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Les abysses ne sont que la surface des tréfonds d'une âme en peine [Adrian]
Maître du Jeu
Maître du Jeu
Date d'inscription : 25/09/2020
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Dim 18 Juil - 2:43
La sentence avait été rendue, expéditive et brutale. Adrian Mayr n’allait pas perdre la vie comme feu son géniteur mais son avenir ne s’annonçait pas plus radieux pour autant. Sa liberté n’en avait que le nom puisqu’il ne pourrait plus quitter le Lys d’Argent jusqu’à nouvel ordre, ce à quoi s’était ajoutée l’interdiction de pratiquer la médecine ; toutes ses affaires seraient saisies et examinées minutieusement par les autorités compétentes. Pouvait-on se réjouir d’avoir encore la tête sur les épaules alors que l’histoire semblait ironiquement se répéter ? L’Amaranthis était en sursis, il le savait ; le Conseil ne savait tout simplement pas quoi faire de lui et seul Basilius concentrait l’attention brûlante de toute l’assemblée. En un sens, peut-être que c’était ce qui l’avait sauvé d’une condamnation trop hâtive ; mais ce n’était qu’une question de temps avant qu’on se penche à nouveau sur son cas, peut-être pour décider finalement que sa coopération dans cette affaire n’était pas suffisante pour prouver son innocence. Une chose était sûre : plus rien ne serait jamais comme avant.

À la fin de cette audition éprouvante qui s’était tenue jusque tard dans la nuit, on le fit sortir de la salle du Conseil, toujours menotté ; deux gardes l’attendaient déjà pour l’escorter jusqu’à la demeure où il serait étroitement surveillé, mais à peine eut-il le temps d’apercevoir la sortie du Palais que son escorte bifurqua brutalement dans un autre couloir et que sa tête se retrouva dans un sac, le privant de ses repères. Les deux gardes restèrent sourds à tout questionnement de sa part et ils dévalèrent bientôt un escalier en colimaçon qui s’enfonçait sous la terre. Adrian compta mentalement chaque marche qui allait le séparer de la surface et elles furent suffisamment nombreuses pour déclencher un ancestral sentiment d’oppression dans sa poitrine. Il ne reverrait sans doute pas le Lys d’Argent cette nuit, comme on le lui avait promis.

Au bout d’un long couloir, il entendit une succession de bruits caractéristiques de portes que l’on déverrouille et on le fit entrer dans une pièce où la température chuta brutalement. On lui ôta ses menottes, le sac qu’il avait sur la tête également, dévoilant… l’obscurité. Il cligna plusieurs fois des paupières comme pour forcer ses yeux à percer les ténèbres. Les torches dans le long couloir qu’il venait de quitter lui fournissaient tout juste assez de lumière pour distinguer les barreaux d’une cage de taille raisonnable : une cage dont il était maintenant au centre. La porte de cette dernière fut brusquement fermée derrière lui et les gardes s’éloignèrent de lui, sans jamais témoigner d’intérêt pour les questions qu’il aurait pu avoir à poser. Quand la dernière porte se referma derrière eux, il fut plongé dans le noir le plus complet, ce qui aurait déclenché des accès de claustrophobie à n’importe qui.

Mais il fut bientôt rassuré par l’écho de sa voix qui rebondissait sur les murs de cette froide et curieuse pièce : il n’y voyait rien mais il y avait beaucoup d’espace autour de lui, allégeant quelque peu ce sentiment d’oppression. Il était seul, vraisemblablement ; il n’y avait aucun son hormis celui de sa propre respiration, le vide absolu. Il était loin sous terre et l’activité humaine également, c’était à la fois apaisant et angoissant. Sa cage était assez spacieuse, il pouvait faire trois larges enjambées de chaque côté mais il réalisa également qu’elle était totalement vide, à l’exception d’un seau dont l’utilité semblait assez évidente. S’il voulait dormir, il allait devoir le faire à même le sol.

Qu’avait-il d’autre à faire de toute façon ? Il pouvait faire les cents pas dans sa cellule ou compter en tâtonnant de sa main chaque pavé qui constituait le sol sous ses pieds, mais le temps ne passait jamais plus vite que lorsque l’on dormait. La fatigue de la journée serait peut-être salvatrice pour lui épargner l’attente interminable qu’allaient devenir les prochaines heures. Les heures ? Les jours peut-être. Il était difficile d’avoir la moindre appréciation du temps ici bas. Personne ne vint jamais le voir, ni pour l’interroger, ni pour le nourrir. Son estomac commença d’ailleurs à le faire souffrir et les premiers signes de déshydratations firent leur apparition.

Il eut l’impression que des semaines entières s’étaient écoulées lorsqu’il entendit finalement des bruits de pas se dirigeant droit dans sa direction. En réalité, il ne devait pas s’être écoulé plus d’un jour ou deux, mais il était impossible d’être formel ; il n’était pas mort de faim ni de soif en tout cas. La porte s’ouvrit sur une silhouette encapuchonnée qui resta à bonne distance de sa cage. Les torches dans le couloir l’aveuglèrent quasiment lorsqu’il tenta de distinguer les traits de l’inconnu dont le visage était plongé dans l’ombre. Comme pour intensifier un effet dramatique, l’inconnu resta silencieux de bonnes secondes avant de faire entendre sa voix.

- « Il y a deux jours, plusieurs maudits ont déferlé dans les rues du quartier Amaranthis pour massacrer la populace. À la surprise de tous, ils ne sortaient pas de la grande Bibliothèque mais des laboratoires qu’il y avait en dessous, où des expériences interdites étaient menées dans le plus grand des secrets par les Amaranthis. Mais vous savez déjà tout cela, n’est-ce pas ? »

La voix était féminine, calme mais aussi gelée que la surface d’un lac en plein hiver.

- « Deux cent treize personnes ont perdu la vie, dont quarante-deux enfants. Les corps ont été rassemblés à la hâte pour être brûlés, sans qu’on ne puisse laisser le temps aux familles de venir identifier les victimes. Beaucoup ne sauront même pas qu’ils ont perdu un proche avant que leur absence ne les inquiète. »

Alors qu’elle tentait visiblement de faire appel aux émotions de l’Amaranthis, elle semblait elle-même en être curieusement dépourvue alors qu’elle énonçait ces informations comme on annoncerait le temps qu’il fait.

- « Vous êtes Adrian Mayr, médecin Amaranthis et propriétaire du Lys d’Argent. Vous avez su vous faire une réputation dans votre quartier de naissance, en dépit de la sombre histoire de votre famille. Vos patients ne manquent pas d’éloges à votre sujet et vous semblez vous tenir loin de tout ce qu’avait entrepris votre père avant sa mort. Pourtant, il vous arrive encore de nager parmi les gros poissons du monde de la médecine, comme lorsque vous acceptez les invitions au manoir Von Ziegler pour échanger vos dernières découvertes avec vos confrères. Est-ce que toutes ces informations sont exactes ? »

Elle ne lui laissa pas le temps de répondre.

« Le Conseil n’a semble t-il pas de temps à vous accorder, Adrian Mayr, mais je vais vous accorder le mien. »

Et cela sonnait presque comme une menace.
Adrian Mayr
Adrian Mayr
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Âge du personnage : 31 Ans
Métier : Apothicaire
Dim 18 Juil - 11:48
Difficile de s'imaginer que la vie d'un simple médecin et apothicaire dont le seul crime fut celui d'être trop curieux se retrouve dans une telle situation. D'abord malmené dans un procès où ses mots avaient semblé rebondir conte un mur complètement sourd à ses complaintes, il s'était retrouvé dépossédé de sa profession, et consigné dans sa demeure. Se voir ôté de son exercice de vie avait été une glaçante découverte pour Adrian qui n'avait put que s'en remettre à la décision du conseil. Attaché comme un criminel, il s'était efforcé de coopérer, au delà de son envie de clamer son innocence, inutile d'empirer son cas. Qui plus est, l'assignation à résidence était une bien maigre conséquence lorsque l'on sait que plusieurs fois pendant l'audition les mots "exécution" et "peine capitale" avaient été prononcés. Il semblerai que sa coopération dans les sous-sols de la bibliothèque avaient au moins joué en sa faveur.

Maigre réjouissance que la sienne, mais Adrian avait comprit qu'il devrait se contenter de ça et espérer que cette mise en examen n'aboutirai pas à de plus dramatiques décisions judiciaires par la suite.

Malheureusement pour lui, il semblait que le cauchemar de cette vie à venir ne faisait que commencer. Affublé d'un sac le rendant aveugle et confronté à de sourdes armoires à glace l'emmenant sans ménagement dans ce qui lui eut semblé être les tréfonds de la terre eux-mêmes, Adrian ne savait plus quoi penser. Une immensité de question s'orientaient autour d'un seul et unique mot dans son esprit désormais tourmenté. Pourquoi? Chaque élément allant à l'encontre d'un schéma logique venait se greffer à se mot pour se décomposer en une multitude de question qui n'auguraient rien de bon. Dans un semblant de lucidité, l'apothicaire redouta ce soudain revirement décisionnel qui l'avait éloigné du couvert de sa demeure.

Incapable de mettre de l'ordre dans sa tête, l'Amaranthis n'eut nul autre choix que d'accepter d'avoir été jeté en cage comme une bête sauvage que l'on aurai jugé dangereuse. L'obscurité totale de l'endroit le privait entièrement de ses yeux émeraude dont les pupilles cherchaient malgré tout frénétiquement un repère. Rien, le vide. Libéré de l'éventuelle claustrophobie que lui aurai procuré le lieux par cette grande raisonnante, il en vint à trouver l'espace autour de lui bien trop vaste et bien sur son esprit commença à lui faire imaginer des choses.

Le silence était presque absolu, réduisant son ouïe au simple écho de ses pas et de quelques bruissements qu'il n'aurai put jurer être réels. Comprenant le péril de cet isolement, l'apothicaire s'était d'abord concentré sur le fait de comprendre ce qui l'entourait exactement. Mauvaise nouvelle pour lui, il n'y avait ici qu'une simple cage, et pas âme qui vive. Dans d'ultimes tentatives de déceler un mouvement ou quelque chose se passant autour de lui, il s'était même efforcé à donner de la voix, n'ayant pour seule réponse que l'écho de ses mots dans le vaste espace.

Sa situation ne fit qu'aller de mal en pis tandis que la notion du temps commençait à déserter son esprit. Il passa le plus clair de son temps appuyé contre les barreaux de la prison, assis à même le sol froid des soixante huit pavés constituant son espace de vie. Dormir aurai été une solution, si seulement il en avait été capable. Privé notamment de ses décoctions aidant son système nerveux à ne pas s'agiter, l'apothicaire avait dut combattre de longues minutes de tremblements convulsifs de ses bras et une compression de poitrine le privant presque totalement de sa respiration. Chaque seconde de ses crises amplifiait l'impression que son séjour prenait des proportions démesurées. Toujours sans réponses et sans même avoir rencontré ne serait-ce qu'une personne depuis qu'il avait été jeté ici, Adrian avait réduit son nombre de question pour se concentrer sur la plus importante, que faisait-il ici? Accroché à cette interrogation comme un Ascanien à sa foi, l'apothicaire se servait de cela pour garder les pieds sur terre.

Il ne réalisait même plus que ses deux mains étaient désormais agités de soubresauts presque constant. Afin de garder un mince semblant de bon sens, Adrian se laissait imaginer qu'il ne s'était pas passé tant de temps que cela. Pour se faire, il tentait de s'écouter lui-même. Son estomac était vide, mais à part quelque crampes, rien d'insurmontable. En revanche...La soif commençait à le tirailler, au point qu'il ne faudrait pas longtemps pour qu'elle ne devienne obsessionnelle. Ainsi, la logique laissait penser à l'apothicaire qu'au moins une journée avait été écoulée sans que personne ne vienne le voir. Il n'aurai put dire plus en détail quel était la durée réelle de son enfermement. La fraicheur de l'endroit le forçait à se replier sur lui-même au mieux dans une vaine tentative de ne pas laisser la chaleur de son corps se dissiper peu à peu.

L'obscurité du lieu possédait peu à peu son esprit, faisant vaciller sa volonté de garder un semblant de connexion avec la réalité...

Tandis qu'il tentait de libérer son visage des tensions de ce manque d'hydratation et de sommeil, la porte s'ouvrit dans une sonorité aussi sinistre que salvatrice. Qui que soit la personne qui venait d'ouvrir la porte, Adrian ne put s'empêcher d'y voir le signe qu'il n'allait pas simplement être laissé pour mort dans une cage six pied sous terre, car c'est cette absurde pensée qui avait commencé à prendre le pas sur ses réflexions, bien qu'il n'y ait aucun sens logique à une telle prise de décision de la part du conseil. Adrian se redressa prestement malgré les protestations de son corps perclus de douleurs. Il ne put que constater son affaiblissement lorsque la simple vision éblouissante des lumières du couloir le força à détourner le regard et à reprendre son observation de manière plus mesurée.

Lorsqu'il parvint à égarer son regard plissé sur la silhouette, il ne put rien distinguer si ce n'est qu'il avait affaire à une personne bien trop silencieuse à son gout. Après un long moment d'attente pendant lequel Adrian avait forcé son regard vers la douloureuse lumière, la voix de la personne se fit entendre. Il avait en face de lui une femme dont le ton n'avait rien d'engageant, mais à l'aube de sa précaire situation, Adrian ne prit pas ce détail en considération. Attentif aux moindres mots et détails du discours, il ne put réprimer un frisson à l'annonce du nombre de morts causé par les exactions de certaines éminences de son peuple. Tout ce désordre et ce chaos avait été un véritable carnage, laissant derrière lui un macabre charnier de cadavre qui noua l'estomac bien trop vide de l'apothicaire. Malgré tout, il s'approcha en silence et enserra les barreaux doucement tout en essayant de distinguer la silhouette un peu mieux, sans succès à cause de ce maudit contre jour.

En silence, l'Amaranthis écouta l'énonciation des faits en ressentant plus de colère que de culpabilité. Il était innocent dans cette histoire, mais la colère qu'il avait ressentit face à Hans Von Ziegler dans ce vaste bureau avait ressurgi à cet instant, cette même colère qui l'avait poussé à détester l'obsession de son peuple pour la connaissance. Ses mains affaiblies se crispèrent sur les barreaux tandis que ses yeux restaient délibérément focalisée sur la femme qui reprit son élocution. Les renseignements qu'elle donnait étaient exact, d'une précision redoutable, mais aussi très évident pour quiconque connaissait Adrian Mayr, de près ou de loin. Il n'était pas difficile de connaitre son histoire, de la condamnation de son père à la mort de sa femme. Réalisant d'ailleurs que son épouse n'avait été nullement énoncée alors que son père oui, il y avait une évidente déduction possible entre les deux parties du discours de l'inconnue. Le sous-entendu de son statut de coupable tout désigné n'était pas difficile à remarquer. Dans un effort presque surhumain, Adrian se retint de parler, au risque de devenir désagréable, chose qu'il n'était pas sur de vouloir tenter face à la glaciale nouvelle venue.

De toute manière, l'énonciation de son père avait d'ores et déjà mis Adrian dans de mauvaises dispositions morales, car il n'était jamais arrivé que quelque chose ne se finisse bien lorsque l'on énonçait le géniteur de l'Amaranthis.


- Le Conseil n’a semble t-il pas de temps à vous accorder, Adrian Mayr, mais je vais vous accorder le mien.

Alors ainsi, cette mystérieuse personne se permettait de faire fi des décisions du conseil. Une nouvelle de bien mauvaise augure, renforcée par le ton peu engageant sur lequel avait été prononcé ces derniers mots. D'instinct, Adrian eut un imperceptible mouvement de recul, gardant malgré tout les mains sur ces barreaux. Elle lui avait posé une question, mais lui en avait bien deux cent autres à lui formuler. Pour autant, était-elle là pour lui accorder une telle audience? Peu probable. Les mains de l'apothicaire tremblaient toujours doucement à cause de la privation de médicament, détail qu'il ne s'était plus autorisé à remarquer et témoins de son affaiblissement mental et physique.

Difficile de savoir par ou commencer, alors l'apothicaire misa sur un aspect plus coopératif, qui sait, peut-être pourrait-il espérer obtenir des réponses? Un optimiste aussi improbable que nécessaire soulevait en lui cette question. La gorge séchée et l'esprit bien plus embrumé qu'il ne le pensait par le manque d'eau, Adrian du se racler la gorge par deux fois pour parler clairement.


- Vos informations sont exactes, à un ou deux détails près...Les raisons qui m'ont poussé à revenir vers la médecine ne sont pas celle que vous semblez sous-entendre.

D'abord calme en apparence, l'apothicaire réalisa qu'il employait un ton relativement hostile, et que tout son corps l'intimait à la méfiance. Devait-il se lancer dans de grandes explications? Probablement pas, pouvait-il se permettre de poser des questions? Possiblement encore moins. Malgré tout, les interrogations les plus banales torturaient trop l'esprit d'Adrian qui ne put s'empêcher de reprendre sans s'étaler sur le sujet initial. De l'extérieur, le discours calme de l'apothicaire ne collait pas avec son visage cerné et ses mains tremblante, s'il avait voulu jouer au bluff un apparent sang froid, la réalité était tout autre...

- Que me voulez-vous? et pourquoi est-ce que je me retrouve isolé de la sorte ?

Sa voix avait a nouveau trahi une certaine faiblesse, ponctuée par une sincère incompréhension de sa présence en ces lieux. Aussi présumé coupable qu'il ne puisse l'être, la sentence avait été prononcée et il aurai déjà du avoir regagné sa demeure. Aussi douloureuse qu'était la chute en désuétude, Adrian avait nourri l'espoir de regagner la confiance des gens et de prouver son innocence. Finalement, il s'était retrouvé seul, enfermé dans un simi de cachot, isolé du monde comme le pourrait-être un dangereux criminel. Une situation qu'il avait bien du mal à accepter. Prenant une profonde inspiration qui fut teinté d'irrégularité dans son souffle, Adrian reprit d'une voix presque étouffée.

- Que me voulez vous?

N'avait-il pas déjà posé cette question?
Maître du Jeu
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Dim 18 Juil - 15:06
La silhouette s’était-elle agacée du ton hostile ? Son attention était-elle focalisée sur le tremblement de ses mains agrippées aux barreaux ? Ou se concentrait-elle davantage sur les expressions qui pourraient le trahir ? Il était impossible pour l’apothicaire de le savoir. Lorsqu’elle se fit de nouveau entendre, la voix était toujours aussi calme et inexpressive.

« Je veux des réponses, d’autres réponses que celles que vous avez données au Conseil. »


Cela paraissait pourtant évident ; pourquoi le garder dans un endroit comme celui-là si ce n’était pour obtenir de lui plus qu’il n’avait été prêt à fournir jusqu’ici ? Car oui, s’il en doutait encore, tout ce qu’il avait pu dire pour sa défense n’avait visiblement pas suffi, pas pour cette voix du moins. Et qui qu’elle puisse être, elle était en mesure de passer outre les décisions du Conseil.

« De son propre aveu, le fils Von Ziegler s’est rendu dans les laboratoires pendant le massacre dans le but d’effacer toute preuve de l’implication de sa famille dans cette histoire. Il m’est difficile de croire que vous l’y avez accompagné uniquement pour contenir la menace que pouvait représenter les expériences de vos compatriotes, menace dont vous disiez ignorer l’existence quelques heures encore auparavant. »

Le prix à payer pour sa curiosité allait être plus élevé qu’il ne le pensait et il pouvait déjà dire que l’inconnue ne se satisferait pas d’entendre l’histoire de son innocence une seconde fois.

« Vous n’avez pas complètement rompu les liens avec les travaux de votre père, n’est-ce pas ? Mais sa condamnation vous a rendu méfiant et vous savez désormais qu’il est vital de faire profil bas lorsque l’on s’écarte du droit chemin. Vous avez donc passé ces dernières années à vous forger une réputation irréprochable et vous n’avez entretenu presque aucune relation avec vos pairs, espérant vous faire oublier. Et cela a fonctionné, les gens ont tellement la mémoire courte qu’ils se bousculent maintenant devant votre porte, comme s’il était aussi facile d’effacer le passé que de changer de nom. »

Elle laissa ses paroles résonner un instant de trop sur les parois de la pièce obscure.

« Personne ne sait que vous êtes ici, du moins personne susceptible de s’intéresser à votre sort. Si vous me livrez tous vos secrets alors peut-être reverrez-vous la lumière du jour. »
Adrian Mayr
Adrian Mayr
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Dim 18 Juil - 16:04
Rien, absolument rien ne trahissait quelconque information qu'Adrian aurait pu utiliser pour entrevoir un détail supplémentaire de son interlocutrice. Immobile et impassible, l'inconnue ne trahissait rien de ses origines ou de son identité, pas d'accent, pas d'intonation spécifique. Habitué à voir défiler bon nombre de personne chez lui, de tout horizons, Adrian était initié à l'exercice d'analyse rapide permettant de s'adapter à son interlocuteur, facilitant les interactions sociales sans avoir à se dévoiler. Cette attitude lui valait d'ailleurs une réputation d'homme taciturne et dénué d'émotion, mais jamais personne ne prétendait avoir vu de la méchanceté lorsqu'ils étaient venus le consulter.

L'apothicaire eut tout de même la surprise d'obtenir une réponse quant aux raisons de la présence de cette femme en face de lui, mais ce qu'elle lui révéla ne l'enchanta guère. Des réponses, d'autres réponses...Voila une bien fâcheuse situation, car Adrian n'avait en rien dissimulé ses intentions originelles et avait même joué la carte de l'honnêteté, au risque de se retrouver immédiatement sur le billaud. Face à lui se tenait donc quelqu'un qui ne s'était pas satisfait de sa plaidoirie, quelqu'un qui connaissait visiblement les recoins les plus sombres du palais. Toute cette machination posait problème à Adrian, comment pouvait-on faire fi des décisions du conseil aussi vite et en ces lieux ? Le pouvoir décisionnel de la plus haute instance de Claircombe était-elle si friable? Ou bien préféraient-ils ne pas ébruiter d'éventuelles méthodes d'interrogatoire afin de ne pas éveiller les curieux. Tout était trop flou, trop imprécis pour l'apothicaire dont la bouche semblait être devenue définitivement sèche.

Attentif aux moindres mots et détails, il eut du mal à se concentrer parfois, dérouté par la résonnance du lieu obscur qui faisait s'immiscer les paroles de l'inconnue dans sa tête de la plus désagréable des façons, se mêlant à cet incessant chuchotement de son esprit perturbé par cette captivité. Evidemment, il était difficile de croire que les intentions d'Adrian avait été louable, mais au delà de sa curiosité bien trop mal placé, l'Amaranthis avait également souhaité mettre la main sur les fameuses preuves, afin d'avoir le coeur net sur cette immonde machination dont il était devenu l'un des porteurs de chapeau.

La seconde partie de l'élocution de l'inconnue crispa les mains d'Adrian dont les phalanges vinrent blanchir le long des barreaux métallique râpeux de la cage. L'espace d'un instant, son regard s'écarquilla, déformant son visage d'une soudaine colère qui mit un temps avant de disparaitre derrière cette expression fatiguée qui le caractérisait depuis lors. La théorie que venait d'avancer l'inconnue ne plaisait guère à l'apothicaire, non seulement parce qu'elle le rapprochait bien trop de son père, mais aussi parce que cette femme à la voix de glace le plaçait sur le même archétype que son géniteur, chose qu'il détestait au plus haut point. La résonnance de ses mots sur les murs de la pièce vint empirer le ressentit.

Lorsqu'elle termina de lui annoncer qu'il devait se livrer à des confidences, l'apothicaire dut prendre sur lui pour ne pas proposer une comparaison des plus impolie pour démonter la théorie qu'il jugeait fumante de son interlocutrice. A la place, il laissa échapper sa colère en écrasant son poing contre un montant horizontal de la cage. Le fracas métallique raisonna si fort que le craquement sinistre de deux doigts de l'apothicaire passa inaperçu. Reculant de quelques pas et insensible à la vive douleur que provoquait normalement un tel choc, Adrian se redressa et laissa ses yeux se poser fixement sur l'inconnue.


- Vous me demandez d'avouer quelque chose? Ou d'inventer quelque chose que je n'ai pas fait? Votre théorie est remarquable, mais vous n'auriez pas pu être plus dans le faux qu'ici.

La colère montait et redescendait par vagues successives, une voix lui chuchotait dans la tête de nombreux messages contraires. Instinctivement, le captif se rapprocha à nouveau des barreaux pour les attraper fermement et approcher sa tête également, affichant un regard pleinement hostile dont la fatigue venait annihiler tout air menaçant que l'on aurai pu ressentir.

- Depuis la mort de Jörgen, sachez que je n'ai consulté qu'une seul fois ses travaux, et je vous parle d'un dossier n'ayant rien à voir avec ses crimes. Dit-il avec un étrange calme dénotant complètement avec son expression corporelle. Vous voulez connaitre mes intentions, alors consultez les écrits de l'audience, car je n'ai nulle vérité supplémentaire à vous exprimer.

Repenser à ce fameux dossier consulté le ramena à penser à Meryl. Il aurait d'ailleurs tout donné pour ne serait-ce que la voir à cet instant, rien qu'une petite minute...Cette réminiscence eut dont de lui accorder une fraction de seconde de répit, un secours de bien courte durée, car désormais Adrian se remémora tout ce qu'il avait laissé derrière lui, à commencer par Whisper, son compagnon canin...Plus tôt, lorsqu'il était encore à la surface, Adrian avait été au moins rassuré de pouvoir se retrouver en compagnie de son chien plutôt que d'être conduit en prison. Les récent évènements et sa perte de la notion du temps avait occulté cet aspect de sa vie. Sa crispation se renouvela, relançant les tremblement jusque dans ses doigts douloureux. Dans sa barbe et juste pour lui, Adrian marmonna.

- Mon chien...je dois voir mon chien. Dit-il dans une forme d'extériorisation de pensée indispensable à sa survie. Par sécurité, il s'abstint de donner le nom qu'il avait également en tête.

Une nouvelle fois, l'apothicaire dut lutter contre la panique. D'instinct, il se mit à chercher dans sa poche la salvatrice fiole, qu'il ne trouva évidemment pas sous ses doigts agités. Résister aux angoisses était une épreuve à cet instant, si bien qu'Adrian s'accrocha à la vision de cette silhouette comme si elle était la dernière chose qui le reliait au monde extérieur, une pensée de bien mauvaise augure qui témoignait assez bien de la précarité de sa situation.
Maître du Jeu
Maître du Jeu
Date d'inscription : 25/09/2020
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Dim 18 Juil - 17:34
Un long silence s’installa dans la pièce. La silhouette ne bougea pas d’un pouce et Adrian devina qu’elle ne perdait pas une miette de l’angoisse qui le saisissait tout à coup.

« Si vous n’avez plus rien à dire alors il est inutile que je perde davantage de mon temps ici. Un peu de solitude vous fera le plus grand bien pour remettre de l’ordre dans vos pensées. »

Elle allait amorcer un mouvement pour se détourner quand la voix forte mais inquiète de l’Amaranthis la stoppa.

«  Mais je ne vais pas vous inventer des aveux ! »
«  La prochaine fois que je viendrais vous voir, vous n’inventerez rien, vous vous contenterez de la vérité. J’ai le pouvoir de faire de votre vie un cauchemar dont vous ne vous réveillerez jamais, de vous briser morceau par morceau jusqu’à ce qu’il ne reste rien de la personne que vous étiez autrefois. Demandez-vous si les gens que vous cherchez à protéger en valent la peine. »

Cette fois, aucune parole, aucun cri, aucune supplication ne la détournèrent de la sortie. Lorsqu’elle ferma la lourde porte derrière elle, elle emporta la lumière avec elle.

L’obscurité. Le silence. Encore, et encore. Adrian fut incapable d’estimer combien de temps s’écoula jusqu’à ce qu’on daigne lui apporter de l’eau et de la nourriture. Le garde qui lui avait amené sa maigre pitance était resté silencieux comme la mort. Apparemment, les ordres étaient de minimiser tout contact humain avec lui, et l’on pouvait dire qu’ils faisaient preuve d’une discipline exemplaire à ce sujet. Bien vite, Adrian cessa de s’inquiéter qu’il puisse mourir de soif ou de faim dans cet endroit, mais une autre inquiétude avait pris le pas sur tout le reste : est-ce que tout ceci aurait une fin ?

Son cerveau se mit bien vite à meubler le silence autour de lui et des boules lumineuses commencèrent à danser devant ses yeux aveugles, comme s’il cherchait à garder un minimum d’activité cérébrale. Les voix dans sa tête - mais qui paraissaient plus vraies que nature – étaient tantôt réconfortantes, tantôt persécutrices. Allongé sur le dos, il lui arrivait parfois de sentir très distinctement le museau de Whisper contre la paume de sa main ; une seconde cette sensation était merveilleuse, la seconde d’après elle le plongeait dans le désarroi le plus total lorsqu’il réalisait que rien de tout ceci n’était réel.

Quant à la silhouette encapuchonnée, elle revint le voir régulièrement. Une fois par jour estima t-il, peut-être plus. A vrai dire, elle espaçait toujours ses visites lorsqu’il se montrait un peu trop vindicatif dans sa façon de s’adresser à elle, comme si elle cherchait à le punir pour son insolence. Mais lorsqu’elle était là, la lumière entrait dans la pièce et il avait enfin autre chose à contempler que les ténèbres. Les questions qu’elle lui posait étaient invariablement les mêmes. Elles voulaient savoir qui était l’Ancien, ce qu’il savait sur lui, quels étaient les noms de ses complices et le véritable but de leur organisation. Et inlassablement, Adrian répétait la même chose. Tout ce qu’il savait, il l’avait déjà dit. En long. En large. En travers. Et il ne savait pas grand-chose. La silhouette finissait toujours par repartir, tout en laissant planer l’affreux doute que cette fois peut-être elle ne reviendrait jamais.

Lors de sa septième visite - Adrian les comptait pour ne pas perdre le fil distordu qu'était devenue sa vie - elle se décida enfin à lui dire autre chose.

« Votre obstination impacte d’autres personnes que vous, vous savez. Votre mère ne semble pas endurer aussi bien que vous les conditions de sa détention. »
Adrian Mayr
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Dim 18 Juil - 18:33
Il y avait quarante deux lumières dans cette pièce, soit une quantité insuffisante par rapport aux nombres de pavés, soixante huit ! Adrian avait revérifié son comptage une bonne dizaine de fois, juste au cas ou. De toute manière, l'Amaranthis ne pouvait les déplacer, ces foutues lumières ! elles s'amusaient à danser, aller, venir, s'éteindre, s'allumer. Quel étrange ballet que celui de ces lucioles qui n'éclairait rien d'autre qu'elles-mêmes devant les yeux ouvert de l'apothicaire. D'ailleurs, il n'était plus bien sur d'en avoir compté autant, sa nouvelle théorie revenait à s'imaginer qu'il y en avait plutôt trente quatre mais qu'elles étaient changeante, Pile la moitié du nombre de pavés, de quoi les répartir une dalle sur deux dans sa nouvelle résidence. Un heureux hasard qui tombait rudement bien, dommage qu'Adrian ne pouvait pas déplacer ces foutues lumières...

Allongé, puis debout, puis assis, aucune position n'était confortable. Parfois, le vide emplissait son esprit, puis la seconde -ou l'heure- d'après revenait cette voix qui lui disait de tout raconter. Pas celle de l'inconnue non, celle dans sa tête, la plus stridente des trois, celle qui n'intervenait qu'en cas d'impatience, souvent annonciatrice d'un imminent retour de l'étrange tortionnaire. Adrian préférait l'autre voix, celle de l'égarement, celle qui le dissociait du temps et de l'espace, qui lui autorisait une discussion ou deux avec des proches ou qui lui murmurait de lancer cette balle à son chien. Dans ces moments, Adrian se redressait et observait l'autre extrémité de la cage. Convaincu d'y entendre le haletant souffle de Whisper, il se dirigeait prestement vers le coin opposé, pour n'y découvrir que du vide à nouveau. Puis ses yeux s'ouvraient sur l'obscurité, et il réalisait qu'il venait simplement de rêver sans esquisser le moindre mouvement. Il aimait beaucoup moins cette troisième et ultime voix cela dit.

Aucun mot autre que les aveux attendus ne semblaient pouvoir contenter l'impassible inconnue. Dans ses plus grand moment de lâcher prise, Adrian s'était pris à employer un langage emprunt d'une certaine haine. La disparition de la geôlière pendant un long moment lui soulignant qu'elle ne reviendrai jamais lui avait rapidement fait comprendre qu'il n'était pas bon de jouer au plus malin ici. Fort heureusement, une once de bon sens semblait s'emparer de l'esprit torturé d'Adrian dès lors que la faible lumière pénétrait dans la pièce, dévoilant encore et toujours cette silhouette.

Il avait bien tenté de lui poser des question personnelles comme son nom, mais rien n'y avait fait. Toujours ces mêmes interrogations, toujours ces mêmes aveux, identique à ceux qu'il avait déjà formulé. Chaque visite de l'inconnue était devenue son point de repère, qu'elle tarde ou non à venir. Ainsi, c'est au septième jour de la semaine qu'elle se décida à changer de discours. Adrian s'était péniblement approché de la cage, comme à chaque fois qu'elle lui rendait visite. Paradoxalement, l'étrange soulagement de voir quelqu'un et de ne plus être seul lui créait toujours cet étrange sentiment de confort, doublé d'une viscérale envie de savoir quelle serai le son de la voix de cette inconnue s'il lui arrachait les ongles un par un. *

Comme si tout était devenu rituel dans son existence, Adrian s'accrochait toujours les mains aux barreaux, toujours aux exactes mêmes emplacements, chaque fois que sa tortionnaire daignait venir à sa rencontre. A la lumière, il dévoilait un visage émacié malgré le fait qu'ils ne le laissent pas mourir de fin. Une trace de griffure massive parcourait sa joue gauche, résultat d'une simple frustration de ne pas pouvoir entretenir sa barbe autrefois impeccable comme il le faisait tout les quartes jours en temps normal. Après avoir gratté au sang, l'apothicaire s'était résolu à laisser son visage en paix, après tout, il ne lui avait rien fait non?

A la secondes ou les mots de l'inconnue différèrent, l'attention de l'apothicaire se remarqua dans une gestuelle non contrôlée, presque impulsive, qui le fit se rapprocher de la cage. Il sentit ses jambes défaillir dès lors que la mention de sa mère parvint à ses oreilles. De nouveau agité, troublé, l'apothicaire eut comme l'impression que chaque parcelle de son monde était en train de s'effondrer sur ce qui était déjà les vestiges d'une existence respectable. Son esprit ben trop actif à cause de sa déroute mentale, il eut immédiatement l'image de sa mère, enfermée dans l'exacte même cage que lui. D'ailleurs, il tourna la tête pour tenter de percer les ombres à la recherche de Magda. La terrifiante obscurité de sa cage à peine éclairée par l'encadrure de la porte l'intima à rediriger son regard vers sa geôlière, mais surtout vers la lumière.

Pour la première fois depuis un moment, ses mains ne se placèrent pas au même endroit sur les barreaux, il garda même une certaine distance avec eux. La silhouette de l'Amaranthis, auparavant si droite et digne, n'était plus que l'ombre de son passé. Appuyé sur une seule jambe bien que l'autre ne repose aussi au sol, Adrian paraissait titubant, fébrile et prêt à défaillir à n'importe quelle seconde. Pourtant, ses yeux était écarquillés, ignorant la douleur qu'impliquait la brulure lumineuse pour ne fixer que sa geôlière. Ses mains ramenés contre ses flanc, on pouvait y distinguer ses doigts bouger frénétiquement comme s'il pianotait le vide.

Dans sa tête, les trois voix s'étaient mise en route. Habituellement, elle ne se manifestaient pas lorsqu'Adrian faisait ses aveux, mais la soudaine menace de s'en prendre à sa mère avait fait jouer un tout autre jeux dans sa tête.


" Dis lui ce qu'elle veut entendre, invente! " Lui susurra la première

" Cache toi dans les ombres, tu n'as rien à faire dans ce monde, cette lumière brule, insulte la pour qu'elle ne revienne jamais ! " Lui cria la seconde

" Tue la à la première occasion qui se présente " Lui hurla la dernière.

- NON! Cria Adrian pour ramener le silence dans sa tête, se moquant de l'interprétation que pouvait avoir l'inconnue de cette réponse. Sa voix se répercuta sur les murs de la pièce, accentuant la brisure qui avait raisonné dans sa voix.

Cette négation avait au moins permis à l'apothicaire de revenir au fil de la réalité. Pour combien de temps? Aucun moyen de le savoir. Il fut tenté de se retourner pour s'enquérir de l'état de sa mère cependant, mais il devait se résoudre à attendre que sa geôlière ne soit partit que ce geste ne soit prit pour une quelconque véhémence et ait pour conséquence une absence plus longue. Puis il se rappela que sa mère n'était pas avec lui...Le plus important, ici et maintenant, était de ne pas s'en prendre verbalement à l'inconnue, il ne pourrait se permettre longtemps d'affronter l'obscurité ainsi.

Son regard exprimait des émotions contraire, toutes rythmées par une évidente faiblesse morale et mentale. Instinctivement, Adrian baissa la tête et écrasa doucement son front sur les barreaux de sa cellule.


- Je vous ait dit tout ce que je savais...Alors pourquoi vous en prenez vous à mes proches...

Si la raisonnante n'avait pas amplifié les propos de l'apothicaire, il aurait été difficile de les identifier clairement. Sa main gauche se leva pour passer sur sa joue encore intacte. Le contact de sa barbe irrégulière l'agaça, mais trop peu pour qu'il ne bouge de sa position à demi affalé contre les barreaux. Comme s'il se rappelait d'un geste qui le raccrochait à sa vie d'avant, Adrian joua distraitement avec sa barbe.
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Dim 18 Juil - 21:17
« Vous ne m’avez rien dit et je n’ai d’autre choix que de chercher mes réponses ailleurs. »
« Et vous choisissez celle qui a conduit son propre mari à l’échafaud pour me protéger de tout ce qui pouvait me rapprocher de mon père ? »

Le rire d’Adrian aurait glacé le sang de n’importe qui l’ayant connu, tant il ne semblait pas lui appartenir. Fidèle à elle-même, la voix n’eut pas de réaction particulière. Sa réponse fut néanmoins troublante de sincérité. Rêvait-il ou semblait-elle même s’être adoucie ?

« Je choisis ce qui est le plus susceptible de vous faire réagir, puisque votre propre vie semble vous désintéresser. »

« J'ai suivi ce maudit fils Von Ziegler pour mettre la main sur les preuves avant lui ! C'était sans compter sur l'élite de la garde et leur intervention cérébralement ralentie. Résultat ? Mes aveux et votre absence de preuve, je n'ai rien pour vous ! »

La voix resta silencieuse en long moment.

« Sur ce dernier point, vous vous trompez. »

Elle allait tourner les talons, sans prévenir, comme elle le faisait chaque fois qu’elle estimait n’avoir plus rien à tirer de leurs « conversations » mais Adrian se jeta presque contre les barreaux pour la retenir.

« Attendez ! Pourquoi dites vous cela ? »

La silhouette encapuchonnée sembla hésiter à quitter la pièce, ce qui n’arrivait jamais d’ordinaire, et la voix de l’Amaranthis se fit soudain suppliante. Il répéta plusieurs fois cette question avec empressement mais ne put que regarder la lumière s’effacer à nouveau lorsqu’elle referma finalement la porte derrière elle. Au cœur de l’obscurité, il entendit une nouvelle fois sa voix, claquant comme un fouet par delà la lourde porte qui le séparait du monde extérieur. Pour la première fois depuis leur rencontre, elle semblait en colère.

« Nourrissez-le correctement. »

Sans doute s’adressait-elle à un garde. Il n’y eut pas de réponse et le silence s’imposa de nouveau à lui. Les repas qui lui furent servis ensuite ressemblaient davantage à ce qu’il avait connu par le passé : de la viande, des légumes, du pain et des fruits. Plus jamais on ne lui resservit ce gruau infâme et sans consistance qui lui donnait à peine l’énergie de se tenir debout dans sa cage pour faire les cents pas.

Cette maigre amélioration dans son quotidien fut contrebalancée par l’absence de visite les jours suivants. Il se repassait les derniers mots échangés en boucle pour comprendre ce qui avait dissuadé  la silhouette de revenir lui parler. Quelque chose avait changé ce jour-là, sans qu’il n’arrive à s’expliquer ce ressenti. Comme si, d’une certaine façon, elle avait finalement obtenu de lui ce qu’elle voulait, alors même qu’il s’était borné à répéter exactement la même chose que les six fois précédentes. Et si… l’objet de cet interrogatoire infernal n’était pas et n’avait jamais été sa culpabilité ? Une hypothèse qui tournait de plus en plus dans son esprit, et qui avait de quoi le rendre fou pour de bon.

Et le temps distordu s’étira davantage, plus qu’il ne l’aurait jamais cru possible. Il n’avait plus que la fréquence de ses repas comme repère temporel, tout le reste lui avait été enlevé. Et puis un jour, la porte s’ouvrit à nouveau sur la lumière, une lumière plus éclatante que d’ordinaire. Là, dans l’encadrement de la porte, la silhouette encapuchonnée se tenait avec une chandelle à la main, dévoilant le visage d’une jeune femme dont les traits délicats mais durs à la fois semblaient façonnés dans le marbre. Elle posa sur lui des yeux si clairs qu’ils lui évoquèrent un ciel d’été sans nuage, un ciel qu’il n’avait plus revu depuis bien longtemps. Doucement, elle s’approcha de sa cage.

« Chaque fois que j’entre dans cette pièce, je m’attends à retrouver votre cervelle étalée sur le sol de cette cage. Je vois que vous n’avez toujours pas succomber à la tentation d’en finir pour de bon. »

Elle n’était pas là pour lui poser ses sempiternelles questions, visiblement. Lentement, elle déposa la chandelle sur le sol, à portée de bras s’il souhaitait s’en saisir. D’un geste, elle sortit également un petit livre à la couverture de cuir noire qu’elle posa juste à côté avant de reprendre sa position, à peu à mi chemin entre les barreaux de la cage et la sortie.

« La route qui vous attend est pleine de ténèbres et vous méritez que quelqu’un vous montre la lumière. »

Et sans un mot de plus, elle disparut comme elle était venue. Cette fois en revanche, la lumière était restée dans la pièce. À la lueur de la chandelle, et s’il ouvrait l’ouvrage qu’elle avait déposé près de la cage, Adrian y verrait plusieurs prières adressées à Providence ainsi que le récit de son combat contre Pernicie au fil des âges. Lui avait-elle donné cela en espérant le convertir à sa foi, aussi folle que cette entreprise puisse paraître ? Ou juste pour lui offrir l’opportunité de rééduquer son esprit à faire autre chose que de se laisser aller à l’oubli ? Il avait le reste de sa vie pour se poser la question.
Adrian Mayr
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Dim 18 Juil - 23:45
Toutes les différences dans le dialogue entamé avec l'inconnue avaient mis en ébullition l'esprit instable de l'apothicaire. S'il n'y avait eu que ça, passe encore, il avait de toute manière tout le loisir d'analyser ce soudain changement de comportement. Ce qui en revanche ne manqua pas de le dérouter, ce fut la présence de ces fameux repas dont chaque aliment semblait salvateur à Adrian qui n'en pouvait plus du gruau, au point d'en avoir réduit sa consommation à un repas sur deux. D'abord méfiant, l'apothicaire avait finit par se jeter sur la nourriture comme l'affamé captif qu'il était. Chaque bouchée avait eu don de lui redonner des forces. Il n'avait pas le cerveau assez en état de marche pour se rationner en cas de soudain arrêt de ces repas qui lui paraissait exquis. Naturellement, une forme de reconnaissance venait de s'additionner au fait que sa geôlière était celle qui lui permettait de dissiper le vide.

De retour dans son absence de lumière, Adrian eut tout le "loisir" de penser à ce sentiment contraire. De la haine au besoin de la revoir, l'Amaranthis passait par des états opposés qui le menèrent tout droit dans une nouvelle crise d'angoisse. Cela faisait longtemps qu'il n'en avait pas fait, du moins, c'est ce qu'il croyait, refusant ainsi de constater que les tremblements de ses bras l'assaillait plusieurs fois par jours. A genoux au sol, Adrian dut faire face à une bien plus intense attaque cette fois. Son coeur tambourinait dans sa tête tandis que les trois voix revinrent de concert s'adonner à un brouhaha qui força l'apothicaire à leur hurler de se taire. Seul l'écho de sa propre voix vint s'ajouter à ce tumulte, amplifiant le procédé. La bave au lèvres a force de serrer les dents et d'exulter son mal être, Adrian reposait sur ses genoux et ses coudes, son front encombré de mèches de cheveux en désordre venait se coller à son front ruisselant de sueur. Une fois de plus, il porta une main à sa poche, pour n'y trouver que du vide à la place de cette fiole. Après un dernier cri de souffrance, l'apothicaire s'écrasa au sol sur le coté, la respiration haletante pendant de longues minutes encore après cela.

Depuis longtemps maintenant Adrian ne s'était plus autorisé de penser à sa vie d'avant. Pourtant aujourd'hui, quelque chose le ramena à sa propre histoire. Il s'était détaché de tout ce qui le rapprochait de son père, puis le destin l'avait ramené sur les chemins de la médecine, alourdi par un deuil trop difficile à porter pour lui. Dans sa volonté de faire les choses dans l'ordre durant l'attaque, il s'était retrouvé affublé du rôle de coupable, quelque chose qu'il n'arrivait toujours pas à accepter. A ce jour, il se retrouvait depuis une éternité dans ce lieu sombre avec pour seul réconfort sa propre tortionnaire, tout ça parce qu'elle était la seule personne à lui adresser la parole et à lui offrir un peu de lumière. Chaque fois que son esprit s'éprenait à divaguer à ce sujet, Adrian se remémorait qu'elle était aussi à l'origine de son enfermement.

Chaque pas qu'il faisait dans sa cellule devenait une journée entière, chaque crise d'angoisse durait pour lui une semaine, chaque souvenir joyeux le torturait pendant ce qu'il croyait être des mois.

Puis la porte s'ouvrit de nouveau, offrant à l'apothicaire un éblouissement dont il n'était pas capable de supporter les effets, forcé de cacher ses yeux profondément creusés et marqués de cernes. De nouvelles marques de griffures étaient apparues sur son visage marqué par une barbe bien plus fournie et désordonnée qu'elle ne l'avait jamais été, presque au même emplacement que les premières, mais de nouvelles marques s'étaient également invitées sur ses bras notamment ou l'on avait l'impression qu'un animal sauvage avait carrément été faire ses griffe sur son avant bras droit, et ce il y a quelques jours à peine.

S'efforçant de ne rien rater de ce bain de lumière, les yeux d'Adrian s'écarquillèrent lorsqu'il vit que l'inconnue portait dans sa main une chandelle qui, pour la première fois depuis maintenant trop longtemps, montrait un visage à Adrian, et pas n'importe lequel, celui de sa tortionnaire. Parce que son cerveau était actuellement fermement encombrés d'idées noir et de trouble, l'apothicaire eut la fausse conviction d'avoir été capable de deviner le vrai visage de sa geôlière avant cette inattendue révélation. Ce n'était pas le cas, il le découvrait actuellement au travers de ses yeux à demi voilés dont l'éclat émeraude se faisait désormais timide. La dureté de ses traits venait s'ajouter comme la touche finale à ce dessin que l'apothicaire s'était fait de celle qui le retenait captif. Interpellé par cette soudaine apparition à découvert, Adrian était de nouveau venu se coller aux barreaux de sa cage.


- Chaque fois que j’entre dans cette pièce, je m’attends à retrouver votre cervelle étalée sur le sol de cette cage. Je vois que vous n’avez toujours pas succomber à la tentation d’en finir pour de bon.

Ce qu'elle ne savait pas, c'est que c'était au moins la quatrième fois depuis sa dernière venue qu'Adrian répandait la cervelle de son propre reflet halluciné sur le sol de cette cellule. Il avait même perdu une fois, se réveillant avec l'intime conviction de devoir ramasser sa boite crânienne pendant de longues minutes avant de réaliser qu'il venait simplement de faire un rêve. L'apothicaire s'abstint de commentaire, beaucoup trop intrigué par ce visage qu'il découvrait enfin. Il avait complètement oublié les raisons qui l'avait poussé à la retenir la dernière fois, mais aujourd'hui, sa curiosité atteignait des sommet face au visage impassible de l'inconnue.

C'est avec un regard peint d'une totale incompréhension qu'il observa le geste de la femme qui se tenait en face de lui. La chandelle désormais au sol près de lui, Adrian eut l'impression que son environnement venait de se transformer, rendant le fond de sa cache obscure hostile quant à sa survie. Lorsqu'elle posa le livre au sol, Adrian n'esquissa aucun geste, si ce n'est celui de suivre du regard les mouvements de l'inconnue.


- La route qui vous attend est pleine de ténèbres et vous méritez que quelqu’un vous montre la lumière.

Un lourd silence s'abattit alors qu'Adrian n'eut aucune volonté de parler. Pourquoi ne la retenait-il pas? Simplement parce que son esprit étriqué n'avait plus la ressource nécessaire pour gérer deux situation à la fois, et le caractère inédit de cette lumière était un pas vers quelque chose de bien trop effrayant pour qu'il ne puisse penser à autre chose. Pendant de longues minutes, Adrian resta seul face à ce livre, sans bouger, laissant inutilement la chandelle se consumer lentement. Réagissant dans un élan de bon sens, l'apothicaire rapprocha la chandelle pour la passer soigneusement entre les barreaux.

Après l'avoir déposé comme le plus précieux des trésors près des barreaux de sa cage, l'apothicaire n'hésita pas avant de se saisir du petit livre. Le contact avec le cuir de l'ouvrage provoqua un étrange sentiment chez l'apothicaire, il ne sut pas l'identifier tant tout ce qui le rattachait à son quotidien d'homme libre lui paraissait loin. D'un geste fébrile mais étonnement contrôlé, il s'appuya contre les barreaux, dos à la sortie, réfugié dans son mince dôme de lumière vacillante comme un oiseau dans son nid. De ses deux mains, il ouvrit avec soin le petit livre.

En quelques lignes, il fut évident à Adrian qu'il avait à faire à des écrits religieux. Alors que ses yeux dévoraient les lignes une à une, la colère monta dans le coeur de l'apothicaire qui jeta rageusement ce livre qui, pour lui, était un vaste ensemble d'illusions mystiques. Pourtant, il ne fallut pas plus de quelques secondes à Adrian pour regretter son geste. Elle lui avait apporté la lumière ainsi que de la lecture. Ses derniers mots avaient été en adéquation avec le petit livre religieux. Alors c'est tout, il avait simplement à faire à une fanatique en mal de camarade pieux? Aussi atteint que soit le cerveau d'Adrian, cette théorie ne trouva jamais de validation. Il y avait autre chose.

Après ces quelques secondes, l'apothicaire s'était finalement jeté sur le livre comme s'il renfermait les plus grand secret de l'humanité. Revenant sur son coin de lumière, Adrian réouvrit le livret à la hâte, s'efforçant de contenir sa colère pour découvrir le contenu de ce fameux ouvrage. Quel qu'en soit le contenu, l'apothicaire ne réalisa pas tout de suite que ce soudain retour à la civilisation avait dont de réveiller des choses en lui. Rien à voir cependant avec le contenu à proprement parler du livre, qui ne trouvait toujours pas d'écho dans l'esprit même torturé d'Adrian. Il lut suffisamment vite pour en consulter chaque détails, chaque mot, se nourrissant non pas du sujet mais de ce mince filet qui le raccordait désormais à la réalité au travers de ce petit objets, habituellement insignifiant.

Lorsqu'il arriva à la fin, la chandelle avait encore un peu de temps de vie. Tournant la toute dernière page pour ne simplement que découvrir les derniers feuillet vierge servant à la reliure, Adrian laissa inconsciemment trainer ses doigts sur cette ultime feuille, ce qui lui valut de simplement se couper avec le papier. Une goutte de sang tomba sur le coin du dernier feuillait et se répandit quelque peu jusqu'au bord. Adrian contempla son fluide vital aux lueurs de sa timide lumière avec un regard primaire et curieux. Il leva alors sa main au dessus de la dernière feuille vierge et serra le poing sur son pouce ensanglanté, faisant couler un peu plus du liquide rouge sur l'ouvrage. Satisfait de son œuvre, il écarta son pouce du dessus du livre pour simplement y laisser le majeur, avec lequel il étira quelques tâches pour former un seul et unique mot.


« Pourquoi »

Cette action le fit rire comme un dément alors qu'il refermait avec un soin démesurément absurde l'ouvrage. Il laissa tomber sa main au sol, libérant le livre qui se posa juste à coté de lui hors de la cage. Toujours dos à la porte, l'apothicaire attendit que cet étrange cadeau qu'avait été la chandelle ne se consume pour retrouver le réconfort des ténèbres, ceux dont il n'avait pas besoin de comprendre le sens. Il restera ainsi un long moment, peut-être des heures, peut-être une journée entière, sans manger, et sans boire. Parfois, il murmura un étrange air, de manière décousue quoique très juste, celui d'une chanson sur laquelle il avait eu la chance de danser, il n'y a pas si longtemps que ça.
Maître du Jeu
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Lun 19 Juil - 0:54
Lorsque la porte s’ouvrit à nouveau, ce fut pour laisser entrer deux gardes. C’était inhabituel, nota l’Amaranthis. D’habitude, il était seul à venir lui apporter son repas. Qu’est-ce qui avait changé cette fois ? Était-ce parce qu’il n’avait rien touché de ses précédents repas ? Non. Qui s’en souciait ? La silhouette encapuchonnée s’en souciait peut-être, elle. Peut-être les avait-elle envoyé pour le forcer à manger et…

Pour la première fois depuis qu’il était entré ici, la porte de la cage fut ouverte et les deux gardes l’empoignèrent chacun par un bras. Et comme la première fois, il fut menotté et un sac fut mis sur sa tête. Il allait sortir d’ici. Il ne savait pas où on l’emmenait mais il allait sortir d’ici, enfin. Mais à la place du sentiment de soulagement qu’il s’était attendu à ressentir, ce fut la peur qui prit le pas sur tout le reste. Où l’emmenait-on ? Pourquoi ?

Pourquoi ?

Pourquoi ?

Une question qui tournait en boucle depuis le premier jour. Une question à laquelle personne n’avait encore voulu répondre. Voulait-il seulement qu’on lui réponde ? N’était-il pas trop tard pour cela ?

On lui fit monter un escalier en colimaçon. Il tenait à peine sur ses jambes affaiblies par le manque d’exercice quotidien, si bien qu’il fut presque trainé par les deux gardes. Et lorsqu’il crut que l’ascension était enfin terminée, on le fit monter encore plus haut, toujours plus haut. Il avait eu l’impression de descendre dans les entrailles de la terre lorsqu’on l’avait amené dans sa cellule, il avait maintenant l’impression de gravir les étoiles.

Lorsque le sac fut ôté de son visage, il découvrit une chambre richement décorée et spacieuse ; un lit à baldaquin, une coiffeuse… mais son attention fut immédiatement attirée par l’immense fenêtre qui donnait sur un petit balcon. Il faisait nuit noire dehors mais il aperçut les lumières de la ville en contrebas. La vue était magnifique. Et il était manifestement toujours dans le Palais du Gouverneur, dans les plus hautes tours de celui-ci d’ailleurs.

On lui retira ses menottes, ce dont il ne prit pas conscience tout de suite, trop confus par la brusquerie de ce changement de décor. Il aurait presque pu chercher à se recroqueviller sur lui-même si une force invisible ne le maintenait pas en place. Les deux gardes s’écartèrent de lui mais restèrent à proximité de la porte, sans lui porter plus d’attention. Ils n’étaient là que pour s’assurer qu’il ne s’échappe pas dans les couloirs du Palais.

Au bout de quelques secondes, une petite blonde au visage doux entra dans la pièce en se raclant doucement la gorge. Lorsqu’il posa ses yeux émeraudes sur elle, elle lui sourit. C’était presque douloureux de voir quelqu’un lui sourire. En réalité, tout était douloureux. Se tenir debout était douloureux. Respirer était douloureux. Vivre était douloureux.

« On m’a envoyée m’occuper de vous, monsieur Mayr. Voulez-vous que je vous fasse couler un bain ou… préférez-vous manger avant ? Avez-vous besoin de quoi que ce soit ? »

Elle le regardait avec hésitation, comme si elle ne savait pas très bien comment se comporter avec lui. Son sourire resta toutefois en place, apaisant.
Adrian Mayr
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Lun 19 Juil - 2:06
Que faisait-il ici, quelle était cette surnaturelle direction que venait de prendre à nouveau le vie de l'apothicaire dont le regard peinait encore à s'accoutumer à la luminosité tamisée de cette pièce dans laquelle il avait été conduit. Longuement son regard s'était attardé sur cette fenêtre lui offrant une vue imprenable sur cette citée qu'il ne pensait jamais revoir. Son corps ne réagissait à rien, seul ses yeux tentaient de démêler l'interminable nœud qui venait de se souder dans son esprit. Les voix dans sa tête étaient elles toujours bel et bien présente, mais il avait apprit à les ignorer lorsque le besoin de se concentrer se faisait primordial. Généralement, il les faisait taire lorsque la porte de sa geôle souterraine s'ouvrait sur la silhouette encapuchonnée de l'Inconnue. Son estomac aussi se noua, car il ne trouva nulle obscurité dans laquelle il supposa se retrouver de nouveau plongé tôt ou tard.

Une envie urgente de simplement se libérer de ce nouvel environnement s'était emparé de son esprit, le dirigeant mentalement vers le vide obscur seulement éclairé d'une multitudes de points lumineux que lui offrait cette imprenable vue. Son corps lui, ne témoigna aucun mouvement en adéquation avec ses macabres pensées. Immobile, il ne put que s'imaginer dégringoler à flanc de muraille de cette tour dans laquelle on l'avait déplacé. Incapable de comprendre les raisons de cet paralysie, il ne réalisa pas que les mots qui raisonnaient dans sa tête venaient de l'empêcher de simplement sauter. Des mots parlant précisemment du lieux dans lequel il se trouvait.


"Un jour, je vous emmènerai là-bas"

Il n'eut d'ailleurs pas le loisir de s'attarder plus longtemps sur ces réminiscence, car une voix venait de troubler son introspection.

- On m’a envoyée m’occuper de vous, monsieur Mayr. Voulez-vous que je vous fasse couler un bain ou… préférez-vous manger avant ? Avez-vous besoin de quoi que ce soit ?

C'est seulement après avoir entendu la voix de la jeune femme blonde au sourire enjôleur qu'il réalisa que ses yeux étaient posés sur elle. Avant cela, une sorte de voile avait laissé trainer une rémanence dans son esprit, le laissant convaincu qu'il était encore en train de regarder la fenêtre jusqu'alors. Il mit un temps fou avant de réellement détailler les traits du visage de cette personne. L'Inconnue n'était pas là, et à sa place, une autre personne dont Adrian ignorait l'identité. Mais ce n'était pas l'Inconnue. Sans même donner l'impression d'avoir écouté ce qu'elle avait à lui dire, Adrian prit soudainement la parole, dévoilant une voix partiellement cassée pour des raisons qui n'avaient eu pour témoin que lui-même.

- Où est-elle?

Le sourire de la blonde vacilla quelque peu tandis qu'elle regardait autour d'elle.

- " Elle " ? s'enquit-elle finalement.
- L'Inconnue, où est-elle. Précisa Adrian avec une insistance non feinte.
Après quelques secondes, la jeune femme sembla comprendre ce que sous entendais son interlocuteur avec une moue un peu gênée.
- Oh... Vous voulez parler d'Erzebeth ? C'est elle qui m'a demandée de m'occuper de vous. Elle pensait qu'un visage amical serait préférable à... La gêne de la blonde s'accentua, détail que l'inconscient d'Adrian remarqua. Le temps que vous preniez vos repères.
- Erzebeth? Oui, c'est peut-être son nom...où est-elle?

La question laissait sous entendre que l'apothicaire n'avait strictement rien écouté, mis à part le nom de l'Inconnue. Les yeux émeraudes de l'Amaranthis n'avaient de cesse de dévisager la blonde dont le sourire finit par s'effacer.

- Elle... n'est pas là.
- Oh...mais pour..Le mot sembla lui bruler la langue, si bien qu'il stoppa net sa question à venir. D'accord.
- Puis-je vous faire couler un bain ? Reprit-elle après un petit raclement de gorge et une tentative de regain de contenance.
- Vous allez éteindre les lumières ? Répondit Adrian l'instant d'après.
-Euh... non. Pourquoi ? Elle ponctua sa phrase d'un petit rire, comme si Adrian venait de plaisanter. Ce ne serait pas très pratique, n'est-ce pas ?
- Pas pratique non...Murmura-t-il avec un sourire dénué d'expressivité. Mais vous allez en éteindre au moins quelques unes, n'est-ce pas ? reprit-il d'un ton qui suggérait une requête.
- Cela vous mettrait-il à l'aise ? N'hésitez pas à me demander. Je vais aller en éteindre quelques unes.

Sans plus attendre, la jeune femme s'affaira à éteindre plusieurs lumières de la pièces, une par une, lentement et avec une attention toute particulière sur les réactions d'Adrian, consultant ainsi son avis quant à la luminosité de la chambre. Une fois avoir atteint un niveau d'obscurité qu'il jugea suffisant, Adrian l'interrompit en s'avançant d'un pas vers elle, la main en avant comme pour la stopper avant qu'elle ne renforce l'obscurité du lieu. Son regard à demi voilé toujours rivé sur la blonde, Adrian reprit la conversation.

- Et l'Inconnue, elle va venir ?
- Je ne pense pas que ce soit prévu, non.

Un visage défait accompagna cette réponse, mais Adrian ne rajouta rien. Aussi naturellement que si la conversation en était encore à la première phrase, l'apothicaire parla à nouveau.

- Un bain...pourquoi pas..
- Laissez-moi tout préparer ! Je n'en ai pas pour longtemps !

La joie et la bonne humeur dont faisait preuve la jeune femme déroutait Adrian au plus haut point. Comme heureuse de rendre ce service de lui faire couler un bain, cette étrange femme ressemblait à la touche finale d'un tableau bien trop parfait pour être sincère. Une chose était sure, Adrian n'avait nullement le sentiment d'être libre, et les chaines qui enserraient son esprit n'avait alors de cesse de se resserrer plus encore.

Pour autant, l'Amaranthis resta entièrement pacifique, laissant seulement son regard se perdre sur tout ce qui composait cette chambre. De l'obscurité à la lumière, du vide à l'abondance. Il venait de passer d'une prison à l'autre, sans qu'aucune explication ne lui soit donné. Alors quoi? Désormais il avait le droit de se retrouver à disposer d'un confort peut-être encore plus grand que celui qui avait été le sien? Une seule et unique question se répétait de concert dans sa tête, par les trois passagers qui occupaient encore son esprit.


" Pourquoi "

Il ne prit pas la peine de poser la question, car l'Inconnue était la seule à avoir la réponse, et elle ne lui avait pas donné, nul besoin de s'épuiser après tout. Conscient que tout pouvait être amené à disparaitre d'une seconde à l'autre, Adrian s'essaya à garder le pas sur la réalité et ôta ses vêtements dont l'odeur aurait été insupportable pour celui qu'il avait été avant ce supplice. Il ignora complètement le regard de la jeune femme et se dirigea près de la baignoire. Tout ses gestes étaient lents, peu assurés et parfois certains mouvement s'avéraient même inutile, comme s'il était simplement dérèglé face au comportement d'une personne normale.

Le contact avec l'eau de la baignoire ne lui fit absolument rien, du moins pendant les premières minutes ou ses pensées s'évertuaient de se demander si l'Inconnue allait venir où non, et si elle venait, était-ce pour le priver à nouveau de tout ce que l'on venait de lui offrir ? Cette pensée le fit rire, d'un rire discret mais peu engageant. Seul dans sa tête, Adrian peinait à prêter attention à la blonde qui se tenait toujours à ses cotés. Quelque chose semblait assez clair, cette femme avait été assignée à son service.

La dissonance cognitive de son esprit embrumé l'empêcha de se comporter normalement, si bien qu'il eut des difficulté à prendre compte de son état de crasse avancé. Ses cheveux étaient poisseux et cassants, sa barbe était bien plus longue et désordonnée. Tout son corps semblait simplement sale et affaibli, blanchi par un excédent d'obscurité. Voyant qu'Adrian peinait à mettre de l'ordre dans ce en quoi consistait les ablutions, la jeune femme s'avança d'un pas timide que l'apothicaire remarqua aussitôt. S'il avait été dans état normal, jamais il n'aurai formulé un aveux de faiblesse, allant jusqu'à souhaiter que cette bienveillante femme blonde ne lui rende que le service de le laisser en paix en se faisant discrète. Mais à ce jour, bien des choses étaient différentes, d'une voix étouffée, Adrian s'adressa à la jeune femme.


- Pourriez-vous m'aider à...je ne sais plus quoi faire...

Comprenant rapidement que l'apothicaire n'avait plus les repère ni l'énergie pour se laver lui-même, elle entreprit de l'aider sans même émettre la moindre protestation.
Maître du Jeu
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Lun 19 Juil - 15:18
La jeune femme s’exécuta de bonne grâce, attrapant une éponge pour nettoyer la crasse incrustée dans sa peau ; il ne fallut que quelques secondes avant que l’eau ne prenne une teinte sinistre autour de lui. Elle l’invita alors à s’immerger un peu plus et à basculer sa tête en arrière pour passer un long moment à laver ses cheveux, les démêlant délicatement avec ses doigts. Contrairement à ce qu’il aurait pu croire, il ne ressentit presque aucun malaise à se laisser laver par une inconnue comme s’il était infirme. Les gestes de la jeune femme n’étaient ni trop hésitants, ni trop invasifs, comme si elle était habituée à ce genre d’exercice, et elle ne relâchait jamais son attention de ce qu’elle faisait, ne lui offrant ni regard de pitié, ni sourire rassurant.

L’éponge vint finalement trouver son visage pour y décoller les traces de sang qu’il avait sur les joues, dévoilant de profondes entailles qui avaient été faites avec les ongles. Elle s’attarda peut-être un peu plus longuement sur ces dernières, toujours sans dire un mot. Une fois les ablutions finies, elle l’aida à se redresser et à quitter la baignoire avant de l’envelopper dans un drap épais ; elle le fit ensuite asseoir sur une chaise ou elle le laissa un peu reprendre ses esprits. Lorsqu’elle revint vers lui, elle tenait une paire de ciseaux dans les mains.

« Vous permettez ? »

Il acquiesça sans vraiment savoir à quoi il consentait réellement. Bientôt, le sol autour de ses pieds fut couvert de petites mèches de cheveux et de poils de barbe et le bruit des coups de ciseaux dans la pièce prenait des airs de berceuse. Il n’eut pas le courage de se regarder dans le miroir lorsqu’elle eut fini, tout juste réussit-il à enfiler les vêtements propres qu’elle lui avait apportés. Ils étaient ternes mais d’excellente facture, nota t-il. Gris. Pas sa couleur préférée.

Il ne sut pas quoi faire de lui ensuite. On lui avait apporté à manger mais il ne savait pas s’il devait manger ou non, il mourrait de faim pourtant. Après de longues heures d’indécision, il finit par s’allonger sans trop y croire sur le grand lit à baldaquin. Et il resta là, immobile. Son sommeil n’était plus vraiment du sommeil, c’était de longues heures d’errance dans sa propre tête. Il n’était plus capable de reprendre des forces, de se réparer. Il était là, point.

Dans un coin de la pièce, la jeune servante s’était installée dans un des fauteuils. Elle donnait juste l’impression de faire partie du décor, de ne pas être vraiment là pour le surveiller. Mais Adrian n’était pas dupe. Les gardes avaient disparu mais il les suspectait d’être juste sortis de la pièce et d'être toujours postés dans le couloir. La porte était restée d’ailleurs grande ouverte et personne n’avait touché aux lumières.

« L’Inconnue est en chemin ? »
« Elle vient de temps en temps mais ne s’attarde jamais vraiment. Pourquoi ? Vous voudriez que je lui dise que vous voulez la voir ? »
« Dites lui, oui… non, peut-être pas… Je, enfin si, mais elle va venir allumer les lumières, non ? »

À mi chemin entre la torpeur et le sommeil, Adrian s’agitait dans un lit qui semblait trop confortable pour lui. La jeune femme qui l’observait depuis son siège lui sourit, alors même qu’il ne la voyait plus.

« Vous prendrez une décision demain. »

Mais pourrait-il prendre une décision demain alors qu’il se réveillerait probablement dans sa cellule sombre et froide ? Il vivait un rêve éveillé plus vrai que nature, ou plutôt un cauchemar, c’était la seule explication qui avait du sens. Ou alors était-il la victime d’un jeu pervers ; dans tous les cas, cette situation ne durerait pas, on attendait de lui qu’il baisse la garde, qu’il s’habitue à la fragile lumière pour le jeter de nouveau dans l’obscurité.

Il ne serait pas capable de prendre une décision demain, parce qu’il n’en prenait plus depuis longtemps. Tout juste pouvait-il choisir de manger la nourriture qu’on lui apportait ou non.

La nuit fut éprouvante. Il avait parfois l’impression que son corps était propulsé dans un abîme sans fond, puis il se réveillait en sursaut, transpirant et haletant.

Le lendemain matin, il réalisa que quelqu’un avait tiré des rideaux épais devant la fenêtre pour qu’il ne soit pas réveillé par la lumière aveuglante du soleil. Il pouvait toutefois la deviner derrière le tissu alors que l’épais maillage ne parvenait pas totalement à l’occulter. Le temps devait être radieux dehors, mais cela l’angoissait curieusement.

Sur sa table de chevet, un plateau garni d’un succulent petit-déjeuner l’attendait déjà. La jeune femme qui s’occupait de lui entra à ce moment dans la pièce, les bras chargé d’un livre, d’un rouleau de parchemin et du nécessaire pour écrire. Elle déposa tout sur le petit bureau de la pièce.

« On m’a demandé de vous apporter ceci. »

Elle s’approcha de lui. Toujours ce même sourire bienveillant sur le visage.

« Comment vous sentez-vous aujourd’hui ? »
Adrian Mayr
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Lun 19 Juil - 17:17
L'avantage avec la sensation de flotter à coté de son propre corps était que les affres d'une mauvaise nuit n'avaient aucune prise sur l'apothicaire. Aussi cauchemardesque et décousue que fut cette nuit, il n'y avait ni bon ni mauvais à tirer de cette expérience presque nouvelle qu'était le confort d'un lit tel que celui qui lui avait été accordé. D'ailleurs, l'apothicaire avait l'intime conviction d'avoir été conduit dans son sommeil dans cette cage qui avait été son lieu de vie pendant cette éphémère éternité. Même ses nombreux réveils en sursaut avaient peinés à le ramener à la confortable réalité.

Assis sur le bord du lit, Adrian avait eu les yeux rivés sur la lumière partiellement occultée. Un frisson remonta le long de son échine alors que ses yeux tentaient d'interpréter la source de cette lumière, était-ce l'Inconnue qui revenait avec une chandelle et de la lecture religieuse? Un élan de lucidité aussi bref qu'incontrôlé le renvoya enfin à des considérations plus terre à terre. Cela ne pouvait être que le soleil, à moins que l'Inconnue ne sache voler. Une voix dans sa tête entama un délicat murmure à la diction rapide pour débattre de la théorie d'un humain volant. Ignorant les chuchotement,

Adrian resta immobile jusqu'à ce que la voix de la jeune femme attentionnée ne le tire de ses rêveries. Il ne tourna le regard vers elle que lorsqu'elle apparut dans son champ de vision, détaillant finalement les fameux objets définis par le terme "ceci", employé un peu plus tôt. Son regard s'attarda sur le bureau et ses nouveaux objets. Un livre, plus gros que celui de l'Inconnue qui reposait dès lors jalousement dans la poche de son nouveau vêtement, comme s'il s'attendait à être fouillé et détroussé de son bien. Aux cotés de l'ouvrage, de quoi écrire et un parchemin, deux éléments ne manquant pas d'interroger l'esprit endormi d'Adrian qui lorgna longuement le bureau alors même qu'une question lui avait été posé.

Une nouvelle fois, et comme s'il n'avait rien écouté, l'apothicaire tourna ses yeux émeraudes vers la blonde. Il mit quelques secondes avant de parler, endiguant au plus profond de son être cette énième question qui lui brulait les lèvres.


- Dois-je vous écrire mes aveux à nouveau? Demanda-t-il avec une étrange innocence.
- Écrivez ce que vous voulez écrire. N'importe quoi. Ou n'écrivez rien. Il me semble que l'on vous offre ceci uniquement comme... distraction.

L'Amaranthis prit un temps fous pour considérer les dires de son interlocutrice tandis que la question venait de se propulser à nouveau au sommet de ses tracas. Pourquoi avait-il finalement le choix, pourquoi avait-il droit à tout cela, pourquoi? Afin d'éviter de s'agacer, Adrian secoua la tête et passa sa main à l'exacte même endroit où les marques se dessinaient sur son visage. Sous ses doigts, la rencontre d'une barbe taillée le fit presque sursauter de surprise, lui provoquant un étrange confort qu'il n'aurai sur expliquer. Il resta encore un moment immobile à simplement répéter son geste, sans y enfoncer profondément ses doigts cela dit.

Son regard désormais égaré sur le mobilier de la pièce, Adrian reprit la parole d'une voix monocorde.


- Où est mon chien ?

Sans filtre et trop épuisé moralement pour faire des transitions, le discours de l'apothicaire était totalement décousu, et chaque fois qu'il entamait un nouveau sujet, il semblait avoir complètement oublié celui d'avant. Toujours avec lenteur, son regard se posa de nouveau sur celle qui s'occupait de lui. Son regard n'exprimait que peu de chose, bien qu'il n'y ait nul masque de neutralité en action à cet instant.

- Vous aviez un chien ? Je n'ai... pas entendu parler de cela. Répondit-elle avec une hésitation qu'Adrian ne releva pas. Cependant, l'emploi du verbe au passé pour parler de Whisper n'était pas passé inaperçue.
- Il est sourd vous savez? Il a besoin de moi. Enchaina l'apothicaire la seconde d'après.

Pourquoi parlait-il de son chien tout à coup? Possiblement parce que son cerveau n'était pas capable de filtrer ses dires à cet instant. Pendant son séjour à l'ombre, il s'était efforcé de ne jamais mentionner son compagnon canin, si ce n'est lorsqu'il était délibérément seul à implorer intérieurement de l'aide. Avait-il fait un erreur de dévoiler quelque chose qu'ils semblaient ignorer? Peut-être, mais dans tout les cas, il aurait été incapable de faire autrement.

- Quelqu'un s'en occupe sûrement chez vous en ce moment, non ? Répondit-elle prudemment.

Cette réponse sembla suffire à Adrian qui esquissa un petit rire alors qu'il n'y avait rien de drôle. Son regard cependant n'affichait aucune joie. D'un geste toujours lent, l'Amaranthis se leva de son lit et traversa en silence la pièce pour se rendre près du bureau. Sa main passa alors avec soin le long du livre à la reliure épaisse avant qu'il ne se risque à en ouvrir une page au hasard. Ses yeux, bien plus vifs que son cors, détaillèrent les lignes explicatives de ce qui semblait être un recueil sur la botanique. L'apothicaire en eut la confirmation en tournant une dizaine de page d'un coup pour se retrouver à nouveau sur d'autres explications liées aux plantes. Toujours silencieux, il prit place devant le bureau et approcha le parchemin et l'encrier.

A cet instant, tout avait disparu autour de lui, nulle interactions ne lui parvinrent aux oreilles. Et si la servante avait tenté de communiquer, alors Adrian n'en avait rien entendu. Raccordé à cette étrange sensation qu'était la vue de ces descriptions, Adrian crut même avoir été déplacé à son insu de cette geôle de lumière qu'était sa nouvelle chambre. Pendant quelques minutes, sa main passa à nouveau sur sa barbe taillées, longeant les sillons des plaies toujours avec cette même précision dans le geste. Son autre main quant à elle tenait la plume dans le vide tandis que ses yeux lisaient aléatoirement des pages du livre.

Puis, d'un coup, l'apothicaire se décida à écrire. Des recettes, des noms de plantes, des explications en désordre concernant telle ou telle décoctions. Sans être frénétique, la main d'Adrian parcourait la feuille avec une adresse qu'on ne lui aurai pas cru possible d'avoir dans son état. En y regardant de plus près, plusieurs parcelles de texte n'avaient pas totalement de sens et de nombreuses fois le mot "Inconnue" revenait dans les phrases. Il ne pensait pas, sa main était simplement guidée par son esprit, si bien que tout était décousu. Pourtant Adrian ne décrocha pas de son activité pendant un long moment dont la durée lui avait personnellement échappé.

Cette bien maigre accalmie mentale fut interrompue par un vif tremblement dans sa main, le faisant rayer une partie du parchemin en travers. Son souffle s'accéléra alors, compressant sa poitrine dans cet horrible étau. Son champ de vision se réduisit au stricte minimum. Dans un effort qui lui parut surhumain, Adrian rédigea frénétiquement une liste d'ingrédients avec une précision qui laissait imaginer qu'il traitait là d'un sujet bien connu pour lui. En réalité, il s'agissait purement et simplement des ingrédient nécessaires à la réalisation de sa décoction dont le brutal sevrage n'avait pas été une partie de plaisir.

A la seconde ou il termina sa rédaction, la plume vola au loin et l'apothicaire récupéra le parchemin contre lui. Sans vraiment le vouloir, il se laissa tomber près de sa chaise et alla se coller contre le mur sous le bureau. Ses yeux s'égarèrent une seconde sur la fenêtre toujours occultée par les rideaux mais dont la lumière éclairait suffisamment la pièce pour y voir clair. Remontant ses genoux contre lui, il serra contre son buste le parchemin à demi chiffonné en tentant de calmer sa respiration haletante. Une voix dans sa tête suppliait d'allumer la lumière, tandis qu'une autre hurlait le contraire. Perdu dans les méandres de son esprit traumatisé, Adrian n'avait plus la force de contenir ses crises, si bien qu'il ne pouvait que subir les sévices nerveuse que son corps lui infligeait.
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Lun 19 Juil - 18:41
Les jours passèrent et se ressemblèrent, ponctués des mêmes peurs, des mêmes crises, des mêmes interrogations. On ne lui proposa jamais de sortir de cette chambre et il ne témoigna aucune envie de le faire. Il était encore en prison, il le savait. Avait-il perdu pour de bon le goût de la liberté ? La jeune femme qui s’occupait de lui et dont il ne connaissait toujours pas le nom était là presque constamment, si bien qu’il finit par se demander quand est-ce qu’elle prenait du repos, ou si elle en prenait tout simplement. Sa notion du temps était toujours autant distordue, malgré un cycle nycthéméral perceptible au travers des rideaux toujours tirés. Combien de temps avait-il passé ici ? Impossible à dire.

Pourtant il lui aurait suffi de compter les trois livres qui s’entassaient sur le bureau : on lui en apportait un nouveau par jour. Ces derniers n’étaient jamais particulièrement intéressants, comme si on se contentait de piocher le premier livre sur l’étagère d’une bibliothèque poussiéreuse à laquelle plus personne ne s’intéressait depuis longtemps. Mais la lecture occupait son esprit ; parfois il lisait sans prêter la moindre attention au sens des mots, cela l’apaisait malgré tout. Et il écrivait aussi. Tout ce qu’il lui passait par la tête, n’importe quoi. Le sol de sa chambre finit bientôt par être tapissé de parchemins griffonnés, raturés, tâché d’encre lorsqu’il tremblait trop pour tenir la plume entre ses doigts.

« Laissez-nous. »

Et soudain, tout prit fin. Il connaissait cette voix, elle ne s’était pas adressée à lui mais il savait qu’il n’avait qu’à relever les yeux pour la voir. L’Inconnue.

Et il releva les yeux.

Il s’attendait à la trouver différente maintenant qu’elle n’était plus plongée dans les ombres, qu’elle était simplement vêtue et qu’il ne l’observait plus au travers les barreaux d’une cage. Il n’en était rien. Elle était plus petite que lui et pourtant elle occupait tout l’espace de sa présence. Il avait comparé sa voix à la surface d’un lac gelé, mais ce n’était pas que sa voix. Elle était un lac gelé, et pas uniquement en surface. Froide, lisse, dure. Combien de pierre aurait-il fallu lui jeter pour qu’elle s’écorne ?

Il remarqua à peine la servante s’éclipser promptement. L’Inconnue ne le lâchait pas des yeux, inexpressive. Elle tenait un parchemin enroulé sur lui-même dans sa main droite.

« J’ai ici une ordonnance du Gouverneur qui allège les sanctions ordonnées par le Conseil à votre égard. Votre assignation à résidence sera levée, même s’il vous sera toujours interdit de quitter la cité. Quant à l’interdiction qui vous a été faite d’exercer votre profession, elle ne se bornera qu’à la médecine pure et il vous sera toujours possible d’administrer le Lys d’Argent et d’y vendre remèdes et herbes médicinales. »

Elle continua ainsi un long moment, détaillant les règles juridiques qui entouraient le futur statut que lui donnerait le précieux sésame qu’elle avait dans la main. Les règles étaient rédigées de façon pompeuses et absconses, certainement l’oeuvre d’un Ascanien. Mais il n’écoutait rien de tout cela, figé au sol.

« Vous pourrez regagner votre demeure dès aujourd’hui. Des gardes vous y escorteront dès que vous en ferez la demande. »

À l’incompréhension s’ajoutait presque la colère. Elle l’enfermait, le privait de lumière, l’affamait, le persécutait avec des questions sans aucun sens, et elle revenait vers lui simplement pour lui dire que tout était réglé. Et il devait se contenter de cela semblait-il. Pas un mot sur le traitement qu’elle lui avait infligé. Pas une excuse sur l’erreur qu’elle avait pu commettre. Même lorsqu’elle le regardait, elle ne semblait pas vraiment le regarder. Comme s’il était indigne de son temps et de son intérêt. Il n’était rien.

Non, c’était impossible. Cela ne pouvait être aussi simple. Et comme pour confirmer ses soupçons, elle finit par ajouter :

« Tout cela, bien sûr, ne sera pas sans contrepartie. »
Adrian Mayr
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Lun 19 Juil - 20:08
Il ne s'était guère passé plus de temps au sommet de cette tour qu'il ne s'en était passé dans les profondeurs du cachot. Cette information, évidente pour tous, l'était aussi pour Adrian. Pour autant, il n'avait pas eu la capacité de se replacer sur les cycles du jour et de la nuit pour compter les jours. On lui servait un petit déjeuner, un déjeuner et un diner, et non plus un seul repas par jour. Son seul et unique repère s'en retrouvait biaisé, si bien qu'il avait assez vite abandonné l'idée de se replacer dans le cycle temporel, pour l'instant. Son esprit était fatigué, malade, étriqué, trop restreint pour traiter les questionnements habituels et quotidiens que l'Amaranthis additionnait à sa maniaquerie de l'ordre. Ce vaste désordre cérébral l'amenait à ne plus être aussi soigneux, ni concentré sur l'étude de telle ou telle interrogation inhérente à son environnement.

L'apothicaire subissait ses crises plus qu'il n'était capable de les gérer, pourtant, il semblait chaque fois revenir à des considérations plus terre à terre comme la lecture ou l'écriture, un évident progrès face aux phases délirantes et aux luttes hallucinées qui avaient été son quotidien post crise dans les tréfond du palais.

Mais tout ce semblant de quotidien dans lequel Adrian se sentait toujours être le prisonnier vola en éclat comme la coque d'un navire contre les pinacles marins. L'inconnue venait de parler, sa voix s'était immiscé dans la tête de l'apothicaire, allant même jusqu'à l'aveugler pour lui donner l'illusion d'un retour au noir complet pendant une demi seconde. Ses yeux vinrent à la rencontre de cette silhouette si familière, bien que débarrassée de son capuchon. Immédiatement, les sentiments contraire vinrent de nouveau agiter les nerfs à vif de l'Amaranthis qui resta malgré tout immobile.

Il l'accueillit dans le plus profond des silences, les yeux fixés dans les impénétrables pupilles de celle qui l'avait privé de lumières et la lui avait rendue alors qu'il n'en voulait peut-être plus. Comme si elle pouvait disparaitre à nouveau, à jamais ou pour une durée indéterminée, Adrian s'accrocha à chaque mots, chaque détails, apprenant ainsi que sa peine avait été allégée. Arrêtant cet étrange sentiment de reconnaissance qu'il éprouvait envers l'Inconnue en repensant au fait qu'elle était l'autrice de sa captivité, il n'accueillit pas cette nouvelle d'un bon œil dans un premier temps, car tout aujourd'hui chez lui prêtait à la méfiance. Bien sur, il avait éprouvé un vague élan de satisfaction en entendant parler d'allègement de sanction, mais il ne restait pas moins captif à cet instant, et il préféra attendre avant de se réjouir. Alors qu'il écoutait les pompeuses conditions, les voix s'éveillèrent brusquement dans sa tête.


" Ne la laisse pas partir, elle sait trop de choses. "

" Elle va te faire du mal, elle va te ramener là-bas. "

" Tue-là, ici, maintenant, fais le. "

Aucunes des voix ne prenait le pas sur l'autre, créant à nouveau ce brouhaha qui avait dont de rendre fou l'apothicaire.

Puis d'un coup, plus rien. L'esprit d'Adrian se vida du tumulte plus brusquement que jamais. Toute les voix venaient de déserter sa tête, laissant raisonner la glaciale voix de son interlocutrice et rien d'autre que celle-ci. Il avait attendu ce moment, le moment ou l'Inconnue allait revenir, peut-être pour lui demander des aveux, ou pour le ramener en cage, qu'importe. Elle allait revenir, il le savait. Il ne s'attendait pas à ce qu'elle lui annonce avoir une peine allégée pour lui, comme un cadeau que l'on offrirait à sa proie avant de l'achever.

Dans toute la lenteur qui avait été la sienne ces derniers jours, Adrian avait apprit à s'approprier cette étrange sensation de se sentir à coté de son corps, au point qu'il en était parvenu à mettre de côté une part d'énergie uniquement dédiée à accueillir l'inconnue. Cette énergie n'était pas physique, bien que l'apothicaire semblait bien plus stable sur l'appui de ses jambes depuis quelques minutes. Dans cette mobilisation mentale, il s'était efforcé de mettre de coté toute ses pulsions interrogatoire qui l'avait maintes et maintes fois poussé à poser des questions à la jeune femme blonde désormais absente. Non, ces question n'avaient qu'une seule destinataire, et elle se tenait devant lui avec un regard qui paraissait aussi accueillant que la foret des égarés. Pour se protéger de ses propres pulsion de ces derniers jours, Adrian s'était dissimulé derrière une seule et simple question susceptible d'endiguer son esprit : "Ou est mon chien?". Il aurait aimé avoir la réponse, car chaque fois que l'image de son compagnon s'affichait dans sa tête, un poignard venait se planter directement dans son coeur. Pourquoi avait-il choisi de se protéger de sa curiosité derrière une question aussi douloureuse? Parce qu'il n'avait pas eu le loisir de faire autrement.

Pourtant, rien ne semblait se profiler comme il l'avait imaginé. Son soudain élan de lucidité le menait au mutisme, il attendait, purement et simplement, jusqu'à ce qu'elle dise enfin quelque chose qui éveilla réellement son intérêt.


- Tout cela, bien sûr, ne sera pas sans contrepartie.

Aussi traumatique qu'avaient été ce brusque revirement et aussi éloigné de sa vrai personnalité qu'il semblait l'être, Adrian sentit l'étau qui enserrait son esprit relâcher quelque peu la pression. Ce n'était pas une victoire, ce n'était pas terminé, mais pour la première fois, il entrevoyait quelque chose s'approchant de son besoin le plus viscéral : comprendre. Silencieux, Adrian attendit de longues et interminables secondes afin de s'assurer qu'elle n'ajouterai rien. Elle ne devait pas partir, elle avait ouvert une porte vers ce qui finalement semblait être l'éclaircissement susceptible d'enrayer la tache sombre de son âme. D'une voix étonnement calme et semblable à celle qu'il aurai eu face à un patient au Lys d'Argent, Adrian prit la parole.

- Je vous écoute, qu'attendez-vous de moi.
Maître du Jeu
Maître du Jeu
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Lun 19 Juil - 21:19
Son expression n’avait pas changé et pourtant Adrian était capable de dire que l’Inconnue était satisfaite. Il avait réussi à la contenter, peut-être pour la première fois depuis leurs entrevues. Et maintenant elle le regardait vraiment, elle s’intéressait à lui ; il pouvait le sentir, malgré ses glaciales apparences.

« Avant de vous demander quoi que ce soit, je devais savoir ce qu’il y avait à l’intérieur de vous. J’avais besoin d’une réponse. Je ne voulais pas juste l’entendre, je voulais la voir. »

Cela ressemblait presque à une justification. Non, c’en était une.

« Vous n’avez pas de noms à me donner mais vous allez me les trouver. Tous. »


Elle disait cela comme si elle ne doutait pas un seul instant qu’il accepte, quand bien même elle n’aurait rien eu à lui proposer en échange. D’un geste, elle ferma doucement la porte de la chambre et se tourna vers lui, avec une certaine gravité dans le regard.

« Il existe une organisation secrète qui entend amasser un certain nombre de connaissances sur la malédiction, non pas pour tous nous sauver comme le prétendent ses membres, mais pour affaiblir le Gouverneur et organiser un coup d’état. Ils se disent chercheurs, médecins : ce sont des arrivistes qui n’hésitent pas à mettre en péril la sécurité de la ville dans leur quête de pouvoir. Leur présence dans la ville est une souillure que j’ai bien l’intention d’éradiquer. »

Elle resta un instant silencieuse, comme si elle ne savait pas encore vraiment à quel point elle avait envie d’entrer dans les détails. Puis la fin tomba comme un coup de hache.

« Votre père faisait partie de cette organisation, cela j’en suis persuadée. Je vous demande de suivre les traces qu’il a sans doute laissées pour vous, je vous demande de poursuivre la voie qu’il a empruntée et de gagner la confiance de ceux que j’ai l’intention de détruire. »
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