« La journée touche à sa fin, les rayons du soleil miroitent sur les flots pour renvoyer leurs derniers éclats dorés. Autour de vous, les habitants n'ont que faire du fabuleux spectacle qui se déroule devant eux. Pire, ces rustres sont tous occupés aux broutilles de leur misérable quotidien. Pourquoi diable ne prennent-ils pas le temps d’apprécier ce petit moment de bonheur ? Le crépuscule vous hypnotise, vous restez perdu dans vos pensées. Soudain, avec une brutalité inouïe, une puissante poigne vous y arrache. On vous précipite à l’intérieur d’une bâtisse, la porte est barricadée derrière vous. Le pêcheur vous fait signe de vous taire et il soulève doucement un pan de peau qui calfeutre une étroite meurtrière pour que vous puissiez voir. Les traits de votre visage se tordent d’horreur et de surprise : vos yeux n’oublieront jamais les silhouettes blêmes et l’odeur putride de ces monstres rôdant parmi les habitations. »
« Vous vous penchez et saisissez un galet. Votre pouce passe sur sa surface polie par l’océan, vos yeux se perdent dans les vagues. Il est difficile d’imaginer que vos aïeuls aient pu s’échouer sur ces plages, éreintés par leurs mésaventures espérant trouver un endroit paisible où prospérer. Difficile d’imaginer qu’alors un terrible dragon survolait les plaines et les vallées faisant régner la terreur. D’un geste malhabile, vous tentez quelques ricochets mais force est de constater que vous n’avez aucune prédisposition naturelle pour ça. Dans un gros plouf, vous recevez le cracha moqueur des écumes. Et là, vous les voyez, du coin de l’oeil, les formes monstrueuses de créatures anthropophages qui rodent sur les plages d’épaves à la recherche de quelque pillard insouciant à se mettre sous la dent. Aussitôt, vous estimez l’heure, l’après-midi touche à sa fin. Mieux vaut rentrer à Port-aux-Echoués avant la tombée de la nuit. »
« Vous avez suivi Noober, et vous vous dites que c’est vous, le plus stupide des deux. Vous auriez dû vous en douter, voilà des mois que cette annonce jaunissait sur le panneau d’affichage, ça aurait dû vous mettre la puce à l’oreille. Mais non, votre cupidité a été plus forte et vous avez envoyeé valser tout votre bon sens là dessus. Vous savez ce qui est pire que d’accepter une quête louche ? Accepter une quête louche émanant de l’Idiot de Port-aux-Echoués, et ne s’en rendre compte qu’une fois sur place. Quiconque ayant une once d’intelligence évitait à tout prix de s’approcher de la Plage d’Epaves. Mais vous y voilà, comme quoi, la sélection naturelle suit son cours… M’enfin, vous êtes là, votre job, c’est de surveiller les arrières du Roi Noober pendant qu’il débusque son trésor imaginaire parmi ces amas de planches pourries. Les minutes passent, vous commencez à vous impatienter. Il n’est pas bon de rester longtemps par ici. Où est donc ce crétin ? Ce n’était qu’une question de temps avant que les anthropophages ne vous encerclent et l’idée de vous faire dévorer vivant ne vous enchante pas vraiment. Ce qui finit par vous convaincre de prendre vos jambes à votre cou, ce sont les cris stridents qui retentirent juste avant les hurlements d’agonie de ce pauvre Noober. Vous n’avez jamais couru aussi vite qu’après avoir entendu le bruit atroce la chaire crue que l’on arrache des os. »
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