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Claircombe  :: Titre :: Quartier Utgardien :: La hutte de Hurlsk :: [Terminé] Départ de feu et retour de bâton - Eredin & Uraïa ::
[Terminé] Départ de feu et retour de bâton - Eredin & Uraïa
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Sam 17 Juil - 2:23
Départ de feu et retour de bâton

Eredin Lautrec & Uraïa Beklaga
Après-midi |  Quartier Utgardien | Hutte de l'Hurlsk | An 83, 1er mois de Printemps
[Terminé] Départ de feu et retour de bâton - Eredin & Uraïa MhU0Kcg
La grande salle du domaine de l’Hurlsk n’avait pas beaucoup changé au cours des dix dernières années. On pouvait même dire que tout était resté fidèle à lui-même, depuis qu’elle avait quitté les siens. Pourtant, elle se faisait l’effet d’être une parfaite étrangère, une intruse parmi les gens de son peuple. Peut être que les chaînes qu’elle portait aux poignets y étaient pour quelque chose, ainsi que les regards curieux voire hostiles qu’on lui jetait. Toute la communauté s’était rassemblée là, et quelque part, elle était soulagée qu’il ne reste pas grand monde des Beklaga pour la voir traînée là comme une criminelle. Aux yeux de la plupart, elle l’était. Les Utgardiens n’étaient pas vraiment connus pour leur mesure ou leur réserve en matière de jugement. Elle dégagea son coude d’un geste sec lorsqu’elle sentit un des gardes la pousser en avant. Par instinct, elle redressa le menton, défiant chacun du regard, l’air mauvais.

Elle avait manqué de chance une fois de plus. Il avait fallu qu’elle soit prise dans la foule piégée dans ce putain de quartier Amaranthis avec Markus. Il avait fallu qu’elle affronte cette marée de morts provoquée par la folie de quelques savants dégénérés, comme seuls les Amaranthis étaient capables d’en produire. Il avait fallu qu’elle soit l’une des rares à posséder un arc et de quoi se défendre. Et c’est ce qu’elle avait fait. Elle avait pris des risques. Elle avait tenté de sauver sa peau et celle de quelques autres. Tout ça pour finir accusée de sorcellerie. Elle qui ne saisissait pas grand chose aux choses de l’esprit et aux affaires mystiques, c’était tout de même un comble.

Markus avait fait de son mieux, mais cet idiot, en voulant défendre sa peau devant les interrogateurs, avait finalement admis avoir participé aux feux déclenchés dans le quartier Amaranthis, finissant sous le couperet de la loi à son tour. Pour couronner le tout, comme ils n’appartenaient pas aux mêmes clans, ils avaient été séparés et emmenés chacun devant leurs référents judiciaires. Elle avait néanmoins entendu des rumeurs selon lesquelles Markus avait eu le bénéfice du témoignage de la civile à qui il avait sauvé la mise. Markus ce héros malgré lui, ce gentilhomme improvisé, Uraïa avait éclaté de rire dans sa cellule. Mais dans le fond, elle était soulagée.

Son sort à elle était bien moins certain. Mais finalement ce qui lui pesait le plus, c’était ce retour forcé après dix ans d’absence, dix ans d’exil, et là voilà qui revenait exposée aux yeux de tous, la cible des quolibets et des commérages. Elle s’efforça d’avoir l’air aussi menaçant que possible. Elle reconnaissait quelques visages, certains avaient pris des rides, d’autres des épaules ou de la hauteur. Elle croisa le regard soucieux d’Orik dans la foule. Bien sûr, il était venu. Il n’arborait pas le même sourire ravageur que lorsqu’il était de sortie. Non, il avait l’air sérieux et grave comme le jour où ils avaient immolé le corps de sa mère, la seule qu’ils aient connue tous les deux. Elle lui adressa un regard de reproche. Voilà qu’il l’enterrait déjà. C’était bien son genre de tout dramatiser.

Elle inspira brièvement pour se donner du courage. Pour ne pas ciller devant l’Hurlsk et ses guerriers. Pour ne pas céder à la colère sous les petites phrases assassines qu’elle entendait sur son passage. Une part d’elle-même rêvait d’envoyer son poing dans quelques trognes, de se jeter dans la mêlée. Peut être que ça lui ferait du bien, peut être qu’elle sentirait moins le poids de cette injustice sur ses épaules, le poids qu’elle se traînait depuis qu’elle savait que le nomade avec qui elle avait affronté le Giganta avait écopé de la peine capitale pour deux morts dont il était soit disant responsable. Combien avaient été tués ce jour-là, par ceux-là même qui avaient engendré, et gardé des abominations dans les souterrains de la ville ? Et ils n’avaient même pas exécuté le vieillard dément qui avait orchestré tout ça. Non, elle ne croyait plus en la justice des hommes.

Et combien y’avait-il de chance pour qu’il en soit différemment parmi les siens ? Ils l’avaient déjà tous condamnée avant même qu’elle n’ouvre la bouche. Elle arriva devant le haut siège de l’Hurlsk. Elle se campa sur ses deux jambes légèrement écartées, mains croisées devant elle. Elle défia les hommes à ses côtés, plantant son regard glacial dans chacun des leurs, comme pour leur intimer de regarder ailleurs, voir si elle y était. Elle crut reconnaître un regard familier parmi eux, mais sans grande certitude. Comment s’appelait-il déjà ? Elle buta sur le nom, mais soudain se remémora les courses-poursuite sur les docks, l’été, les batailles d’eau et les poissons grillés qu’on partageait au soleil, affamés par trop de jeux et d’enthousiasme à dépenser cette jeunesse fuyante autant qu’on le pouvait, jusqu’à s’effondrer de fatigue le soir sur sa couchette, les muscles endoloris mais le sourire aux lèvres.

Elle s’y attarda un peu plus longtemps qu’elle ne l’aurait réellement voulu, parce que le nom ne lui revenait pas et que ça titillait son esprit sur l’instant, comme une diversion bienvenue dans ce moment pénible et humiliant. Lagreck, non, Lautrec. Eredin Lautrec, voilà. Elle se souvenait d’un gamin blond fin comme un chat de gouttière et vif comme un lièvre. Toujours fourré avec le fils de l'Hurlsk. Vu où il se tenait et le bracelet d'argent qu'il arborait, ça lui avait plutôt bien réussi. Mais à en juger par ses cicatrices, il en avait quelque mérite. Nul doute qu’il avait eu sa part de combats et il se tenait désormais élancé et fort comme un jeune pin, juste à côté du siège de l’Hurlsk. Visiblement le destin lui avait souri, à lui au moins. Elle hocha simplement de la tête dans sa direction, un mouvement infime comme un geste de salut, par égard pour ce gamin perdu de son enfance et avec qui elle avait partagé des échardes à trop courir sur les pontons de bois, pieds nus sur le port.

Et elle détourna le regard. Il n’était plus temps pour la nostalgie ou le regret de cette insouciance envolée à jamais. Elle ferait face à son destin, quel qu’il soit. Si on n’avait pas toujours le luxe de choisir sa fin, on pouvait choisir comment l’affronter. Elle était prête.


Dernière édition par Uraïa le Sam 2 Oct - 11:49, édité 1 fois
Eredin Lautrec
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Sam 17 Juil - 17:49
Comme à chaque fois lors des jugements, il y avait foule dans la hutte de l'Hurlsk. Certains étaient ici pour le spectacle et pour être sûr d’être au courant des dernières histoires, d'autres encore pour se faire entendre, mais la plus part étaient ici parce que c'était important ! Même si c'était l'Hurlsk qui avait le dernier mot, les gens venaient pour vérifier que les règles et les traditions étaient bien respectées. La seule différence avec les autres fois, c'était que la grande salle était presque trop petite pour accueillir tout le monde. Tous étaient venus voir la femme qui avait embrasé le quartier Amaranthis, cette paria qui avait jeté l'opprobre sur le clan alors qu'elle n'en faisait pas vraiment partie. Uraïa Beklaga ! Le nom de sa famille allait se faire traîner dans la boue suite au jugement. Tous en étaient persuadé, car ils ne connaissaient rien de l'histoire. Aucun d'entre eux n'étaient présent lors de l'attaque ou lors du grand conseil qui avait été si animé. Donc, comment leur en vouloir ? Ils étaient simplement ignorants et attendaient qu'elle soit un exemple ! Et hélas, Uraïa allait en être un.

On avait demandé à Eredin d’être présent, comme presque à chaque jugement d'ailleurs, pour « apprendre » ! Même si cette fois, on lui avait annoncé qu'il aurait un rôle à jouer sans lui en dire plus. Placé non loin du siège de l'Hurlsk, il faisait donc face à la foule et aux prévenus. On les amena tous les uns après les autres, en commençant par le plat principal. La pyromane. Il se rappelait d'elle de quand ils étaient petits, mais c'est vrai qu'il l'avait totalement oublié depuis et ne s'était pas vraiment aperçu de sa disparition. On lui avait très vite expliqué qu'elle vivait avec un petit groupe d'Utgardien et ne faisait plus partie de la communauté. Autant dire que ça n'allait pas vraiment l'aider pour son jugement. Croisant le regard de la rouquine, il ne répondit pas au petit hochement de menton. À quoi bon lui donner de l'espoir ?

Bien qu'elle fut la première à être amené, on passa d'abord les autres prévenus, les petits délits. Des amuses gueules avant le plat principal. Juste quelques voleurs qui avaient eut l'audace de se faire prendre, rien de bien excitant. Heureusement, elle était là.


- Uraïa Beklaga !

Un garde la poussa au-devant de la scène où allait se jouer la comédie qu'était son jugement. Le conseil avait demandé la mort pour cette femme et sans l'intervention de l'Hurlsk, elle aurait perdu la tête comme le géant sauvage avec qui elle avait combattu. On avait réussi à lui épargner cette humiliation, mais elle allait être maintenant jugé selon les lois Utgardiennes. Des lois sévères. Mais au moins, ça se ferait entre eux, dans le respect des croyances et de l'honneur !

Pour la première fois depuis le début, Eredin vit l'Hurlsk se redresser dans son siège pour mieux observer la jeune femme debout devant lui.

- Uraïa Beklaga, il est bien dommage que tu reviennes parmi nous dans de telles circonstances... Tu es accusé par le conseil de magie noire, d'avoir mis le feu à plus de dix bâtiments et de vingt commerces différents dans le quartier Amaranthis.
Il marqua une pause pendant laquelle de nombreux murmures d'indignation se firent entendre. Fille d'Yvar et d'Isold Beklaga, tu es une Utgardienne ! C'était un fait indéniable. Les actes d'une seule personne peuvent influencer un groupe entier et dans ton cas, c'est le clan que ça impacte. Nous n'avons rien à voir avec l'attaque et pourtant, ils essayent de nous faire porter la responsabilité de la destruction du quartier Amaranthis. Uniquement à cause de toi !

Cette fois, le silence n'eut pas le temps de s'installer, la foule se mit à hurler et à pousser sur le cordon de garde qui la séparait de cette maudite femme. L'Hurlsk laissa faire pendant de nombreuses secondes avant de lever une main autoritaire qui fit revenir le silence. Et sans laisser le temps à la jeune femme de s'exprimer pour se tenter de se défendre, il reprit avec plus de force.

- On nous demande de payer pour les réparations, mais nous ne payerons pas. Ce sera toi jeune fille qui va devoir rembourser intégralement la somme ! Et si tu ne peux pas, ta famille s'en occuperas. Sais-tu combien cela représente ? Tu es chasseuse, il me semble, se tournant vers son bras droit qui était le chef du groupe de chasse principal, Combien de temps il faudrait à un excellent chasseur pour rembourser entièrement la somme ?

- He bien, en partant du principe qu'elle chasse chaque jour de sa vie et qu'elle ramène à chaque fois au moins trois proies de bonne taille... je pense qu'il lui faudrait dix ans, minimum. Mais si on veut être réaliste, ça sera plutôt vingt ans.

- Vingt ans... et dans les mines ?

- Dix ans, si elle arrive à tenir autant de temps, mais vu son gabarit ça m'étonnerait.


- Hum. Nous voilà face à un grand dilemme. Selon moi, tu ne pourras jamais rembourser ta dette.

Puis l'Hurlsk se tourna vers Eredin, c'était son moment. Le guerrier fit un pas en avant en comprenant parfaitement le rôle qui lui incombait.


- Il y a peut-être un moyen de rembourser rapidement la dette. Vous le savez tous, les femmes amaranthis vendent leur honneur chaque soir contre quelques pièces, c'est une activité qui rapporte beaucoup. Je suis sûr qu'une chevelure de feu comme la sienne attirerait de nombreux clients... pour avoir traîné l'honneur du clan dans la boue, elle peut bien mettre le sien de côté pendant quelques années n'est-ce pas ?

Cette fois, le silence s'installa ! Personne n'osa dire quoi que ce soit face à ses propos. Était-il sérieux ? Voulait-il vraiment la faire travailler comme catin dans les bas-fonds du quartier des plaisirs ? C'était du jamais-vu. Mais au fond, n'était-ce pas la seule solution possible ? Quoi qu'il en soit, tous attendaient la réaction de l'Hurlsk qui semblait pensif.

- Ce serait une première... mais c'est aussi la première fois que quelqu'un se présente après avoir autant souillé le clan. Qu'en pensez-vous ? Devrions-nous la faire travailler chez les Amaranthis pour réparer sa faute ? Une seule année et nous payerons le reste ?

La jeune femme était livide devant la comédie qui se déroulait devant elle. Avait-elle imaginé pouvoir s'en sortir ? Que sa faute n'était pas si grande ? Eredin retourna à sa place avec un sourire aux lèvres, il connaissait un bon établissement où les filles étaient bien traitées...
Voyant que l'Hurlsk attendait de voir l'avis des gens, la foule se mit à discuter entre elles. S'il y avait bien des voix qui s'élevaient contre cette sentence, la majorité était pour. Pendant bien cinq minutes, de nombreuses voix se firent entendre pour juger la coupable ! Malheureusement pour elle, il n'y avait pas grand monde pour la défendre avec assez de force, un homme du nom d'Orik tenta bien de se faire entendre, mais le groupe était plus fort. C'était ça de vivre en dehors de la communauté, on devenait trop vite une paria et on pouvait se retrouver accusé de beaucoup de choses gratuitement. Tel un bouc émissaire, la foule avait décidé de vendre son corps pour la punir de quelque chose qui les dépassait tous.


Heureusement pour elle, c'était l'Hurlsk qui avait le dernier mot ! Et cette comédie avait assez duré. Se levant de son siège, il descendit et se mit face à Uraïa, il l'invita ensuite à se tourner vers la foule.


- Vous avez donc décidé de la faire travailler une année entière chez les Amaranthis pour réparer sa faute ? Vous vendez son corps et son honneur comme si ça pouvait ramener le nôtre, c'est bien ça ? Il remonta les marches menant à son siège pour être sûr d’être bien vu de tous avant de reprendre : Donc, vous voulez condamner une Utgardienne qui a eu le courage d'affronter la mort plutôt que de la fuir ? Une Utgardienne qui a combattu un monstre encore jamais vu jusqu'à maintenant ! Qui a tenté ce qu'elle pouvait pour venir à bout du Giganta qui a brisé les lignes de la milice et qui a tenu tête à la cavalerie Ascanienne... Elle aurait dû fuir comme les autres ? Par Njörd ! Êtes-vous tous devenus fous ? On devrait l'acclamer comme une héroïne ! Et non comme une paria ! Si cette chose avait réussi à s'enfuir, qui sait si la citée aurait survécu... et quelques bâtiments de traîtres brûlés, c'est bien peu payé pour notre survie ! Les chiens d'ascaniens l'accusent de magie noir car ils ignorent totalement ce que le courage peut faire faire ! Il parlait avec fureur, déçus de voir que son peuple était si facilement manipulable. Nous sommes des Utgardiens bon sang ! On devrait avoir confiance les uns envers les autres plutôt que de se déchirer dès que nos ennemis tentent de nous diviser... il se laissa ensuite tomber dans son siège et reporta son attention sur Uraïa. Jeune fille, pardonne les, ils ne savent pas ce que tu as fait ! Mais nous, on sait et nous te remercions. Tu as peut-être simplement voulu sauver ta peau, mais en combattant dans la rue, tu as empêché cette chose d'atteindre les grilles ! Si je le pouvais, je te récompenserais au lieu de t'infliger la peine décidée par le conseil... tu va devoir aider aux travaux de reconstructions dans le quartier Amaranthis. Présente-toi demain, ici, Eredin t'accompagnera et veillera à se que tout se passe bien.

***


Lorsque Uraïa se présenta le lendemain matin, plusieurs charrettes l'attendaient pour pouvoir partir. Elles étaient chargées de matériaux de construction en tout genre, des poutres, des planches, des caisses entières de clous épais, d'outils, etc. Dans la dernière, il y avait toutes les personnes condamnées la veille, tous devaient aider aux réparations dans le quartier Amaranthis.


- Voilà enfin notre héroïne !


Et les charrettes se dirigèrent lentement vers le lieu du massacre.

Uraïa
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Dim 18 Juil - 1:05

Quelle bande d’enfoirés. Elle avait oublié la malice de l’Hurlsk, et plus encore sa roublardise. Elle avait seulement gardé en mémoire cette stature et ce regard perçant qui savaient en imposer par sa simple présence, chose qui l’intimidait lorsqu’elle était haute comme trois pommes, et qui malgré elle, continuait de lui inspirer de la déférence aujourd’hui encore. Elle était restée estomaquée par l’intervention de ce petit con d’Eredin, déjà parce qu’il l’avait toisée comme s’il lui était supérieur et ensuite parce que pendant tout le temps de son charmant discours, elle avait gobé comme le reste de l’assistance sa proposition d’en faire une catin Amaranthis. Elle avait vu rouge, elle était si furieuse qu’elle avait été prête à tenter un coup d’éclat qui lui aurait valu la mort d’un coup d’arrêt simple. Mais dans l’instant, elle aurait préféré mourir bêtement en se jetant sur l’Hurlsk plutôt que de finir dans un bordel. Telle était la fierté des Utgardiens, et surtout la sienne.

Du reste, ça n’avait trompé personne car l’un des gardes avait resserré sa prise sur ses chaînes, ce qui n’avait fait qu’exacerber encore sa fureur. Mais tout ça n’était qu’une mise en scène, un leurre, une farce dont elle était la dinde. Elle avait très mal pris ce revirement, étrangement. Comme si l’Hurlsk se contentait de l’utiliser pour ses objectifs personnels, ce petit moment d’éloquence, montrant à ses ouailles qui était le plus intelligent d’entre tous. Il avait joué avec elle, et Eredin Lautrec aussi, ils avaient joué avec son destin, ses émotions, ils l’avaient humiliée volontairement pour faire passer leur message à d’autres, sachant qu’elle était innocente. Elle avait senti la haine des siens retournée contre elle, avant que l'accalmie ne revienne, d’un claquement de doigts de l’Hurlsk. Jamais elle ne s’était sentie plus étrangère à son clan. De ça, elle leur tiendrait toujours rancune, une rancune froide et silencieuse, qui n’avait de sens que pour elle, mais qu’elle gardait précieusement. Il était plus facile de haïr que d’aimer, de se méfier que de faire confiance, de mépriser que de respecter.

L’image de l’Hurlsk en avait pris un coup, même si son discours avait fait mouche. Elle avait eu du mal à trouver ses excuses sincères, après coup, comme un corniaud un peu farouche qu’on voudrait caresser après l’avoir cogné. Il avait semblé si convaincant en la condamnant quelques secondes plus tôt, comment croire en ses dernières paroles ? Uraïa était une femme simple et droite, loyale jusqu’à la pointe des cheveux, du moins, elle s’en targuait. Elle était capable de donner sa vie aveuglément pour ceux qu’elle aimait, elle ne pouvait pas comprendre qu’on puisse jouer avec ces choses là. Jamais sa famille de cœur ne lui avait tant manqué qu’à cet instant. Ils étaient devenus sa nouvelle patrie, elle s’en rendait compte maintenant plus que jamais. Orik était passé la voir, une fois que cette mise en scène de théâtre avait été terminée, et que chacun avait repris le cours de sa vie. Ils n’avaient pas dit grand chose, assis tous les deux dans sa petite boutique, pendant qu’il lui servait de l’hydromel sans discontinuer.

Elle arborait cette mine abattue et silencieuse qui lui avait valu une longue accolade et une grande tape dans le dos à son arrivée, accolade qu’elle lui avait rendue avec force. Il était content de la savoir en vie, et avec un peu de chance “tout ça” ne serait plus bientôt qu’un mauvais souvenir, avait-il déclaré en la resservant, alors qu’elle continuait de se terrer dans son silence morose. Il avait évité de parler de son combat contre le Giganta, car il était évident que la mort du nomade y était trop étroitement associée et que la rouquine n’avait aucune intention d’en parler. Néanmoins, elle lui avait jeté un long regard reconnaissant. C’était une chose tendre et rassurante de savoir que quelqu’un la comprenait si intimement qu’il pouvait deviner ses états d’âme sans même qu’elle ait besoin de parler ou de se justifier. Qui savait juste quand parler ou quand se taire, d’un seul regard. Orik était ainsi. Elle s’était endormie la tête lourde de vin sur l’établi du tanneur, et il avait simplement posé une couverture sur ses épaules pour éviter qu’elle se refroidisse durant la nuit.

***

Le lendemain, elle avait mal au crâne et elle était de méchante humeur. Elle avait toutes les raisons du monde pour ça. D’une, elle avait bu tant et plus la veille qu’elle portait l’équivalent d’une enclume sur les épaules, et le soleil était bien trop violent à cette heure du matin pour ses yeux rougis et fatigués. Deuxièmement, elle était obligée de se rendre à nouveau dans ce quartier maudit et de réparer ce qui méritait d’avoir été brûlé, ne serait-ce que pour l’enfer qu’elle y avait vécu. Troisièmement, elle était obligée de se coltiner cette petite enflure de Lautrec en guise de chaperon, et rien que la manière qu’il avait eue de l’aborder - nonchalante et narquoise, elle avait déjà envie de casser un truc. Voire plusieurs. Au hasard, sa jolie petite trogne. Mais elle n’en fit rien, bien sûr, se contentant de monter dans la charrette dans un grognement annonciateur de sa bonne humeur et préventif quant aux charmantes plaisanteries dont sa nouvelle nounou semblait friande.

Ils n’étaient pas seuls cependant, mais elle était bel et bien la dernière, puisque le chariot s’ébranla aussitôt qu’elle fut assise dedans, serrée comme une sardine pas fraîche au milieu de ses nouveaux compagnons de bagne. Elle sentait bien tout de même quelques regards plus ou moins insistants. Déjà parce qu’elle était la seule femme, ensuite parce que mine de rien, certains se demandaient encore si elle était finalement pyromane ou non, sorcière ou non, hé après tout, le discours de l’Hurlsk n’avait pas été si clair que ça pour ces ahuris bas du front. Oh oui, la journée promettait d’être longue. Elle commença par lancer des regards noirs à tous ceux qui la regardaient un peu trop longuement - qu’est ce que vous regardez comme ça, les petits génies ? - ce qui lui garantit une paix relative, à défaut d’attirer la sympathie.

Lautrec semblait s’amuser comme un petit fou, lui, ou alors c’était juste une posture. Au moins, lui n’avait pas à trimballer des pierres et des planches et à jouer les grouillots pour ces gros culs d’Amaranthis. Du reste, c’était une bonne question, ça, qu’est ce qu’il foutait là au juste ? Avait-il seulement la charge de la surveiller ? La croyait-on si peu digne de confiance qu’il faille un genre d’inspecteur de l’Hurlsk pour s’assurer qu’elle exécute la basse besogne ?

— Alors on est venu pour le spectacle, Lautrec ? L’Hurlsk a pas de boulot plus gratifiant à te proposer ? C’est vraiment trop d’honneur, vraiment, fallait pas.

Néanmoins, elle descendit de la charrette comme les autres, car ils venaient de s’arrêter et elle trimballa tout son barda sans faire d’histoire, sinon en grommelant de vagues imprécations qu’elle était seule à comprendre. Se faisant, elle évitait de repenser à ce qui s’était produit ici quelques jours plus tôt, ce paysage dévasté, ces maisons éventrées, la horde d’abominations s’abattant comme le fléau du monde sur l’humanité en proie à une terreur primitive et incontrôlable, réduite au simple statut de bétail, de proie. Des années qu’on vivait avec cette malédiction au-dessus de la tête. Les gens avaient appris à repérer les signes, à s’attacher la nuit, on brûlait le moindre cadavre, on s’était même accoutumé à couper les têtes des morts à peine refroidis sans plus dégobiller ni tourner de l'œil. On croyait dur comme fer qu’on pouvait survivre, s’adapter. Ces crétins d’Amaranthis avaient même été jusqu’à penser qu’ils pouvaient l’étudier, comme si c’était un phénomène naturel qu’ils pouvaient saisir et comprendre. Et puis un beau jour, sans prévenir, tout le monde en avait payé le prix fort, et les dieux s’étaient bien moqués d’eux.

Il n’y avait plus un seul cadavre, et pourtant ils avaient été des centaines à mourir en quelques minutes à peine. Elle entendait encore les hurlements de terreur et d’agonie lorsqu’elle fermait les yeux le soir. Seuls les pavés rougis et les murs de certaines maisons gardaient encore des traces du massacre sanglant que ça avait été, tout le reste avait été mangé par le feu qu’elle avait provoqué. C’était un paysage de désolation et pourtant une grande agitation régnait, déjà les hommes s’occupaient à reconstruire, car telle était la vie en Avalone. On poursuivait inlassablement cette tâche bête et sournoise de vouloir survivre et de recommencer chaque fois que l’humanité échouait à s’y essayer, sans rien changer à sa routine. Ça n'allait pas plus loin que ça.

Elle songea que le nomade n’était finalement pas l’être le plus fou qu’elle avait rencontré et se mit aussitôt au travail.

Elle n’était pas maçon et encore moins artisan mais elle avait le dos, les épaules et les bras d’une archère entraînée, et les cals aux mains qui l’accompagnaient. Elle était d’une stature sèche et musclée, suffisamment haute pour son sexe, et elle avait l’habitude de marcher et de vivre à la dure, aussi ni le soleil ni la fatigue ne l’atteignaient beaucoup. Même si elle regrettait amèrement d’avoir abusé de l’hospitalité d’Orik la veille au soir, mais pour ça, elle ne pouvait s’en prendre qu’à elle-même. Elle travaillait comme les autres, si ce n’était plus, car elle était même plus costaude que quelques autres moins bien nourris ou moins entraînés qu’elle à l’effort physique.

Elle commença à déblayer les restes d’une maison à moitié en ruine avec une hargne palpable. De toute façon, plus vite ils s’y mettraient, plus vite ils auraient fini. C’était pas ça, le dicton ?

Eredin Lautrec
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Lun 19 Juil - 15:12
Et bien ! La pyromane avait l'air encore plus remontée que la veille, une mauvaise nuit ? Un jugement qui lui semblait injuste ? Ou peut-être était-elle simplement indisposée ! En tout cas, cela le faisait bien rire de la voir ainsi. Bien qu'elle soit une femme et plus petite (malgré sa taille) que la plupart des autres condamnés dans la charrette, c'était bien elle qui faisait baisser les yeux. Mais après tout, ce n'était pas vraiment surprenant venant d'une survivante qui avait combattu le fameux Giganta. Lorsqu'elle commença à le fixer, le sourire d'Eredin s'élargit en grand, pensait-elle pouvoir l'intimider ? Au final, elle détourna le regard. La journée allait être intéressante !

Lorsqu'ils arrivèrent dans le quartier Amaranthis, le petit cortège s'arrêta et Eredin donna une poignée d'ordre pour mettre les condamnés au travail. Il avait vraiment dû réussir à énerver l'héroïne du groupe car elle lui envoya quelques remarques dans les dents. Cela le fit encore plus sourire avant de lui ordonner de se bouger le cul. Ils devaient commencer par enlever les décombres d'une maison. Pour avoir plus d'information, Eredin se rendit un peu plus loin dans la rue pour trouver le chef du chantier qui avait installé une table en bois au centre de la rue. On lui demanda de s'occuper des cinq premières maisons. On lui expliqua quoi faire des débris et on le remercia pour les matériaux offerts par le clan. Avec toutes ses informations, Eredin retourna près de son groupe et donna plus d'explication pour que chacun puisse travailler efficacement.

Commença alors le vrai travail pour Eredin, ne rien faire à part surveiller tranquillement que tout se passe bien. Une lourde tâche fatigante que seul lui pouvait accomplir ! D'ailleurs, le voir ne rien faire aussi parfaitement eut le don d'énerver la pyromane, à moins que ce soit le fait qu'il la suive du regard... il s'attendait à chaque instant à se prendre une remarque, mais la rouquine se retint de tout commentaire, dommage. Le temps passa et le quartier s'anima, malgré son état, beaucoup de personne le traversait. Certains tentaient de sauver des décombres des effets qui leur appartenaient et qui étaient encore en état. D'autres n'étaient là que pour voir l'état du quartier. D'ailleurs, une connaissance à lui le remarqua en plein travail et vint le voir. C'était Léonie l'une des filles de l'Eveil des Sens. Le petit papillon s'arrêta pour discuter avec lui, toujours friand de ragot, elle lui demanda ce qu'il savait de l'attaque, ce qu'il faisait ici, etc. Eredin, heureux d'avoir un peu de distraction après autant d'effort, l'Utgardien se fit un plaisir de tout raconter ! Il modifia un peu l'histoire pour la rendre plus incroyable encore, expliqua qu'il avait lui-même combattu quelque maudits pour se faire passer pour un héros et présenta le groupe d'horrible criminel extrêmement dangereux qu'il avait la lourde tâche de surveiller. Comme toute-bonne hôtesse, Léonie joua totalement le jeu avec des étoiles dans les yeux.


- Mais fait surtout attention à elle dit-il en désignant Uraïa, si le quartier est dans cet état, c'est de son fait !
- Quoi ? C'est donc elle la sorcière ?
- Exactement !

- Hoooooo.

Voyant le regard noir de la sorcière, cela rappela soudainement à Léonie l'heure. Elle le salua, lui passa le « bonjour » de sa patronne et fila sans demander son reste. Content de lui, Eredin se remit à surveiller l'avancement des travaux.

Les heures filèrent plus vite qu'il ne l'aurait cru et enfin, c'était l'heure de la pause du midi. Il invita tout le monde à l'ombre des charrettes mangé la nourriture que l'on avait gentiment prévue pour eux. Du pain, du fromage, des saucisses sèches, quelques fruits et de l'eau. Naturellement, ils s’installèrent tous les uns à côté des autres pour pouvoir discuter. On lui demanda combien de temps ça allait durer et il répondit que ça dépendait surtout de la vitesse à laquelle ils allaient. Plusieurs commencèrent à se plaindre et il leur rappela que ce n'était pas bien cher payé pour leurs crimes. En bon chef, Eredin sortit une petite bouteille de vin qu'il partagea avec le groupe. Rien de mieux pour motiver des hommes. Au moment de la passer à la pyromane, il ne lâcha pas la bouteille lorsqu'elle tira pour la prendre. Elle lui lança directement un regard noir et il lâcha la bouteille en rigolant.



- Et bien, notre pyromane s'est levé du mauvais pied aujourd'hui, on dirait...
il marqua une pause avant de reprendre sans gêne Uraïa ! J'avais totalement oublié ton existence, tu as disparu du jour au lendemain non ? Pourquoi avoir quitté le clan ?


Ce n’était pas tout à fait vrai, il se souvenait d'elle gamine, mais c'était tout. Le groupe aurait préféré qu'il lui demande de raconter l'attaque et pourquoi elle avait foutu le feu au quartier, mais hélas pour eux, Eredin connaissait déjà l'histoire. Il préférait donc poser les questions qui l'intéressaient vraiment. Pourquoi avait-elle quitté le clan !? Pour lui, ça semblait impensable, mais elle avait sûrement une bonne raison. Et de par sa place, il était forcément curieux de savoir ce qui pouvait pousser les gens à quitter le clan.


- La vie est plus belle ailleurs ? Non je sais, l'amour ? C'est ça ?



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Lun 19 Juil - 17:23

C’était donc ça son châtiment. Plus que les travaux forcés - ce qu’elle prenait avec un certain stoïcisme - elle devait se coltiner Eredin Lautrec en contremaître et tourmenteur improvisé. En comparaison, se démener sous la chaleur de ce début de printemps était un parcours de santé. Mais il n’avait cessé de la regarder, de lui dédier des sourires moqueurs et de la narguer toute la matinée. Elle avait dû se contenir lorsqu’il avait joué les jolis cœurs devant une catin du quartier qui devait bien le connaître à la façon dont elle lui adressait des regards énamourés.

Certainement que ses tatouages et son air de vilain garçon devaient y être pour quelque chose mais étrangement, cela ne fit que redoubler son envie de lui casser la gueule. Elle déchargea toute cette frustration dans une poutre brûlée qu’elle dégagea un peu trop violemment, tirant des protestations à son compagnon d’infortune le plus proche qui faillit se faire écraser les pieds. Peu importait, ça lui faisait du bien, à elle.

A midi, elle était épuisée mais dégrisée de la veille, un point positif dans cette journée pourrie. Elle mangea silencieusement et de bon appétit car tous les efforts du matin n’étaient qu’une mise en bouche et qu’il fallait savoir profiter de la nourriture offerte quand il y en avait. Elle aurait dû deviner que le vin donné par Eredin était un piège et elle regretta aussitôt d’avoir si vite accepté ce gage de paix. Qu’avait-il bien pu se passer durant toutes ces années pour que le gamin rieur qu’elle avait connu se transforme en godelureau arrogant ? Une vie trop douce certainement.

Deux natures distinctes et opposées se disputaient invariablement en Uraïa : celle pleine de feu qui gagnait un peu trop souvent pour son propre bien et qui lui faisait foncer dans le tas dès qu’un élément perturbateur se présentait à elle et l’autre, plus calculée, plus sauvage qui prenait la mesure de la menace et la poussait instinctivement à se réfugier dans le silence et une morgue prudente. Avec Eredin, elle ne savait que faire. D’une part, ses silences et ses regards assassins semblaient l’amuser, de l’autre, si elle mettait le feu aux poudres, elle y perdrait immanquablement, c’était une certitude. Il n’attendait que ça, comme un mâtin en manque de proie pour s’amuser. C’était donc ça en définitive, il s’ennuyait. Elle n’allait pas jouer au lièvre pour son bon plaisir.

Alors qu’il récupérait la bouteille dont elle venait de s’enfiler un bon quart, elle planta son regard dans le sien, sans dévier, avec une froideur pleine d’un calme généralement annonciateur d’une tempête chez elle. Mais elle savait ce qu’elle avait à faire et se tiendrait à sa ligne de conduite, dut-elle s’enfoncer des bouchons dans les oreilles pour le supporter.

— Écoute-moi bien, Eredin Lautrec. Je suis coincée avec toi ici, et tu donnes les ordres, c’est très bien. Mais je suis pas obligée de t’écouter parler ni de te tenir le crachoir parce que tu t’ennuies. Je raconte pas ma vie, et tu m’épargnes ta jactance, ça rendra les prochains jours plus faciles pour tout le monde, crois moi.

Ce n’était ni une question ni véritablement un ordre, juste un fait qu’elle énonçait et une ligne qu’elle comptait tenir. Elle pensait en avoir terminé là mais elle se surprit à reprendre tout de même, après avoir marqué une pause.

— Et la prochaine fois que tu penses te goberger devant une pute de passage, songe bien aux morts que tu déshonores ici et qui se sont vraiment battus pour cette ville. De bons guerriers se sont fait déchiqueter par les maudits pour sauver des gens qui n’avaient pas demandé à se trouver là. Les bûchers fument encore, bordel. Si tu es vraiment un guerrier de l’Hurlsk, montre un peu de respect.

Elle secoua la tête en terminant sa sentence qui s’était achevée avec un peu trop de véhémence à son goût. Pourquoi avait-il fallu qu’elle ajoute ça ? Autant pisser dans un violon. Les types du genre de Lautrec, elle les connaissait. Ils n’avaient aucune once d’empathie pour ce qui ne les concernait pas directement. Ils n’avaient d’honneur que lorsqu’ils étaient offensés et de bravoure que lorsqu’ils s’agissait de défendre leur ego. Encore de la salive gaspillée en vain. Elle retourna à son silence, qu’elle regrettait déjà d’avoir quitté. Nul doute que Lautrec avait désormais un bel os à ronger, un os qu’elle lui avait donné sans le vouloir.

Le mal était fait, et il était fort probable de toute façon que ce genre de type saisissait la moindre occasion pour harceler l’objet de leur attention, comme une nuée de taons autour du bétail. Elle ferma un instant les yeux avec résignation et s’efforça au calme et à la patience, deux vertus dont elle n’avait pas hérité naturellement, au grand regret d’un paquet de gens, en commençant par elle.

***

Elle ne tarda pas à reprendre le travail, fuyant tout à la fois ce Lautrec qui lui tapait sur le système et quelque chose de plus insidieux qui lui pesait presque autant que sa gueule de bois du matin. C’était ce quartier, cette odeur de brûlé, c’était le poids du soleil sur ses épaules. Elle était fatiguée d’un mal qu’elle ne pouvait nommer, et que d’autres auraient pu identifier sans mal comme le deuil. Mais Uraïa était aveugle à elle-même à bien des égards. Elle avait passé les dernières années de sa vie à bâtir un mur solide entre elle et ses émotions profondes, et elle vivait seulement pour se rendre compte qu’il n’était pas si solide qu’elle l’aurait cru. Elle se morigéna pour cette faiblesse qui la guettait et elle redoubla d’ardeur, ignorant sa gorge sèche et sa migraine qui revenait au galop. Bientôt l’auberge calcinée qu’ils étaient occupés à déblayer n’eut plus qu’une façade et une portion de toit éventré pour tout appui, et nul n’avait vraiment songé qu’il leur faudrait un échafaudage pour briser la charpente la plus élevée. Chacun se regarda un instant en silence pour savoir comment ils allaient bien se dépêtrer de cet épineux problème et pendant qu'ils se faisaient des noeuds à la cervelle à y réfléchir, Uraïa trouva une corde à laquelle elle se relia, avant de la jeter au sommet de l’édifice d’un geste sûr.

C’était l’habitude d’affronter des monts escarpés, tout comme la pensée pragmatique qu’elle était la plus légère et la plus habile pour grimper là haut. Elle passa sa masse dans son dos et entreprit l’ascension après avoir donné le bout de la corde à quelqu’un capable de la retenir en cas de chute. Tout se passa comme prévu et en quelques mouvements, elle déploya toute l’habileté acquise au fil des années, mettant à l’épreuve les muscles de son dos, de ses épaules, de son ventre et de ses cuisses pour se hisser sur le morceau de corniche qui subsistait encore. Elle ne prit pas la peine de regarder en bas, elle sentait bien assez le groupe de prisonniers la fixer tandis qu’elle accomplissait sa petite démonstration de force. Elle espérait qu’ils en avaient pour leur argent.

Elle empoigna sa masse et commença son œuvre de destruction. Les morceaux de charpente se défirent comme un rien, des morceaux de toit entier s’écroulant avec fracas et force poussière en contrebas. Elle espérait que leur zélé contremaître prenait son content de poussière dans les naseaux lui aussi. Détruire lui faisait un bien fou, étrangement, et elle avait presque retrouvé le sourire lorsqu’elle entendit un craquement sinistre. Un instant elle revit le visage de Markus, cette fameuse fois où ils s’étaient lancés dans cette chasse ubuesque à la wyrm aquatique et qu’ils avaient réveillé un béhémoth à la place. Elle l’entendit distinctement prononcer du tréfonds de sa mémoire “ Putain, encore la chance”. Elle eut un petit sourire triste et s’effondra, traversant le plancher qui se dérobait sous ses pieds, avant de s’étaler au milieu des gravats et de la poussière quelques mètres en contrebas - et des mètres de corde qui ne lui avaient servi à rien.

Il n’y eut étrangement pas de douleur, juste un moment de parfait silence puis ce son aigu qui monta dans ses oreilles et qui la rendit sourde à tout ce qui l’entourait. Elle qui rêvait de faire taire Lautrec, la solution venait d’être toute trouvée. Sa vision était bizarrement trouble, et elle se rendit compte qu’elle ne respirait plus, le souffle coupé par la chute. Elle s’efforça à une brusque et maladroite inspiration, comme lorsqu’elle jouait à plonger avec les autres gamins du clan dans les étangs glacés les premiers jours d’été, et que le froid leur mordait les membres tout d’un coup comme un loup enragé. Elle se demanda si elle s’était fracturé des côtes et se releva des décombres, comme un animal blessé prêt à se défendre d’une nouvelle attaque. Elle allait bien, bordel ! Pourquoi la regardaient-ils tous comme ça ? Lautrec devait bien se marrer, ça oui… Où était-il d’ailleurs, hein ? Elle fit un pas en avant, digne d’un ivrogne en fin de soirée, vacilla sur ses appuis...

Puis le noir total.


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Jeu 22 Juil - 13:28
He bien ! Eredin savait qu'elle était énervée et que sa petite blague n'allait qu'ajouter un peu d'huile sur le feu, mais il n'aurait imaginé qu'Uraïa lui réponde avec autant de véhémences. Un temps soufflé par la surprise et son audace, il se ravisa vite pour arborer son éternel sourire tout en se passant la main droite dans la barbe.

- Sois gentille avec Léonie, c'est une brave fille !

Il termina sa phrase avec un petit clin d’œil pour la rouquine histoire de lui faire croire qu'elle ne l'avait absolument pas atteint avec ses propos. L'envie de lui répondre était bien là, mais Eredin se retint de le faire. Pour quelle raison ? Lui-même ne le savait pas trop, mais voyant dans quel état elle se trouvait après une demie journée, le guerrier était persuadé qu'attendre était la meilleure chose à faire. Il aurait à coup sûr bien d'autres occasions de lui répondre. Néanmoins, et bien qu'il tentait de faire comme si de rien était, elle avait réussi à l'énerver ! Comment osait-elle lui parler ainsi devant tout le monde ? Elle venait de le rabaisser et de lui faire une leçon de morale comme si il n'était qu'un enfant. Pour qui se prenait-elle ? Ho oui, elle allait sentir le coup revenir au moment venu.

Le repas terminé, ils reprirent tous le travail avec entrain et bonne humeur ! Eredin ne se préoccupa plus de la pyromane. Énervé, l'Utgardien avait préféré prendre quelques distances pour éviter de dire des choses qu'il pourrait regretter. Et alors qu'il discutait de l'avancement des travaux et de la façon de faire pour démolir la troisième maison qui était sur le point de s'effondrer, il entendit des cris venant de son chantier. Que s'était-il encore passé ? Par Njörd, si Uraïa avait déclenché une bagarre, elle allait apprendre sa place ! Et si l'incident tournait bien autour de la jeune femme, ce n'était pas ce qu'il avait imaginé. Le plancher sous ses pieds s'était effondré et la jeune femme était tombée de plusieurs mètres. La sorcière s'était relevé comme si de rien était avant de s'écrouler à nouveau, mais cette fois inconsciente. Voyant qu'aucun des idiots n'avaient bougés le moindre petit doigt, Eredin s’avança en donnant des ordres. Que l'on prépare une charrette et qu'on l'aide à la transporter ! Il installa la jeune femme à l'arrière avant de s'élancer vers le quartier Utgardien.

Selon la guérisseuse qui s'était occupée d'elle, ce n'était qu'un coup à la tête et Uraïa ne craignait plus rien maintenant. Elle allait devoir passer la nuit ici sous surveillance pour que l'on s'assure qu'elle ne fasse pas une hémorragie et si ce n'était pas le cas, elle pourrait sortir le lendemain matin. Eredin demanda à rester auprès d'elle, on l'avait chargé de veiller sur elle, il allait donc remplir son rôle. On le laissa rentrer dans la pièce après avoir recouvert l'intimité de la jeune femme qui s'était fait examiner le corps entier à la recherche de blessure. Le guerrier s'installa dans un fauteuil sur le coin du lit avec la promesse de la guérisseuse que s'il osait faire quoi que ce soit, c'est lui qui se retrouverait dans le lit dans les vapes... comme si c'était son genre. Plongé dans l'obscurité, Eredin passa une bonne partie de la nuit à attendre sans s'endormir. Le silence coupé de temps en temps par la guérisseuse qui venait voir si sa patiente allait bien. Après plusieurs heures, lorsque la belle au bois dormant commença à émerger, ce fut Eredin qu'elle vit en premier. Uraïa tenta bien de se redresser, mais le guerrier l'en empêcha en lui retenant une épaule et en remontant un peu plus le drap blanc pour éviter de s'attirer ses foudres gratuitement.


- Ne bouge pas, tu as fait une vilaine chute et tu t'es cogné la tête. Je vais aller chercher la soigneuse... s'assurant qu'elle n'allait pas bouger, il la lâcha et commença à se diriger vers la porte avant de s’arrêter après quelques pas. Je ne veux pas te voir demain sur le chantier, tu as besoin de te calmer avant de revenir ou la prochaine fois, tu vas réussir à prendre une vie... Je te vois après-demain princesse ! Puis il quitta la pièce sans lui laisser le temps de répondre.

A vrai dire, la soigneuse lui avait imposé une journée entière de repos pour s'en remettre, mais au vu de son tempérament, Eredin était persuadé qu'elle aurait refusé de s'y conformer. Sauf qu'après ça, elle n'avait plus le choix et de toute façon, il ne l'accepterait pas sur le chantier.

Le problème avec une personne en moins dans l'équipe, c'est que le travail avance moins vite. S'ils prenaient du retard, ça voulait dire que tout le monde serait bloqué plus longtemps, lui y compris. N'ayant pas sa « protégée » à surveiller, Eredin décida de remonter les manches et de donner un coup de main aux autres détenus. C'était ponctuel et ça n'avait pas intérêt à se répéter, mais de cette façon, ils ne prirent aucun retard. Les gravas furent totalement dégagés, les murs abîmés furent abattus et on ne garda debout que les fondations encore totalement intactes. À la fin de la deuxième journée, la première maison était totalement nettoyé et la seconde bien entamée !

Le lendemain, comme convenu, Uraïa se présenta et Eredin l’accueillit avec un petit sourire.


- Le retour de la princesse... Allez, monte.
Dit-il en lui tendant une main pour l'aider.

Si elle pensait que chuter et se blesser à la tête suffisaient à lui faire oublier ou à l'attendrir, elle se trompait et se fourrait le doigt dans l’œil jusqu'au coude. Néanmoins, Eredin préféra s'assurer qu'elle était d'attaque, rien à voir avec de la sympathie, c'était simplement son rôle.

- Ne force pas trop aujourd'hui et si tu sens que ça ne va pas, dit le ! Je n'ai pas envie d'un nouvel accident.


Puis la charrette s’élança une nouvelle fois pour le quartier Amaranthis. Il reprit son poste de surveillance et cette fois, ignora la jeune femme. Il semblerait que la regarder la mettait mal à l'aise, la rendait agressive et lui faisait faire n'importe quoi. Donc Eredin espérait qu'en l’ignorant, tout irait mieux...
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Jeu 22 Juil - 18:03
Quand Uraïa émergea des limbes où elle était, elle constata deux choses. Non, trois. D’une, elle avait un mal de crâne terrible, comme si elle avait fait une chute de plusieurs mètres et avait atterri en plein dans un tas de gravats. Étrange. De deux, elle était complètement nue, couchée sous un drap dans une chambre qu’elle ne reconnaissait pas. De trois, elle croisa le regard de Lautrec qui lui interdit aussitôt de se redresser d’une main sur l’épaule. Elle faillit se fâcher, mais il avait déjà redressé le drap pour l’empêcher de se découvrir, ce qui était peut être le geste le plus prévenant qu’il avait eu envers elle d’aussi loin qu’elle se souvienne.

Trop amochée et nauséeuse pour dire ou faire quoi que ce soit, elle se contenta de plaquer son bras sur le drap en question et perçut dans une bouillie de mots qu’il lui interdisait de revenir sur le chantier tant qu’elle ne serait pas remise. Ah, et il l’avait appelée princesse aussi. Elle roula des yeux et se rendormit. Elle rêva. Elle bandait un arc qui n’était pas à elle, d’une taille gigantesque et elle l’avait placée en baliste sur l’épaule de Markus qui ne cessait pas de râler alors qu’elle tentait d’ajuster le meilleur tir possible. Un puissant carreau sombre, droit dans la direction de la plus terrible des monstruosités qu’elle avait jamais eue à affronter. Le trappeur tremblait et elle siffla entre ses dents avec agacement. La pointe du puissant carreau était noire et brillante, parfaite. Elle allait revenir parmi les siens, couverte de gloire. Elle ne serait plus maudite. Elle banda l’arc et elle expira, le trait partit avec une vitesse foudroyante… C’était beau. Jusqu’à ce que le projectile heurte le Giganta. Celui-ci l’attrapa avec la vitesse de l’éclair. Un simple balai. Il l’observa et le rompit en brindilles. Uraïa restait figée sur le toit déchiqueté sans comprendre. Où était passé le splendide carreau ? Soudain, Markus n’était plus là. Il était dans la poigne du monstre, bien loin hors de sa portée. Il se débattait mais elle ne pouvait pas l’entendre crier.

Elle voulut saisir une flèche de son carquois mais celui-ci était vide et de toute façon, l’arc était bien trop lourd. En bas, Baldhramn hurlait quelque chose d’un air furieux. Il lui lança une corde qu’elle ne put attraper. Elle lui fit signe de la jeter une seconde fois mais trop tard, il se fit engloutir par la marée des morts et disparut. Elle l’avait laissé mourir sans pouvoir rien faire. Quand elle releva le nez, elle vit le giganta armer son bras avec son nouveau projectile, droit sur elle, comme l’ironie du sort s’abattant sur elle de plein fouet. Markus atterrit sur le toit comme un pantin désarticulé, ses os se brisant dans un bruit écœurant. Lorsqu’il se releva pour bondir sur elle, la fixant de son air vide et mort, elle tomba à genoux sur le toit. Elle poussa un hurlement.

Elle était seule dans la petite chambre et elle mit du temps à comprendre où elle était. Avant que la guérisseuse n’entre avec le regard inquiet, elle avait déjà renfilé une chemise et son pantalon et la bouscula pour sortir dehors. C’était déjà la nuit, même si elle n’avait aucune idée du temps qu’elle avait passé dans cette chambre. Peut-être un jour entier. Eredin avait dit qu’il l’attendait le surlendemain. Elle avait donc dû passer la journée à comater. Cette pensée rationnelle lui fit du bien, tout comme l’air frais du soir, malgré sa tête brûlante. Elle se laissa diriger par ses pas sans savoir où elle allait, pieds nus dans la terre battue de la place. Elle était de retour dans le clan et peu de gens circulaient encore à cette heure, sauf en direction de la hutte de l’Hurlsk où tous aimaient boire et se rassembler à la nuit. Aussi, peu firent attention à elle et son air de folle à lier. Elle marcha tout droit vers les quais, un endroit qu’elle affectionnait en dehors de la maison du fauconnier. Mais penser au vieux bougre ne l’aidait pas.

Elle s’assit au bord du ponton et plongea ses pieds nus jusqu’à la cheville dans l’eau noire et froide. La sensation glacée la rasséréna étrangement. Elle reprit son souffle et se rendit compte qu’elle avait le cœur battant comme si elle avait couru. Baldhramn était mort. Mais pas Markus. Là, dans le silence seulement brisé par les vagues de la marée, elle s’autorisa à pleurer la perte du géant. Elle pleurait l’injustice, elle pleurait son impuissance, elle pleurait son incompréhension d’être là alors que tant d’autres étaient morts, elle pleura parce qu’elle était vivante et qu’elle n’arrivait pas à s’en réjouir. Finalement, elle s’arrêta. Elle se pencha et s’aspergea le visage et la nuque d’eau froide. Le sel ne lui tira pas d’autres larmes. Elle en avait déjà trop versé.

Elle se redressa laborieusement, en soufflant. Tout son corps était couvert d’ecchymoses, et tous ses muscles lui faisaient mal. Elle était fourbue et malheureuse, mais elle avait recouvert la maîtrise d’elle-même. Elle se redirigea vers la maison de la guérisseuse et lorsqu’elle croisa celle-ci sur le seuil, les poings sur les hanches, elle leva les mains en signe de reddition avant que l’autre s’exclame :

— Par Njörd, on dirait une revenante ! Viens ici, ma fille !

Elle l’attrapa sans ménagement par les bras, lui sécha les pieds et le visage avec une serviette rugueuse comme la langue d’un chat, puis l’installa à une table devant le feu, et lui mit un bol de bouillon entre les mains.

— Mange !

Elle se retourna pour fermer la porte de la maison à clé avant de glisser cette dernière dans une poche de son tablier et l’observa d’un œil inquisiteur tandis qu’Uraïa se découvrait soudain un appétit d’ogre. La guérisseuse sourit finalement et se rassit en face d’elle sur un tabouret.

— C’est bien, reprends des forces Tu en auras besoin. Eredin Lautrec t’attend demain sur le chantier.

La rousse s’empara d’une miche de pain entamée et la brisa en deux, en trempant un gros morceau dans le bouillon avant de l’engloutir, son intérêt pour la conversation ravivé.

— Eredin Lautrec. Il était là, à mon réveil.
— Oh que oui, ma fille. Il t’a ramenée du chantier et il a passé la première nuit ici, à te surveiller. Un brave garçon. Et honorable.

Elle lui adressa un signe de tête entendu. Elle n’aurait pas laissé un vaurien dans la chambre d’une femme inconsciente. Uraïa grogna vaguement, dans son coin.

— L’Hurlsk l’a chargé de me surveiller.

Néanmoins, son ton était moins péremptoire qu’elle l’aurait voulu. Elle l’avait peut-être jugé un peu durement. Elle n’oubliait pas cependant le tour qu’il lui avait joué avec l’Hurlsk. Elle se redressa après avoir engouffré la miche de pain et son deuxième bol de bouillon, et esquissa un sourire pour la guérisseuse qui lui indiquait déjà son lit avec autorité.

— Merci, Sturla.

***

Le lendemain, elle avait pris un bain, changé de vêtements, mangé une paire de saucisses et du fromage et était même repartie avec un panier bien rempli de Sturla, en prévision des efforts sur le chantier. La matinée était belle, et un léger vent venait rafraîchir les premières ardeurs du soleil. Un temps idéal. Uraïa avait couvert ses bleus d’un pourpoint de cuir et marchait avec une certaine raideur, rien qui ne passerait avec le temps et quelques nuits de sommeil. En attendant, elle ne comptait pas être en retard. Elle avait déjà montré assez de faiblesse par sa journée d’absence et serait bien surprise de voir que le chantier n’avait pas pris de retard à cause d’elle. Elle ne broncha pas au salut d’Eredin à qui elle dédia un petit signe de la tête, acceptant sa poigne pour grimper dans le chariot, l’air un peu moins revêche qu’à son habitude. Il ne l’ennuya pas et si elle en fut surprise, elle ne lui montra pas.

Elle constata très vite que les choses avaient bien avancé en son absence et interrogea un de ses camarades du regard, un jeune voyou du port qui s’était fait attraper à revendre du poisson en sous-main. L’autre étira un sourire tout en s’attaquant au chantier :

— Y’a pas que toi qui sais manier la masse, rouquine. Même que Lautrec nous a filé un sacré coup de main.

Uraïa étira une nouvelle moue. Décidément, un vrai enfant de chœur, le blondinet. Elle savait ce qui lui restait à faire : elle redoubla d’ardeur pour ne pas être en reste. Ses coups n’étaient pas aussi précis et puissants qu’elle l’aurait souhaité, mais elle se retrouva rapidement en nage et un insidieux mal de crâne la reprit en fin de matinée, lorsque le soleil s’avéra assez haut dans le ciel. La pause apparut bienvenue, et elle s’installa avec les autres pour partager le repas du midi. Cette fois, c’est elle qui partagea les vivres de la vieille Sturla, qui s’était montrée généreuse. Elle tendit le saucisson, le pain et le fromage sec qu’elle avait glissé dans plusieurs torchons et fit passer une part en gage de paix à Eredin, sans froncer le sourcil ni afficher l’hostilité dont elle avait fait preuve jusque-là.

Alors que tous étaient occupés à manger et à plaisanter, elle finit par se racler la gorge, et voulut s’adresser à lui mais elle fut interrompue par l’arrivée d’un Amaranthis bien habillé, visiblement pas un de ces types qui cassaient de la pierre toute la journée à en juger par la douceur de ses mains et ses nombreuses bagouzes.

— Eredin Lautrec ?

Il cherchait visiblement le blondinet du regard, et le trouva facilement. Il affichait un sourire affable des plus satisfaits.

— Au nom des commerçants Amaranthis que je représente, je tenais à vous signifier mes compliments. J’étais venu inspecter l’état des travaux, et vous êtes de loin celui qui a le plus avancé. Nous allons bientôt pouvoir reconstruire ici… Si vous cherchez du travail dans ce domaine, vous êtes le bienvenu… Nous savons valoriser les ouvriers à la hauteur de leur talent, croyez moi.

Uraïa eut un sourire amusé tout en observant ce parvenu Amaranthis. Il devait assez mal connaître les us et coutumes Utgardiennes pour prendre un guerrier de l’Hurlsk pour un vulgaire ouvrier. Mais elle se rappela qu’il ne savait ni lire les tatouages des Utgardiens ni reconnaître leur coupe de cheveux, ni même lire dans leur posture et leur maintien, ni identifier que la hache qui pendait à la ceinture d’Eredin n’était pas faite pour couper du bois. Elle imaginait Eredin Lautrec en simple maçon pour les Amaranthis et l’idée lui tira un autre sourire. Elle se contenta d’observer le guerrier faire preuve de toute la diplomatie Utgardienne avec un brin de malice dans le regard.


Eredin Lautrec
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Lun 26 Juil - 14:43
Eredin le maçon, c'était nouveau ! On ne le lui avait jamais fait celle-là. Il aurait pu mal le prendre, comme une insulte à son entraînement martial et pour tout un tas de choses, mais à quoi bon ? Il se leva simplement et s'approcha de l'inspecteur en souriant.

- Si nous sommes ceux qui ont le plus avancé... alors il faut vraiment songer à renvoyer les autres !

N'était-ce pas vrai ? Si une bande de criminels réunie à la hâte arrivait à devancer des artisans Amaranthis, c'est qu'il y avait vraiment un problème dans leur façon de faire. Les Utgardiens étaient réputés pour ça, mais tout de même ! Ce n'était donc pas surprenant de voir un riche Amaranthis venir tenter de le séduire avec de l'argent. Travailler pour des maudits traîtres à la cité, qui refuserait une telle offre ?


- Vous pouvez remercier mes hommes pour ça
, dit-il en montrant le chantier derrière eux. Et si vous voulez vraiment engager des personnes compétentes, je connais des noms, ils seront bien plus efficaces que nous encore, mais sûrement pas aussi charmant...

L'Amaranthis eut des étoiles dans les yeux et se mit à rire avant de serrer chaleureusement la main d'Eredin.

- Pour le charme, je saurais m'en passé !
- Vous devriez aller voir le contremaître Emerik, il pourra vous fournir autant d'hommes que vous souhaitez. Des gens compétents et motivés ! Avec eux, le quartier serait remis sur pied tellement vite que les grandes pontes Amaranthis vous féliciteront pour votre boulot...
- Je n'y manquerais pas ! Merci Eredin.


Le quartier avait été détruit par une Utgardienne et si au final, ils embauchaient des Utgardiens pour le reconstruire, ça serait vraiment une bonne blague... mais comme bien souvent, c'est ainsi que le monde tournait. Quoi qu'il en soit, le guerrier en avait terminé avec la diplomatie, il retourna simplement s’asseoir pour finir son repas, ce qui mit un terme à la conversation et poussa l'Amaranthis à partir. Une fois au loin, Eredin se mit à rire.


- Et après, on dit que ce sont eux les cerveaux de la ville... j'ai vraiment une gueule de maçon ?


Après la pause, ils reprirent les travaux sous les encouragements d'Eredin ! Les louanges de l'Amaranthis avaient motivé le groupe entier et maintenant, le guerrier voulait prendre tellement d'avance qu'ils allaient être obligés de reconnaître la grandeur du clan ! Il les poussa donc à travailler plus vite et à redoubler d'efforts, mais Eredin dut se raviser en voyant la sorcière montrer des signes de faiblesse. Il ne voulait pas d'un deuxième accident et au final, ils étaient déjà en avance, donc il ordonna aux autres de ralentir pendant qu'il forçait Uraïa à faire une pause.


- Ralentis princesse, je sais que tu as les capacités, mais je veux pas avoir à te porter une deuxième fois.


Il lui tendit une gourde d'eau pour se rafraîchir avant de l'observer tranquillement, pas trop longtemps et sans insistance pour ne pas s'attirer ses foudres. Elle s'était clairement détendue comparé au premier jour, mais il n'avait pas envie de raviver les braises de sa colère, pas pour l'instant tout du moins. C'était sûrement le meilleur moment pour tenter d'avoir des réponses.


- Tu es chasseuse, il paraît non ? Avec ton groupe, vous chassez quoi ?


Oui, il voulait surtout savoir pourquoi elle avait quitté le clan, mais peut-être qu'une approche plus détournée était préférable... et étant lui même chasseur, ça l’intéressait aussi de savoir qu'elles étaient ses compétences.


- Je ne me souviens pas t'avoir déjà vu dans un groupe de chasse du clan.





Uraïa
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Mar 3 Aoû - 0:31
La rousse prit une longue gorgée d’eau. La pause était bienvenue et Eredin semblait… plus sérieux, moins moqueur. Elle lui devait bien une réponse et puis son œil s’était allumé à la mention de la chasse, malgré elle.

— J’ai jamais eu l’occasion de chasser avec le clan. J’étais partie avant. Mais j’ai bien un groupe. On chasse selon les contrats. Parfois de grosses prises…

Elle sourit, chose rare.

— Je piste, et j’envoie mes faucons sur les petites prises. Souvent ça suffit à nous nourrir le temps de la chasse.

Il ouvrit grand les yeux :

— Tu utilises des oiseaux pour t'aider dans la chasse ? Incroyable !

Il tourna la tête vers le ciel pour imaginer les possibilités qu'un tel allié pouvait offrir.

— Tu les as apprivoisés toi-même ?

Elle secoua la tête doucement.

— Ce n’est pas si simple. Affaiter des rapaces prend du temps. Tu dois te faire accepter d’eux, les comprendre. Et une fois fait, ils deviennent une part de toi. C’est un ancien du clan qui m’a appris.

— Ça doit être sacrément pratique à l'extérieur, je comprends pourquoi votre groupe arrive à s'en sortir. Avec de telles compétences, tu pourrais largement chasser pour le clan... pourquoi tu ne le fais pas ? pourquoi être partie ?

Il avait enfin posé la question qui lui brûlait les lèvres. Elle soupira longuement, perdant à nouveau son sourire, comme un nuage voile l’horizon, puis ajouta d’une voix sourde loin des oreilles des autres.

— Je suis maudite. Ma famille l’est. C’est connu.

Eredin le savait très bien, mais il voulait l'entendre de sa bouche.

— Tu crois en ta malédiction ? Donc tu crois à la sorcellerie... sorcière ?

Mais avant qu'elle ne s'énerve, il leva les mains comme un innocent et reprit :

— Personnellement, je n'y crois pas... Mais chacun ses croyances, n'est-ce pas ? Je trouve ça simplement dommage qu'une Utgardienne comme toi tourne le dos au clan...

Elle fronça les sourcils et désigna le ciel d’un doigt.

— L’ancienne me l’a prédit. Je subirai le même sort que ma mère et sa mère avant elle. Tu irais contre son avis ?

Elle poussa un profond soupir et reprit un peu d’eau.

— Qui serais je pour lutter contre la volonté des dieux ?
— Quand j'étais encore enfant, avec Uriel et Isaac, nous avons enfermés des bébés Cocatrix dans la hutte de l'ancienne. Si tu avais vu sa colère... Je crois que nous n'avons jamais été autant punis de notre vie, Uriel le premier. Eredin marqua une pause en se remémorant cette fameuse punition - Tu comprendras que depuis, l'enfant que je suis a toujours du mal à écouter notre vénérable ancienne qui ne sait pardonner des gamins idiots... quand a la volonté des Dieux, j'ai bien du mal à croire qu'ils te fassent traverser Uvn dit-il en faisant référence au quartier Amaranthis qui s'était transformé en un véritable enfer pour te la prendre au moment de donner la vie ... Un silence s'installa entre eux avant qu'il reprenne mais qu'en sais-je au final ? Le soleil tape plus fort que je ne le pensais ! et tu as bien raison de fuir, c'est sûrement la meilleure solution...

C'était lâche, pourtant, il le savait. Elle écouta son histoire avec un petit sourire, se remémorant ses propres facéties étant enfant puis laissa passer un silence à sa conclusion.

— Je n’ai pas fui. J’ai quitté le clan pour m’éviter la honte et épargner un homme de mon destin. J’ai vu ce que la mort de ma mère a fait à mon père. J’ai porté le poids de son regard toute mon enfance.

— Je comprends, la perte d'un être cher, ce n'est pas quelque chose que l'on surmonte facilement... mais si ton destin est d'avoir un enfant, tu n'y échappera pas et t'éloigner du clan n'aura servi à rien.

Elle haussa une épaule résolue.

— Jusque là j’ai réussi à y échapper.

Elle évitait de mentionner la solitude qu’elle s’était imposée. Maintenir la distance, éviter les attentes. Dans un monde où la survie passait par le nombre, elle était un poids qui ne contribuait en rien à l’essor du clan.

— Pour l'instant en effet. Et se tenant le menton pour tenter de se souvenir de son prénom Et cet homme qui a pris ta défense pendant le conseil... Varus ? Ou Cassius ? je sais plus. Il avait l'air vraiment très... - Il prit une grande inspiration pour trouver le bon mot -  motivé à te défendre... et avec un sourire qui en disait long, il ajouta, Le danger vient parfois de là où l'on ne s'y attend pas !

Elle haussa bien haut les sourcils en l’observant.

— Varus ?

Elle semblait complètement larguée. Elle ne voyait même pas de quel homme il parlait.

— J’étais trop énervée pour m’en soucier.

C’était sa grande spécialité après tout.

Sautant du muret sur lequel il était posé, il commença à vouloir faire une imitation de Caïus

— Un ami à toi il me semble, il disait t'avoir aidée à mettre le feu à la cité.

Elle s’esclaffa. Elle voyait maintenant. Très bien.

— Markus !

Si Markus l’avait vu, il était certain qu’il se serait peut être un peu vexé de cette imitation.

— Il est celui qui a rassemblé notre groupe de chasse. C’est un bon trappeur.

Il se retint de sortir une blague de mauvais goût et ajouta avec prudence :

— Il a l'air de t'apprécier ! Pour un Ascanien...

Elle souffla du nez. Bien souvent, elle regrettait cet aspect de sa personne. Mais étonnamment elle avait fini par l’oublier. C’était devenu un sujet de plaisanterie au mieux.

— Il a été élevé par un prêtre ascanien. Rien de plus. On se connaît depuis des années. Il a prouvé sa valeur et on s’est mutuellement sauvé la vie plus d’une fois…

Elle se sentait obligée de le défendre, comme s’il y avait un besoin de protéger le chasseur sans véritable raison. Il se posa à nouveau sur son muret à côté de la sorcière

—Je comprends, un compagnon proche, c'est rare, et même si c'est un Ascanien, on lui pardonne.

Elle sourit doucement, avant d’acquiescer, coudes sur les genoux.

— Oui, c’est un bon compagnon…

Elle marqua une pause avant de lui tendre son outre personnelle.

— Pourquoi tu n’es jamais sorti du clan toi ? Tu as la mine d’un explorateur, d’un chasseur, et pourtant tu restes ici.

Il attrapa son outre et prit une petite gorgée avant de lui montrer son bracelet d'argent.

— Voilà pourquoi ! De grandes responsabilités... je ne peux pas faire n'importe quoi car beaucoup de monde compte sur moi et ca risque d'être encore plus vrai dans le futur, mais je suis heureux comme ça, j'aime le clan, c'est comme ma famille ! Et en plus de ça, j'arrive toujours à trouver du temps pour faire ce que j'aime, comme la chasse ! Et parfois de l'exploration pour changer un peu d'air.

Il lui rendit son outre en la remerciant.

— Et regarde, je me retrouve avec les meilleurs boulots du monde comme ça.

Elle secoua la tête en lâchant un léger rire. Elle commençait à comprendre son humour et rangea son outre.

— Splendide. Mais si tu veux vraiment de l’aventure, il faut prendre le risque de te perdre.

Elle se souvenait de cette sensation d’immensité et de total inconnu. L’écrasante perception du monde et de ses dangers. Une liberté absolue et sauvage. C’était un voyage qui ne pouvait pas vous laisser en paix, ou aimer son foyer trop longtemps.

— J'ai déjà du mal avec les princesses de la cité, je pense ne pas être prêt pour la grande aventure ! Il lui fit un petit clin d’œil joueur - Quand à me perdre, la dernière fois, j'ai bien cru ne jamais revenir... donc je vais t'avouer être moyen chaud ! Surtout que je ne parle pas aux oiseaux comme toi.

Elle ricana à sa mention des princesses de la ville. Qui n’aurait pas du mal avec elles ? Puis elle reprit.

— Le jour où tu devras partir, tu le sentiras. Et alors rien ne pourra te retenir. Pour le reste, la nature est un grand livre qu’il faut savoir décrypter. Si tu sais la lire, tu n’es jamais seul. Et tu retrouveras ton chemin.

— Je l'ai déjà sentie, cette sensation, un médecin apothicaire je sais pas quoi d'Amaranthis est venu recruter des gens pour un voyage à l'Oeil de Shoggoth... je me suis jeté sur la mission, j'avais besoin de partir ! Et qu'importe mes responsabilités, mon devoir ou le bon sens, j'ai foncé tête baissé à l'extérieur... et maintenant que j'y pense, d'une certaine façon, j'y ai retrouvé mon chemin.

Il observa Uraïa comme la sorcière qu'elle était en se demandant si elle avait vraiment des pouvoirs ou non

— Naaah... tu as pas de pouvoir, sinon tu m'aurais déjà brûlé...

Et il lui fit un petit clin d'œil. Elle lui flanqua son poing dans l’épaule avec un regard noir qui n’avait rien de très crédible, une étincelle de malice dans les yeux.

— Pas besoin de magie pour te botter le cul. Si j’en ai envie.

Elle ajouta avec une pointe de flagornerie, juste de quoi le défier.

— Mais je sais bien des choses que tu ne sais pas.

Elle eut une pointe de remords à l’idée que peut-être, c’était vrai. Elle avait fait le rapprochement bien tard mais elle avait croisé une femme balafrée qui ne voulait pas revenir. Et qui devait constituer une balafre bien plus grande pour le blondinet, une blessure invisible chez le guerrier.

Il siffla en voyant l'assurance que sa détenue prenait avant de la pousser gentiment de l'épaule.

— Je dis pas, à la chasse je ne pense pas avoir mes chances... mais en bottage de cul, je me défends plutôt bien !

Eredin sauta ensuite de son mur avant de s'étirer.

— Moi aussi je sais des choses que tu ne sais pas ! Mais ça ne fait pas de moi un sorcier, sorcière !

Elle s’esclaffa de bon cœur en se redressant de toute stature. On ne refaisait pas la fierté Utgardienne.

— La magie c’est pour les tricheurs.

Elle s’étira et retint une grimace à ses os douloureux. Il faudrait qu’elle soit au seuil de la mort pour s’en plaindre.

— Quant à se battre… Tu es probablement fort et agile. Mais j’ai chassé plus gros.

Elle étira un demi sourire goguenard. Guerrier ou pas, si elle était décidée, elle l’affronterait et lui donnerait du fil à retordre. Pour la première fois, Eredin la détailla longuement de haut en bas sans même se cacher. Elle allait surement prendre ça pour de la convoitise alors qu'il était simplement en train de se demander si elle avait ses chances en combat singulier.

— Au moins, tu as le bon état d'esprit, mais tu dois être à moitié aveugle pour ne pas voir la différence entre nous deux... sans magie, tu n'as aucune chance !

Et il écarta grand les bras pour la provoquer.

Elle affronta son regard de son air rude, affichant toute la menace dont elle était capable, une assurance pleine et entière en ses capacités. Il ouvrit les bras pour le défier et si elle avait été plus jeune, elle aurait pu tomber dans le panneau. Elle haussa les sourcils avec un air dédaigneux et fit mine de s’en désintéresser, le contournant nonchalamment avant de lui envoyer un taquet dans les reins. Rien de bien méchant, elle s’amusait seulement.

Eredin arbora un énorme sourire victorieux lorsqu'elle détourna la tête. Alors on faisait moins la maline d'un coup ? Puis il explosa de rire en faisant un bond sur le côté lorsqu'elle lui envoya un coup dans les reins. Amusé, il sautilla sur place comme un boxeur, prêt à la recevoir.

— Tu veux jouer hein ?

Elle eut du mal à ne pas rire de même. La joie de vivre de l’Utgardien était contagieuse et quelque part il lui rappelait trop bien son frère de lait. Elle fit mine de le toiser de nouveau de toute sa superbe et pourtant elle plaçait déjà ses pieds et ses épaules, avisant les moindres ouvertures chez son adversaire. Elles n’étaient pas nombreuses.

— Moi jouer ? Jamais.

Et pourtant ce fut le moment qu’elle choisit pour charger et tenter une prise habile pour le faire basculer sur ses appuis. Elle comptait sur sa rapidité et l’assurance de son geste dans cette joute amicale. Un grand sourire carnassier aux lèvres.

Elle ne faisait peut être pas partie du clan, mais c'était une véritable Utgardienne et personne ne pouvait dire le contraire ! C'est pour ça qu'il ne fut pas si surpris de la voir se lancer sur lui avec un sourire aux lèvres. Le guerrier l’accueillit bras ouvert et bien ancré sur ses appuis.

— Tu penses vraiment m'avoir comme ça ?

Bien que grande pour son sexe, elle n'en restait qu'une femme et il avait l'avantage physique.

— Alors princesse, c'est tou-

Mais pas le temps de finir qu'Uraïa le forçait à mettre un genou à terre grâce à une clé de bras.

— Ha ! tu sais faire ça toi !?

Il n'aurait jamais imaginé qu'elle sache faire une telle prise, il l'avait sous-estimée. Et maintenant ? Il avait bien quelques idées pour se dégager, mais ça serait bien trop inapproprié pour un simple jeu.

Elle savait qu’il ne se contenterait pas de subir sans réagir. Elle avait eu de la chance, parce que tous les Utgardiens avaient tendance à sous-estimer un inconnu et encore plus une inconnue, qui ne faisaient pas partie des guerriers du clan. Mais nul doute qu’il ne referait pas cette erreur aussi, elle renforça sa prise avec vigueur et tenta de l’immobiliser définitivement en le coinçant au sol, quitte à se couvrir de poussière au passage. La lutte était une affaire d’efficacité, pas de grâce et de délicatesse. Elle s’enroula autour de lui comme un serpent, cherchant à le retourner sur le ventre.

Elle n'avait donc pas du tout l'intention de s'arrêter là ? Elle comptait l'immobiliser totalement pour que sa victoire soit totale ! Il voulait bien jouer gentiment et accepter de perdre, mais le guerrier n'avait pas signé pour ça. Alors qu'Uraïa commençait à se positionner derrière lui en tenant son bras, Eredin commença à résister en serrant les dents. Il ne pouvait plus l'empêcher de lui faire une clé et n'avait aucune chance de gagner dans une telle position...  Il n'avait pas voulu lui faire mal, mais maintenant il voulait juste se libérer et il devait d'abord commencer par se relever. Eredin utilisa donc toute sa force dans sa jambe pour se remettre debout. Elle tenta bien d'accentuer sa prise pour l’empêcher de bouger, mais c'était mal connaître les Utgardiens ! Parti dans son élan, le guerrier, le bras toujours replié dans le dos, commença à reculer en forçant la sorcière à reculer avec lui. Et malgré sa résistance, il réussit à la bloquer entre le mur et lui. De son bras libre, il lui envoya plusieurs coups de coude à l'aveugle vers le haut du torse. En temps normal, il aurait visé la tête pour être sur de se libérer, mais c'était une femme, il ne voulait pas la défigurer.

Ah le vrai jeu commençait ! Cela faisait longtemps que l’Utgardienne ne s’était pas amusée avec quelqu’un du clan ! Elle riait tout en se débattant mais n’en perdait pas moins sa combativité malgré ses muscles endoloris, se moquant bien du spectacle qu’elle offrait au reste du groupe qui s’était rassemblé autour d’eux en riant, prenant les paris sur sa défaite prochaine. Il était fort. Il en abusait pleinement pour se redresser mais il continuait de la sous-estimer et il envoya son coude trop bas, heurtant le gilet de cuir. Elle s’en saisit, tentaculaire comme une pieuvre et l’emprisonna de nouveau. Il allait falloir user de ses jambes et de toute la force de son corps. Posant un genou au sol, elle utilisa son autre jambe pour briser les appuis de son adversaire, se glissant à moitié sous lui. Les commentaires graveleux ne manquèrent pas mais c’est que les gaillards n’avaient pas goûté de ses muscles d'archère ni de ses cuisses aussi dures que de la brique. Eredin, lui, allait les éprouver.

Un grand sourire aux lèvres malgré sa position qui était de plus en plus difficile à tenir, Eredin commençait à apprécier l'échange. Il l'avait totalement sous-estimée, un peu à cause de son sexe, mais surtout parce qu'il était trop confiant, comme toujours ! Arrogant pour deux sous même dans les pires situations, le guerrier devait donc prouver que ce n'était pas que du vent. Eredin sentait les membres de sa partenaire s'enrouler autour des siens pour les verrouiller les uns après les autres. Refusant d'abandonner, il tenta avec force de se libérer de cette emprise en se tortillant comme un ver dans tous les sens.

— Attends que... je... me libère... tu... !

Ce n’était plus une affaire de force à présent. Il était dans ses filets et seule la volonté de l’un et l’autre les empêchait de finir ce duel. Usant de l’appui du sol et de son dos, elle se cambra dans un ultime effort, tout en serrant son bras entre les siens, imprimant un point de pression particulièrement douloureux dans son épaule et tira brusquement, afin de parachever son mouvement. Le bras tordu dans une posture particulièrement délicate, elle espérait que le guerrier finirait par céder à la douleur de son articulation mise à mal.

Par Njörd ! Il avait beau se démener tel un félon, il n'y avait plus rien à faire. Eredin Lautrec, le guerrier, avait perdu à plate couture... Il donna plusieurs tapes de la main sur la jambe d'Uraïa pour lui faire comprendre qu'il abandonnait. Lorsqu'elle le lâcha, il se massa l'épaule douloureuse un petit moment avant de se relever et d'ainsi libérer l'Utgardienne.

— Sorcière !

Il l'avait mauvaise d'avoir perdu, surtout contre lui pour l'avoir totalement sous estimée, mais il ne pouvait plus rien faire de toute façon.

— Tu as gagné, bravo ! Je comprends pourquoi tu as survécu... tu es vraiment forte.

Il marqua une pause pour faire des moulinets de son bras endolori.

— Tu es forte à la chasse ! au combat ! Tu es Utgardienne ! Tu parles aux oiseaux et tu as des cheveux de feu ! Dommage pour ton sale caractère...

Il rigola gentiment avant de reprendre :

— Tu as raison de t'éloigner du clan parce que je connais beaucoup de guerrier qui ne cherche qu'une femme comme toi !

Elle secoua la tête en frottant ses frusques et ses cheveux pleins de poussière.

— Tu m’as sous-estimée une fois et j’en ai profité. Ça n’arrivera pas deux fois. Quant aux guerriers, la plupart du temps, ils ne m’aiment pas tant que ça…

Elle sourit en coin. Beaucoup d’hommes qu’elle avait mis au tapis n’avaient pas bien supporté qu’elle les domine. Eredin la considéra d’un autre œil. Et intelligente en plus de ça ! Elle savait pertinemment qu'il ne ferait la même erreur deux fois après une telle leçon.

— On a tous notre fierté ! et se faire botter le cul de cette façon devant tout le monde, c'est pas facile à accepter.

Elle se souvint tout à coup de son duel avec Baldhramn. Le souvenir lui tira un sourire triste alors que les autres repartaient déjà, privés du spectacle de leurs congénères.

— Je ne t’ai pas trop maltraité…
— Juste battu sans que je ne puisse faire quoi que ce soit, une terrible humiliation devant les autres... maaaaaais je vais survivre ! Disons que j'ai l'habitude ! Oui je l'ai mauvaise, mais c'est de ma faute, donc ça m'apprendra !

Elle lui flanqua une petite bourrade, une fois de plus, tout en se dirigeant vers le chantier d’un pas nonchalant, sur le ton de la conversation.

— La prochaine fois, tu me montreras de quoi tu es vraiment capable… c’était juste l’échauffement…

Elle se permit même un clin d’œil. Peut être était elle restée trop loin du clan, finalement.

— J'aurais trop peur d’abîmer ton visage de princesse. Et retourne bosser au lieu de faire la maline !

Elle se pencha et lui envoya une poignée de poussière avec un sourire goguenard.

— C’est ça, regarde moi bosser, tu apprendras une ou deux choses…

Quelques prisonniers n’avaient pas raté les échanges des deux Utgardiens et certains se montrèrent bien plus cavaliers à présent qu’Uraia avait montré une façade plus avenante, se permettant quelques blagues grivoises sur sa manière de se rouler dans la poussière. Un jeune loup prit une claque derrière la nuque et un regard à réfrigérer l’été. La pause était terminée.

— Ferme ta grande gueule et garde tes yeux pour toi, ou je vais m’en occuper.

Le travail reprit dans une ambiance plus légère, bien que l’Utgardienne resta assez solitaire dans son coin, comme si ses camarades cherchaient à respecter une certaine distance de sécurité. Comme aucun incident notable ne se produisit, les choses allèrent bon train durant les jours qui suivirent, stimulées encore par le désir de réaliser des exploits, propre à tout Utgardien, même chez le plus bas des ivrognes. Il semblait également que la relation si orageuse entre le chef de chantier et sa seule travailleuse féminine ait brutalement changé pour le mieux, comme on passe de l’hiver le plus rude au chaleureux soleil d’été sans intersaison. Tous ceux qui avaient suffisamment côtoyé l’Utgardienne savaient qu’elle était lunatique et changeante comme la marée, mais ces changements ne tenaient en rien du caprice. Il fallait seulement relever le défi pour s’en faire accepter et remporter son adhésion. Ce qu’Eredin, malgré sa défaite qu’il jugeait humiliante, avait réussi de haute lutte.


Eredin Lautrec
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Sam 7 Aoû - 18:30
Malgré ses belles paroles et son sourire d'apparat, Eredin regrettait d'avoir perdu aussi lamentablement. Lui, qui se vantait d’être un guerrier, avait mordu la poussière sans rien pouvoir faire, et par une femme en plus de ça ! Il devait vraiment avoir un problème à affronter le sexe opposé, car il perdait souvent contre la gente féminine. Il n'avait pourtant pas l'impression d’être plus gentil avec elle. Alors comment expliquer ce relâchement ? Il s’entraînait pourtant plusieurs fois par semaine, peut-être devrait-il penser à changer de partenaire ou à revoir les bases. Ça pourrait lui faire du bien. Ce n'était pas avec ses performances qu'il allait pouvoir protéger Uriel ou l'Hurlsk correctement.

Les jours passèrent sans qu'aucun événement notable ne se déroule, les travaux avançaient correctement et le représentant Amaranthis se pointa même une seconde fois pour les féliciter à nouveau. L'ambiance était au beau fixe et pendant quelques jours, Eredin se demanda si on avait vraiment besoin de lui ici. Il savait que l'Hurlsk l'avait envoyé gérer les travaux pour surveiller la pyromane, pour la « protéger » même, mais on était bientôt à la fin du chantier et il ne voyait aucune raison expliquant sa présence. Les ordres étant les ordres, il continua néanmoins à surveiller activement cette bande de criminels endurcis jouer les démolisseurs de l’extrême.

Heureusement, sa bonne étoile ne l'avait pas abandonné et lors du cinquième jour des travaux, en fin d'après-midi, des cavaliers se présentèrent. Eredin assit sur son muret les pieds dans le vide mangeait une pomme en observant les trois cavaliers approcher. On ne pouvait pas se tromper sur leurs appartenances, des foutus Ascaniens et de la pire espèce en plus, car ils travaillaient directement pour le dirigeant de la cité, Krox. Un sourire aux lèvres, il croqua doucement dans sa pomme tout en soutenant le regard plein de mépris du cavalier de tête. Eredin le connaissait pour l'avoir affronté une fois quand ils étaient jeunes, un certain Auguste. L'Ascanien détourna le regard et observa le groupe de travailleur pour s'arrêter sur Uraïa.


- Voici donc la fameuse sorcière qui a fait brûler le quartier !

On pouvait ressentir tout le mépris qu'il éprouvait pour elle dans sa facon de parler. De plus, en haut de son cheval, dans ses jolies vêtements et avec la médaille de la cité autour du cou pour bien signifier son rôle comme si elle pouvait le protéger, Auguste cracha vers elle sans l'atteindre
.

- Tu as bien de la chance que ton- que l'Hurlsk soit intervenu... Sinon tu aurais passé quelques jours dans nos cachots avant d'avoir le plaisir de rencontrer notre bourreau !

Faisant tourner son cheval sur lui-même, Auguste défia chacun des Utgardiens du regard avant de s'arrêter sur Eredin qui continuait de manger sa pomme.

- Je te connais toi...

Eredin haussa les épaules et acquiesça de la tête en mâchant. Cet homme était un nid à problème et il allait devoir faire de son mieux pour les éviter. Ne pas s'emporter ! Ne pas s'emporter !

- Moi auchi je te connais ! Dit-il en avalant.

- Vous avez l'air de bien vous amusez ici, vous êtes un peu dans votre élément n'est-ce pas ? Les ruines, la crasse et plein de choses à casser, ca ne change pas de votre porcherie où vous vivez n'est-ce pas ?
- En effet, on est bien ici et en plus de ça, on fait du bon boulot... quand on ne vient pas nous emmerder.
- C'est censé être une punition pour cette sorcière et non pas des vacances ! Est-ce qu'il faut que je te montre comment tu es censé t'en occuper ?
Dit-il en désignant un fouet accroché à sa celle.
- Si vous aviez vu la raclée que je lui ai foutue hier, elle a osé me regarder dans les yeux, vous y croyez vous ? Et encore ce n'était rien comparé au début de semaine quand elle est montée dans le même chariot que moi, je-
- Arrête de me raconter de la merde... je vois bien quand une lice est mal dressée.


Puis voyant que ses provocations ne fonctionnaient pas sur le guerrier, il avança son cheval vers Uraïa et l'observa de haut. Eredin croqua à nouveau dans sa pomme en étant fier de lui, il avait réussi à esquiver l'orage, plus qu'à la pyromane de réussir à en faire autant maintenant.

- Tu ne mérites pas de vivre sorcière ! Ta tête aurait du rouler par terre comme celle du géant sauvage... un parasite en moins dans notre belle cité !
Uraïa
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Jeu 26 Aoû - 18:36
Tout allait trop bien. Forcément. Il avait fallu que les Ascaniens se radinent et rajoutent leur grain de sel. Une montagne de sel. Uraïa prit le temps de respirer. Une fois. Deux fois. Trois fois. Elle guettait Eredin du regard. Il avait l’air calme. Elle devait pouvoir faire de même. Aussi, elle ne se tourna pas quand on commença à parler d’elle. Ni à l’injurier. Elle était occupée à déplacer des débris sur un tas a l’aide de sa pelle. Quand l’Ascanien s’approcha elle resta muette, mais d’un geste vif elle envoya une pelletée de graviers dans le nez de sa monture. Elle tourna alors la tête avec un sourire d’excuse qui n’avait rien de sincère.

— Je suis tellement maladroite. Vous disiez ?

Auguste maîtrisa rapidement sa monture qui venait de reculer à cause des graviers de la sorcière, il serra les dents avant de se mettre à sourire sadiquement. D'un mouvement imperceptible du pied sur le flanc de sa monture, il  la fit avancer  vers l'Utgardienne et au dernier moment, il tira sur ses rennes pour la faire tourner dans le but de donner un coup de croupe à cette chienne ! - Tellement maladroit en effet !
Uraïa dut bondir pour ne pas se faire écraser, et prit un violent coup de queue en plein visage. C’était davantage humiliant que douloureux, et elle crispa violemment la main sur le manche de sa pelle qu’elle n’avait pas lâchée. Elle avait très envie de la foutre dans la gueule de cet empaffé et sentait ses veines s’embraser de colère. Elle carra les mâchoires de son mieux et rétorqua, bien campée sur ses jambes.

— C’est vrai. C’est pas les Ascaniens qui pourraient faire un boulot pareil.

Le regard était si méprisant et le ton si dédaigneux qu’il était impossible de ne pas y voir une insulte. Uraïa contenait sa rage, mais ça ne suffirait bientôt plus.

— Un travail comme celui-ci vous convient bien mieux qu'à nous en effet ! petit silence. Puisqu'il ne demande aucune compétence, même  des crétins comme vous peuvent briller grâce à lui... Les deux autres cavaliers se mirent à rigoler. Tu dois te sentir à ta place ici n'est-ce pas ?

Qui était le plus méprisant maintenant ? Uraïa regarda autour d’elle et prit à parti ses ouailles, ceux qui étaient de son clan.

— Moi je travaille, au moins, et oui je suis à ma place ici. Avec mon clan. Tu peux en dire autant avec ta Providence et ta bande de dégénérés consanguins qui passent leur temps à comploter ? D’ailleurs c’est marrant, je vois pas ce bon vieux préfet… Ernst quelque chose, ce grand héros ! Comment va sa jambe ?

Elle étira un sourire carnassier. Quel son merveilleux que le hurlement de ce taré lorsqu’elle avait planté son couteau de chasse dans son mollet… Juste la prise qu’il lui fallait pour s’éviter la chute mortelle qu’il avait failli lui faire subir. Elle donnerait cher pour le revoir. Rien qu’une fois.

Comment osait-elle parler de Providence ? Il sentit son sang bouillir en lui et cette fois son sourire disparut totalement de son visage

— Blasphème !  Et en plus de ça, elle s'en prenait au nouveau héros Ascanien ? - Comment oses-tu parler comme ça chienne ? Continue et je vais devoir t'apprendre les bonnes manières.

Son cheval qui sentait la tension de son cavalier commençait à ébrouer en direction de l'Utgardienne

— C'est peut être ce que tu cherches d'ailleurs... dit-il en passant sa langue sur ses lèvres je me demande juste si tu va couiner comme ce foutu géant quand on va s'occuper de toi ?

Elle se figea dans une expression de statue.

— Il n’a pas couiné, j’étais là. Mais votre beau héros, lui, a bien gueulé comme un porc qu’on égorge quand j’ai planté mon couteau dans sa jambe.

Elle tourna ensuite sa tête vers Eredin, lui dédiant un regard d’avertissement. Tout ça allait très mal se terminer.

— Donc, tu avoues ton crime... en voyant la défense de- de l'Hurlsk, on a pas cherché à t'accuser, mais tu viens simplement d'avouer devant tout le monde que tu es coupable. Espèce de conne.

Et d'un signe, les deux autres cavaliers s’avancèrent vers Uraïa.

— Et maintenant hein ? Où est ton clan ?

Il observait les autres Utgardiens qui ne bougeaient pas, même ce foutu Lautrec qui continuait de manger sa pomme

— Je n’ai rien à avouer. Il a essayé de me tuer, c’était un malheureux concours de circonstances, que mon couteau s’accroche dans son mollet.

Elle arborait une expression mauvaise.

— Il a aussi jeté des civils innocents dans le vide, on fait mieux en termes d’héroïsme si vous voulez mon avis… mais on lui pardonne dans le fond, il était dépassé par la panique…

Elle afficha une expression narquoise, cette fois.

— Mon clan ne bouge que lorsqu’il a une vraie raison de le faire.

Elle reprit sa pelle et dédaigna le cavalier. S’il croyait lui faire peur…

— Oui oui c'est ça, tu pourras te défendre une fois devant nos inspecteurs, on verra si tu seras toujours aussi confiante... et il ajouta très bas en reluquant l'Utgardienne - j'ai hâte d'entendre tes couinements !

Les deux autres cavaliers s’avançaient déjà en lui ordonnant de lâcher sa pelle.

— Vous êtes pas dans votre quartier ici. Et je suis sous l’autorité de mon Hurlsk.

Elle pencha la tête, les yeux dans les yeux de cet Ascanien puant, tenant fermement sa pelle, à s’en blanchir les jointures. Bien qu’immobile, tous ses muscles et ses nerfs semblaient se tendre en vue d’une attaque imminente.

— Je ne suis pas sûre que tu aies ce qu’il faut pour ça, assura-t-elle sur le même ton.

— Dans mon quartier...? Auguste montra la médaille de la cité autour de son cou - Je suis un représentant de notre gouverneur, il n'est plus question de quartier et l'autorité de ton Hurlsk ne représente rien devant lui ! Ose agresser mes hommes et tu rejoindras ton ami ! dit-il en faisant référence au sauvage

— Ta médaille te donne pas tous les droits. Passe ton chemin, j’ai à faire. Elle n’en démordait pas. Il aurait pu l’arrêter plus tôt, il ne l’avait pas fait. Il était venu pour la pousser à l’agression et elle ne bougeait pas. J’ai strictement rien fait. Alors vous allez me laisser en paix. Ou nos "relations diplomatiques" vont sérieusement se détériorer…

Après un ordre de leur chef, les deux hommes tentèrent de se saisir de l'Utgardienne. Elle recula vivement pour les en empêcher, pelle en main. Elle se sentait trembler de fureur mais si elle en tuait un, c’est elle qui tomberait à coup sûr.

— Foutez moi la paix, je le répéterai pas.

Que faire ? Devait-il intervenir pour l'aider ? Il ne voulait pas froisser son honneur ou montrer de l'irrespect en intervenant alors qu'elle maîtrisait la situation. Comme une revanche sur quelque chose dont lui seul se souvenait, Eredin rigola une dernière fois en la voyant toute tremblante avec sa pelle. Ça l'avait amusé de la voir s'enfoncer dans les problèmes, mais maintenant, il avait peur qu'elle fasse une connerie. Si la sorcière agressait les deux Ascaniens, il n'était pas sûr de réussir à la sauver... Eredin soupira et sauta donc de son muret pour s'approcher de la monture d'August. Il lui caressa le menton avant de lui agripper les rênes de la bride pour la maintenir en place. L'animal s'agita nerveusement en sentant cet étranger si proche de lui.

— Allons allons, du calme, dit-il à la fois pour la monture que pour le cavalier - August, cette femme m'appartient jusqu'à la fin de la semaine et je n'ai pas l'intention de la partager avec toi...

Les deux hommes se regardèrent un moment avant qu'Eredin ajoute :

— Repars d'où tu viens avant de regretter de t'en prendre aux miens...

Le regard sérieux, il n'y avait plus de trace de sourire sur son visage.

— Mais si tu veux... on peut voir maintenant qui de l'autorité de mon Hurlsk ou de TON gouverneur est la plus importante à l'instant présent.

Sa main libre se posa sur sa hachette et August le remarqua bien.

— Mais évitons ça et réglons ça comme des gentlemen ! Demandons à l’intéressée ce qu'elle souhaite ! Sorcière ? Avec qui de nous deux tu souhaites partager ton lit ce soir....?

Eredin s'éloigna du cheval en gardant la main sur son arme, il se mit de sorte à avoir en visuel chacun des trois hommes. La tension était palpable et même s’il aurait dû faire en sorte qu'elle retombe calmement (il en avait le pouvoir), l'Utgardien appréciait trop mettre de l'huile sur le feu ! Il doutait fortement qu'August ait les couilles d'aller jusqu'au bout de toute facon...

Uraïa se sentait sur le point de commettre l’irréparable quand ce charmeur de serpents d’Eredin finit par intervenir pour ajouter son grain de sel. S’il avait osé insinuer la veille encore qu’elle était sa catin, elle aurait simplement chargé, sa pelle à la main, mais dans sa fureur, elle sentit qu’il cherchait à l’aider. A sa manière très agaçante bien entendu. Elle fronça plus encore les sourcils, serrant sa pelle de plus belle puis finit par cracher dans sa direction pour donner le change.

— Coucher avec un Ascanien ? Plutôt me pendre !

Si Markus avait été là, il aurait sûrement trouvé à redire sur cette sentence mais il n’était pas là pour le faire et l’Utgardienne en profita avantageusement. Une nouvelle fois, Uraïa avait habilement esquivé les pièges sous le regard malicieux du guerrier. Ce n'était pas la première fois qu'il se faisait la réflexion, mais cette femme réussissait toujours à trouver les mots et à s'en sortir. Il se tourna ensuite triomphalement vers l'Ascanien et se passa une main dans les cheveux.

— Ne le prends pas mal, mais regarde-moi ! Comment lui en vouloir ?

Puis il cracha à son tour au sol vers le cavalier :

— Et que veux tu, tu n'es qu'un Ascanien !

Il tapa une fois dans ses mains :

— Bon, maintenant que c'est réglé, tu peux y aller... nous avons encore du travail !

Trop facile !

— Eredin Lautrec... tu devrais apprendre ta place !

D'un mouvement du pied, il fit tourner son cheval vers la sortie de la maison pour retourner dans la rue, mais avant de partir il s'arrêta et se retourna vers ses hommes.

— Si vous intervenez, vous finirez votre vie dans les prisons du château.

Le message était clair.

— Maintenant, faites lui comprendre qu'il y a une certaine façon de parler à un représentant de notre gouverneur à TOUS !

Et les deux hommes de main se jetèrent sur Uraïa pour la passer à tabac.

— Alors Eredin ? Est-ce que tu voudras encore d'elle après ça ? Avec un visage... dans l'état qu'il sera... ?

Il sous-entendait beaucoup de choses, énormément même. Uraïa prit sa pelle à deux mains. Si elle devait y passer, elle vendrait sa peau chèrement.

— Enfin ! Venez tâter de ma pelle, bande de lâches…

Elle carra les épaules et se prépara à combattre.

Tout alla vite. Très vite. Les deux Ascaniens, confiants dans leur entraînement et leur supériorité face à une simple femme, barbare qui plus est, la chargèrent sans aucune délicatesse, manches retroussées. Elle se gaussa, se décala à la dernière minute, et abattit sa pelle avec une force peu commune pour son sexe dans un large mouvement circulaire. Le premier n’eut rien le temps de voir, cueilli en plein élan puis assommé rudement et le deuxième esquiva de justesse. Elle lui lança une œillade et l’invita d’un sourire carnassier à venir la chercher de nouveau. Incrédule face à la rapidité qu’elle avait eue de mettre à plat son comparse, l’Ascanien prit le temps de mesurer sa deuxième approche et tenta de la désarmer d’une prise habile. Elle résista et lui sourit, contrant son habilité par la force brute, refusant de lâcher sa pelle. Un petit duel s’engagea, chacun tirant la pelle de son côté, nez à nez, Uraïa faisant jouer sa musculature d’archère avec un grondement féroce. D’une secousse, elle se débarrassa de lui d’un coup de pied dans le bas du ventre, et rabattit le plat de sa pelle sur sa nuque dès qu’il fléchit. L’homme s’effondra sans même l’avoir approchée et elle remit un violent coup de pelle à l’arrière de son crâne avant de se tourner vers l’autre qui gémissait au sol. Elle releva sa pelle pour abattre le tranchant dans sa nuque, les yeux pleins de fureur, l’écrasant de sa botte plantée dans son dos…

Bon sang, de quel bois était fait cette femme ? Et comment on pouvait l'avoir laissée quitter le clan ? Eredin n'eut pas le temps de se réjouir de la voir remporter le combat qu'il dut se mettre à courir vers elle. S’il la laissait faire, elle allait tuer cet homme et August aurait simplement gagné ! Elle leva bien haut sa pelle et entama le mouvement fatidique, heureusement, Eredin réussit à la percuter au dernier moment. Il l'emporta avec lui et ils roulèrent tous deux pendant que la pelle volait dans un coin. Elle n'avait pas dû comprendre ce qui venait de se passer car elle tenta de se jeter sur son nouvel adversaire, lui ! Au fait de ses compétences et n'ayant pas envie de terminer comme la dernière fois, Eredin n'hésita pas et la frappa avec force. Par principe, il ne visa pas le visage, à la place il frappa là où il put et lui envoya une puissante droite dans la poitrine en lui ordonnant d'arrêter.

— Arrête-toi ! Tu as gagné...

Voyant qu'elle revenait à elle, Eredin se retourna furieusement vers les Ascaniens en sortant sa hachette :

— Dégagez ! MAINTENANT !

August lui lança un dernier regard avant de partir en laissant ses deux hommes se débrouiller. Eredin attendit qu'ils disparurent avant de se tourner vers elle.

— Tu allais le tuer...?

Uraïa dut s’ébrouer sous l’effet du choc qui irradiait sa poitrine. Maudit Eredin ! Elle lui jeta un regard flamboyant mais se reprit en soufflant. Son plan était bien plus élaboré. Déjà, elle allait tuer ce vermisseau qui méritait le caniveau, ensuite elle allait écrabouiller cette crevure qui se croyait immunisée avec sa camelote autour du cou.

— Je vais tous les écraser. Ils ne méritent que ça.

Sa voix était tranchante et implacable mais peu à peu, la voix de la raison s’instillait dans son cerveau. Elle allait se condamner elle-même.

— Ha ouais ? Bah tu feras ça une autre fois, cette semaine tu m'appartiens donc tu vas fermer ta gueule, ramasser ta pelle et retourner travailler !

Le sang du nord coulait dans ses veines et il avait vu trop des siens commettre des bêtises irréparables à cause de lui. Donc avant que les idées qu'elle avait s'incrustent trop profondément, il préféra détourner sa colère sur lui.  Si elle pensait pouvoir le battre une deuxième fois, très bien ! Quelle essaye et peut être qu'il mordrait la poussière à nouveau, mais il ne comptait pas la laisser se tuer pour rien.

— Contrôle toi, femme !

Elle rugit entre ses dents et le bouscula d’une brusque bourrade en arrière. Elle n’aimait vraiment pas son ton.

— Ne me dis pas ce que je dois faire, Eredin Lautrec ! Ne me parle pas comme si tu valais mieux que moi !

Elle fulminait encore, le feu enflammait ses veines puissamment et elle ne résista pas à l’envie de botter le train du vermisseau qui tentait de profiter de cette diversion pour fuir. Elle l’attrapa par la gorge comme le ferait un faucon ayant attrapé un rongeur. Elle plongea sur lui et le redressa avec toute sa force, lui tordant ensuite la nuque en arrière.

— Où elle est ta belle Providence, vermine ? Est-ce que je t'égorge sur place pour sacrifier ton sang à Njörd ?

L’homme se débattit, mais il était encore groggy. Avant qu’Eredin puisse l’arrêter, elle lui fit goûter la poussière une nouvelle fois et lui envoya un coup de pied digne des enfers dans le fondement. L’homme gémit et s’étala en avant mais profita de son élan pour fuir. Elle le laissa ramper tout en jetant un regard de défi à Eredin.

— Ne me dis pas de me contrôler.

Il la laissa faire et se passa une main dans la barbe pour se calmer. Il hésita même à prendre une outre d'eau pour la faire revenir à la raison, mais se ravisa en se disant que ça aurait l'effet contraire.

— Si tu ne veux pas que je te dise quoi faire... alors fais-le par Njörd !

Il lui faisait face sans broncher, prêt à la recevoir à tout moment.

— Tu as gagné, ils pouvaient rien faire ! Tu espérais quoi en le tuant hein ?

Voyant que les autres continuaient d'observer en silence, il leur ordonna soit de reprendre le travail, soit de partir !

— Tu veux mourir c'est ça...? Tu es intelligente il me semble non ? alors utilise ta tête un peu bordel. Si tu l'avais tué on aurait fait quoi hein ? Rentrer en guerre contre le gouverneur ? Tu te serais cachée toute ta vie ? Putain...

Il ravala le reste des mots pour éviter de devoir se battre contre elle. Elle voulut lui répondre avec la même hargne et lui faire passer l’envie de la défier de la sorte mais elle perçut quelque chose chez lui qui l’en dissuada. Elle l’observa un moment en silence, les dents serrées et le regard noir, puis finit par secouer la tête comme un animal enragé qui reprend raison. La lutte était finie, les Ascaniens étaient partis et il ne restait autour d’elle que les ruines fumantes de ce terrible événement qui avait failli emporter la ville et ceux qu’elle aimait.

— Parfois, pour faire ce qu’il faut, il ne faut pas trop réfléchir.

Elle le dit d’un ton froid et sans émotion, mais au fond d’elle, c’était un fleuve d’émotions brutes qui se déversait sans discontinuer.

— Et parfois il faut savoir faire preuve de discernement et de bon sens...

— Parce que tu en es un exemple peut-être ?

— Qu'importe... c'est passé.

Il savait très bien que la colère pouvait nous faire faire des choses regrettables et tenta de ne pas en garder rigueur contre elle. Elle se laissait gagner par une forme de rancœur, sachant qu’elle n’aimait pas être sermonnée et qu’elle se souvenait fort bien de cette balafrée de Port aux Échoués. Mais elle eut la bonne idée de ne pas rentrer dans le vif du sujet. Après tout ce n’était pas ses oignons. Et elle ne voulait pas être cruelle inutilement. Malgré lui, sa tête alla légèrement de gauche à droite montrant sa totale désapprobation avec les propos de la jeune femme.

— Je n'ai jamais prétendu être un exemple il me semble...

Et toujours malgré, comme elle commençait à l'agacer, il rétorqua avec un léger sourire :

— Et je crois que ce que tu essayes de dire depuis tout à l'heure, c'est merci non ? Car je ne suis peut être pas un exemple, mais j'ai tout de même sauvé tes miches... Et c'est la deuxième fois !

Techniquement, il avait en effet voté pour la protéger lors du conseil. Elle roula des yeux avant de se laisser tomber sur un muret, fatiguée de cette journée qui avait failli lui coûter cher.

— Merci pour ton aide, Eredin Lautrec ! Même si tu trouves toujours le moyen de te rendre insupportable en le faisant !

Elle pointa un index accusateur dans sa poitrine.

— Jamais je ne coucherai avec un goujat comme toi !

La voyant se détendre et faire l'immense effort de le remercier, il jugea que l'orage était passé et commença lui aussi à se détendre.

— Comme si une sorcière au sale caractère était mon style...

Bien sûr qu'une véritable Utgardienne avec un caractère bien trempé était son style ! Et d'ailleurs, pourquoi revenait-elle sur le sujet ?

— Ce serait pas plutôt toi qui en pinces pour ton héros ? Ha ! Est-ce pour ça que tu cherchais encore la bagarre ? Pour faire un peu de corps-à-corps ?

Il se mit à rire en la pointant du doigt tel un enfant immature. Elle faillit s'étouffer d'indignation, mais ses nerfs en prirent un coup, et elle se prit à rire sans prévenir, d'un grand rire qui envahit les ruines, au milieu des débris.

— Je crois que c'est toi qui prends tes rêves pour la réalité... Comme celle de me battre au corps à corps...

Elle fanfaronnait exprès, mais elle ne lui laisserait aucune chance à ce petit jeu là.

— Ne sois pas trop sûre de toi parce que je t'ai sous-estimée une fois...

Puis il se passa une main dans la barbe.

— Et je ne rentrerais pas dans ton jeu ! Tu essayes de me pousser à t'attaquer ! Pour sentir une nouvelle fois mon corps contre le tien...

Il écarta grand les bras comme pour l'inviter à faire un câlin ou pour commencer un combat.

— N'aie pas honte de ressentir ce que tu ressens, tu ne serais pas là première à tomber sous mon charme ! Il lui lança un clin d'œil pour l'achever !

Elle le détailla de la tête aux pieds avec une mine narquoise, sans bouger de son coin, jambes étirées et croisées devant elle.

— Oh oh. C’est vrai, regarde-moi. Je meurs d'envie de me ruer sur toi, c'est insoutenable...

Eredin rigola et s'approcha de quelques pas.

— Par pitié, retiens toi ! C'est que je suis un peu timide tu vois et devant tout le monde... ça me gène un peu...

Elle le regarda approcher avec le même sourcil haussé de perplexité feinte.

— Timide ? Compte sur moi, je vais te mettre à l’aise.

Elle esquissa son air carnassier habituel. Il souffla de soulagement en l'entendant le rassurer :

— Tu as toujours de la répartie toi hein ?

Il aimait ça !

— Mais attention à pas te faire prendre à ton propre jeu !

Et il s'approcha à nouveau pour diminuer grandement l'espace entre eux deux Elle continua de l’observer sans moufter, immobile et sans la moindre inquiétude.

— Doucement, le timide. Tu vas te brûler.

Il s'approcha encore un peu avant de s'arrêter :

— C'est ton truc de mettre le feu hein ?

Il se mordit la lèvre pendant que ses yeux observaient avec intensité la pyromane. A quoi pensait-il ?

— J'ai suffisamment de cicatrices comme ça...

Se ravisant, il recula de plusieurs pas pour remettre de l'espace entre eux. Elle secoua la tête en souriant.

— On se dégonfle à ce que je vois…

Eredin était un beau parleur, mais à lui laisser la main, il faisait moins le malin.

— Tu es peut-être bel et bien timide.

Elle partit d’un nouveau rire. Elle avait bien besoin de penser à autre chose et Eredin avait le don de faire passer le moindre événement pour un jeu. Il balaya les remarques d'un grand geste de la main :

— Très grand timide même, c'est un miracle que j'arrive à te parler sans bafouiller d'ailleurs  ! Il rigola doucement avant de reprendre - Et je suis un grand romantique en plus de ça... J'ai besoin de l'ambiance, des bougies, de la poésie... Il se retint de rire avant de reprendre - c'est pour ça que je pense que c'est impossible que ça fonctionne entre nous ! il prit une mine triste et mit une main sur son cœur comme si ça lui en coûtait de continuer - Tu es une sauvage, une... une Utgardienne ! Tu manques de finesse, de savoir être et regarde comment tu parles, tu oses tenir tête à un homme... Il fit non de la tête - Définitivement non !

Elle s’esclaffa de nouveau devant son numéro :

— Tu devrais faire du théâtre… On y croirait presque.

Elle se redressa à son tour et s’avança vers lui de toute sa stature. Elle ne le dépassait peut-être pas mais elle était loin d’être une brindille. Elle s’avança avec nonchalance jusqu’à lui, le défiant à son tour.

— C’est quoi tous ces tatouages, alors ? Une ode à ta maman ?
— Parce que tu penses que c'était de la comédie ? En la voyant s'approcher et se dresser face à lui, il lui fit simplement face en soutenant son regard - C’est une mise en garde pour ceux qui voudraient s'en prendre à mon peuple, aux miens... Il s'approcha à nouveau, son visage trop près du sien, ou à moi !

Elle fit mine d’être surprise puis esquissa un sourire en coin, tout en s’approchant dangereusement, nullement intimidée ni rougissante.

— Tu vois, c’est la différence entre toi et moi… je ne donne pas d’avertissement.

Elle claqua des mâchoires à un centimètre de son visage. Il l'observa faire en souriant, sans reculer, ni avancer.

— Que fais-tu ce soir ? Il fit mine d'avancer sa tête pour l'embrasser avant de revenir à sa position initiale - Pour me remercier, tu pourrais m'offrir un verre tu crois pas ?

Trop dans l'instant présent pour se soucier du bon sens, il se laissa simplement porter.

— J'aimerais te présenter quelques personnes... une femme comme toi ne dois plus vivre en dehors du clan ! Puis en observant ses lèvres avec un sourire joueur, il ajouta, et puis qui sait, avec suffisamment d'alcool... tu pourrais devenir une femme digne de moi !

A ces dernières paroles, elle lui flanqua un coup de poing dans l’épaule.

— Je te dois un verre, c’est d’accord. Mais ne m’insulte pas…

Elle détailla le jeune homme de la tête aux pieds comme si elle n’était pas dupe de ses effets, pour finalement le repousser d’une bonne bourrade amusée. Ainsi se termina la journée, sans autre incident notable. Uraïa put rentrer chez Sturla qui voulait contrôler sa tête une nouvelle fois, et s’assurer que rien d’alarmant ne risquait encore de se produire.

L’archère se laissa faire bon gré mal gré, puis profita d’un baquet d’eau chaude pour se débarrasser de toute la poussière et de la fatigue de la journée. Un des avantages à vivre chez la meilleure guérisseuse du clan. Elle finit par endosser des vêtements propres, délaissant une partie de son équipement habituel, pour une tenue plus légère et moins encombrante. Elle se sentait un peu mise à nu en l’absence de son plastron de cuir, mais elle ajusta sa tunique de lin d’un très large ceinturon dans lequel elle glissa son couteau de chasse. Elle enfila son pantalon de cuir ajusté et ses bottes et s’estima assez équipée pour une nuit au sein de son clan. Elle n’avait pas fait ça depuis des années. Sturla passa la porte et l’arrêta d’un geste péremptoire.

— Tu comptes vraiment sortir ainsi ?

L’archère eut beau bougonner et tempéter, elle dut céder sa tignasse de feu aux bons soins de la guérisseuse qui les démêla et les tressa à la mode Utgardienne, et Uraïa se tortilla temps et plus durant le processus que la vieille femme finit par lui flanquer une tape sur la main.

— Là, maintenant, c’est bon ! Fallait-il en faire toute une histoire…

Uraïa s’échappa sans même observer son reflet dans une glace, de peur que la guérisseuse n’essaie de lui faire passer une robe. Elle marcha dans les rues assombries par la tombée de la nuit jusqu’aux lueurs de la hutte de l’Hurlsk. L’endroit était déjà bien animé et l’heure avancée. Elle s’arrêta malgré elle, avec une lueur d’appréhension que personne ne verrait mis à part Njörd elle-même et finit par passer les portes du lieu.

Eredin Lautrec
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Sam 28 Aoû - 14:17
Une fois le travail terminé et que tout fut en ordre, Eredin se sépara du reste de la bande pour aujourd'hui et se rendit directement dans la Hutte de l'Hurlsk pour faire son rapport. Selon lui, cette histoire avec August n'irait pas plus loin que ce petit affrontement, mais il devait tout de même en rendre compte au cas où. Il se dirigea ensuite, directement chez son frère pour commencer la soirée. Comme à l’accoutumé, il y retrouva Uriel et Isaac en plein débat sur le sort des Amaranthis, le fils du chef voulait une punition exemplaire et marquante pour qu'un tel accident ne puisse plus jamais arriver alors qu'Isaac était moins extrême. N'ayant pas envie de rentrer dans un tel sujet, il s'installa plutôt à côté d'Olgierd qui sculptait un kraken dans un morceau de bois tout en écoutant distraitement la conversation des deux autres.


- Alors cette journée ?
- Amusante... j'ai revu August, il était venu emmerder notre sorcière.
- August-August, l'un de ceux à cause de qui on passé plusieurs jours chez eux ?
- Ouais le grand blond là.
- Haaaa oui ! Et alors ?

- Alors il est toujours aussi con... mais si tu l'avais vu en train de se faire remettre à sa place par Uraïa. J'ai dû intervenir pour ne pas qu'elle tue ses hommes. Il se mit à rire en repensant à cette idiote armée de sa pelle.
- Ha ! J'aurais aimé voir ça, elle ne t'a pas botté le cul cette fois ? Cette fois, ce fut lui qui rigola.
- Pas cette fois non, mais c'est pas passé loin ! Elle a vraiment un sacré caractère...
- Je te crois, pour que tu en parles, c'est que ça doit être quelque chose à voir.
- Tu vas en avoir l'occasion, je l'ai invité ce soir à boire un coup.



Comme si il avait dit quelque chose de totalement improbable, Olgierd leva les yeux de son morceau de bois pour le juger. Après quelques secondes, un grand sourire qui en disait long se dessina sur le visage du géant.

- Et les gars, vous savez quoi ? Ere' a invité une femme à boire un coup !
- Quoi ?
Firent les deux autres d'une seule et même voix.
- Arrêtez, ce n'est pas ce que vous pensez, je veux juste la présenter à certaines personnes.
- Hoooooooooo !
- Mais non pas comme ça ! Elle vit totalement en dehors du clan, j'en avais presque jamais entendu parler, mais après avoir vu de quoi elle est capable, je trouve que c'est un talent gâché ! Elle pourrait être un sacré atout... je suis sérieux !
- Un atout dans ton lit surtout !
- ...


Malgré ce combat perdu d'avance, Eredin tenta de s'expliquer pendant un bon moment avant de jeter l'éponge. Ses frères faisaient exprès de ne pas le croire, trop heureux de le voir inviter une femme, ils en profitèrent un bon moment...


Quelques heures plus tard


La soirée continua et se décala pour ne pas changer des autres jours dans la Hutte de l'Hurlsk. Du monde, de l'alcool, du bruit, de l'alcool, de la nourriture et de l'alcool. Le meilleur endroit pour passer une soirée dans toute la ville ! Installé dans un coin, le groupe en était à sa deuxième tournée lorsque Eredin, à l’affût, repéra une chevelure flamboyante pénétrée dans l'établissement. Il se leva et se dirigea vers elle pour l’accueillir. Uraïa avait troqué sa tenue habituelle contre une plus féminine et avait fait l'effort de coiffer ses cheveux. En la voyant ainsi, Eredin regretta presque de ne pas avoir fait d'effort vestimentaire.


- Bonsoir ! J'ai cru un moment que tu ne viendrais pas.


La rousse esquissa un demi sourire en retrouvant une tête connue au moins.

— Honnêtement ? J’ai failli ne pas venir. Mais je ne suis pas du genre à fuir.

Il était évident que les lieux faisaient ressurgir mille souvenirs et que l’archère était plus à l’aise dans sa solitude et au milieu des rapaces. Mais la hutte était aussi un lieu où elle avait passé de nombreux bons moments, dans cette existence révolue depuis longtemps. Elle prit le temps d’inspirer puis posa son regard sur Lautrec. Avait il seulement pris un bain ? Elle secoua la tête, souriant toujours à demi.

— Et il parait que je te dois un verre.

- Tu es avec moi donc tu n'as absolument rien à craindre ici !
Il connaissait tout le monde ici, que ce soit les guerriers ou les fermiers donc elle n'avait rien à craindre.  En tout cas, je suis content que tu sois venu. Il l'invita à le suivre et commença à se diriger vers le bars qui se trouvait à l'opposé de leur table.  Tu veux boire quoi ?

Elle parcourut la foule du regard et regretta d’avoir laissé passer une vague faiblesse par sa répartie. Elle pouvait battre deux Ascaniens avec une seule pelle, elle pouvait bien traverser une taverne pleine d’Utgardiens pour boire un verre avec Eredin Lautrec. Elle carra un peu les épaules et joua des coudes pour le suivre.

— Un hydromel.

Elle déposa d’elle même de quoi payer sur le comptoir avant que son chevalier servant du moment se sente pousser des ailes. Elle fit signe au tavernier qu’elle paierait pour les deux.
Elle s’installa ensuite au comptoir, se perchant de biais sur un tabouret. Manière d’avoir toujours un œil sur la foule et personne dans son dos.

— Alors, comment se porte le clan ?

Il l'observa faire en souriant, elle n'était pas à l'aise, ça se voyait.
- Et bien comme tu peux le voir, il est toujours... vivant !
Il remercia le tavernier et poussa la choppe d'hydromel vers la sorcière, accoudé vers elle, Eredin avait toute la salle dans le dos.
- Si non, il est agité à cause des derniers événements, mais qui ne le serait pas ?
Il leva sa choppe et trinqua avec la jeune femme

Elle trinqua avec lui en hochant de la tête.
— Je ne pensais pas les Amaranthis fous à ce point… J’ai cru qu’on en réchapperait pas cette fois…
Le ton était plus lourd qu’elle ne l’aurait voulu. Dans le fond, tous n’en avait pas réchappé, et une part d’elle même était restée sur ce toit, tétanisée pour toujours par la vue du Giganta.
— J’ai entendu dire que l’Hurlsk voulait marier son fils à une fille de Port aux Échoués ?
Le glissement de sujet n’était pas subtil, mais dans le fond, c’était le propre de ce genre de conversation.

Il aurait voulu réagir à ses paroles, mais elle changea de sujet rapidement et il l'accepta sans rien dire.

- En effet, il semblerait qu'Uriel n'ait plus vraiment le choix maintenant, on lui avait pourtant dit de se trouver une femme avant que ça n'arrive. Mais en vrai, ça ne dérangeait pas son frère de ne pas pas avoir le choix, son seul but étant de rendre le clan plus fort, c'était un bien maigre sacrifice que de ne pas pouvoir choisir la mère de ses enfants.  Et c'est la fille du chef de Port-aux-Echoués... cette alliance permettrait de contrôler totalement le village, ça pourrait changer le rapport de force dans la citée, mais c'est bien loin d'etre fait... Il la regarda en souriant, observant les tresses qu'elle s'était faite  Pour une personne qui vit en dehors du clan, tu as l'air bien au courant.

*Elle écoutait les détails de cette négociation tout en buvant son hydromel. L’attitude détendue d’Eredin déteignait peu à peu sur elle.
— Je vis peut être en dehors du clan mais j’ai des oreilles.
Elle finit par ajouter en englobant le reste de la salle d’un geste :
— Et bien sûr que le sort du clan m’intéresse.

Eredin fit une petite moue pas vraiment convaincu
- Je n'aurais pas cru, beaucoup de ceux qui ont quitté le clan ont une raison de le détester... pour les autres, comme toi, j'ai bien du mal à comprendre pourquoi on souhaite vivre en dehors.

Uraïa inspira profondément. Elle n’avait pas l’habitude de se justifier à ce sujet, car elle ne l’abordait tout simplement pas, la plupart du temps. Elle finit par poser un regard lourd de sens sur Eredin.
— Je n’ai pas quitté le clan de gaité de cœur. J’ai simplement su un jour que je devais partir. C’était devenu… trop pesant. Tu n’as jamais rêvé une fois ou deux de te réveiller et que personne ne te connaisse ? Repartir de zéro ?

Cette fois, il fut un peu plus convaincu et trinqua avec la choppe de la jeune femme.
- Ha, j'ai connu une période comme ça en effet... mais je suis un idiot, j'ai préféré flirter avec la mort plutôt que de quitter le clan !
Il avala une longue gorger avant de commander de quoi grignoter avec l'alcool.
- Allez raconte...

Elle esquissa un demi sourire encore une fois. Eredin faisait partie des optimistes, indéniablement.
— Qu’est ce que tu veux savoir au juste ?

- Pourquoi tu as quitté le clan ? La raison !
C'était peut etre pas une question à poser, mais il était ainsi ! Rien ne lui faisait peur, même une sorcière en colère.

— La raison, je te l’ai déjà donnée. Ma lignée est maudite. Déjà enfant, les ragots allaient bon train, mais quand l’Ancienne elle même a scellé mon sort avec sa prophétie, ça n’a fait qu’empirer.
Elle reprit une gorgée d’hydromel avant de poursuivre les yeux dans le vague.
— Déjà qu’avant mon paternel n’était pas des plus heureux de m’avoir… quand j’ai eu l’âge de me marier, j’avais l’impression d’être un bœuf qu’on envoie à l’abattoir.
Elle pinça les lèvres. Sa fierté en pâtissait toujours.
— Je les ai refusés, un à un, mes prétendants. Puis un matin, j’ai eu le choix entre être une pièce de viande, ou une vieille fille à la risée de tous. Mon père a menacé de me couper les vivres alors j’ai commencé à chasser seule.
Et je ne suis pas revenue.


- Donc tu as décidé de devenir une vieille fille qui se cache ? c'est pour ça que tu es ici...? Il cacha son sourire derrière sa choppe, mais avant de boire une gorgée, il observa le liquide d'un oeil suspicieux  Tu as foutu quelque chose dans mon verre...?  tu as peur de succomber à mes charmes donc tu va me tuer avant que ça n'arrive ? Il hésita avant de boire un petit coup.

Elle roula des yeux en se retenant de lui coller une bourrade.
— T’es con, Eredin Lautrec. Je ne me cache pas, je me tiens à l’écart, c’est tout. Et tu peux boire tranquille, si je dois te tuer, tu le sauras.

Pendant une fraction de seconde, il repensa au médecin Amaranthis qui s'était occupé de Liveig, peut etre pouvait-il l'aider avec cette histoire de "malédiction". Il chassa l'idée bien vite avant de reprendre:
- Je me suis entraîné avec mes frères à boire tout et n'importe quoi depuis que je suis petit, j'ai pas peur d'une coupe d'hydromel un peu plus corsé !  Et ton paternel, il est devenu quoi...? tu l'as revu ?

— Le poison, c'est l'arme des faibles... Mais je me doute que tu as le cuir dur. Pour ce qui est de mon père, il s'est remarié il y a des années de ça, il a sa nouvelle famille, et ses enfants. Je cherche pas à le revoir et lui ne parle jamais de moi. C'est probablement mieux ainsi.
Elle haussa les épaules. Orik lui donnait parfois des nouvelles, mais globalement, moins elle en savait, mieux elle se portait. Elle avait plus souvent vu le dos de son père que son sourire, de toute façon.

- Mais redoutable... Il savait pertinemment que leurs ennemis n'hésiteraient pas une seconde à utiliser cette arme contre eux. C'est surement mieux ainsi en effet, tu aurais du avoir le choix dés le départ, tu n'aurais pas du etre obligé de partir de cette facon, mais bon, ça à fait de toi qui tu es aujourd'hui et c'est aussi pour ça que tu es ici à l'instant présent... Il leva son verre. A ta foutu malédiction sans qui je ne me serais pas fait botter le cul !

Elle sourit en coin à cette façon de voir les choses et leva son verre en retour.

— T'es un optimiste, c'est indéniable, Eredin Lautrec. Au destin, dans ce cas ! Et que les lâches s'étouffent dans leur propre poison.
Elle s'envoya une bonne rasade d'hydromel, chassant de sombres pensées, résurgences désagréables de son passé. Elle n'aimait pas plus qu'Eredin ressasser encore et encore les choses qui n'avaient plus lieu d'être. A quoi bon ? Elle ne put s'empêcher de lui demander, tout de même.
— Tu n'as pas de regrets, toi ?
S'il était aussi optimiste, c'est qu'il avait peut être trouvé le secret pour aller de l'avant. Auquel cas, elle était curieuse de le connaître.

Lui un optimiste ? Ce fut vrai pendant une bonne partie de sa vie, mais était-ce toujours le cas maintenant? Il ne montra pas son hésitation et répondit presque directement.
- Bien sûr que j'ai des regrets, énormément même... j'ai préféré rejoindre mon frère pour jouer au ballon plutôt que passer la nuit avec la jolie Margaret Il souffla profondément en faisant non de la tête face à ce souvenir. Et cette fois où pour impressionner une femme j'ai sauté sur un Cocatrix pas encore dressé dit-il on montrant une cicatrice sur son bras.

Elle haussa un sourcil en jaugeant de ladite cicatrice. Si c’était bien de la même Margaret dont elle se souvenait, il n’avait probablement pas manqué grand chose.
— Tu sais que Margaret est plus velue qu’un ours ? Enfin… on ne doit pas avoir froid l’hiver au moins.
Elle souffla du nez d’un air presque comique.
— Mais je comprends ta technique.

Il se mit à rire sans se soucier le moins du monde des autres personnes présentes autour d'eux.

- A l'époque ça ne m'aurais pas le moins du monde dérangé je peux te l'assurer ! puis en la pointant du doigt et toi alors ? raconte moi un regret !

Elle rit à son tour à sa réponse.
— Ca ne m’étonne même pas ! Et je n’ai aucun regret de ce genre…

- Vraiment aucun ? Il semblait à la fois surpris et déçus par cette réponse. Je veux connaitre ton secret du coup !

— J’ai fait exactement toutes les conneries que je voulais, c’est tout.
Elle sourit à demi une fois de plus. S’il ne parlait pas des choses les plus sérieuses, elle n’allait pas le faire non plus.

- Haaa, madame serait donc une vilaine fille qui fait n'importe quoi !? ça explique beaucoup de choses...

— Je crois que tu es mal placé pour me juger, monsieur ours…
Elle retint à peine un éclat de rire moqueur.

- Je ne te juge pas ! Je fais une constatation... et avec un sourire fier. Et je ne vois de quoi tu parles ! Je suis quelqu'un de sage et respectable, je ne brûle pas un quartier entier et je n'attaque pas des représentants du gouverneur avec ma pelle... MOI !

— Ce n’est pas de ma faute si les Amaranthis ne sont pas foutus de construire des maisons plus solides… et si les Ascaniens ont toujours tort. Je ne fais que leur rendre service.

Il leva sa choppe aux vérités qu'elle venait d'émettre.  
- Je crois qu'ils y réfléchiront à deux fois avant de se frotter à toi après cette raclée.

Elle sourit et leva la sienne en miroir.
— J’ai pas beaucoup d’espoir. Par contre, je donnerais cher pour un tête à tête avec ce préfet…

- Ha, planter ton couteau dans sa jambe ne ta pas suffit ?

Elle s’assombrit un peu.
— J’ai comme un goût d’inachevé…

- Il doit vraiment être un sacré enfoiré pour mériter autant de... ressentiment ? Je veux dire, c'est un ascanien et ça façon de se mettre en avant, rien que pour ça il mérite qu'on le frappe, mais de la à aller aussi loin...

— Je l’ai aidé et il essayé de me jeter dans le vide… il a tué des civils de la même manière… et à son retour, il me fait accuser…. Je crois qu’il mérite largement le sort que je lui réserve. Si je le retrouve un jour.

Il siffla en entendant les accusations. - Rappel moi de toujours faire en sorte de t'avoir dans mon camp ! Et, si vraiment tu le cherches, je pourrais peut être essayer de t'aider, tu sais, je connais un gars qui connait un gars... Il fit une petite grimace. Je me renseignerais

Elle soupira doucement.
— C’est mon problème à moi. Je t’en ai assez donné comme ça.

- Me renseigner ne m'apporteras aucun problème... et disons que ça ne sera pas gratuit ! Le regard fixé sur un point imaginaire dans les cheveux de la sorcière, il cherchait quoi demander en guise de paiement. - Absolument pas gratuit du tout... ca va même te coûter chère, à coté de ça, les travaux de cette semaine passeront pour des vacances... Il n'avait aucune idée de se qu'il pouvait bien lui demander, mais il était sûr qu'au moment venu, il trouverait !

Elle haussa un sourcil devant son petit numéro et roula finalement des yeux en le voyant chercher ce qu’il pourrait lui demander.
— Laisse tomber Eredin, je vois bien que ce n’est pas dans mes moyens !

Amusé, il bomba le torse pour faire le malin.
- Bah, on trouvera bien un moyen de s'arranger... Ça voulait absolument tout et rien dire à la fois, mais il ne doutait pas que ça ferait mouche !

Elle le toisa avec un regard faussement désabusé, un jeu qu’ils commençaient à roder depuis ces quelques jours passés ensemble.
— Si tu crois pouvoir me plumer… tu te fourres le doigt dans l’œil.
Evidemment il y avait plusieurs façons de plumer quelqu’un et là encore, elle n’allait pas expliciter sa pensée plus que lui.

- Hmmm, on verra bien à la fin de la soirée ! En parlant de plume, ça lui donna une idée Plus sérieusement, tu devras me montrer comment tu chasses avec tes oiseaux ! Je suis curieux de savoir comment ça fonctionne et de voir à quel point c'est efficace ! Qu'est ce que tu en dis ?

— Je pourrais te montrer deux trois trucs, si tu te montres discipliné. Elle hocha la tête avec sérieux.

- Car j'ai l'air de quelqu'un indiscipliné ? Il la regarda avec un grand sourire avant de se mettre à rire Ne t'inquiètes pas, je sais quand profiter et quand être sérieux !

Elle le jaugea avec une drôle de lueur dans le regard, peut être un effet de la lumière.
— C’est ce qu’on verra.

- Ca m'a tout l'air d'être un accord du coup ! Il lui tendit une main pour conclure le marché.

Elle esquissa un léger sourire en coin avant de prendre sa main et la serrer avec la poigne qui était la sienne.
— Marché conclu.

Il serra sa main pour confirmer l'accord, mais au moment où il aurait dû la relâcher, il ne le fit pas.
- J'ai vraiment hâte de voir ça !  Un nouveau sourire puis enfin, il relâcha sa main.

Elle dodelina de la tête, songeuse soudain.
— Mais avant ça, j’ai quelque chose à faire.

Curieux, mais voulant faire bonne impression, il se retint de poser la question
- J'ai tout mon temps, et maintenant que l'on a échangé la poignée de main ancestrale, tu ne peux plus t'échapper !
Il se retourna vers la salle et commença à observer les gens présents

Elle haussa les épaules.

— Une parole est une parole. D’ailleurs, si tu veux encore voyager… tu es le bienvenu.

Son regard aperçu une personne qui ne devait pas être ici et en une fraction de seconde, la colère monta en lui. Il observa cet homme pendant bien dix secondes avant de se retourner vers Uraïa. Il lui fallut bien quelques secondes de plus pour réussir l'exploit de passer outre pour ce soir.
- Ha... voyager. En si bonne compagnie, comment refuser ? Mais avant je vais devoir m'arranger avec mes frères. Il montra son bracelet d'argent et toutes les responsabilités qui allaient avec, même si ce n'était pas forcément la le vrai problème .
- Ils ont bien du mal à se séparer de moi, ce sont des enfants et je suis cette figure de grand frère si importantes à leurs yeux... Oui, pour ce soir, il pouvait faire l'effort d'accepter cette personne ici.

Elle fronça imperceptiblement les sourcils. L’attitude du guerrier avait changé puis soudain il s’était maîtrisé. Elle ne put s’empêcher de se retourner pour suivre le regard meurtrier qui lui était si familier.
— Je connais ce regard…
Elle revint à lui, incapable d’identifier sa cible ou un regard noir en retour. Mais indubitablement, elle savait ce qu’elle avait vu.

Bien sûr qu'elle s'en était rendu compte
- Ce n'est rien, c'est juste... mon verre qui est vide ! Et il appela l'homme derrière le comptoir pour commander deux nouvelles choppes qu'il mot sur son ardoise. D'habitude, vous voyager dans quel coin ?

Elle soupira. Il était vraiment mauvais pour mentir. Elle prit un instant, hésitant à le laisser s’en sortir comme ça.
— Eredin Lautrec. C’est probablement pas du tout mes oignons. Et que je vais probablement le regretter… Mais t’es vraiment le pire menteur que j’aie croisé. Raconte.
Elle récupéra sa chope tout en le fixant.

Il l'observa du coin de l'oeil avant de diriger son regard sur le plafond.
- Et si je ne veux pas en parler maintenant ?
Comment lui expliquer sans la blesser que ce n'était pas ses affaires ?
- C'est une histoire pour plus tard... ne gachons pas not- cette soirée avec ça !
Il l'observa a nouveau du coin de l'oeil pour voir sa réaction.

Elle plissa le regard un petit temps, puis se ravisa. Après tout, elle n'était pas de la milice. Il ne voulait clairement pas lui parler, elle n'était rien pour lui extirper les vers du nez. Elle reprit donc une gorgée de sa bière, haussant une épaule.

— Soit. Ne dis rien. C'est pas mes oignons, de toute façon.

Il serra les dents tout en affichant un sourire forcé et en observant devant lui vers la réserve d'alcool. Ça lui faisait presque de la peine qu'elle le prenne comme ça, mais il était soulagé qu'elle lâche le morceau.
- Hmm.
Que dire de plus ? Il avala une longue gorgée d'alcool pour laisser le breuvage le réchauffer de l'intérieur.
- Tu avais parlé de voyager...?

La température avait perdu quelques degrés entre les deux acolytes, mais l'Utgardienne avait finalement décidé de battre en retraite, sur ce terrain là au moins. Aussi saisit-elle cette opportunité sans grand enthousiasme et rétorqua.
— Cette chose que je dois faire, elle va me demander de partir un moment. Ca pourrait être dangereux.

- Tu as besoin d'un garde du corps ?
Son regard se tourna vers elle et le sourire forcé devint plus naturel.
- Je serais ravi de veiller sur toi...

La rousse roula légèrement des yeux dans sa direction, sa bière toujours en main, se tournant à demi vers lui de nouveau :
— J'ai pas besoin d'un garde du corps, seulement d'un compagnon, ou deux, parce que les extérieurs ne sont pas bons pour les chasseurs solitaires.
Elle se racla la gorge et but une gorgée de bière.
— C'est jamais malin de partir seul dans les étendues sauvages.

- Ho mais je peux aussi servir de compagnon si tu le souhaites !
Il lui envoya un petit coup d'épaule pour détendre l'atmosphère.
- De nos jours la bonne compagnie se fait rare, c'est important de s'entourer des bonnes personnes. Il marqua une légère pause. Je serais très heureux de me joindre à toi. Je suis sûr que je pourrais apprendre énormément, j'ai toujours voulu devenir un grand chasseur, mais hélaaas je n'ai pas assez de temps pour ça...

Elle opina doucement du chef avant de cogner son bock du sien.
— Dans ce cas, c'est réglé. Tu es un bon guerrier et je ne peux pas impliquer tout mon groupe dans cette histoire. Je t'apprendrai quelques trucs sur les faucons au passage. Mais je te préviens, ça ne sera pas de tout repos.[/color]

- Un bon guerrier ? Tu ne m'as encore jamais vu combattre...
Il joua distraitement avec sa choppe, faisant tournoyer le liquide à l'intérieur.
- Pour la condition physique, je pense pouvoir suivre !
Elle avait des jambes puissantes, mais il ne s’entraînait pas seulement pour impressionner les filles !
- Et pour cette histoire, et bien on verra au moment venu.

Elle sourit en coin. Elle se doutait que le défi allait trouver un écho chez le guerrier. Comme il en trouvait toujours un chez elle.

— Tu as le sens de l'aventure. Tu ne me demandes pas pourquoi ni comment.

- Ce n'est peut être pas si important... et du moment que ce n'est pas pour tuer quelqu'un, je vois pas pourquoi je me priverais d'un voyage avec une sorcière ! En t'observant j'apprendrais à coup sûr quelques tours de magie !!!
Et ça lui permettrait de retourner dehors avec une bonne raison de revenir entier cette fois.
- Rassure moi... c'est pas pour tuer quelqu'un hein ?
Il la regarda en plissant les yeux.

Elle lui retourna un regard sombre annonciateur de tempête puis éclata de rire.
— Non ! A vrai dire, je compte honorer la mémoire de ce nomade, Baldhramn, et retourner ses cendres et ses effets à son clan.

Cette femme avait plus de couille et d'honneur que la plus part des hommes présents ce soir ! Et si au début c'était simplement des belles paroles pour lui faire plaisir, maintenant qu'il connaissait la raison, bien sûr qu'il la suivrait !
- Je ne sais pas comment tu fais, je dois vraiment devenir vieux...
Il la regarda avec respect, véritablement impressionné ! Et voyant son regard interrogatif, il s'expliqua:
- A chaque fois que je te vois, tu arrives à m'impressionner ! Je ne sais pas si c'est de la folie ou de la stupidité, mais se rendre dans un clan de nomade... c'est jamais une bonne idée, surtout pour ramener les cendres de l'un des leurs !
Et avant qu'elle puisse s'insurger ou lui répondre, il leva les mains en l'air en signe de paix.
- Tu es une véritable Utgardienne Uraïa Beklaga, Njörd m'en voudrait de ne pas t'accompagner pour une mission aussi noble ! Tu as gagné ma hache !
Et tout en maintenant sa bière en l'air, il s'inclina en avant avec sa main libre sur le cœur.

Elle esquissa une moue gênée. Le moins qu'on pouvait dire, c'est que Lautrec avait réussi lui aussi à la surprendre maintes fois, si bien qu'elle ne savait pas toujours quelle posture adopter. Pour ajouter au phénomène, elle n'avait pas l'habitude d'être commentée dans ses actes - encore moins de manière élogieuse. La plupart du temps, ça se résumait à des grognements, ou des insultes étouffées pendant qu'elle cognait un type dans l'arrière cour d'une taverne. Elle but quelques gorgées pour passer son embarras et sourit à demi.

— Ce sera un honneur partagé. Et pour tout dire... je connaissais Baldhramn avant cette invasion... Enfin... On s'était cognés... et bref, il avait fini par se raser le crâne pour marquer sa défaite. Je m'étais promis de le ramener en vie. J'ai pas réussi à tenir cette parole là.
Elle se rendit compte que ses paroles étaient confuses alors elle poussa un lourd soupir.
— C'est le moins que je puisse faire.
Il méritait pas de mourir sans honneur.

Elle prétendait avoir battu le géant ? Comme avait-elle réussi un tel exploit ? Sorcellerie ! Ou alors, encore un qui l'avait sous-estimé. Eredin se toucha machinalement les cheveux en étant content de ne pas devoir se raser à chaque fois qu'il se faisait allonger...
- On le ramènera chez lui.
Il ne le connaissait pas et n'avait pas levé le moindre petit doigt pour le sauver.
- Et tu ne pouvais rien faire pour le sauver...

— C'est pas la question de ce que je pouvais faire ou pas... C'est que j'ai pas tenu ma parole. Il a confronté le Giganta le premier... Il voulait mourir en héros, et je l'ai privé de sa belle mort. Tout ça pour finir sur l'échafaud, humilié par des types qui avaient pas le dixième de son courage. Je dormirai pas tranquille, tant que ce sera pas fait.

Il écarta les bars comme si la question était réglé
- Il faut que je m'organise, mais je pourrais partir d'ici quelques jours si ça te convient !

Elle acquiesça de nouveau.

— Ça serait l'idéal. De toute façon, j'ai besoin de quitter la ville...

- Je comprends, surtout après un tel événement, je ferais au plus vite.  Est-ce que tu veux que j'essaye de trouver d'autres "compagnons" ou ça ira ?

Elle secoua la tête doucement.
— Markus devrait nous accompagner, le connaissant.

Eredin hocha la tête en sourian
t
- Une équipe de choc ! Il a l'air d'un partenaire fidèle.

— Il l'est. On partage les risques et nos gains... Moitié moitié. Enfin maintenant, on partage aussi avec les autres. Mais ça reste équitable.
Elle aimait cet équilibre où chacun ne devait rien aux autres, si ce n'était ce respect mutuel et cette entraide naturelle et sans dette.

- Tu parles comme une voleuse et ici on aime pas ça... donc te fais pas prendre, j'ai pas envie de devoir te surveiller une semaine de plus !
Il but une gorgée d'alcool en l'observant
- C'est important d'avoir quelqu'un sur qui on peut compter, veille sur lui !
Lui, il avait les siens !

— C'est ce que je fais déjà. C'est pas un guerrier... Alors je garde un œil dessus. Et je ne suis pas une voleuse ! Y'a rien de mal à partager en égaux avec ceux qui le méritent.
Elle dodelina de la tête un moment, songeuse. Elle avait clairement changé ses habitudes, au fil des années, et elle ne s'en était pas vraiment aperçue jusque là.

- Hmmm, je vais garder un oeil sur toi dans le doute !
L'alcool commencant à se faire sentir, il se tourna une nouvelle fois vers la salle pour observer les personnes présentes .
- C'est normal de partager, en effet.

Elle secoua la tête comme pour dénier ses propos, mais elle s'aperçut qu'elle était peu à peu gagnée par une certaine langueur, et qu'elle avait peu à peu perdu le fil du nombre de pintes qu'elle avaient bues. Mais pour une fois, depuis un moment, elle se sentait bien. Peut être que cette nuit-là, ses cauchemars ne la tourmenteraient plus.
— J'ai pas prévu de me battre ce soir.

Il rigola en l'entendant
- Tu n'as pas prévu hein ? Tu es dans la hutte de l'Hurlsk, tu ne sais jamais comment la soirée va se dérouler !
De nature belliqueuse et avec l'alcool qui montait tranquillement, Eredin n'allait pas réussir à se retenir toute la soirée alors que cet enfoiré était toujours présent.
- Mais avant, il faudra que je te présente quelques personnes... et peut etre que l'on mange un peu.
Ca faisait déjà un moment qu'ils discutaient non ? Eredin était presque surpris qu'Olgierd ne soit pas venu voir si il y avait un problème.

Il avait mille fois raison cette fois-ci. Mais peut être était elle gagnée par un rare moment de paix. Retrouver un lieu perdu de son enfance, échanger quelques taquineries en bonne compagnie, comme si tout était normal, inchangé. C’était peut être tout ce dont elle avait envie sur le moment. Elle redressa néanmoins le dos à sa dernière proposition.
— Me présenter qui ? Pour le reste, je suis toujours d’accord pour manger… j’ai besoin d’éponger je crois…
Elle n'était pas ivre loin de là, mais la journée avait été harassante, et elle sentait bien que l'alcool pourrait lui jouer un mauvais tour si elle n'y prenait pas garde.

- Alors faisons comme ça, mangeons et ensuite je te présenterais... certaines personnes !

Faire planer le mystère là où il n'y avait rien était toujours un véritable mystère. Il sourit en la voyant froncer les sourcils avant de se tourner vers le tavernier, il commanda deux assiettes du plat du jour et invita Uraïa à le suivre. Il trouva deux places cote à cote sur un banc au milieu d'une table, il s'y installa en saluant les hommes déjà présents.

- Tu es forte et tu sais manier une pelle petit sourire, tu as du courage, de l'honneur, tu fais preuve de respect, tu aimes autant que nous les ascaniens et il semblerait que tu sois une bonne chasseuse. Il leva légèrement les mains en l'air. Comme je te l'ai déjà dis, une femme de ton acabit ne dois pas vivre en marge du clan. Donc je vais te présenter quelques personnes digne de confiance, si tu as un jour besoin d'aide, de vendre des choses, de trouver du travail ou quoi que ce soit, tu pourras soit directement venir me voir, soit leurs demander à eux. Il marqua une légère pause. Comme tu le disais, l'entraide est importante et nous il écarta les bras, le clan ! on essaye d'aider au mieux ceux qui en ont le plus besoin. De faire en sorte que personne ne soit laissé pour compte... se rendant compte qu'il dérivait un peu, emporté par son enthousiasme, Eredin se concentra en rapprochant un peu plus  son visage d'elle. Je veux dire par la que pour être fort, nous avons besoin de personne comme toi... peut être qu'un jour nous aurons besoin de toi et nous te demanderons ton aide, en attendant tu profiteras simplement de nos services ! Tu as probablement déjà des acheteurs et tout ce dont tu as déjà besoin, mais ce n'est pas eux qui t'ont sauvé de l’échafaud...
Eredin, avec une jambe de chaque coté du banc pour pouvoir etre bien en face de la jeune femme arborait un visage sérieux
- Je te veux dans mon camp Uraïa !

Elle avait entamé son écuelle tout en l’écoutant puis quand il eut terminé, elle reposa sa cuillère, et passa le dos de sa main sur sa bouche. On réfléchissait mieux le ventre plein.
— Je sais pas, Eredin…
Elle renchérit :
— Tu peux compter sur moi. Mais je ne reviendrai pas vivre au sein du clan…
Elle ajouta, finalement en tournant sa cuillère sur elle même :
— Et il y a des gens qui dépendent de moi en dehors… Mais bien sûr si le clan a besoin de moi, je serai là…

- Je ne te demande pas d'abandonner ta liberté ! Veille sur les tiens. Il se remit droit pour attaquer son assiette Mais peut être que tu pourrais passer plus souvent... Concentré sur son plat, il n'observa pas la réaction de la jeune femme.

Elle restait dans l’expectative mais elle devait admettre que l’eau avait coulé sous les ponts. Elle n’était plus cette adolescente sous la coupe de son père. Aujourd’hui personne ne pourrait lui imposer quoi que ce soit. Elle y avait veillé. Et même si la perspective de revivre parmi les siens n’était clairement pas à l’ordre du jour… elle pouvait bien aider Eredin qui l’avait tirée de mauvaises passes deux fois quand il aurait besoin d’elle en retour.
— Peut être oui.
Elle sourit à demi avant de mordre dans un morceau de pain à belles dents.
— Peut être même que je pourrais t’aider. Si tu me parles.
Le sous entendu n’en était pas vraiment un. Elle avait peut être abandonné le sujet plus tôt mais elle était du genre persévérant.

Entre deux bouchées.
- Peut être ? hum, c'est déjà pas mal !
Penché sur son plat, il s'arrêta de manger et se tourna vers elle
- Qui a dit que j'avais besoin d'aide ?

— Parce que ça fait une heure que tu serres les dents. Si c’était facile, ce serait déjà réglé, non ?
Elle l’observait tranquillement, sure de son interprétation. Eredin avait le clan derrière lui. Si c’était une affaire de force, elle ne doutait pas qu’il en aurait déjà fait l’usage.

Il roula des yeux et se focalisa à nouveau sur son plat. Il avala plusieurs cuillères tout en sentant le regard pesant de la sorcière. Cette fois il ne s'en sortirait pas si facilement. Il prit une gorgée d'alcool avant de s'ouvrir un peu, juste assez pour avoir la paix.

- Ça aurait dû être facile, mais... on m'a demandé d'attendre d'avoir des preuves avant de faire couler le sang, donc j'attends patiemment, gentiment...
Il secoua la tête de gauche à droite, exaspéré par cette situation qui durait depuis trop longtemps à son gout.
- Je passe pour un faible et un lâche du coup.
Grimaçant, il enfonça sa tête entre ses épaules avant d'attaquer à nouveau son plat.

Elle observa longuement le guerrier. Puis elle finit par se morigéner de vouloir s’en mêler mais c’était plus fort qu’elle. Elle finit par soupirer.
— Personne n’a dit que tout le monde devait être gentil et patient…

D'une main, il l'interrompit avant qu'elle n'en dise trop.
- C'est à moi de le faire... comme toi avec les cendres, tu n'accepterais pas de confier cette tache à un autre n'est-ce pas ? Et bien moi c'est pareil.

Elle acquiesça.
— C’est pas la question. S’il te faut des preuves… cherchons les. Si tu ne peux pas t’en charger, tu n’es pas seul... Et si ça ne suffit pas…
Elle ne termina pas sa phrase. Quand il était question de vengeance, Uraïa ne se formalisait pas des lois.

- Merci de te proposer aussi naturellement, ça me fait plaisir, mais tu devrais réfléchir avant de t'engager, je suis le frère de sang du prochain Hurlsk, j'agirais avec lui et pourtant... même nous devons faire attention...
Ce n'était pas normal, la famille Mörth avait beau etre ancienne et puissante, Eredin ne comprenait pas pourquoi l'Hurlsk ne lui avait pas donné son accord !
- Et de toute façon, à moins que tu saches où trouver une taverne secrète caché dans le quartier Amaranthis accessible uniquement grace à un mot de passe... et bien tu ne seras d'aucune aide.
Son ton était plus froid que voulu, il ne voulait pas la blesser, mais c'était la simple vérité. Eredin se remit à manger pour terminer le peu qui restait dans son assiette.

Elle réfléchit un moment sans paraître se vexer ou se soucier du ton froid de son acolyte. Il souffrait de ne pas pouvoir agir, elle connaissait le sentiment d’impuissance. Et son remède.
— A vrai dire. Je connais des Amaranthis. Et probablement de ceux qui connaissent des endroits peu recommandables. Et puis on peut toujours secouer quelques personnes au besoin.

On lui avait trop donné de faux espoirs dans ce genre la, il savait maintenant prendre du recul et ne pas trop s'enthousiasmer.
- Tu as l'air d'avoir quelques idées, je te laisse faire... ramène moi un indice et je t'en devrais une ! Tu pourras demander n'importe quoi !

— Il faudra peut être m’en dire plus. Mais si je peux le faire, je le ferai.
Elle hocha la tête, l’air le plus sérieux du monde. Elle ne s’engageait pas à la légère.

Il repoussa son assiette maintenant vide et termina le repas par une bonne gorgée d'alcool.

- Je pourrais peut être t'en dire plus...

Elle fit de même, repue, tout en continuant de le scruter. Elle commençait à se douter de ce qu’il allait dire mais elle préféra le laisser faire.
— C’est toi qui vois.

Eredin l'observa une nouvelle fois, plongeant ses yeux bleus dans les siens, mais cette fois il recherchait quelque chose au fond de son regard, quelque chose qui lui donnerait confiance ou au moins le courage de se lancer.
- Liv... son nom était difficilement prononçable, malgré qu'il avait accepté de passer à autre chose, ça restait toujours trop difficile pour l'instant désolé, on en parlera plus tard, gachons pas la soirée...

Uraïa ne détourna pas les yeux. La peine du guerrier était une plaie à vif, aussi à vif que la balafre de Liv était visible. Elle ne lui retourna ni pitié ni fausse empathie. Elle posa sa main sur son épaule et la serra simplement. La culpabilité la mordit un instant.

— Je sais. Je l’ai rencontrée. Il y a quelques temps. Je ne savais pas pour vous deux.
Et c’était vrai. Elle n’avait fait le rapprochement avec Eredin que récemment. Au moins, maintenant, il savait.
Elle lâcha son épaule sans plus s’avancer. Comme on laisse une bête sauvage choisir d’aller vers une main tendue ou de s’en éloigner.

A nouveau, il se tendit, la mâchoire crispée et le regard dur. C'était quoi ce bordel ? C'était pour ça qu'elle s'était rapproché de lui ? par pitié ? par curiosité ?

- Tu le savais depuis le début... ?

Elle secoua la tête.
— Je l’ai croisée il y a quelques mois par hasard à Port aux Échoués. C’était plutôt houleux avec un type pour qui elle bosse. J’ai essayé de l’en dissuader… Elle secoua de nouveau la tête. Je pouvais pas savoir qu’il y aurait l’invasion, que je me retrouverais jugée et que tu serais chargé de me surveiller. Du reste, j’avais oublié cette histoire…
Elle ne l’avait pas lâché du regard. Il avait l’air d’une bête aux abois.
— J’ai essayé de la secouer.

Il souffla pour évacuer, elle ne mentait pas et il s'était une nouvelle fois emporté pour rien.
- La secouer, j'ai essayé aussi... mais je n'avais aucune chance de réussir.
Il se massa le cou d'une main pour se calmer, elle connaissait déjà tout donc c'était plus simple.
- Enfin, tu connais toute l'histoire du coup... les hommes à la table à gauche de l'entrée sont de la famille Mörth et l'un d'entre eux est Barldwin, l'homme qui devait épouser Liv'. L'homme qui a engagé des Amaranthis pour s'occuper d'elle car il ne supportait que je l'ai... il mourra de mes mains ainsi qu'absolument toute sa famille, ce n'est qu'une question de temps.
Il termina sa choppe avant de s'essuyer la bouche et la barbe.
- Voila, plus de secret... tu sais tout.

Elle n’avait pas eu autant de détails de la part de Liveig mais le puzzle se reconstituait avec les explications d’Eredin. Elle prit la mesure des choses et observa dans la direction qu’il lui indiquait, retenant les noms et les visages pour les graver dans sa mémoire. Elle tourna finalement la tête vers lui. Rien n’avait changé dans son regard à elle. Eredin avait certes souffert mais elle ne lui infligerait pas le regard qu’on accorde aux choses brisées ou incomplètes. Elle ne l’avait que trop subi de la part de son père.

— Je comprends mieux, disons. Mais je ne suis pas d’accord avec toi.
Elle marqua une pause avant de reprendre.
— C’est à elle de le faire. Elle doit tuer ses démons.

Il tourna son regard vers elle, surpris, jamais ça ne lui avait effleuré l'esprit. Mais c'était sa mission, son objectif, LE SIEN ! Il l'avait trop souhaité et imaginé pour ne pas le faire soit même !

- La Liv' que j'ai connu n'existe plus... elle a trop changé... mais dans mes souvenirs, elle reste cette femme douce et gentille que j'ai connu... je ne la transformerais pas en meurtrière.
Peut etre avait-elle raison dans le fond, mais ce soir, il refusait cette idée.
- Et de toute façon, c'est mon rôle.

Elle secoua la tête de nouveau, soufflant du nez, sans rien dire sur le moment. Elle le comprenait mais elle ne pouvait pas l'approuver.
— Tu en parles comme si elle t'avait appartenu, Eredin. Liveig est capable d'aligner une cible au couteau en ayant bu trois pintes, elle se bat, elle a besoin de savoir qu'elle est forte. Elle ne redeviendra jamais elle-même si elle ne peut pas les affronter. Tu le pourrais toi ?

Elle ajouta sur un ton plus sombre.

— Ce n'est pas un meurtre de toute façon. C'est eux qui l'ont défigurée, violentée. C'est la simple justice qu'elle le fasse. Ton rôle à toi, c'est d'arriver à te pardonner de ne pas avoir été là.

Le guerrier cogna sur la table de colère avec force et les dents serrés. Il se leva en tenant toujours son verre vide et abaissa son regard sur elle. Pour qui se prenait-elle ? Elle disait l'avoir rencontré une fois et pensait la connaitre mieux que lui ?  Et depuis quand pensait-elle être assez proche de lui pour pouvoir parler ainsi... ? Le regard noir, il tendit la main pour prendre sa choppe avant de partir les recharger au bar. Une fois de retour, il lui redonna son verre avant de s’asseoir sans un mot.

Elle le regarda sans bouger. Qu'il essaie de la cogner et il se heurterait au même mur qu'il avait rencontré jusque là. Elle n'éprouvait absolument aucune peur. Elle regarda sa nouvelle chope puis le guerrier, dans le calme le plus total. Elle lui laissa néanmoins un répit. Elle se demanda pourquoi elle avait mis les pieds là dedans, mais c'était déjà la deuxième fois qu'elle se retrouvait dans cette affaire malgré elle. Peut être était-ce un signe, ou un message bizarre des dieux.

— Personne n'est assez fort pour prévoir l'imprévisible, Eredin.
Elle avait parlé d'une voix plus douce. Il fallait qu'il comprenne. Peu importait maintenant s'il se jetait sur elle ou s'il lui renvoyait sa bière à la gueule.
— Tu penses que c'était à toi de la protéger... Mais la seule chose qu'on peut faire, c'est aider ceux qu'on aime à devenir plus forts, à se préparer au pire. C'est le seul moyen. Un jour ou l'autre, le danger arrive, et on n'est pas là.
Elle souffla finalement.
— Je crois que c'est ce qu'elle essaie de faire. Plus ou moins.
Finalement elle se tut. L'Utgardien s'était montré furieux, menaçant, mais il était revenu pour l'écouter.

Comme au début de l'année dernière après la disparition de Liv', Eredin songea à passer le reste de la soirée au fond de son verre pour simplement passer à autre chose. Hélas et c'était même bizarre, il n'en fit rien et l'écouta sans rien dire.

- Tu parles beaucoup...
Mais il comprenait bien qu'elle disait ça pour lui.
- J'entends se que tu dis, mais... ca fait des mois que je suis jugé pour mon inaction, je le vois presque tous les jours et je ne peux rien faire... je rêve de planter ma hache dans sa tête et d'enfin mettre un terme à cette histoire et d'enfin pouvoir accomplir ce qu'elle m'a autant reproché... de ne pas l'avoir vengé !
Soufflant et faisant craquer ses cervicales, il ajouta:
- J'y réfléchirais...

Elle soupira longuement.
— C’est toi qui me fais parler… mais parce que je connais ce sentiment. Ne pas avoir de prise sur le passé. Et en porter tout de même le poids. Avoir cette rage qui bouillonne en soi, et ne pas réussir à l’extirper… c’est une bête qui te ronge de l’intérieur.
Tu ne peux ni la noyer, ni la dompter…


- Je suis presque sûr de réussir à la noyer...
Et pour la première fois depuis un petit moment, il regarda cette femme qui n'avait pas peur de dire les choses
- Donc tu fais quoi pour évacuer cette rage...? tu l'acceptes ? tu passes à autre chose ?

Elle eut une petite moue, un instant plongée dans certains souvenirs désagréables.
— Je l’ai laissée sortir… c’est égoïste mais je la préfère adressée à mes ennemis qu’à moi même….
Elle haussa une épaule.
— Ou bien j’ai pris la tangente pour la fuir. Dans tous les cas, c’est elle ou toi.
Elle reposa les yeux sur lui.

Ça faisait un moment qu'il évacuait sa rage et sa haine d'une manière malsaine avec sa catin du quartier Amaranthis, il s'était peut etre enfermé dans une routine de complaisance sans vraiment s'en rendre compte et avait comme qui dirait commencé à perdre la flamme. Il se disait toujours qu'il ne pouvait rien faire de plus, mais comme Uraïa l'avait fait remarqué, il y avait toujours moyen de faire quelque chose...
- Je crois comprendre... son regard perdu un moment dans la mer de flamme qu'était sa coiffure - Tu as l'air d'en avoir bien bavé toi aussi, est-ce qu'aujourd'hui c'est terminé ... ?

Elle parut surprise de cette bifurcation soudaine de la discussion sur son propre sort. Elle se frotta une tempe comme pour réfléchir à sa question.
— Je me traîne toujours un sale caractère, finit-elle par dire, avec un léger sourire d’auto-dérision Il y a des trucs qui ne partent pas… Mais moi je n’ai pas un ennemi en chair et en os qui me nargue tous les jours. Je me bats avec mon reflet dans le miroir.
C’était la réponse la plus honnête qu’elle pouvait faire. Dire qu’elle avait surmonté ses démons et ses peurs aurait été un cruel mensonge. Elle s’était bannie d’elle même de son clan. Elle avait repoussé les autres pendant des années, et même ce crétin de Markus n’était qu’une exception ponctuelle de douceur dans sa vie régie par l’austérité.

- Hum, un sacré caractère en effet... tu parles sans crainte, peu importe la personne en face, et tu dis les choses...  tu es sûr que c'est à cause de ta malédiction que tu es seule ?
Après un petit temps, il sourit avant de rire légèrement. Il ne voulait pas passer la soirée à déprimer, donc il faisait l'idiot.
- Au moins toi, ton adversaire est agréable à regarder, pas comme cet enfoiré !

Elle souffla du nez, avant de boire de nouveau. Eredin avait perdu cette expression torturée pour reprendre son air rigolard et taquin habituel.
— C’est Sturla qui m’a sauté dessus. On ne peut pas lui dire non. Elle a un caractère pire que le mien…
Elle heurta légèrement son épaule de la sienne en avisant l’autre table.
— Qu’il profite de ses dernières heures…
Elle était désormais bien déterminée à tirer cette affaire au clair. Peut être un espoir de rédemption pour deux Utgardiens qui en avaient trop bavé. Ce serait peut être une manière de régler sa dette envers le clan qui lui avait évité un sort funeste aux mains des Ascaniens.

- Ha Sturla, il vaut mieux l'écouter et je sais de quoi je parle !
Lorsqu'elle le poussa gentiment, il ne put s’empêcher de sourire.
- A ses dernières heures dit-il en levant sa bière et que notre voyage soit riche en aventure ! et il but une belle gorgée.

Elle leva sa bière de concert et enfila sa pinte avec zèle. Elle avait bien besoin de boire elle aussi. Elle avait été beaucoup plus loquace que ce qu’elle avait envisagé. Elle espérait que ça servirait son comparse. Et elle se promit de s’occuper de cette taverne clandestine Amaranthis. Elle connaissait pile la personne pour ça.
— Je verrai mon contact avant notre départ.
C’était sa manière à elle de lui promettre qu’elle n’oublierait pas ce service qu’elle avait dit qu’elle lui rendrait.

- Concentre toi sur ta mission et sur le voyage, nous verrons après pour la mienne... j'ai attendu une année, je peux attendre quelque jours de plus. Et c'est un coup à ce que je ne sois pas concentré ou que je ne vienne plus.
Il posa une main sur son avant bras
- Merci Uraïa.

Elle esquissa un sourire un peu embarrassé. Elle était agile sur bien des plans mais les démonstrations d’affection étaient tout en bas de la liste. Elle passa maladroitement sa main sur celle qui s’était posée sur son avant bras et inclina de la tête.
— Comme tu voudras. Ça ne me coûte pas grand chose… Entre Utgardiens.
Elle retourna ensuite à sa chope, un domaine bien moins hasardeux.

Un sourire sincère, il retira sa main en sentant la gène de la jeune femme.
- Bon, on devrait allez voir mes frères avant que l'on soit trop bourré... ou que eux le soient.
Malgré tout, il passait un bon moment et c'était bien l'une des rares fois où il n'avait pas envie d'etre avec les siens

Elle retournait sur un terrain qu'elle maîtrisait beaucoup mieux. Bien qu'elle n'avait pas côtoyé autant d'Utgardiens depuis un moment. Cela dit, il n'avait pas tort. Si elle continuait sur cette pente, elle allait finir sa soirée sous la table. Le sang battait à ses tempes et elle dodelina de la tête avant d'esquisser un geste pour se lever.
— Je vais juste... faire un petit tour. J'arrive.
Autant de bière, ça se payait à un moment. L'environnement dansait doucement autour d'elle et elle plissa les yeux pour se reprendre. Un Utgardien ne faillit jamais. Elle dut s'appuyer à son épaule, geste qu'elle fit passer pour amical, histoire de dissimuler son manque d'équilibre momentané.
Elle se dirigea ensuite vers la sortie arrière de la Hutte, où traditionnellement on trouvait les lieux d'aisance. Elle se fraya un passage au milieu de la foule en repoussant la masse de ses coudes, l'air surchargé d'effluves de bière et de chaleur humaine.
L'air extérieur lui frappa le visage quand elle aborda ce qui ressemblait à des latrines ou vaguement. Elle inspira à plein poumons l'air de la nuit et fixa un moment son regard sur la lune pour faire le point sur ses idées. Elle se sentait tranquille, pour une fois. Flottant sur un léger nuage d'alcool. Elle se dirigea vers la cabine des latrines coupée dans ses élans poétiques par une envie plus pressante, puis reprit le chemin vers la hutte quand quelque chose sembla bouger dans l'obscurité. Elle fronça le sourcil vaguement, sûrement un chat qui venait fouiller les déchets.


Spoiler:
Eredin Lautrec
Eredin Lautrec
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Lun 6 Sep - 15:46
Alors qu'elle s'apprêtait à passer outre, pour une fois, une voix la frappa dans son dos, une voix qu'elle n'avait pas entendue depuis des années.
— Qu'est ce que tu fous ici, Uraïa ?
L'Utgardienne tressaillit et finit par se retourner. L'homme avait pris des rides malgré tout, il gardait la même stature haute, l'impression de force qu'elle avait toujours connue, et un semblant de flamme demeurait dans ses cheveux taillés sur les côtés.
- Moi aussi, ça me fait plaisir de te voir, père.
Elle esquissa un sourire narquois et crispé. Elle aurait dû se douter.
Yvar Beklaga s'avança d'un pas pesant dans sa direction, et une fois de plus, Uraïa eut envie de fuir loin, se rappelant les contrées sauvages qui avaient été son refuge si longtemps. Il pointa un doigt accusateur dans sa direction.

— Tu traines avec Lautrec, maintenant ? Il parait qu'il en a bavé. Tu devrais le laisser tranquille. On sait tous les deux que tu auras pris les voiles à l'aube.
Elle s'efforça de garder son calme, inspira profondément en plantant son regard dans le sien. C'était bien plus difficile que d'affronter une armée de péteux Ascaniens.
— Qu'est ce que ça peut te foutre ? T'as pas une famille à t'occuper ?

Il la foudroya du regard en retour :
— C’est toi qui es partie. Tu m’as humilié et tu oses te pointer ici dix ans après ? Tu crois qu’on a oublié ?

Seul à sa table alors qu'il attendait patiemment le retour de la jeune femme, Eredin se fit surprendre. Torstein lui attrapa la tête sous son bras pour l'emmerder avant de s’asseoir à la place d'Uraïa en rigolant, Olgierd aussi été la et se fit une place juste en face.
- Bah alors, tu as fait fuir ton rendez-vous ? s'empressa de demander Torstein
- Sache que je n'ai pas encore ton talent pour faire fuir les femmes ! Sûrement parce que je me lave, moi !
Les trois hommes rigolèrent de bon coeur.
- Venez avec nous, on s'amuse ! on a de l'alcool ! Et on partait chercher des boucliers dit-il en lui faisant un clin d'oeil Et on veut tous voir ta nouvelle copine, Uriel le premier...
Eredin savait pertinemment qu'ils allaient le faire chier avec ça jusqu'au bout et il avait décidé d'arrêter de lutter, de toute façon la jeune femme allait tous les remettre à leur place très rapidement, il n'en doutait pas une seconde.
- Vous me connaissez, je suis un timide et je ne suis pas sûr que lui présenter des crétins comme vous est une bonne idée !
- Haha très drole !
- On va pas tarder à arriver, vous inquiétez pas, et la faite pas chier... c'est un conseil, surtout pour toi ! Dit-il en pointant Torstein
- Très bien, vient on va chercher les boucliers !
Les deux hommes se levèrent avant de se diriger vers l'arrière salle pour prendre des boucliers, encore pour un jeu stupide et dangereux à tout les coups...

Uraïa ne revenait pas cependant. Elle se heurtait à un barrage de son passé, coincée entre les latrines et l’entrée de la Hutte. Elle fixa son père d’un air mauvais, alors qu’un élan de culpabilité la traversait malgré elle.
— J’ai le droit d’être là si j’en ai envie. Tu ne m’as pas laissé beaucoup de choix, je te rappelle. Et tu as d’autres enfants. Pourquoi tu ne m’oublies pas ? On a qu’à faire comme si on se connaissait pas… ça changera pas grand chose.
Le vieil Yvar fit encore un pas vers elle.
— Tu vas partir, Uraïa. C’est tout. T’es pas la bienvenue ici. Disparais et ne reviens pas.
Elle encaissa le rejet du père comme un uppercut bien placé. Elle savait qu’il n’avait jamais cherché à savoir ce qu’elle devenait mais cette lueur dans l’œil de son géniteur lui poignardait tout de même les entrailles. Elle le contourna brutalement en le bousculant.
— Va te faire foutre, papa.
Elle ne s’attendait certainement pas à ce qu’il la chope par la nuque comme lorsqu’elle n’était qu’une gamine et qu’il lui retourne une gifle monumentale. Elle en resta ébahie, le visage cuisant, puis elle leva le poing pour répondre et se ressaisit juste à temps. Son père lui retourna un rictus mauvais, mais elle se contenta de cracher à ses pieds avant de tourner les talons.
— C’est ça ! Fuis encore !
Elle ressurgit dans la salle bondée et surchauffée en cherchant l’air. Elle resta un moment à se retrouver elle-même, serrant les poings à s’en entamer les paumes. La rage n’avait pas mis longtemps à ressurgir.

Les idiots, il observa ses frères passer à nouveau avec un bouclier dans chaque bras, ils allaient encore faire n'importe quoi ! Patient, il attendit le retour de la rouquine sans se poser de question. Après plusieurs minutes, guettant son retour, il la vit surgir dans la grande salle, mais quelque chose avait changé. Les rôles s'étaient subitement inversés. Eredin détourna le regard pour lui laisser du temps, mais l'alcool jouant, il se leva pour la rejoindre.
- Qu'est-ce qu'il y a ? Me dit pas qu'ils sont venus te chercher ici ?
Il avait directement pensé aux ascaniens, même si il se doutait qu'ils n'auraient jamais assez de courage pour mettre un pied ici à cette ci.

Elle ouvrit la bouche pour lui répondre, soulagée qu’il la trouve alors qu’elle même n’avait pas les idées très claires. Mais le vieux Beklaga lui avait emboîté le pas depuis l’arrière de la hutte et arborait une expression cynique. Il passa derrière elle en la bousculant et s’arrêta en reconnaissant Eredin.
— Un conseil, mon garçon. Elle n’apporte que le malheur, puis elle disparaît comme un courant d’air. Évite toi du souci.
Déjà, il détournait la tête et jouait des coudes pour disparaître à nouveau dans la foule.

Il observa l'homme s'éloigner en essayant de comprendre si il y avait un problème. Puis une fois l'inconnu disparu dans la foule, il se tourna vers Uraïa.
- Charmant...
Et donnant une tape sur le bras de la sorcière.
- Tu va bien ?

Elle se secoua un peu et tenta de chasser l’obscurité qui l’avait envahie.
— Mon père.
Elle n’avait rien de mieux à dire.
— Ne fais pas trop attention.
Pendant un instant, elle avait songé à quitter la hutte tout simplement. Mais sa fierté l’empêchait de faire ce que son père attendait d’elle.
Elle finit par desserrer les poings en sentant ses ongles lui perforer les paumes.

— Ça va.

- Je vois... je ne comptais pas y faire attention de toute façon.
Restant debout à coté d'elle, il observa la salle
- On a chacun un de nos démons présent ici... on fait quoi du coup ? est-ce qu'on y va pour montrer que l'on en a rien à foutre d'eux ou... est-ce que l'on s'éclipse ?
Un petit sourire aux lèvres, il l'accompagnerait quoi qu'elle décide, même si il doutait qu'elle souhaite s'éclipser dans un coin, avec lui !

Comme toujours, les deux natures d'Uraïa se disputaient chez elle. Foncer ou s'isoler, deux extrêmes incompatibles. Et pourtant. Jusque là, elle avait toujours pris la voie de la fierté et de l'honneur. Mais ce soir, Eredin lui avait donné à réfléchir. Est ce que vouloir à tout prix provoquer ses démons n'était pas une forme de défaite ? Leur donner bien plus d'importance qu'ils n'en méritaient ? Elle prit sa décision, sans même s'en apercevoir, glissant sa main sous le bras du guerrier.
— Et pourquoi pas les deux ? On en a bien assez bavé pour eux. Pourquoi se les imposer quand on passe une bonne soirée ?
Et elle se fraya un passage dans la direction opposée, le menton haut, la stature altière.

Une nouvelle fois, il se fit surprendre par la jeune femme qui n'avait pas l'intention de fuir, mais qui souhaitait profiter de la soirée. Elle glissa donc sa main sous son bras pour l'attirer vers la grande salle et Eredin se laissa faire sans un mot. Droit, un sourire charmeur sur le visage, il traversa la pièce avec l'une des femmes les plus fortes qu'il connaissait. A cet instant, il était bien et rien n'avait vraiment d'importance ! Voyant qu'elle ne savait pas vraiment où se rendre, il la guida vers la table de ses frères, mais à mi chemin il changea d'idée
.
- Tu va m'en vouloir... dit-il avec un sourire qui s’agrandissait
Poussé par l'alcool, il attrapa sa main pour etre sûr qu'elle ne le laisse pas seul et l'attira en rigolant dans une partie de la hutte où il n'y avait pas de table, juste à coté du coin des musiciens. Ils se joignirent ainsi aux rares danseurs de la hutte. Voyant la jeune femme dans son élément naturel, il rigola et se rapprocha d'elle.

- Laisse toi guider et ne m'en veux pas trop ! Trop heureux à l'instant présent pour se soucier des autres, il ne voyait qu'elle et tentait de la guider du mieux qu'il le pouvait.

Elle n’avait pas vu ce coup venir et quand elle eut compris, c’était trop tard. Elle se raidit comme un cheval renâcle devant l’obstacle mais Eredin avait trouvé le bon moment et la situation pour l’entraîner sur la piste de danse. Elle avait dansé par le passé, mais ce dont elle se souvenait était éparpillé dans sa mémoire. Elle n’avait plus l’habitude de sortir de sa zone de confort, mais il tenta de l’amadouer avec ses airs charmeurs et son regard de sale gosse. Elle lui jeta un regard noir en retour, qui n’aurait aucune chance de le dissuader alors qu’il l’attirait déjà vers lui. Elle pouvait lutter mais elle n’était pas sur un terrain d’entraînement, résister ne servirait qu’à la ridiculiser davantage. Du reste, sa main calée dans la sienne, ferme et sûre, l’alcool qu’elle avait déjà ingurgité lui firent lâcher prise et elle lui laissa cette petite victoire, tâchant de retrouver les pas qu’elle avait oubliés.
— Je me vengerai…

Eredin prit un air choqué et surpris, comme si il ne comprenait pas pourquoi elle le menaçait de la sorte. Puis il l’entraîna d'une prise ferme dans une danse simple.
- Peu importe, ça vaut le coup !
Et pendant un temps, au rythme des instruments, ils ne furent que deux dans cette Hutte pleine à craquer.

Elle grommela, râla sur ses pieds qui rataient des mesures mais bientôt elle finit par se concentrer sur son voleur-cavalier. Il affichait cette insouciance incroyable qui représentait un véritable miracle vu ce qu’il avait enduré. Peut être était-ce son secret, sa meilleure défense contre l’insoutenable pesanteur du destin. La musique lui remplissait les oreilles, la vibration des tambourins s’instilla doucement dans ses muscles, et le souffle plus court, elle se laissa contaminer par la joie de vivre d’Eredin. Au milieu de cette piste de danse, il irradiait comme un soleil. Son insolence était à la hauteur de son rayonnement.
Elle se prit finalement à rire en retrouvant les pas oubliés.


En la voyant commencer à prendre le rythme et à dévoiler des pas de danse qu'elle connaissait, Eredin se mit à lui tourner autour en applaudissant et en riant. Il l'encourageait de bon cœur, ravi de voir qu'elle se laissait aller ! Hélas, toute chose aillant une fin, la musique s'estompa et les musiciens prirent une pause bien mérité.
- Roooh allez, une autre les gars !
Eredin n'avait aucunement envie de s'arrêter.

Elle battait des mains au même rythme que les autres danseurs, et alors qu’Eredin se mettait à tourner autour d’elle, elle le suivit du regard, se mettant à tournoyer à son tour. Elle perdit la notion du temps, elle commença à avoir chaud, mais saoule de musique et de cette bonne humeur qui l’envahissait, elle ne vit pas arriver la fin plus que lui. Elle reprit son souffle, encore hilare, et secoua la main devant elle, sifflant les musiciens pour leur belle performance.
— Laisse les respirer… il fait aussi chaud que dans un four ici…
Elle dédia un sourire amusé à Eredin. Évidemment qu’il n’avait aucune envie d’être raisonnable.

Il fit une petite moue avant d'applaudir les musiciens qui allaient boire un coup.
- Tu cachais bien ton jeu ! moi qui pensais que tu allais t'accrocher à moi pour ne pas être abandonné au milieu de la piste, je suis presque déçu, mais au final tu te débrouilles plutôt bien !
Tirant sur son col, c'est vrai qu'il faisait chaud ici ! Et ils n'avaient plus rien pour se rafraîchir en plus !

— C’était ton plan ?
Elle secoua la tête en souriant, soulevant sa tignasse qui lui collait à la nuque.
— Mais merci du compliment… Je danse comme une clé rouillée, mais pas question de refuser un défi.
Elle balaya les environs du regard. Ils avaient réussi à tenir tête à leurs démons tout en les ignorant royalement.
— Et maintenant ?

- Bien que j'en ai pas vraiment envie, maintenant je te présente mes frères, c'était un peu le but à la base... ce sont des idiots, mais ce sont les miens ! dit-il en souriant, contant de sa bétise Etant le premier cercle du futur Hurlsk, on est tous promis à des postes importants, donc ce sont les personnes à connaitres pour... Il chercha les mots quelques instants pour à peu près tout et n'importe quoi !
Lui offrant à nouveau son bras, il l'invita à le suivre jusqu'à la table qu'il avait l'habitude de prendre.
- Ne fait pas trop attention à ce qu'ils diront hein... comme je te l'ai dit, ce sont des idiots !
Avait-il vraiment envie de la présenter ? Eredin était persuadé que c'était une mauvaise idée, ils allaient encore en faire des tonnes et dire n'importe quoi ! Il hésita même à simplement sortir dehors pour se rafraîchir, gagner du temps voir même fuir ailleurs et reporter à un moment plus propice... mais maintenant qu'il avait dit se qu'il allait faire, c'était trop tard non ? Bordel ! Toujours debout sur la piste de danse, il n'avait pas bougé d'un pouce.

Elle haussa un sourcil. Ça ressemblait à quelque chose d’informel et de sérieux tout à la fois. Et la nervosité d’Eredin, sa prévenance, le fait qu’il n’avait toujours pas bougé tout lui donnait l’impression que c’était un moment important. Elle prit une rapide inspiration. Peut être qu’elle aussi regrettait la piste de danse tout à coup. Elle prit néanmoins son bras, assez naturellement.

— Sois pas si nerveux, tu m’inquiètes.
Elle sourit avec malice, peut être pour donner le change, elle aussi. A vrai dire personne n’avait pris la peine de la présenter à quiconque depuis longtemps, tout en semblant se soucier de l’impression que ça allait laisser sur elle.

Nerveux ? Il l'était ? Non... pourquoi le serait-il ? Tournant la tête vers elle alors qu'elle prenait son bras, il se le demanda.
- Quoi ? pfff, mais non...
Avait-il vraiment peur qu'il y ait une mauvaise impression ? ou qu'elle pense que ce soit un signe, qu'il lui présentait les siens pour autre chose que la faire revenir dans le clan ? peut etre bien s'imaginait-elle qu'il cherchait à la ramener chez les Utgardiens pour avoir une chance...? c'était le cas ? ... non ! Il avait vu son potentiel et faisait ça sans aucune idée derrière la tête autre que vouloir renforcer le clan, oui ! mais alors pourquoi il hésitait ainsi ? L'alcool l'embrouillait, Eredin Lautrec était perdu !
- Je te dis juste que ce sont des idiots, rien de plus, le reste je m'en fiche !
Idiot ! Idiot ! Idiot ! Elle avait foutu quelque chose dans sa bière c'était sûr, il aurait du se méfier de cette sorcière !
- Allons-y !
Et il se mit en marche ! Pas besoin de trop réfléchir de toute facon, il allait simplement lui présenter sa famille... et pourquoi elle avait attrapé son bras ? n'était-elle pas Uraïa Beklaga ? Indomptable, indépendante, forte et solitaire ? Qu'était-il entrain de faire ? Foutu lui !

Elle émit un rire nasal tout en le suivant. C’était vraiment une drôle de soirée. Il jouait bien les indifférents mais en définitive elle comprenait davantage les signes que le corps renvoyait plutôt que les paroles. Une éternité passée à étudier la nature et les animaux plutôt que de passer son temps avec ses propres congénères. Elle pencha la tête puis eut la courtoisie de ne pas l’enfoncer davantage.
— Si tu le dis. Je suis parfaitement rassurée.
Elle le suivit, navigant au milieu des buveurs et des tables, essayant de ne bousculer personne pour une fois. Elle ne réalisa que trop tard qu’elle était toujours accrochée à son bras et finit par le lâcher en arrivant à l’approche d’une nouvelle table. En espérant que ce n’était pas une nouvelle feinte de son voleur cavalier.

En voyant ses frères, ses doutes s'envolèrent, il ne sentit même qu'Uraïa venait de retirer sa main de son bras. Chacun avec un bouclier sur la tête sur lequel était posé une biere pleine, Torstein et Uriel tentaient de suivre les mouvements qu'Olgierd faisait. Le but étant de ne pas renverser sa bière ou son bouclier. Seul Isaac faisait bonne figure, toujours posé à la table en observant les trois autres et en pariant sur qui aller perdre. Le remarquant s'approcher, Olgierd s'exclama en levant haut les bras et en s’avançant vers eux. Les deux idiots, pensant que ca faisait parti du jeu et qu'ils devaient l'imiter en fire autant, renversant leurs boucliers en mettant de la bière partout ! Ils commencèrent à protester, que ça ne contait pas car c'était un mouvement impossible à faire avec un bouclier sur la tête, mais le géant les ignora totalement.

- Vous voilà enfin !

Il s'approcha férocement avant de donner une bonne tape dans le dos d'Eredin. Olgierd était un véritable nounours, mais l'alcool le rendait un peu brute, ils ne les avaient pas attendus du tout pour boire.

Torstein et Uriel s'approcherent pour accueillir Uraïa.

- Torstein !
- Uriel ! Et lui c'est Olgierd, il a beau être grand, il n'est pas méchant. Enchanté de te rencontrer Uraïa, nous avons tous longuement entendu parlé de toi ! Je me demandais qu'elle sortilège tu as lancé sur mon frère pour l'ensorceler ainsi, mais maintenant je comprends !
- Les gars...
- Allez venez vous installer !
dit Olgierd en les poussant tout deux vers la table.

Eredin s'installa à sa place habituel, à coté d'Isaac qu'il n'hésita pas à pousser ! Il laissa Uraïa se poser en face de lui. Olgierd s'évertua, sans en mettre partout, à remplir deux verres pour les nouveaux arrivants.


- Et voici Isaac ! Le meilleur combattant que je connaisse !
- Enchanté, j'espère que cet idiot se comporte correctement avec toi, il a parfois un peu de mal avec... disons qu'il a toujours eut un peu de mal !


Bordel, mais même lui avait décidé de le faire chier ? C'était pourtant celui du groupe qui restait le plus impartial, le plus calme et celui qui utilisait son cerveau avant d'agir. Le pire étant que celui qui l'aurait soutenu à coup sûr, Askeelad, n'était pas ici, l'idiot était en voyage à Ports-aux-Echoués pour des négociations.

- Voila les miens, manque juste Askeelad. Futur Hurlsk en pointant Uriel, futur chef de la garde ou plutôt de la guilde des « protecteurs » puisque l'on est pas autorisé à avoir une milice dit-il en pointant Olgierd, notre meilleur combattant et la personne la plus intelligente autour de cette table, même si parfois il devrait faire attention à se qu'il dit si il ne veut pas s'en prendre une dit-il en observant Isaac. ]b]Et... Torstein, futur bouffon de[/b] mais Eredin n'eut pas le temps de finir et plongea sur le coté pour esquiver un os volant envoyé par Torstein.
- Je m'occupe avec Askeelad d'apprendre à gérer les affaires du clan pour que dans le futur, je puisse l'aider au mieux !
- Tu es plutot son assistant inut-
mais il plongea à nouveau sur le coté pour esquiver, mais trop tard cette fois.
- Un peu de calme, qu'elle image vous donnez de nous les gars ! Pour une fois qu'Eredin nous présente quelqu'un... dit Uriel assez fort pour couvrir les idioties de chacun. Et voici Eredin, il sera mon bras droit et aura la lourde tache de me soutenir dans l'avenir. Et après un clin d'oeil à son frère: Vous aurez tous cette tache ! Dit-il en s'adressant à chacun des hommes autour de la table.
- Voici les personnes qui pourront t'aider à- Mais Eredin qui avait tenté de remettre en ordre les choses, en effet c'était une présentation professionnelle et rien d'autre ! se fit simplement interrompre par Uriel.
- Et toi Uraïa ? Qu'en est-il de toi ? Qui es tu ? Je sais seulement ce que ma raconté Ere', mais il a parfois la fâcheuse tendance à en faire un peu trop...
Uraïa
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Sam 18 Sep - 15:15
Uraïa avait plongé tête la première dans la joyeuse bande d’Eredin, de grands gamins turbulents, comme une vaste majorité des Utgardiens entre 20 et 30 ans. Elle esquiva habilement des éclaboussures de bière, un puis deux os de poulet, contrairement à Eredin qui se prit le deuxième. Elle n’eut pas le temps de répondre aux présentations désordonnées de tous ces gaillards avides d’en découdre et de mordre la vie à pleine dents, de prouver leur valeur. Ils essayaient tous d’embarrasser Eredin de leurs remarques mais elle nota davantage les accolades viriles et les œillades affectueuses qu’ils avaient les uns pour les autres, ce qui lui tira un vague sourire. Elle se rappelait de quelques visages qu’elle avait connus dans l’âge tendre de l’enfance mais surtout de celui d’Uriel parce qu’il était le fils de l’Hurlsk. On pouvait dire qu’il ne déshonorait pas les Utgardiens avec sa belle stature, sa crinière de bronze et ses traits harmonieux. Nul doute qu’il faisait un fier représentant du clan et que la fille du chef de Port aux Échoués n’aurait pas à se plaindre. Du reste, il avait l’air le plus sage au milieu de cette petite bande à moitié ivre. Elle esquissa des sourires polis avant de prendre sa place sans faire de façon sur le banc en face d’Eredin. Elle se retrouva coincée épaule contre épaule entre Torstein et Olgierd, entre le marteau et l’enclume. Elle sentit monter en elle un bref sentiment de claustrophobie mais se reprit, entamant sa bière fraîche en remerciant le géant de la tête. Il avait clairement abusé de la soupe étant petit, lui. Mais elle avait déjà chassé plus gros.

Elle s’efforça tout de même de répondre au flot de questions qu’Uriel déversa sur elle, alors qu’elle se demandait bien ce que le fils de l’Hurlsk pouvait trouver d’intéressant à une presque étrangère comme elle.
— Il n’y a pas grand chose à savoir… Elle cherchait l’information qui pourrait s’avérer pertinente dans ce contexte sans vraiment cerner ce qu’il attendait d’elle. Je chasse pour vivre.
Markus lui avait déjà maintes fois reproché que son caractère pragmatique la rendait barbante en société, et une fois de plus, son cerveau se faisait vide lorsqu’il s’agissait de socialiser. Elle essaya de se rattraper, avec une certaine maladresse sûrement.
— J’ai une vie plutôt simple quand on n’essaie pas de me tuer… que ce soit les non morts ou les Ascaniens.
Elle ponctua sa remarque d’une touche d’auto dérision. Uriel l'observa attentivement comme si il essayait de percevoir à travers son crâne ce qui pouvait bien se tramer dans son esprit
— Une vie simple consisterait à trouver un type gentil et à l'épouser, mais toi tu préfères vivre en dehors du clan et tu chasses pour vivre !
C'était un fait et pas une attaque, mais elle pouvait le prendre ainsi, ça lui permettrait de voir son caractère.
— Quel genre de proie tu chasses...?
Elle haussa une épaule stoïquement. Elle ne pouvait pas s’offusquer d’un franc parler dont elle faisait usage en toutes circonstances.
— Pour moi c’est vivre enchaînée à un homme qui est difficile.
Elle compléta ensuite, sans se formaliser d’éventuelles remarques.
— Je chasse tout type de proie avec mon groupe. En général, on répond à des contrats. On a des grosses prises pour la viande, des commandes de peaux, des contrats pour des animaux exotiques… Mortes ou vivantes. C’est mon cousin Orik qui prépare le cuir pour les clients. On a chacun nos spécialités.
Il siffla de surprise et donna une tape de compassion dans le dos d'Eredin, mais il la laissa continuer sans l'interrompre.
—Vous avez l'air de bien vous débrouiller ! Et si vous avez chacun vos spécialités, quelle est la tienne ? Mais avant qu'elle puisse répondre, il ajouta : Orik, il fait parfois des peaux pour le groupe de chasse il me semble non ? Il fait du bon travail !
Et se tournant vers Torstein et Eredin en train de s'envoyer des claques.
— Pour une fois ! Pour une fois qu'une femme accepte de s'asseoir entre des sauvages comme vous, il faut que vous fassiez les cons ... je vais demander à Olgierd de vous sortir hein !
Puis, maintenant que le calme était revenu, il reporta son attention sur cette femme qu'Eredin avait choisi de ramener, elle et pas une autre ! Pour tenter de comprendre pourquoi. Elle se prêta au jeu des questions, observant les facéties d’Eredin et Torstein d’un œil apparemment neutre, bien que l’ombre d’un sourire fleurisse sur son visage au détour de la conversation. Elle reprit, pour Uriel, qui semblait si curieux :
— Heureusement, j’ai l’habitude des animaux….
Esquissant un sourire en coin qui avait pour but de le rassurer, elle poursuivit :
— C’est vrai qu’Orik est doué, il s’y connaît. C’est un fêtard mais il est consciencieux quand il s’agit du travail… Moi, j’ai appris à affaiter les rapaces avec le vieux Brön. Je piste et je tire à l’arc.
Elle ajouta cependant, par peur de paraître vantarde :
— Mais c’est Xan’ti notre nomade qui s’y connaît le mieux avec les bêtes. Il sait tout sur elles. Raquel me bat à l’arc, elle aligne un écureuil à 100 m sans sourciller. Et elle gère le partage entre nous. Markus est un trappeur. Il a pas son pareil pour poser des pièges. Et il négocie tous les contrats. Il fait en sorte… que tout fonctionne.
Elle poussa un bref soupir en les désignant tous d’un geste large :
— Un peu comme vous tous. Si chacun fait sa part, tout le monde obtient la sienne.

Le visage comme figé pendant qu'il continuait de l'analyser, il était difficile de savoir ce qu'il pouvait bien penser. A la fin de son explication, pourtant il afficha un léger sourire en coin.
— Un groupe bien hétéroclite, le savoir des nomades représente une petite mine d'or ! Et je vois que l'on a tous nos boulets... disait-il en faisant référence à l'Ascanien de son groupe et en regardant vers Eredin et Torstein.
— Et pourquoi tu es ici alors ? tu n'as pas l'air d'avoir besoin du clan et comme tu l'as si bien dit, être enchaînée à un homme...

Uriel se prit un coup de pied sous la table venant de son frère de sang. Voilà qui était plus difficile… elle-même s’était déjà posé la question dans la soirée puis Eredin lui avait fait oublier les raisons. Elle choisit finalement l’honnêteté comme toujours.
— Eredin m’a invitée et je lui devais un verre ou deux… déclara-t-elle simplement.
Elle se reprit ensuite en ajoutant avec précaution.
— Et j’étais curieuse. Mais je vois que le clan se porte bien.
Il rigola d'un rire jaune !
— Tu ne vois que la surface c'est pour ça, nous avons de moins en moins de pouvoir sur la cité, les autres sont sous la coupe de Krox et nous sommes isolés dans notre quartier... les points de contrôles à- mais Uriel se fit interrompre par Eredin :

— Va pas l'assommer avec de la politique ! puis, pour la seule femme autour de la table : Excuse-le, c'est un sujet sensible et quand il commence, ça peut durer des heures ! fit Eredin
Elle sourit à demi au guerrier venu la sauver juste à temps. Malgré tout, une pointe de culpabilité subsistait, qu’elle refoula au fond de son verre avant de se tourner à nouveau vers Uriel.
— Je ne suis qu’une chasseresse, surtout. Je suis mal placée pour donner mon avis sur ces questions là. Mais je comprends mieux certaines choses.
Elle hocha simplement de la tête, de nouveau.
— Et il te reste encore tout à faire. Tu pourras prouver ta valeur.
— Tu n'es pas qu'une chasseresse non, tu es une Utgardienne qui vit en dehors du clan et qui n'as pas besoin de lui pour survivre... tu es peut-être la meilleure personne pour pouvoir donner ton avis ! Surtout que tu côtoies des personnes de tous les horizons ! Puis après avoir bu une gorgée : Ce ne sera pas bien difficile de prouver ma valeur, beaucoup de choses vont changer quand je serai Hurlsk ! Et sûr de lui, entouré de ses futures généraux, il bomba le torse avec une assurance exacerbée.

Elle sourit doucement à ce déferlement de ferveur. Qui de mieux que le fils de l’Hurlsk pour montrer tant de vigueur à vouloir porter le clan, à le mener vers de vastes horizons ? Sa voie était toute droite devant lui. Il n’avait qu’à saisir son destin. Elle leva sa chope devant lui et inclina du menton sobrement.
— Que Njörd soit avec toi, Uriel. Tu es né pour faire de grandes choses.
Elle évitait sensiblement de saisir la perche qu’il lui tendait, de donner son avis sur ce clan qu’elle avait quitté. A bien des égards, elle n’en était pas fière et aujourd’hui une certaine réserve s’imposait.
— Hum ! A tes belles paroles et qu'il puisse t'entendre ! Dit-il en levant son verre et pointant du doigt le plafond. Puis se penchant en avant vers elle et en parlant doucement pour qu'Eredin ne puisse pas entendre: Comment tu as fait pour qu'il ne saute pas à la gorge de Barldwin ? nous étions prêts à intervenir... mais... il a préféré rien faire ! Tu lui as dit quoi ?

Elle haussa les sourcils à ce changement brutal de ton et de sujet, un peu décontenancée. Elle réfléchit à sa question et dut replacer les événements de la soirée en place pour lui répondre, plus réservée.
— Rien d’extraordinaire. Je l’ai vu changer de visage mais il n’a pas voulu me parler sur le moment.
Elle se souvenait bien de ce moment où il avait quitté la table avec fureur, néanmoins.
— Il était furieux quand j’ai insisté mais finalement, il s’est calmé.

Tournant la tête pour regarder son frère, il l'observa en train d'essayer de tenir un bouclier sur sa tête.

— Bizarre, il est du genre à se calmer une fois son adversaire au sol ou une fois dans les vapes. Il doit suffisamment t'apprécier pour ne pas avoir envie de se battre avec cet enfoiré. Il rigola en voyant Torstein renverser une bonne partie de la bière sur son bouclier, puis il planta son regard dans les yeux de la chasseuse. Il en a bien bavé... donc fais attention avec lui !
Ça sonnait à la fois comme une menace que comme un conseil. Elle l’observa en retour, méditant à sa manière de lui parler.
— Je lui ai juste fait entendre que c’était à elle de tuer ses démons et que la seule façon de protéger ceux qu’on aime c’est de leur apprendre à se défendre. Elle prit une longue inspiration à sa mise en garde. Qu’est ce que je suis censée comprendre, Uriel ?
— Comprends ce que tu veux, je te dis juste de faire attention avec lui. Sa langue passa sur ses lèvres avant de boire une nouvelle fois Il l'a trop aimée pour pouvoir l'oublier facilement... et malgré ses apparences, il n'est pas si gentil. A nouveau il regarda Eredin. Tu dis qu'il faut apprendre à ceux qu'on aime à se défendre n'est-ce pas ? Mais c'est aussi à nous de les défendre... et c'est mon frère, notre frère ! Il posa sa main sur l'épaule d'Isaac qui se contenta d'hocher la tête. Uraïa écouta et hocha lentement de la tête en absorbant le fond de sa bière devenue tiède.
— Mais un jour ou l’autre, on se retrouve seul face à son ennemi. Chacun d’entre vous sait manier une hache et mourir avec honneur s’il le faut.
Son propos était lourd de sens. Liveig s’était retrouvée la proie impuissante d’une meute assoiffée de sang et elle n’avait pu qu’assister à sa propre destruction. Uraïa frémit. Elle avait passé sa vie à faire en sorte qu’une telle chose ne lui arrive pas.
— Ça ne devrait jamais être le privilège des hommes.

Uriel rigola :
— On a jamais interdit aux femmes de venir s’entraîner ! Et pour revenir sur elle car tu as l'air d'insinuer des choses, elle était une femme bien différente à l'époque : timide, réservée, discrète, solitaire, faible ! Chaque adjectif était très appuyé. Malgré ça... c'est elle qu'il a choisie ! Donc elle était de la famille ! On a bien essayé de la bouger un peu...mais jamais, absolument jamais elle a accepté de mettre un pied sur un terrain d'entraînement ou pire, tenir une arme ! On pouvait ressentir énormément de rancœur envers Liv' dans sa voix. Uraïa secoua la tête en retour. Uriel n’y était pas tout à fait.
— Ce que j’essaie de dire… c’est que ce n’était pas de la faute d’Eredin.
Elle ajouta :
— Tu ne l’aimais pas beaucoup. Liveig.
— Bien sûr que ce n'était pas de sa faute ! Qui aurait imaginé que des fous oseraient s'en prendre à nous dans notre propre quartier... c'est lui qu'il faut réussir à convaincre ! Repoussant son verre, il se passa les mains dans les cheveux.
— Et bien, je trouvais qu'elle n'était pas une femme pour lui, mais si il était heureux, ça me convenait... sauf que depuis, je sais que ça va paraître méchant, mais elle l'a trop fait souffrir et je ne peux simplement pas le lui pardonner ! Elle a souffert, c'est triste et je suis désolé pour Liv', sincèrement... mais ce qu'elle lui a fait ? Han ! Il fit non de la tête. Remettre toutes les fautes sur ses épaules  et l'abandonner ensuite ? Tu crois qu'il était dans quel état après ? Qui ferait ça à un être aimé ? Il parlait énergiquement en s'assurant de temps en temps qu'Eredin était toujours occupé à faire l'idiot. On a veillé des mois sur lui pour qu'il ne fasse rien de regrettable ! Isaac l’a accompagné absolument partout, dans toutes ses aventures, des plus futiles aux plus dangereuses ! Pour le protéger de lui même et pour protéger les autres de notre frère... normalement le temps est censé guérir les blessures ! mais plus le temps passait et plus le clan le jugeait de ne rien faire, de ne pas l'avoir vengée ! Et sans parler des Mörths toujours en vie à se pavaner devant lui...  Isaac l'invita à se détendre et à boire un coup donc oui, j'ai vraiment du mal avec elle maintenant ! Et Uriel prit une longue gorgée d'alcool avant d'encourager Torstein qui dansait sans faire tomber son bouclier. L’Utgardienne écoutait, ses mains sagement posées autour de sa chope vide, ses yeux alternant parfois entre le fervent défenseur d’Eredin et l’objet de son inquiétude. Elle écoutait et elle comprenait. Finalement, elle déclara :
— Vous avez fait votre part… Quant à Liveig… Un animal blessé est toujours le pire danger. Et Eredin… il a besoin d’une mission, de quelque chose à accomplir.
Uriel acquiesça de la tête
— Le problème c'est qu'en lui mettant tout sur le dos, elle lui a donné une mission et qu'il ne l'abandonnera pas... donc je mise plutôt sur une femme !
Son sourire voulait absolument tout dire :
— C'est dans les bras d'une autre femme qu'il arrivera à vraiment passer à autre chose.

Elle haussa un sourcil à la proposition d’Uriel, tourna le pouce dans sa direction d’un air incrédule puis se prit à rire en secouant la tête.
— C’est ça ta solution, Uriel ?
Uriel rigola à son tour :
— Un début de solution ! De toute façon, ce ne sera qu'une fois la tête de Barldwin au bout d'une lance qu'il pourra espérer aller mieux.
Il attrapa le pichet pour remplir son verre, celui d'Isaac et celui de la chasseuse au passage.
— Et au pire avec ma "solution", il aura passé un bon moment non ?
— A mon avis, il n’a pas attendu ton plan de génie pour ça…
Elle roula des yeux tout en se laissant resservir. Elle se sentait étrangement insultée par toutes ces insinuations. Mais pas assez pour s’offusquer.
— Hum, je ne suis pas si sûr ! Avec un sourire malin il ajouta : Je ne demande pas à cette femme de simplement écarter les jambes, pour ça je sais qu'il se débrouille parfaitement ! Je lui demande juste de... il chercha comment formuler malgré l'alcool de s'ouvrir à lui ? Isaac rigola mais pas les jambes ! enfin si, si elle le souhaite bien sûr ! Il posa les deux mains l'une contre l'autre devant sa bouche comme pour reprendre depuis le début. Tu es la première qu'il ramène ici, je ne sais pas ce que ça veut dire exactement ! mais c'est pas rien ! et je vous ai observés, il y a un truc !

L’Utgardienne s’étouffa avec sa bière fraîchement versée.
— Je sais pas si je dois m’énerver ou rire, Uriel… Tu es très mauvais en explications, sache le !
Elle ajouta ensuite, un peu plus calme :
— Je ne sais pas si j’ai envie de discuter de ça avec toi…. Et quoi qu’il en soit, je ne suis pas venue pour ça… du reste, tout le monde sait que je ne suis pas…
Elle secoua la main. Tout ça devenait terriblement embarrassant. Comment la discussion avait-elle dérapé ainsi ?

Uriel voulu s'expliquer plus, mais Isaac l'en empêcha alors que les trois autres s'approchaient.
— Uraïa !? Hésite pas à les envoyer chier si ils t'emmerdent hein ! dit Eredin en souriant avant de se rafraîchir. Et voyant que la conversation s'était arrêtée à son approche, il regarda avec suspicion Uriel qui détourna simplement le regard.
— J'ai raté quelque chose...?

Une fois de plus, Eredin débarquait juste à temps pour la tirer de l’embarras. Elle frappa sur la table d’un air ragaillardi, interrompant ce moment de flottement.
— Tout va bien ! Tu arrives juste à temps pour la nouvelle tournée que nous doit Uriel…
La chasseresse se fendit d’un sourire narquois à l’adresse de l’intéressé tout en se redressant pour se dégourdir les jambes. Elle avait assez passé de temps sous la lumière.
— Haaaa !
Eredin reposa donc sa choppe vide à côté du pichet vide en regardant Uriel avec un grand sourire.
— En attendant, je vais sortir quelques instants car battre Torstein donne chaud !
— Tricheur répliqua son frère
Et après un coup d'oeil vers la jeune femme, il laissa derrière lui ses frères pour prendre un bol d'air frais !

La rousse dansa d’un pied sur l’autre quelques instants, profitant des largesses qu’elle venait de s’octroyer de la part d’Uriel puis après avoir souri à quelques plaisanteries goguenardes de la bande d’Eredin, elle finit par profiter qu’ils se lançaient dans de nouveaux défis pour s’éclipser sa chope à la main. Elle se faufila tant bien que mal jusqu’à la sortie et prit à son tour un bol d’air frais, sans trop savoir pourquoi elle avait suivi Eredin jusque là. Quelle que soit la raison, elle plissait le regard à sa recherche dehors.

L'air frais faisait du bien, mais ce qui était encore mieux, c'était de plonger sa tête dans le tonneau d'eau fait exprès pour ça à côté de l'entrée. Maintenant avec les idées un peu plus en ordre, Eredin s'éloigna à l'ombre d'un bâtiment pour se soulager. Ayant besoin de marcher, il fit le tour de la hutte entièrement avant de revenir vers l'entrée où il trouva Uraïa.
— Me dis pas que tu allais fuir pendant que j'étais absent ?

Elle se retourna un peu vivement, toujours sur la défensive quand on arrivait dans son dos. Elle secoua la tête en le voyant revenir.
— Tu verras que ce n’est pas mon genre de fuir.
Elle se reprit comme on trébuche.
— De manière générale.

— De manière générale bien sûr !
Le sourire aux lèvres, il s'amusa de cette réponse en finissant de s'approcher.
— Rassure moi et dis moi qu'ils ont pas été chiants ! Ou méchants !
Elle souffla un rire en s’ébrouant dans l’air frais.
— Ce sont de bons frères que tu as là. Ils veillent sur toi.

Il pencha la tête sur le côté en essayant de comprendre le message caché ! Elle n'allait pas dire de méchanceté sur eux car elle comprenait qu'ils étaient très proches, mais du coup... Est-ce qu'ils l'avaient emmerdée ? Est-ce qu'ils avaient étés gentils ou non ? Au moins elle avait rigolé, ça devait aller du coup !
— Hum... c'est vrai que j'ai de la chance de les avoir !
Il planta son regard dans le sien un petit moment avant de le détourner pour observer les alentours.
— Parfois un peu trop, j'espère que tu as pas parlé du voyage... Ils seraient capables de s'inviter à la fête ! Surtout Isaac !
Je n’ai rien dit du tout. Ce n’est pas à moi de le faire… et puis tu peux toujours changer d’avis, encore.

Elle s'assit sur une des marches pour apprécier l’air frais sur sa peau et la vue sur le ciel. Elle était toujours plus paisible à l’air libre. Le dos contre le mur, il imita Uraïa et observa la voûte céleste.
— Changer d'avis ? Pourquoi je dirais non à une aventure en si bonne compagnie, où je vais pouvoir observer la chasse avec des oiseaux et pour une quête des plus nobles !? A cause des créatures mortelles qui n'attendent que ça que nous sortions ? A cause des nomades qui pourraient ne pas apprécier le geste...? Pfffff Il balaya l'air de sa main. Non, je vois pas pourquoi je changerais d'avis !
Au final, le guerrier se posa à son tour sur une marche à ses côtés.
— Après, si tu veux retirer ton invitation, je comprendrais... c'est déjà dur de trimballer un boulet, alors deux...
Il avait un petit sourire en coin et se força à observer uniquement le ciel. Elle roula des yeux puis finit par sourire.
— Si tu étais un boulet tu penses que je t’aurais proposé ?
Elle ajouta :
— Juste… suis moi pour les bonnes raisons.

Cette fois, il arrêta d'observer le ciel et tourna son regard sur elle.
— Les bonnes raisons...? Car il y en a des mauvaises a ton avis ?
Il ne comprenait pas vraiment où elle voulait en venir. Elle souffla du nez, cherchant ses mots, comme à chaque fois que ça devenait plus compliqué.
— Je sais que tu en baves ici. Et que ça doit te miner…. C’est tentant de vouloir tout oublier et… juste bondir sur une occasion…
Elle se prit à rire doucement comme pour se moquer d'elle-même.
— Bref, si tu es vraiment sûr de ce que tu fais, oublie ce que je suis en train de te dire.

Eredin avait bu ce soir, c'était un fait, mais il pensait avoir tout de même réussi à faire attention comparé aux autres soirs. Alors pourquoi il ne comprenait rien ?
— Je... ne.... comprends pas !
Il se frotta l'arrière du crâne un peu gêné avant de se reprendre.
— Mais je suis pas du genre à faire des choses si je ne suis pas sûr de moi ! Donc si je te dis que je vais venir, c'est que je vais le faire et je serais présent à  200% ! Ce ne sera pas mon premier voyage tu sais, je suis revenu de l'Oeil de Shoggoth, tu peux me faire confiance !

Convaincu d'avoir rattrapé la chose et d'avoir bien répondu, il afficha un grand sourire d'idiot trop sûr de lui. Elle tourna le regard vers lui et étudia son air enthousiaste, presque candide. Elle eut l’air sérieuse pendant quelques instants à l’étudier puis se prit à sourire, renonçant dans son for intérieur à poursuivre sur cette piste hasardeuse qu’elle avait empruntée.
— Tu sais quoi ? Nous verrons bien.
Il plissa les yeux en l'observant avant de lui envoyer un léger coup d'épaule comme pour lui faire cracher la vérité.
— Explique-moi ! J'ai l'impression d'être un Arako la !

Raaah. Il n’avait pas si bien mordu à l’hameçon qu’elle l’aurait pensé. Voilà qu’elle était acculée. Un juste retour des choses après ce qu’elle avait fait quand les ennemis d’Eredin avaient débarqué dans la hutte.
— Uriel pense qu’il te faut une femme pour passer à autre chose.
Autant ne pas faire dans la finesse au point où elle en était. Il la regarda surpris sans rien dire pendant un petit moment avant de donner signe de vie.
— L'espèce de petit enfoiré de merde. Je vais aller lui botter le cul à celui-là. Venait-il de lancer pour lui tout en commençant à se relever. Pourquoi Uriel avait-il dit ça !? Et pourquoi elle ? Elle l’arrêta d’une main relativement ferme.
— Je sais me défendre. Et puis je ne crois pas qu’il le disait méchamment. Il veut que tu sois heureux. De toute façon, c’est pas le sujet.
Elle l’invitait à se rasseoir car elle n'avait aucune envie de rentrer dans l’instant. Encore moins pour provoquer une rixe avec les frères d’Eredin. Il souffla et se laissa retomber sur sa marche.
— L'écoute pas...

Mais que dire maintenant après ça ? Uriel avait foutu son putain de doigt sur quelque chose qui n'existait pas encore et qui maintenant qu'il était désigné avait peu de chance de se produire ! Et merde ! Il allait le prendre son pied au cul ! Eredin tenta de se relever rapidement, mais à nouveau elle le stoppa avec une seule main. Bon ok, mais c'était que partie remise !
— Il aurait pas dû dire ça !
Au moins, maintenant il comprenait de quoi elle parlait, les mauvaises raisons de la suivre, bondir sur une occasion etc. Il passa ses mains sur son visage avant de tourner la tête vers elle. Il avait beaucoup de choses à dire, et l'alcool aidant il n'avait plus peur de rien ! Elle n'était pas qu'une occasion à saisir, pourquoi il aurait attendu plus d'un an ? Mais Eredin préféra la fermer. Elle laissa passer un silence puis se prit à sourire de nouveau, finissant par le pousser de l’épaule à son tour.
— C’est bon. J’ai eu ma réponse.
Autant s’épargner d’autres discours gênants. L’attitude d’Eredin était parfaitement limpide.
— Détends toi, Lautrec. Je ne suis pas en sucre.

Un bref sourire apparut lorsqu'elle le poussa de l'épaule.
— Je m'en fais pas pour toi, c'est plutôt pour moi que j'ai peur !
Il la poussa à son tour en lui envoyant un clin d'œil joueur.
— Et je ne sais pas quelle réponse tu as réussi à obtenir, mais j'espère qu'elle te convient...
A nouveau et sans vraiment s'en rendre compte, il venait de planter son regard dans le sien.
— Je sais reconnaître un menteur et un manipulateur quand j’en vois un. Et clairement, tu n’en es pas un. Ton avis m’intéresse plus que celui d’Uriel, de toute façon.
Elle lui retourna un regard des plus sincères. Tranquille. C’était plus facile loin de la foule.
— Ho tu pourrais être surprise ! Tu devrais faire attention avec moi, je suis un vrai méchant !
Il fit semblant de mordre dans le vide avant de reprendre son sérieux.
— Pour une femme qui vit en dehors du clan, je te trouve vraiment très à l'aise, dans toutes les situations.
Elle était bien plus à l'aise que lui et pourtant, il devait avoir plus de relations humaines qu'elle… Elle haussa une épaule en réfléchissant.
— Dans la nature, il ne faut jamais avoir l’air faible. Ou alors j’ai abusé de la bière. Ou alors j’ai décidé que tu étais digne de confiance.
Elle esquissa un sourire un coin.
— Ou alors je ne suis pas qu’un félon enragé.
Elle avait déjà entendu plusieurs fois Markus utiliser cette comparaison pour la désigner.
— J'ai été entraîné à reconnaître les différents types de personnes et je peux t'assurer que tu n'es pas qu'un félon enragé...
Eredin hésita, mais n'osa pas.
— Donc comme ça, je suis digne de confiance ? Tu aurais pas quelques pièces ? Je te les rendrais !
Pourquoi il n'arrivait pas à être un minimum sérieux ? Cet idiot ! Mais il profita de sa blague pour se rapprocher un petit peu
— Ou alors tu es un être humain, une femme ! Et que peut être, je dis bien peut être, tu te sens seule dans ton propre groupe...
Par Njörd qu'attendait-il ?
— Et pour l'alcool... On sait très bien que ce n'est pas ça.

Elle nota ce rapprochement infime. Peut être que ce n’était pas l’alcool après tout. Mais à son tour, elle se demanda ce qu’elle faisait ou ce qu’elle ne faisait pas, en l’occurrence. Depuis quand réfléchissait elle ? Peut être l’avertissement d’Uriel résonnait-il à son esprit comme un écho. Ou l’horrible confusion de sa vie depuis qu’elle avait échappé au massacre du quartier Amaranthis.
La solitude ne m’a jamais gênée… Ce n’était pas tout à fait vrai, mais elle avait choisi la liberté plutôt que la servitude. Je préfère choisir plutôt… plutôt que quoi ? plutôt que subir.
Elle poursuivit en plissant le front.
— Ça ne veut pas dire que je n’ai pas des regrets parfois.
Elle sourit.
— Mais pas à propos de femmes à barbe ou je ne sais quoi.

Il se mit à sourire en l'écoutant s'ouvrir un minimun, c'était comme une victoire !
— Et... avant d'avoir des regrets... il marqua une pause : est-ce que tu as choisi ?
— Comment ça ?
Elle sembla confuse quelques instants. De quel choix parlait-il ? Elle ne comprenait pas ou peut être avait elle la crainte de comprendre… Cette fois, il se retint de rire et hocha la tête de haut en bas.
— Et bien... la solitude, la liberté...
Il rigola avant de s'arrêter.
— Je crois que j'ai bu trop d'alcool !

Elle souffla sur une de ses mèches de cheveux qui retombait sur son front.
— J’ai choisi la liberté… la solitude c’est un coût… acceptable. En tout cas,  on est obligé de s’y confronter pour être vraiment libre.
Elle l’observa du coin de l’œil, évaluant son degré effectif d’alcoolémie. Elle lui dédia un sourire goguenard :
— On sait très bien que ce n’est pas l’alcool…
Acceptable ? Elle n'avait pas l'air de vouloir être seule, elle se forçait à l'être pour échapper à sa prétendue malédiction. Il avait toujours aimé la simplicité...
— Ha oui...? et si c'est pas l'alcool... Il bloqua sa langue sur le côté entre ses dents un moment en souriant avant de reprendre... et bien qu'est-ce que c'est ?

Elle se prit à rire, sans trop savoir pourquoi. Peut-être cette posture qu’il avait en la narguant…
— A toi de me le dire ?
— Ha vraiment ?
Le guerrier se pencha vers elle et commença à parler doucement pour qu'elle seule puisse entendre le secret.
— J'ai l'impression... que tu en as marre de ta solitude et que ce qui était acceptable avant, ne l'est plus autant aujourd'hui... et tu te dis que ce guerrier qui fait l'idiot pour te faire rire est peut être pas si mal tout compte fait...
Elle écouta attentivement avec un air exagérément concentré.
— Hmm. Tu as peut être raison… mais si c’est un plan élaboré pour me ramener dans le clan… j’aime ma vie au sein de mon groupe. Je ne vais pas le quitter.
Eredin se pinça les lèvres de mécontentement
— Mince, tu as découvert mon plan !
Puis il se mit à sourire tendrement.
— Je ne me souviens pas t'avoir demandé de les quitter...
Elle affecta une légère moue avant d’acquiescer doucement.
— Tant mieux.
Elle précisa quelques secondes après.
— Ma plus grande crainte c’est pas de mourir et de me relever. C’est d’être enfermée.
Ainsi c’était dit. Il connaissait désormais un de ses plus grands points faibles. Et elle lui avait révélé facilement, au point qu’elle s’en étonnait elle-même. Lui qui était prêt à faire une bêtise s'arrêta en l'écoutant.
— Donc tu n'as rien à craindre de moi... Tu es libre et c'est toi qui choisis !

Il avait retenu ces paroles et n'avait de toute façon aucune envie de la faire souffrir elle aussi… Elle acquiesça à ses mots. Il était évident qu’il manifestait tout ce qu’il pouvait sa volonté de ne pas la forcer à quoi que ce soit. Elle aurait voulu lui dire que la confiance était une chose qu’on ne pouvait acquérir que par le temps ou les épreuves mais elle rangea cette version d'elle-même dans un placard. Elle lui semblait injuste et morose. Et elle avait passé beaucoup de temps dans les ténèbres. Alors qu’Eredin n’était que chaleur et lumière. S’il faisait l’effort d’enfouir pour une soirée ses plus sombres aspects, elle pouvait bien tenir ses démons aussi. Et quand le jour serait levé, elle pourrait reprendre sa vie, affronter ce qui se présentait. Elle soupira doucement :
— Je sais. Qu’est ce que tu choisis, toi ?
La question était venue d’elle-même sans qu’elle y réfléchisse. Il la poussa de l'épaule en guise de réponse. Eredin se laissait complètement porter par les évènements, il passait un bon moment et ne voulait pas réfléchir donc il s'en remettait à son instinct et ses envies. Et ce que l'Utgardien voulait à l'instant présent, c'était simplement être avec cette sorcière.
— Devine !

Il se pinçait le bas des lèvres pour ne pas faire de conneries. Elle releva les yeux vers lui. Presque surprise. Ou était passé l’Utgardien narquois qui lui en avait fait voir ses premiers jours de retour dans le clan ? Celui qui avait suggéré par ruse de se servir d’elle comme d’une catin durant son audience ? Elle s’était fourvoyée dans les grandes largeurs. Elle le voyait maintenant. Et elle se sentait sur le bord de quelque précipice sans trop savoir ce qui l’avait menée là. Un vague sentiment de culpabilité l’envahît soudain. Elle fronça les sourcils pour elle-même pour tenter d’attraper cette ombre qui s’était abattue sur elle. Sans parvenir à la définir exactement. Un fil ténu mais pourtant solide qui l’attirait hors de ce lieu, loin de cet Utgardien qu’elle aurait pu épouser si elle avait été quelqu’un d’autre, dans une autre époque.
— C’est une mauvaise idée…
Et avec un grand sourire, du genre de ceux que l'on a juste avant un mauvais coup.
— Si tu le pensais vraiment... tu ne serais pas ici ! Et qui peut dire si c'est bien ou non avant d'essayer ?
Il observa à nouveau le ciel comme s'il pouvait y trouver des solutions.
— Aurais-tu peur... ?
Oh oui elle avait peur !!!

Elle, avoir peur de ce blondinet aussi solaire qu’agaçant ? Non certainement pas. Elle tourna cette fois ci les yeux dans sa direction avec une lueur de fierté ou de défi. Si elle avait réfléchi, Uraïa aurait su que sa plus grande faiblesse n’était pas sa peur des espaces réduits mais bel et bien sa fierté. Une étrange pulsion la prit et comme lorsque la fièvre du combat la prenait, c’était pour elle plus facile d’attaquer que de se défendre. Elle saisit le col de sa tunique et attrapa ses lèvres dans la foulée. Le regard étincelant, elle s’écarta ensuite, juste assez pour lui dédier un regard noir.
— Ça c’est pour la peur. Tu ne pourras pas dire que je ne t’ai pas prévenu.
Victorieux, il afficha le sourire des vainqueurs jusqu'aux oreilles et le regard noir qu'elle lui envoya n'eut absolument aucun effet, au contraire même !
— Peureuse !
Cette fois ce fut lui qui l'embrassa, il glissa une main dans ses cheveux pour l'empêcher de fuir et se retira après quelques secondes. Eredin était peut être immunisé contre ses regards noirs, il ne pourrait pas soutenir longtemps qu’elle était peureuse. S’approchant de nouveau, elle captura son visage une fois de plus, une main derrière sa nuque, afin de confirmer son audace. Pour une femme qui s'était éloignée pour être seule et qui pensait que c'était une mauvaise idée, Uraïa avait l'air d'apprecier cet échange ! Lui-même oublia qu'ils étaient assis sur les marches menant à la hutte de l'hurlsk, il profita simplement de l'instant.
— Ça me semble pas si mal comme idée finalement !

Elle soupira de son côté. Évidemment, il saisirait l’occasion pour se vanter de cette petite victoire arborant ce sourire de sale gosse qui leur voudrait des problèmes à tous les deux.
— Parce que tu ne vois pas plus loin que le bout de ton nez, Eredin Lautrec…
Elle évita d’ajouter à voix haute qu'elle-même se demandait ce qu’elle était en train de faire. Tout tournait dans sa tête, un maelström de sentiments et de désirs plus ou moins agréables et contradictoires. Elle décida d’arrêter de penser.
— Peut être parce que ce que j'ai au bout de mon nez me convient ! Dit-il en faisant référence à elle ! Et avant de te mettre la pression, attends de voir comment va se passer le voyage... plusieurs jours ensemble et sans assez d'alcool pour se supporter en cas de problème ! Peut être que je vais découvrir que tu ronfles comme Olgierd et que je ne pourrais le supporter, peut être que tu découvriras un côté de moi moins gentil et tu voudras stopper l'aventure.... Toujours avec son sourire de la victoire Mais au moins on aura tenté ! On ne pourra pas avoir de regrets ! Après... si tu as peur...
Il rigola. Elle roula des yeux à cette nouvelle provocation. Elle n’allait pas marcher à chaque fois.
— Dehors c’est du sérieux, on ne va pas batifoler. Du reste, on ne sera pas seuls. Markus sera sûrement de la partie….
Elle songea au chasseur. Sensation confuse, presque nauséeuse. Elle se tut.
— Même pas un petit peu ? Dit il en essayant d'avoir l'air triste pour l'attendrir ! Mais je comprends, chaque chose en son temps. Je serais ravi de rencontrer ton Ascanien ! dit-il avec un sourire carnassier
Elle l’observa longuement avant de lâcher finalement, piquée au vif, sans savoir pourquoi :
— Ce n’est pas « mon » Ascanien… mais on a été plus que des amis quelques fois. Rien de sérieux… Mais je donnerais ma vie pour lui.
Elle se sentit parfaitement idiote soudain de lui parler ainsi. Une pointe d’amertume la traversa. Avec Markus ça avait toujours été confus mais simple et spontané. Ils cédaient à l’impulsion du moment puis se séparaient à l’aube, sans excuse ni explication. A la fois sécurisant et sans avenir, parce qu’ils ne s’étaient jamais rien promis. C’était à la fois durable et sans calcul, parce qu’il acceptait sa liberté et qu’elle ne lui demandait jamais de comptes. Et pourtant, en secret, elle avait bien failli basculer plus d’une fois. Et avait pris la tangente à chaque fois. Eredin fut surpris par cette petite explication, il ne s'était pas attendu à ça, mais au moins il en apprenait un peu plus à chaque fois.
— C'est ton ami et il est Ascanien, donc c'est ton Ascanien ! Tout simplement !
Il n'évoqua pas le reste car ça ne le concernait pas encore vraiment, et si il n'y avait rien de sérieux, alors il n'y avait pas de problème.
Elle hocha la tête, songeuse et précisa pour la forme avec un demi sourire.
— Demi Ascanien.
— Ha, je pourrais peut-être l'apprécier un peu alors...
Il sourit en songeant qu'il allait devoir faire des efforts pour fréquenter un Ascanien, puis il tourna le regard vers elle avant de se dire que ça pouvait valoir le coup de faire des efforts.
— Vous avez quelques points communs…. Comme d’être très bavards.
Elle lui sourit d’un air taquin pour compenser l’amertume qu’elle ressentait.
— Trop bavard peut-être ?!
Il lui envoya un coup d'épaule joueur.
— Après, il n'a pas l'air aussi beau que moi...
Fixer les étoiles pour ne pas rigoler, il ne détournait pas les yeux. La mine ébouriffée de Markus au petit matin alors qu’elle se faufilait au dehors s’imposa soudain dans son esprit. Elle chassa cette image de sa tête. Elle ne traînait jamais et il ne la retenait pas. Pourquoi s’attarder ? Pourquoi ? Elle avait les nerfs à vif et se concentra sur l’instant, volontairement détachée.
— Tu te feras ton idée. Tu connais des femmes plus belles que moi et alors ?Tu peux les retrouver si tu veux….
Il siffla en entendant l'invitation.
— Je pourrais en effet !
Elle ne savait pas à quel point elle avait raison.
— Mais pourtant je pense que je vais rester ici...
Il s'étira le dos et la nuque.
— Je me ferai mon idée.

Elle s’adossa comme lui au mur. Elle commençait à ressentir la fatigue de l’alcool et le mélange d’émotions contradictoires ne lui valait rien. Alors qu’elle allait répondre, une vive lumière l’obligea à passer son avant bras devant ses yeux. La porte venait de s’ouvrir et elle reconnut le visage hagard d’un des membres du clan Morth.

Eredin ne percuta pas directement, il y avait la place pour passer et pourtant le sortant restait dans l'entrée. Le guerrier se retourna pour voir quel était le problème et il reconnut l'un des hommes de la famille Morth. Instinctivement, Eredin se releva et fit quelques pas sur le côté pour ne plus tourner le dos à un de ses ennemis, mais il ne dit rien et se retint de lui dire de bouger son cul. L'homme le reconnut instantanément, il rigola et appela le reste de la bande. Après quelques secondes, c'était cinq Morth dont Barldwin qui se tenaient dans l'entrée. Le regard de Barldwin passa d'Eredin a Uraïa.
— Tiens tiens Eredin... on fait des infidélités a sa femme ?
Ils se forcèrent tous a rigoler.
— Quoique selon la rumeur, je peux te comprendre, Liveig aurait perdu de son charme... il paraît.
Eredin se mit à sourire en sachant exactement comment ça allait se terminer.
— Toujours en travers de la gorge à ce que je vois hein ? Eredin se força à rire. Après tu aurais dû t'en douter non ? Quand on voit les hommes de ta famille, c'est normal de se faire abandonner juste avant l'union non ?
Ils descendirent tous les marches en ignorant Uraïa. Barldwin s'avança un peu plus que les autres qui eux commençaient déjà à l'encercler.
— Se faire abandonner, tu sais de quoi tu parles Lautrec hein !? Est-ce que c'est vrai qu'elle n'a pas crié lorsqu'elle s'est fait violer ? On raconte qu'elle en redemandait même après !
Eredin posa sa main sur sa hachette pendant que l'autre remettait sa barbe en place. Ils étaient plus nombreux et ils savaient tous se battre, il n'avait aucune chance de l'emporter... Même avec l'intervention d'Uraïa. Il lâcha donc son arme et serra les dents, prêt à recevoir.
— Va te faire foutre espèce de-
Mais il n'eut absolument pas le temps de terminer que les cinq se jetèrent sur lui pour profiter qu'il soit seul... Pour une fois.

En un instant un loup esseulé était devenu une meute. Une meute bien trop nombreuse alors qu’ils n’étaient que deux et pas bien frais. Uraïa se palpa et réalisa qu’elle n’avait ni son arc ni sa dague longue. Et encore moins sa cuirasse. Elle se maudit d’avoir relâché sa garde. Pour une fois. Vaille que vaille, elle tira néanmoins son couteau de chasse alors qu’Eredin disparaissait dans la mêlée. Elle fut tentée de se jeter à corps perdu dans la bagarre elle aussi, quitte à prendre des coups, si ce n’était pire. Mais elle réalisa dans un instant de lucidité qu’il y avait mieux à faire. Rentrant en trombe dans l’auberge, elle bouscula le premier qui lui barrait la route et se mit à beugler au-dessus du tumulte.
— URIEL ! DEHORS !
Puis sans attendre, elle retourna dehors couteau en main prête à faire un carnage.

Il avait bien tenté de se défendre comme un félon acculé, mais c'était peine perdue. Après avoir réussi à embrasser Uraïa, sa deuxième victoire fut de réussir à mettre une belle droite a Barldwin avant de se retrouver au sol avec deux gaillards sur lui ! Immobilisé, Barldwin en profita pour lui envoyer plusieurs droites. Serrant les dents, Eredin rigola après quelques coups :
— Tu frappes vraiment comme une femme, sale merde !
Il encaissa encore quelques coups et au bord de l'évanouissement, il entendit du bruit, beaucoup de bruit. Les poids qui retenaient ses membres disparurent et il roula instinctivement sur le côté pour cracher le sang qui s'était accumulé dans sa bouche. Ouvrant les yeux, il vit Torstein briser un pichet en argile sur la tête d'un Morth et Olgierd au sol avec un autre. Rigolant, Eredin tenta tant bien que mal de se relever en titubant pour profiter de la bagarre, mais Barldwin l'envoya au tapis une bonne fois pour toutes. En tombant, comme au ralenti et juste avant de tomber dans les vappes, il remarqua juste une crinière rousse dans la mêlée, bon sang mais qu'elle femme !

Uraia ne savait plus vraiment ce qu’elle faisait. Elle prenait des coups, s’enrageait à la vue du sang et rendait la monnaie en double. Elle n’avait que faire de blesser ou de tuer, du sang jusqu’à la jointure des coudes. Tant qu’elle était debout, elle pouvait se battre et elle le ferait sentir à tous ceux qui tenteraient de la mettre au tapis. Elle déchargeait le flot de violence qu’elle gardait en elle. Contre l’impuissance, contre la solitude, contre l’injustice. Elle faisait plus que défendre un guerrier esseulé, elle se battait pour elle, pour reprendre le dessus sur la vie, pour se soulager de ce qu’elle ne pouvait exprimer en mots. Elle vit Eredin émerger puis retomber et tendit une main en avant pour le rattraper avant de sentir une main s’accrocher dans ses cheveux et la tirer violemment en arrière. Elle rugit et se retourna pour enfoncer sa lame dans le ventre de son assaillant. Elle s’enfonça comme du beurre dans un bruit écœurant et un gémissement de douleur lui répondit. Une silhouette s’effondra mais elle ne réussit pas à savoir si elle l’avait tuée ou non, ni ne parvint à distinguer de visage. Elle était comme en transe, une transe sanguinaire teintée d’une seule obsession : parvenir à sortir de là vivante, le tirer de là vivant. Se ruant de nouveau dans sa direction, elle profita d’une faille qu’avait créée Olgierd pour retrouver la masse inerte du guerrier en plein milieu du chaos. Elle se jeta à côté de lui et le tira sans ménagement, de toutes ses forces pendant que les autres s’occupaient de ce qui restait de la bande de Barldwin.
— Eredin !
Le guerrier semblait inconscient. Elle chercha du regard une blessure plus importante qu’une autre sans même savoir si elle même était en un seul morceau. Elle ne sentait que la rage des combats.

C'était une nouvelle bagarre qui avait lieu, c'était pas la première et sûrement pas la dernière ! Maintenant que toute la bande était ici, les Morth n'avait plus aucune chance, surtout que certains habitués de la Hutte en avaient profité pour se joindre à la mêlée. Mais cette fois, une nouvelle fois d'ailleurs, quelqu'un avait sorti une arme et un Morth s'effondra en gémissant dans son sang. Uriel cria des ordres, Isaac les répèta et après une dizaine de secondes le calme revint alors que deux camps se formaient pour s'occuper des siens.

Uriel s'approcha d'Uraïa et envoya un coup de pied dans les jambes de son frère pour voir si il était mort, Eredin se mit à gémir sans ouvrir les yeux. Ça voulait dire qu'il allait bien. Voyant la dague dans les mains de la rousse, Uriel pesta, lui demanda de la ranger rapidement et de ramener Eredin chez lui. Lui s'occuperait du reste et s'assurerait qu'il n'y ait pas de vengeance ! Il lui indiqua le chemin et lui fourra une clé dans les mains, puis il envoya un nouveau coup dans les jambes d'Eredin pour qu'il émerge.

— Disparaissez.

Eredin Lautrec
Eredin Lautrec
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Sam 2 Oct - 11:14
Uraïa s’exécuta sans discuter, passant un bout de sa manche sur son visage pour en essuyer la sueur avant de se rendre compte que du sang avait coulé dans ses yeux. Pas le sien. Elle était indemne mis à part quelques contusions et éraflures. Elle ne sentait rien. Elle rangea son couteau de chasse puis empoigna Eredin qui émergeait difficilement, passant son bras par dessus son épaule. Il pesait le poids d’un âne mort mais la chasseresse en avait à revendre. Elle le souleva à demi jusqu’à ce qu’il puisse tenir sur ses jambes suffisamment pour qu’elle l’entraîne dans l’obscurité. Elle se rendit compte après un moment que les lueurs de la hutte n’étaient plus visibles et qu’elle ne savait pas où elle marchait. Elle déposa Eredin sur le pas d’une porte inconnue et prit un moment pour respirer et calmer son esprit embrumé par l’alcool et la fureur du combat. Elle se rendit compte qu’elle était essoufflée. Elle releva le visage vers le ciel puis tenta de se repérer. Instinctivement, elle était revenue dans la direction de la maison de Sturla. Elle se pencha de nouveau vers Eredin pour le soulever et le traîna en direction de la demeure de la guérisseuse.

— On arrive chez Sturla. Elle va nous tuer…


Elle ne réalisa qu’après qu’elle avait la clé qu’Uriel lui avait mise dans la main. Et elle n’avait pas la moindre idée de quelle porte elle ouvrait. Probablement la maison d’Eredin mais elle n’était pas plus avancée.

Il sentait que quelqu'un le soutenait et le déplaçait, le guerrier toujours sonné tentait de rester debout, mais il savait pertinemment que sans son soutien il retomberait tout simplement au sol. Et cela dura un moment, a chaque fois qu'il réussissait à émerger, c'était pour mieux repartir. Une voix lointaine lui parvenait, qui était-ce ? Il voulait juste lâcher prise... mais après de longues minutes, Eredin toussa et émergea une bonne fois pour toutes. Il se trouvait devant la porte de chez Sturla, soutenu par Uraïa. Il cracha le reste de sang dans sa bouche et inhala une longue bouché d'air frais avant de lui dire de remonter la rue. Il ne voulait pas se rendre chez la guérisseuse pour si peu. Puis, pas vraiment sur de lui, il se redressa. Le guerrier vacilla mais réussi à tenir debout sans aide, laissant la jeune femme ouvrir la porte qu'il lui indiqua.


- Tu vas bien ? Il se massa la mâchoire et testa chacune de ses dents avec sa langue, tout était à sa place !

Une fois la porte ouverte, il s'engouffra dans la maison et referma derrière lui avant de se diriger vers une table pour prendre de l'eau et s'en passer sur le visage.

- Qu'est ce qui s'est passé ? Tu leurs a botté le cul ?


Pour sa part, l’archère s’autorisa quelques secondes à s’appuyer contre la porte, éreintée.

- Je n’ai rien. Je crois. Sacrée bagarre… Uriel a débarqué avec le reste et ils ont remis les Morth à leur place… Ce n’était pas que moi. Elle soupira. Devait elle parler du coup de couteau ou non ? Elle décida que non. Tu as des côtes cassées ?

Eredin s'approcha du feu qui était entrain de mourir et enleva son haut pour vérifier. Il observa à la lueur des dernières braises ses côtes en appuyant dessus. Au côté gauche, déjà une belle marque rouge était présente et allait sûrement virer au violet, mais rien n'avait l'air de cassé. Comme quoi, même ces bâtards avaient un minimum d'honneur, si ils l'avaient voulus, ils aurait largement eut le temps de lui faire bien plus mal ou de le laisser pour mort !

- Je crois que je m'en sors bien !


Il attrapa une bûche en grimaçant et la déposa dans l’âtre pour tenter de relancer le feu. Quel idiot de pas avoir fait comme d'habitude,c'est à dire de les foutres dehors avec quelques claques, au moins il aurait évité se passage à tabac. Il ne pouvait s'en vouloir qu'à lui même et il n'était même pas énervé contre eux, ils avaient simplement profité de sa faiblesse.

- Merci, sans toi j'aurais passé un sale quart d'heure... les espèces d'enculés, la seule fois où je les laisse tranquilles, ils en profitent ! Eredin déposa sa hachette sur la table avant de servir deux verres d'eau.

Elle l’observa attentivement, étudiant les marques à la lueur du feu. Il avait l’air de nouveau lui même, elle en déduisit qu’il n’allait pas trop mal. Les Utgardiens étaient robustes et le guerrier en avait probablement vues d’autres. Elle lui fit confiance sur son verdict. Il souffrirait probablement le lendemain. Du reste, la nuit était passablement avancée et elle entendait déjà les premiers chants des oiseaux au dehors, signe que l’aube ne tarderait plus. Elle chercha un fauteuil où s’asseoir et se laissa choir dessus, réalisant qu’elle aurait bien du mal à en sortir. La tête lourde, elle fixa les flammes un instant pour remettre un peu d’ordre dans ses pensées.

- Ils ont tenté leur chance et y ont perdu des plumes.

Elle se demanda si l’homme était mort. Cela n’aurait d’importance que si on cherchait un responsable. Finalement, son expédition pour honorer la mémoire de Baldhramn aurait peut être une double utilité.

- J'ai fait l'erreur de fermer les yeux une fois, on ne m'y reprendra plus !

La fatigue lui tombait dessus maintenant, sûrement à cause des coups et de l'adrénaline retombant. Observant Uraïa, il ne savait pas vraiment quoi faire, tout en lui le poussait à l'inviter à rester, mais il ne voulait pas aller trop vite. Elle tenait à sa liberté et il allait devoir se montrer patient, mais après une telle soirée et vu l'heure, il serait fou de ne pas tenter sa chance. Quant à Liveig, l'alcool l'avait chassé bien loin de son esprit, c'était donc maintenant ou jamais ! Il aurait des remords demain.

- Il se fait bien trop tard pour rentrer... reste ici pour cette nuit !


Torse nue à coté du feu, le guerrier avait mal à la mâchoire et au crâne, il tentait néanmoins de rien laisser paraître avec son sourire charmeur.

Elle redressa la tête pour le regarder. Son œil fut un instant attiré par la solide stature du guerrier puis elle répondit, en passant une main sur sa nuque douloureuse.


- Ça tombe bien, je ne comptais pas vraiment bouger…. Au moins pour une heure ou deux…


Elle poussa un bref soupir. Ses mains étaient couvertes de sang séché et elle n’osait pas regarder la tunique que lui avait prêtée Sturla. Elle était déchirée à plusieurs endroits et elle était couverte elle aussi de taches brunes et de poussière. Il ne restait pas grand chose de sa tenue propre, ni de son bain de la veille au soir.

Eredin se laissa tomber dans le deuxième et dernier fauteuil présent, ça faisait du bien ! Oubliant presque ses obligations d'hôte, il se releva en grimaçant. Il attrapa une bassine et sortit dehors pour revenir quelques minutes plus tard avec de l'eau. Il déposa le tout sur la table.


- Tu veux que je la fasse chauffer ? Ça risquait de prendre du temps, mais au moins elle ne serait pas congelé. C'est pas un problème hein !

Il sortit une brosse et un petit savon presque terminé. Puis il se lava le visage pour enlever le reste de sang et de terre, il se frotta rapidement les avants bras et les aisselles au passage. Il retourna rapidement à coté du feu après se coup de froid mordant.

- Fait comme chez toi !

Et cette fois il se laissa tomber une bonne fois pour toute dans le fauteuil !

Elle s’extirpa du fauteuil laborieusement, les muscles raides.


— Tu n’aurais pas une chemise propre ? Ne bouge pas, dis moi juste ou c’est.

Sa propre tenue était si lamentable qu’une toilette simple serait parfaitement inutile.

Il désigna du bras la porte menant a sa chambre


- Dans l'armoire de gauche, et si tu veux des vêtements pour femme, dans le coffre au pied du lit il doit y avoir quelques trucs.

Il ne réalisa pas qu'il venait de lui dire de piocher dans les vêtements abandonnés de Liveig. Eredin s'étira comme un chat devant le feu qui commençait à repartir. Ses côtes allaient le faire souffrir quelques jours, mais ce n'était rien de bien grave.

Uraia comprit, elle. Sans rien dire, elle se dirigea vers la chambre, perplexe. Elle avait déjà rencontré Liveig. La jeune femme était plus petite et possédait une silhouette bien plus délicate que la sienne. Elle se demanda pourquoi Eredin avait eu l’idée saugrenue de lui proposer de porter ses vêtements. Elle passa devant le coffre, devant le lit qu’il avait partagé avec une autre et fut tentée un instant d’aller y jeter un œil. Puis elle se rabroua et avança vers l’armoire, mal à l’aise. Elle attrapa une chemise qui lui semblait correcte et revint d’un pas plus vif vers la pièce à vivre. Silencieusement, elle se plaça dos au feu et rapprocha une chaise face à la bassine. Sans barguigner, elle se défit de son large ceinturon, constitué de lanières de cuir plusieurs fois passées autour de sa taille. Puis elle ôta sa tunique déchirée qu’elle jeta à ses pieds et entama ses ablutions, sans se soucier davantage d’Eredin. Elle avait déjà eu l’occasion de manquer d’intimité quand elle partait en chasse. Elle se frotta le visage et les mains, ramenant ses cheveux sur son épaule. Elle fit l’état des lieux des ecchymoses sur son ventre et ses flancs en grimaçant, formant un drôle de contraste avec l’encre noire de ses tatouages. Elle se débarrassa du sang et de la sueur de la soirée et tâtonna pour enfiler la chemise d’Eredin.

Si au début il se concentra sur le feu, très vite il tourna son regard sur elle. Comment ne pas observer ? Il n'était qu'un homme ! Eredin contempla les nombreux tatouages, il ne s'était pas vraiment douté qu'elle en avait, mais maintenant qu'ils se présentaient à lui, ça lui paraissait tout a fait normal d'en voir sur sa peau ! Celui entre ses Omoplates était vraiment beau et avait dû demander pas mal de travail et des heures des souffrances. Il aperçu aussi une flèche stylisé sous son bras gauche, ça avait du sens pour une chasseuse et ça lui plaisait a lui aussi ! Il repéra des runes du clan par ci par là, combien en avaient-elles ? Pour quelqu'un qui voulait vivre en dehors du clan, c'était drole de voir des runes de ce dernier tatoué sur sa peau, mais ça voulait surtout en dire long sur ses motivations. Elle n'avait rien contre le clan, au contraire même, mais elle se forçait à le fuir. Sans gêne, son regard caressa les courbes d'Uraïa un bon moment. Animé par un feu nouveau, le guerrier se leva de son siège en se demandant de quels tatouages les lignes qui sortaient de son pantalon pouvaient provenir. Alors qu'elle venait enfin de mettre la main sur sa chemise, Eredin s'arrêta dans son dos et posa sa main sur la sienne pour la stopper. De son autre main il déplaça les cheveux par dessus l'épaule d'Uraïa pour qu'il puisse observer le tatouage dans son dos en détail. Du bout du doigt, il en redessina les lignes avant de déposer un baiser dans son cou.

Elle avait presque oublié la présence du guerrier, silencieux au point qu’elle avait fini par croire qu’il s’était endormi de fatigue. Elle sursauta légèrement quand elle l’entendît bouger dans son dos. Le rapace en plein vol gravé dans sa peau avait été dessiné par une main particulièrement habile de sorte à épouser parfaitement les muscles de l’archère, si bien que lorsqu’elle croisa les bras sur sa poitrine, il donna l’impression de frémir, les courbes des multiples cercles autour de lui se mouvant de concert. Uraïa ferma les yeux au contact délicat sur sa peau, et au souffle sur son cou. Elle repensa à la chambre et au coffre qui s’y trouvait et voulut dire quelque chose, protester. Mais elle n’en fit rien, se trouva bien faible et savoura ce moment suspendu.

Le baiser dans le cou se répéta une deuxième fois, puis il commença à descendre lentement et se dirigea vers son épaule. Une fois arrivé à son extrémité, Eredin retourna Uraïa pour qu'elle lui fasse face et l'embrassa doucement, mais avec envie ! Il ne savait pas où était la limite, voir même si il y en avait une ! Dans le doute, l'Utgardien fonçait tête baissée, il avait déjà pris une raclée ce soir et était prêt a en recevoir une autre en guise de punition si il le fallait. Eredin était prêt a prendre le risque car il sentait que c'était différent cette fois, que ça pouvait valoir le coup. Elle n'était pas qu'une enieme conquête qu'il avait simplement envie de prendre, non cette fois il voulait plus. Et pendant qu'il l'embrassait, ses mains couraient sur les courbes de sa compagne, une s'arrêtant sur ses hanches et l'autre sur sa fesse gauche. Son regard qui aurait facilement put dévier sur sa poitrine n'en fit rien, il ne voulait voir que son visage.

Elle aurait probablement dû le repousser, au milieu de cette nuit déjà passablement chaotique. Mais encore une fois, son manque d’intervention la stupéfia elle-même. Cédant à la facilité de ne plus réfléchir ni songer aux conséquences, elle déplia les bras pour entourer sa nuque maintenant qu’elle avait quitté sa chaise, l’enlaçant à son tour. Elle ne voulait plus ni parlementer ni chercher de cause. Elle voulait simplement se sentir vivante, son corps à demi nu contre le sien. Laissant à la nuit ses secrets.

Lorsqu'elle l'enlaça, ce fut un signal claire comme une corne de guerre ! Eredin retrouvant toute son énergie, il attrapa ses cuisses et la souleva pour l'emmener jusque dans le lit. Des deux côtés, il n'y avait plus aucun doute et ils se laissèrent simplement aller dans un déferlement de passion. Cette nuit là, il finit par découvrir tous les tatouages de sa partenaire et trouva toutes les runes sur son corps.

Le soleil était bien trop haut dans le ciel lorsque la chasseresse ouvrit un œil péniblement. La bouche sèche et le corps pétri d’ecchymoses, elle réalisa qu’elle avait passé la nuit et une bonne partie du jour suivant dans le lit d’Eredin, le même lit qui l’avait mise mal à l’aise quelques heures plus tôt et qu’elle avait oublié à la minute où les choses avaient sérieusement dérapé avec le guerrier. Encore trop fatiguée pour se morigéner de son égarement, elle se tourna simplement sur le ventre pour échapper à la luminosité qui envahissait la pièce, enfonçant sa tête sous un oreiller qu’elle trouva par terre.

Avec un bracelet d'argent on avait des responsabilités, si elles offraient du pouvoir et pas mal d'avantages, il y avait aussi des inconvénients et l'un d'entre eux était comme une malédiction. Un démon noir qui venait chaque matin chercher Eredin. Si autre fois, il se contentait de toquer et de l'attendre quelques minutes, avec le laisser-aller du guerrier, Isaac avait pris l'habitude de venir le chercher directement jusque dans son lit. Par chance, ce dernier fit rapidement le rapprochement entre la jeune femme d'hier et les vêtements dispersés un peu partout. Il s'arrêta donc dans l'entrée par respect pour la rouquine et appela son frère plusieurs fois. Eredin se tira du lit sous les menaces du démon, s'habilla avec ce qu'il trouva et disparu. Il était trop tôt, il avait mal au crâne, avait un œil au beurre noir et sa mâchoire faisait un drôle de bruit quand il l'ouvrait trop en grand, mais malgré ça l'Utgardien arborait un drôle de petit sourire. Sur le chemin vers ses responsabilités, Isaac lui expliqua se qu'il s'était passé la veille au soir et lui parla d'Uraïa et du coup de dague dans l'un des Mörth. Ce dernier avait passé la nuit entre la vie et la mort, mais Sturla avait réussi à le sauver. Eredin rigola, un peu déçu qu'elle l'ai raté ! Ensuite il assista à quelques réunions sans importances, on essaya de lui donner du travail qu'il réussi à esquiver en négociant avec Isaac et sur le coup des 10h, il fut libéré. Il retourna directement chez lui en s'arrêtant seulement pour acheter quelques confiseries, ne sachant pas vraiment ce qu'elle aimait, il prit un peu de tout. De retour, il se déshabilla a nouveau et retourna se coucher aux côtés d'Uraïa, même si il doutait vraiment réussir à retrouver le sommeil.

L’Utgardienne finit par émerger quand elle sentit de nouveau le matelas grincer. Elle poussa un lourd soupir en sortant la tête de sous l’oreiller, plissant un œil dans la clarté avant de tomber sur un Eredin bien réveillé. Trop réveillé. Elle le jaugea d’un œil suspicieux tout en rabattant une partie du drap sur elle avant de se racler la gorge.


— Il est quelle heure ?


Allongé sur le dos, un avant bras rabattu derrière la tête et l'autre sur le ventre, le guerrier n'avait aucune chance de retrouver le sommeil. Lorsque la sorcière à ses côtés émergea et lui demanda l'heure, il se tourna sur le côté pour lui faire face.

- 10h passé, peut être même 11h.


Elle se redressa un peu plus vivement dans le lit, retrouvant son côté alerte.

— Par Njörd… Elle commença à chercher ses affaires éparpillées partout, soulevant les draps.

Il l'observa tenter de rassembler rapidement ses vêtements sans avoir l'intention de l'aider, au contraire même car lorsque l'une de ses mains fut a portée, il la saisit pour l'attirer dans le lit a nouveau, bien contre lui.


- Reste un peu !


Elle trébucha, un bras dans sa chemise. Celle qu’elle n’avait pas eu le temps d’enfiler la veille encore. Elle grogna un peu en revenant à la case départ, adressant un regard sévère à son agent perturbateur.

— J’ai des trucs à faire…


Eredin la bloqua bien contre lui avec ses bras en essayant de soutenir son regard.

- Des trucs à faire hein !?
Il en profita aussi pour lui voler un baiser en espérant que ça puisse la convaincre de rester un petit peu. J'ai passé une très bonne soirée.

Elle souffla un léger rire en se déridant quelque peu, passant son pouce sur les ecchymoses de son visage.

— Une excellente soirée… Elle lui rendit son baiser, à court d’idée. Protestant pour la forme. Mais j’ai quand même des trucs à faire. Vu que je ne suis plus maçon…

Ses travaux d’intérêt général semblaient terminés désormais, elle avait de nouveau champ libre.

- C'était donc ton plan d’envoûter le surveillant pour échapper à ta punition ? Dommage de réussir le dernier jour ! D'ailleurs, il se remémora les paroles qu'elle lui avait lancé : "jamais je ne coucherai avec un goujat comme toi !". Un petit sourire se dessina avant de s'amplifier jusqu'à le faire rire.

- Puisque je ne peux te faire changer d'avis... Il la libéra sans la lâcher du regard en croisant ses bras derrière sa tête. Je veux te revoir avant que l'on parte ! Il devait d'ailleurs lui demander la date et savoir si elle souhaiterait avoir des montures ou non, mais plus tard ! Ça lui donnerait une bonne excuse pour un nouveau rendez-vous.

Il ne lâchait pas l’affaire facilement même s’il l’avait relâchée tout court. Il se mit à rire ce qui lui fit hausser un sourcil… Il se moquait à n’en pas douter… mais de quoi… Elle résolut de ne pas chercher plus loin. Sous peine de se lancer dans une nouvelle joute. Elle devait repartir. Elle en avait une conscience accrue. Néanmoins, à sa grande surprise, il exigea des garanties. Encore une chose à laquelle elle n’était pas habituée. Elle réfléchit et souffla du nez.

— Je vis à l’Oie Blanche dans les faubourgs quand je ne suis pas dehors. Le patron me loue une chambre.

Une adresse, c'était déjà bien, mais ça ne lui suffisait pas. Il se redressa dans le lit et s'approcha doucement.

- L'oie blanche hein ? il fit une petite moue, au pire maintenant tu sais où j'habite ! Elle pouvait venir quand elle voulait ! Et tu devrais faire profil bas, le Morth va sûrement survivre au coup de couteau, pour l'instant il a rien dit, mais quand il l'ouvrira, ils vont peut être chercher à se venger. Oui, on lui avait raconté, il aurait put lui faire un sermon sur le fait de sortir une arme lors d'une simple bagarre car ça aurait put faire dégénérer les choses, mais il n'en fit rien, il s'en foutait tout simplement. Il tenta a nouveau de l'attraper, mais elle esquiva cette fois ci ! - C'est ta dernière chance pour un deuxième tour, tu pourras bien faire tes "trucs" après ! Il retira le drap qui couvrait sa nudité comme pour la tenter.

Elle écouta les nouvelles du jour en fronçant les sourcils, reprenant un peu de son sérieux et de sa sévérité coutumière. Ça ne lui plaisait pas plus que ça de s’attirer de nouveaux ennemis. Elle finit néanmoins par hausser une épaule. Elle ne pouvait strictement rien y changer. Elle regrettait peut être seulement d’avoir manqué sa cible.


- Je ne vais pas m’éterniser en ville. Ils auront du mal à me retrouver une fois dehors.

Peu de chance qu’ils connaissent le terrain aussi bien qu’elle. Mais très vite, il tenta de nouveau de l’attirer dans ses filets. Elle se dégagea en passant sous son bras en lâchant un rire moqueur puis sauta au bas du lit quand il bondit hors du drap. La tentation était grande mais elle avait laissé ses « fioles » chez Sturla. En retarder la prise était un risque inutile et si elle commençait à lui laisser croire qu’elle pouvait rester sans limite de temps, il ne tarderait pas à la garder au lit toute la journée.
— Bien tenté… mais non… Elle sourit en s’échappant par la porte, tentant cette fois résolument de mettre la chemise qu’elle lui avait empruntée.

Il se laissa retomber dans le lit en rigolant.

- Tu peux fuir Uraïa Beklaga ! Mais tu ne pourras pas m'échapper !

Oui, ça avait été une bonne soirée ! Il allait maintenant en subir les conséquences, mais il ne regrettait rien ! Il ferma les yeux pour tenter de chasser la culpabilité qui commençait à arriver, mais plongé dans le noir il visualisait à nouveau cet oiseau de chasse qu'elle portait dans son dos, c'était un sacré tatouage pour une sacrée femme !

Un nouveau rire moqueur lui répondit tandis qu’elle enfilait ses braies de cuir et son ceinturon sur cette tunique trop large.

- Disait le guerrier nu dans son lit…

Elle tomba sur un sachet de confiseries et elle ne résista pas à l’envie de piocher dedans, l’estomac dans les talons.

Qu'avait-il fait ? Comment osait-il s'avourer un tel moment alors qu'il venait de se faire ridiculiser par son ennemi...? Eredin savait déjà que ce soir, on se moquerait à nouveau de lui, de sa faiblesse et de son inaction. Pourtant, il n'avait qu'une idée en tête, la revoir et faire la même erreur une seconde fois...

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