait dire que c'étaient eux qui l'avait abandonnée. Si elle était convaincue d'une chose à présent, c'était de la vacuité de sa foi, de la vacuité de la Foi. A la dérive, elle observait son amie en tournant doucement la tête vers elle. Comment le lui dire ? Comment lui dire que les Dieux se riaient d'elle comme ils se riaient du reste ? De toutes les âmes qu'elle avait connues, celle de Nyxie était la plus pieuse. Sa foi à elle était pure, rien ne l'avait entachée jusqu'ici. Et Meryl l'aimait exactement comme ça, elle ne voulait rien entacher, rien entraver, rien dénaturer.

Pourquoi son âme devait être purifiée ? Elle ne posa pas la question à voix haute parce qu'elle savait d'avance qu'elle ne comprendrait pas la réponse.

Sa réponse à elle, en revanche, elle la connaissait déjà.

- Je ne peux pas faire ça.

Elle avait assisté une seule fois à l'Épreuve de Shoggoth, elle avait vu la tête de la malheureuse être maintenue sous l'eau pendant un temps qui lui avait paru infini. Lorsque l'on avait remis son corps sur la berge, elle ne bougeait plus. Elle revoyait encore sa peau blafarde et ses lèvres bleuies. Il était hors de question de faire subir cette épreuve à Nyxie, peu importe à quel point elle était persuadée que sa foi la protégerait.

La foi ne protégeait de rien du tout.

- Seule une chamane peut te faire passer cette épreuve.

Voilà une excuse idéale pour couper court aux élucubrations de sa harpie. Pas de chamane, pas d'épreuve. Pas de noyade, pas de peau blafarde et lèvres bleuies. Et pas de mort. Plus de mort, plus jamais.

- Est-ce qu'on peut... ne plus parler de ça ? M'imaginer te maintenir la tête sous l'eau n'est vraiment pas une vision qui m'enchante.

Elle tendit le bras pour attraper sa main dans l'eau et entrelacer ses doigts avec les siens.
Nyxie
Nyxie
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Date d'inscription : 25/09/2020
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Âge du personnage : 21 ans, née en l'an 72
Métier : Guérisseuse
Dim 11 Avr - 15:35

Seule une chamane le pouvait. Mais elles n’avaient plus de chamane. Il n’y avait plus rien. Dans l’éther bleuté de l’eau, les cheveux de Meryl brillaient comme de la neige. Dans un flash, elle vit une main de squelette chercher son contact.

La tête sous l’eau… répéta-t-elle dans un murmure tandis que sa main glissait hors de l’étreinte pour passer le long de son crâne pour toucher la bosse douloureuse. Le coup l’avait sonnée et envoyée dans l’eau.

— Tu l’as déjà fait… Tout à l’heure... la rame…

Elle s’était senti partir. Elle avait vu la malédiction sur Meryl. Dans ses bronches, elle pouvait encore sentir l’irritation provoquée par la quantité d’eau qui s’était engouffrée dans ses poumons. L’eau qu’elle avait craché et vomit lui avait irrité la gorge.

— J’ai passé l’Epreuve de Shoggoth sans le vouloir, alors que je me croyais perdue. J’ai vu la moitié de ton corps maudit, mais je ne comprends pas pourqu...

Dès leurs retrouvailles, elle avait senti la trahison, son corps l’avait senti, son âme l’avait senti, elle l’avait vu avant même de le voir. Cette envie subite envie de strangulation, qu’elle avait immédiatement réfrénée.  « … peu importe combien d'années je passerai dans ces murs... ». Elle n’avait pas pris instant pour prier avant de manger. « Et si les Dieux n’avaient rien prévu pour moi ? », « On n’a besoin de personne pas même des Dieux ». Toutes ces allusions faites étaient des aveux qu’elle avait refusé d’entendre. Maintenant ils s’additionnèrent subitement dans sa tête en une seule conclusion :

— Tu ne crois plus, réalisa-t-elle, interdite. L’éventail de mèches noires qui ondulaient dans l’eau comme autant de serpents se rétractèrent pour se plaquer contre son dos et ses épaules lorsqu’elle se redressa en s’avançant vers son amie, son amante, son amour, son tout. L’avait-elle regardé avec un air plus tendre ? Elle l’aimait, elle l’aimait.

En la voyant se relever, Meryl fit de même incertaine de l’attitude à adopter. N’avait-elle pas attendu avec appréhension le moment où elle devrait s’expliquer sur la perte de sa Foi ? De quoi Nyxie était-elle capable après une telle trahison ? Peut-être qu’au final, la nomade avait fini par se sentir piégée par ses croyances, elle aussi, et qu’en la voyant vivante après tant d’années dans la perdition, elle se rendait compte que les Dieux n’avaient rien à voir avec la survie, et que le blasphème ne tuait pas ?

—  Je me croyais perdue, mais je ne l’étais pas. Je ne l’ai jamais été. Je t’ai retrouvée. Maintenant tout ira bien. Je ferai n’importe quoi pour toi, Meryl, fit-elle en la prenant dans ses bras, la serrant contre elle. Sa main caressa ses cheveux blonds, elle embrassa son cou, une dernière fois.

— La malédiction est en train de te prendre. C’est toi. C’est toi qui t’es perdue, Meryl. Et je t’ai retrouvé. Je vais te retrouver encore. Je ferai n’importe quoi...

Elle l’aimait trop, trop pour que ce soit sain, trop pour l’abandonner à sa liberté sans elle, trop pour la laisser jeter son âme en pâture à la pire corruption qui soit. On fait le meilleur par amour, on fait surtout le pire.

— … pour sauver ton âme, chuchota-t-elle dans son oreille. Une larme chaude tomba son cou. Le pied droit de Phoenyx faucha le talon gauche de Meryl, elle la poussa en arrière pour la coincer sous elle. De ses deux mains, la nomade s’efforça de la maintenir sous l’eau. Personne d'autre ne t'aimera autant que moi, personne d'autre ne peut te sauver, Meryl ! JE TE SAUVERAI !
Meryl
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Date d'inscription : 23/09/2020
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Âge du personnage : 23 ans
Métier : Guide / Pisteuse
Ven 16 Avr - 23:23
La douleur de l'eau s'infiltrant dans ses poumons était moins insupportable que de savoir que les mains qui la maintenaient sous l'eau l'avaient tendrement enlacée quelques instant plus tôt. S'il y avait des trahisons pires que les autres, celle-ci, d'entre toutes, avait été la plus terrible.

Elle ne sut combien de minutes s'écoulèrent avant qu'elle ne cesse définitivement de se débattre, mais bientôt la panique laissa place à une toute autre sensation : elle se sentait en paix. Lorsque son corps fut ramené sur la berge, elle ne respirait plus du tout et son cœur était à l'arrêt. Lors de l’Épreuve de Shoggoth, il était interdit d'intervenir directement pour réanimer l'infidèle, ainsi Nyxie ne put rien faire d'autre que la basculer promptement sur le ventre, voyant qu'elle ne revenait pas à elle.

Après un temps qui lui sembla interminable, Meryl se mit à cracher l'eau qu'elle avait dans les poumons sur le sol.

Anauroch avait tenu son âme entre ses crocs pour la recracher au dernier moment, comme si elle était indigne d'être broyée par lui. Combien de fois avait-elle frôlé la mort ? Combien de fois lui avait-on refusé la délivrance ? Aujourd'hui encore les Dieux se jouaient d'elle, d'une façon encore plus cruelle que tout ce qu'ils avaient pu faire jusqu'à maintenant, alors que l'instrument de leur volonté s'était parée des traits de la seule personne qui -elle le croyait- ne l'aurait jamais fait souffrir.

Encore hébétée, à moitié suffocante, mais totalement consciente de ce qu'elle venait de vivre, Meryl força sa respiration à se calmer, alors que ses yeux cherchaient ceux de son amie, espérant y déceler une forme de regret quelconque. Elle n'y trouva rien de tout cela.

- Sais-tu combien j'ai prié ce jour-là ? Sa voix était rauque, ses yeux humides de larmes ou de l'eau du fleuve, elle ne savait plus très bien.

Existait-il des prières plus déchirantes que celles d'une enfant à qui l'on arrachait le don de créer la vie ? Sa foi était pure, son âme également, elle se croyait digne d'être entendue par Eux. Elle avait prié pour que cela s'arrête, prié pour que l'on vienne à son secours, prié pour au moins s'évanouir, prié pour être emportée dans les limbes et ne plus avoir à souffrir. Elle ne cherchait pas à se justifier, elle n'avait pas à le faire... Pourtant une petite partie d'elle-même caressait encore l'espoir que Nyxie puisse comprendre.

- Et sais-tu ce que j'ai entendu lorsque j'ai tendu l'oreille ?

Les croyances aveugles vous persuadent que tout ce qui vous arrive à un sens, que vos Dieux vous éprouvent plus que les autres parce qu'ils vous estiment plus que les autres. Un tas de conneries. Meryl connaissait la vérité : elle n'avait jamais compris le sens de ce qui lui était arrivé tout simplement car il n'y avait rien à comprendre. Aucun sens. A rien. Jamais.

- Un silence. Un silence assourdissant.

Nyxie l'ignorait peut-être encore mais elle venait de tuer quelque chose en elle. Meryl avait certes survécu à l'Epreuve de Shoggoth, mais à quel prix ?

- Et tu sais ce qui me réconforte lorsque je me réveille en sursaut certaines nuits ? Me dire que lorsque je mourrais, mon âme ne rejoindra pas les leurs. Jusqu'ici, la seule chose qui m'était insupportable était de savoir que même dans la vie après la mort nous ne serions pas réunies.

La blonde fit un pas dans sa direction, puis deux, jusqu'à ce que leurs visages ne soient qu'à quelques centimètres. Dans son regard, l'envie de la gifler se disputait à l'envie de lui hurler qu'elle l'aimait plus que tout. Elle ne fit rien de tout cela.

- Merci de m'avoir délivrée de cette souffrance.

Meryl aurait fait n'importe quoi pour elle, sa seule limite aurait été de lui faire du mal. Nyxie... Nyxie, elle, n'avait pas hésité. Qu'aurait-elle fait si les choses ne s'étaient pas passées comme prévu ? L'aurait-elle regarder mourir sur la berge sans lever le petit doigt, par peur de s'attirer le courroux des Dieux ? Préférait-elle la voir morte que maudite ?

Rien n'avait autant d'importance que les Dieux pour Nyxie, Meryl le savait, elle l'avait toujours su. Leurs retrouvailles avaient momentanément éclipsé cette réalité mais celle-ci les rattrapait maintenant. Si vite, trop vite. Et encore une fois, sa légitime colère se retrouvait balayée par la douleur. Elle ne pleurait pas souvent, ces rares moments se comptaient sur les doigts d'une main, mais ici et maintenant elle ne pouvait plus rien contenir. Chacun de ses sanglots semblaient charrier toute la peine qu'elle avait accumulé ces dernières années.

- Pourquoi il a fallu... que tu me fasses ça...
Nyxie
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Sam 15 Mai - 0:06
Elle n’était pas une égarée. Elle pouvait encore accomplir sa destinée. L’épreuve de Shoggoth venait de le révéler et une vague de soulagement détendit les traits de Phoenyx alors que la rancoeur et la rage de son aimée grondait à en faire vibrer l’air. Elle sentit Meryl faiblir, se briser et ça, elle ne pouvait pas le supporter.

— Ne sois pas idiote, Meryl, fit-elle sèchement en lui attrapant le visage pour la confronter à son regard impitoyable. Ton âme ne rejoindra jamais les leurs. JAMAIS.

Il y avait quelque chose de définitif, de redoutable dans ce mot, quelque chose de dangereux, une promesse, une évidence.

— Jamais Anauroch ne leur accordera la rédemption pour ce qu’elles t’ont fait. Ce qu’elle t’ont fait a condamné la tribu à l’errance. Les Vaar Orée marchent aveugles et sourds à la volonté des dieux. Elles nous ont tous condamnés pour les desseins égoïstes. Anauroch ne pardonne pas les Fourvoyeurs d’Âmes. Il ne récupère même pas leur essence en ses crocs. Il les laissera pourrir avec la corruption du vide, comme des maudits. Leur âme n’iront nulle part, mais la tienne si.
Elle gardait entre ses mains le visage de son amante, la forçant à la regarder. Fallait-il être cruelle pour agir ainsi ? Etait-elle tout à fait insensible à la douleur et la peine qu'elle cause ou accordait-elle plus d'importance à ses propres mots ? Nyxie essayait-elle de se convaincre qu'elle était dans le vrai en convaincant sa victime que ses faits et gestes étaient guidés par la volonté des dieux ?

— Tu n’as pas le droit de mourir Meryl, tu vas t’accomplir. Les Fourvoyeuses m’ont volé ma place, mais je suis ta chamane. Tu n’entendras jamais rien, tu ne verras jamais rien, car ce n’est pas à toi d’entendre ou de voir les Dieux. C’est à moi. Toi, tu dois juste survivre jusqu'à ta destinée. C’est ce que tu as toujours fait : survivre. C’est ce que tu dois faire, encore. Il n’y a que moi qui t’aimes assez pour te faire ça, tu le sais. Jamais personne ne t’aimera assez au point d’accepter de te perdre si c’est pour sauver ton âme. Personne ne fera jamais ce que je ferai pour ton âme.

Cette faiblesse insupportable, ces larmes qui coulaient à gros sillons. Phoenyx pouvait sentir Meryl s’effondrer de l’intérieur. Dans cet instant de fragilité, ses yeux rougies renforçaient le bleu de ses iris et l’expression de sa déception et de sa tristesse avait quelque chose de déchirant. Pourtant avec tout le mal qu’elle lui faisait, Nyxie ne se sentait nullement coupable : tout ça était injuste, mais nécessaire. Sinon pourquoi la Tridéité les aurait réunies ?

— J’aurai voulu vivre avec toi, ici, en dehors de la réalité, pour toujours. Je l’aurai fait sans hésiter. Mais je vois et j’entends. Je ne peux pas ignorer les âmes que j’abandonne aux mécréantes.Quand je reviendrai, je serai chamane et j’accepterai de prendre le risque de te perdre encore. Ne pleure plus comme ça. Personne ne mérite tes larmes.

Ses pouces balayèrent doucement les joues de Meryl pour essuyer sa peine. Elle déposa un baiser d’adieu sur ses lèvres.

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